Madame la Première ministre, pour la dixième fois depuis deux mois, vous avez eu recours à l'article 49.3 de notre Constitution – chaque fois sur le projet de loi de finances ou le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Avec la majorité et le Gouvernement, les jeudis de décembre se suivent et se ressemblent – vous pourriez écrire le scénario d'une série intitulée Les Jeudis de décembre.
Jeudi 8 décembre : ajournement de la commission mixte paritaire sur la loi de programmation des finances publiques et huitième 49.3. Jeudi 15 décembre : commission mixte paritaire sur la loi de programmation des finances publiques non conclusive et dixième 49.3.
Or, aux 49.3 incessants succèdent invariablement les motions de censure de la NUPES. C'est la raison pour laquelle nous sommes présents ce samedi : nous entendons défendre nos positions sur le budget 2023.
Le moment où vous déclenchez l'article 49.3 est un acte politique particulièrement regrettable : en quatre minutes, jeudi dernier, vous avez de nouveau privé les députés de leur droit à la parole. Mais, ce qui est extraordinaire, ce sont les raisons par lesquelles vous justifiez votre recours à cet article. D'abord, vous avez argué que « tous les groupes d'opposition [vous avaient] fait savoir qu'ils [voteraient] contre le PLF ». Ensuite, lors de la nouvelle lecture, vous avez expliqué « qu'aucun groupe d'opposition ne vous [avait] fait connaître une évolution de sa position sur son vote final ». À présent, pour la lecture définitive, vous nous dites que « [vous avez] aussi, trop souvent, trouvé porte close », et vous ajoutez : « Sur le budget, nous ne pouvons pas trouver de compromis si les oppositions craignent, ainsi, de se compromettre ».
Replaçons l'église au milieu du village, comme on dit chez nous, dans le Perche, dans le pays d'Auge et le pays d'Ouche. Si vous avez recours à cet outil constitutionnel, madame la Première ministre, c'est pour une seule et unique raison : vous n'avez pas de majorité. Ne tentez donc pas d'en faire porter la responsabilité aux groupes d'opposition, et assumez de composer avec eux, si vous voulez effectivement aboutir !
De fait, quand vous ne voulez pas composer, vous n'aboutissez pas. J'en veux pour preuve, par exemple, votre refus de trouver une voie de passage sur la loi de programmation des finances publiques.