Nous n'avons pas attendu cette proposition de loi pour exprimer notre soutien plein et entier aux forces de sécurité du pays – c'est absolument fondamental, mais je ne suis pas sûr qu'on puisse en dire autant de tous les mouvements politiques ici présents. Nous l'avons fait dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi) s'agissant du refus d'obtempérer, et dans d'autres textes en ce qui concerne la limitation des réductions des peines ou les exclusions de l'application de plein droit de la libération sous contrainte – et on pourrait continuer la liste.
S'il s'agit d'armer les policiers, comme vous le dites, nous leur donnons physiquement des armes – des efforts extrêmement conséquents sont réalisés en ce sens –, et nous leur avons aussi donné les armes juridiques pour pouvoir les utiliser. Je respecte pleinement notre collègue Taverne, ancien fonctionnaire de police – il bénéficie donc d'un crédit de bonne foi –, mais cette proposition de loi n'est en réalité qu'un affichage politique, classique pour le Rassemblement national. Cette idée avait également été soutenue à un moment par Éric Zemmour, et on voit très bien d'où elle vient.
Le présent texte irait directement à l'encontre des efforts que nous avons toujours consentis. C'est une proposition de faux amis et de faux-semblants, tout à fait trompeuse parce qu'elle conduirait, contrairement à ce qu'on peut penser, à une régression pour les policiers par rapport à la situation qu'ils ont connue. J'ajoute que c'est un fatras législatif assez incroyable : le rapporteur a déposé un amendement pour supprimer l'article 2 de son propre texte. Ce n'est en réalité qu'un début de retour au bon sens : l'article 1er existe déjà et l'article 2 n'était qu'un simple plagiat – comme Gilles Le Gendre l'a dit, la notion de plagiat est consubstantielle au Rassemblement national.
Il existe déjà un cadre juridique intelligent et structuré dans lequel les services de police et de gendarmerie se reconnaissent sans difficulté, et ce n'est pas le moment de le changer, avec ou sans sommation. Cette proposition de loi est inutile, mais aussi inefficace, au sens où on peut prévoir toutes les présomptions de légitime défense qu'on veut, il y aura à chaque fois une procédure judiciaire et une vérification des conditions dans lesquelles les choses se sont passées. Même présumée, la légitime défense devra être établie pour exonérer de sa responsabilité l'auteur des faits. Réintroduire un texte générique et général en faveur des fonctionnaires de police ne changera strictement rien à la réalité. Les magistrats s'attachent à vérifier dans quelles conditions réelles et subjectives se trouvait le fonctionnaire de police qui a malheureusement été obligé de sortir son arme.
Enfin, c'est une proposition de loi dangereuse, parce qu'elle visait à l'origine à s'exonérer un peu trop rapidement de la proportionnalité entre la défense et la gravité de l'atteinte – il est évident qu'un fonctionnaire de police ou de gendarmerie ne peut pas sortir son arme dans n'importe quelles conditions et pour n'importe quels faits –, parce qu'elle procurerait à certains une impression illusoire de liberté sans sécurité juridique, c'est-à-dire une sorte de désinhibition qu'aucun d'entre nous ne souhaite, et enfin parce qu'on peut difficilement penser qu'une partie de la population ne considérerait pas qu'il s'agit d'une forme de permis de tuer.
Pour toutes ces raisons, le groupe Renaissance est parfaitement opposé à cette proposition de loi. Nous avons donc déposé deux amendements de suppression – en réalité, un seul puisque le rapporteur ne souhaite lui-même conserver qu'un seul pseudo-article.