Madame Le Peih, vous m'interrogez sur la manière dont la France pourrait s'inspirer de ses voisins européens pour rendre plus acceptable le déploiement des énergies renouvelables. L'un des principaux obstacles en France au déploiement de nouvelles capacités de production est effectivement l'acceptabilité des populations et des territoires. Si la majorité des Français se dit favorable au déploiement des énergies renouvelables, l'opposition des riverains empêche ou retarde considérablement la plupart des projets. Aujourd'hui, près de deux tiers des projets d'implantations d'éoliennes seraient contestés devant la justice administrative. Or, il n'y a pas de raisons pour que la France échoue là où l'Allemagne, la Suède ou le Danemark ont réussi.
Les auditions réalisées dans le cadre du rapport d'observation m'ont amené à conclure que la production d'énergies renouvelables sera d'autant plus accélérée qu'il y a un engouement, voire une désirabilité, pour ce type d'énergie. Il me semble qu'une campagne de communication nationale du ministère de la transition écologique soulignant les bénéfices et les objectifs du recours aux énergies renouvelables serait à ce titre bienvenue. Je considère également qu'une réflexion doit être menée au niveau européen, afin d'évaluer les problèmes liés à l'attractivité des projets touchant aux énergies renouvelables. La Commission européenne pourrait, par exemple, être à l'initiative d'études comparatives des politiques énergétiques des États membres, lesquelles détermineraient les éléments qui favorisent l'acceptabilité, la réussite et le développement de projets d'énergies renouvelables sur les différents territoires. Il serait ainsi possible de s'inspirer des bonnes pratiques de nos voisins européens. Nous avons besoin de sortir de la dépendance fossile, de renforcer notre souveraineté énergétique et de tenir nos engagements pris dans le cadre de l'Accord de Paris : ces objectifs sont de nature à ce que l'ensemble des citoyens acceptent l'installation d'éoliennes et de panneaux photovoltaïques sur des sites qui leur sont dédiés.
Madame Chikirou, vous m'avez interrogée sur la planification et sur la formation. Ce sont effectivement des domaines dans lesquels nous devons agir davantage. Concernant la planification, nous avons interrogé le Secrétaire général en charge de la planification écologique, placé auprès de la Première ministre, M. Pellion. Il nous a présenté France Nation Verte, projet lancé en octobre dernier qui doit permettre, avec la création récente du secrétariat général, de progresser sur la question de la planification. La planification est un travail interministériel décliné en une vingtaine de chantiers : le Gouvernement, à travers ce secrétariat général, est en ordre de marche pour la réaliser.
Nous avons également à agir sur la formation initiale et continue. Des actions vont devoir être menées, et les employés qui travaillent actuellement dans les secteurs de l'énergie fossile doivent se reconvertir dans des secteurs d'avenir, les énergies renouvelables. Même si nous sommes sur la bonne voie, je suis d'accord avec vous pour dire qu'il faut mettre l'accent sur la formation. La question de savoir si l'on a les capacités, en matière de main-d'œuvre et de compétences, de répondre aux besoins de cette reconversion vers l'économie verte, et notamment vers les énergies renouvelables, a régulièrement été soulevée lors de nos auditions.
Madame Gérard, il est vrai que le projet de loi a été élaborée en amont de la publication des nouveaux objectifs. Nous avons en tête l'objectif des 40 %, mais l'ambition européenne pourrait finalement atteindre 45 %. Il a fallu que l'on rédige ce rapport sans avoir une certitude sur l'objectif visé. Pour y parvenir, nous avons formulé plusieurs recommandations. Sur l'acceptabilité, j'ai entre autres mentionné celle de prévoir une convention citoyenne sur les énergies renouvelables. La convention citoyenne, une initiative unique en Europe et saluée par nos partenaires, a permis de donner la possibilité aux citoyens d'exprimer leurs positions. Il serait peut-être bénéfique de réitérer cet exercice.
Pour atteindre nos objectifs, il faut également étendre les zones propices à l'accueil d'équipements d'énergies renouvelables, tels des éoliennes ou des panneaux photovoltaïques. Les concertations en amont et la simplification des procédures administratives sont en effet les vecteurs clefs pour pouvoir emporter l'adhésion de la population. On constate d'ailleurs que nos voisins en avance sur les énergies renouvelables, comme le Danemark et la Suède, sont organisés de façon à ce qu'il ait des concertations préalables.
Ce projet de loi vise essentiellement les éoliennes et les panneaux photovoltaïques, mais la France est également en retard sur les autres énergies renouvelables, en particulier les pompes à chaleur. Il faudrait peut-être envisager ainsi que le dispositif MaPrimeRénov intègre la géothermie de façon plus volontariste.
Enfin, pour répondre à la question de savoir si la projet de loi sera suffisant pour atteindre nos objectifs européens, il faut bien avoir conscience qu'il s'agit du premier pilier de notre stratégie énergétique nationale. Il faudra le compléter, et c'est l'intention du Gouvernement, par un deuxième pilier visant à accélérer la construction de nouvelles installations nucléaires. Un troisième pilier, qui nous permettra d'atteindre les objectifs fixés à l'échelon européen, implique d'adopter une loi de programmation énergie-climat. Il s'agirait d'une première, le texte devant être présenté dans le courant de l'année 2023.