Selon l'Unesco, la liberté de la presse s'est détériorée pour 85 % de la population mondiale pendant les cinq dernières années. C'est notamment le cas dans les pays autoritaires – Russie, Chine ou Venezuela – mais également dans de grandes démocraties – États-Unis, Inde ou Mexique – où la liberté de la presse recule pour différentes raisons : l'argent, la corruption, des dirigeants autoritaires… Cela vaut également en Europe, où la montée de l'extrême droite, en Pologne ou en Hongrie, rogne la liberté des médias publics ou privés.
Dans ce contexte, ce règlement européen est le bienvenu. Il l'est d'autant plus que les commissaires chargés de l'élaborer ont su faire rapidement les bons constats. Ainsi, pour paraphraser Thierry Breton, les médias européens font face simultanément à une baisse de leurs recettes, à l'émergence des plateformes en ligne et à un conglomérat de règles nationales compliquant la libre circulation de l'information.
Le règlement présenté mi-septembre par la Commission s'inscrit dans la continuité de notre ambition pour protéger les médias européens. Après la création commune d'un droit voisin numérique, immense victoire des journalistes face aux plateformes que l'on doit au président Mignola, ce projet de règlement renforce encore la protection de nos médias.
En effet, il conforte les règles de transparence quant à la communication des États ou aux propriétaires de presse, mais aussi en matière de concentration, ce qui contribuera au renforcement des liens de confiance entre la presse et la population. Il conforte également le soutien aux journalistes en créant un fonds destiné à ceux qui, parmi eux, sont menacés, et en amplifiant la lutte contre les logiciels espions. Il affirme le soutien des États à l'endroit des médias du service public en leur garantissant un financement adéquat et stable. Il lutte également contre la puissance des Gafam en leur imposant de donner les raisons du retrait d'un article au média qui en est à l'origine. Nous devons toutefois aller plus loin en la matière tant l'inquiétude s'accroît à l'égard de ces géants du numérique, qui peuvent modifier des lignes éditoriales en sélectionnant des articles et en les mettant en avant ; en outre, ils aspirent les recettes des médias en captant les revenus publicitaires en ligne.
Pour toutes ces raisons, notre groupe soutient la proposition de résolution, qui soutient un texte européen pertinent tout en exprimant des réserves justifiées. Nous partageons les pistes d'amélioration qui ont été proposées. Nous devons en particulier nous montrer vigilants à propos du comité européen pour les services de médias et de son futur périmètre. L'Autorité de la concurrence sera-t-elle entendue sur les questions de concentration ? Comment l'indépendance de cette structure sera-t-elle garantie ? La presse écrite, dont les processus sont si particuliers, sera-t-elle exclue de la compétence de ce comité ? Autant de questions soulevées par cette proposition de résolution européenne qui ne devront pas rester sans réponse.