Intervention de Roger Vicot

Réunion du mercredi 20 juillet 2022 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoger Vicot :

Alors que nous débutons l'examen de ce projet de loi, dont l'objet principal est de ratifier une ordonnance relative à la fonction publique des communes de Polynésie française, il est utile de rappeler certains éléments du contexte qui fait la singularité de ce territoire. Les quarante-huit communes de la Polynésie française sont réparties dans un ensemble géographique grand comme l'ensemble de l'Europe, cela a été dit, et comptant 121 îles, dont seulement soixante-seize sont habitées.

Rappelons aussi l'évolution spécifique du statut des communes de la Polynésie et de leurs agents. La loi organique du 27 février 2004 a donné le statut de collectivité territoriale aux communes de Polynésie française, mais ce n'est qu'avec l'entrée en vigueur d'une ordonnance prise en 2005 que leur personnel communal a pu bénéficier d'un statut de droit public. Jusqu'alors, en effet, les quelque 4 700 agents communaux employés par les quarante-huit communes de Polynésie relevaient d'un statut de droit privé et étaient soumis à des situations particulièrement hétérogènes.

Cette première ordonnance a défini un statut uniforme qui a permis aux fonctionnaires des communes de Polynésie de disposer des mêmes droits et obligations que les fonctionnaires territoriaux de la métropole, tout en tenant compte des contraintes financières des communes et de leurs groupements.

De la même manière que l'ordonnance de 2005 avait dû faire l'objet d'une mise à jour en 2011, il convient, par la ratification de l'ordonnance de décembre 2021, d'actualiser le statut de ces agents et de transposer les apports des dernières lois concernant la fonction publique, notamment la loi dite Lebranchu de 2016, relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

L'ordonnance de 2021 entendait également répondre, en partie, aux revendications exprimées par les agents communaux de Polynésie française lors du mouvement de grève de mai 2017. Aboutissement d'une longue période de concertations entre le Gouvernement et les instances politiques et syndicales de la Polynésie française, cette ordonnance renforce les garanties accordées aux fonctionnaires, en les alignant sur le droit commun de la fonction publique. À titre d'exemple, la liste des motifs ne pouvant donner lieu à discrimination, sujet extrêmement important, est complétée par l'identité de genre, la situation de famille et l'état de grossesse. L'interdiction des agissements sexistes et du harcèlement sexuel est également formalisée, tandis que le temps partiel thérapeutique et le congé de paternité et d'accueil de l'enfant sont institués. Par ailleurs, l'ordonnance étend à la fonction publique communale de la Polynésie française les obligations déontologiques énumérées par le statut général de la fonction publique, en application de la loi Lebranchu, à savoir le respect des principes de dignité, d'impartialité, d'intégrité, de probité, de neutralité et de laïcité, et reprend des dispositions relatives à la prévention des conflits d'intérêts.

Si l'ordonnance de décembre dernier est entrée en vigueur dès sa publication, elle doit être ratifiée dans un délai de dix-huit mois, sous peine de caducité. Pour éviter cette situation et pour conférer à l'ordonnance une valeur législative, nous devons au moins adopter l'article 1er du projet de loi.

Le Sénat a jugé utile d'ajouter à cet article plusieurs dispositions. Certaines sont tout à fait pertinentes, comme celles de l'article 13, relatif aux modalités de recrutement des personnes handicapées, mais le groupe Socialistes et apparentés considère que nous ne devons pas nous écarter de l'objet principal du projet de loi, afin d'assurer rapidement son adoption et de pérenniser les avancées prévues par l'ordonnance de décembre 2021. Certains écueils rencontrés au Sénat pourraient ainsi être évités à l'Assemblée nationale. Je pense en particulier à l'article 6, introduit par les sénateurs lors de l'examen du texte en commission avant d'être supprimé en séance publique. Cet article prévoyait la suppression du mot « laïcité » dans la liste des obligations et principes déontologiques devant être respectés par les fonctionnaires communaux de Polynésie française. Ce fut un important point de crispation lors des débats : si cet article avait été maintenu en séance publique, certains sénateurs auraient pu voter contre le projet de loi. Évitons ces points de crispation et concentrons-nous plutôt sur notre mission, la valorisation du statut des fonctionnaires communaux de la Polynésie française.

En l'état, les députés socialistes et apparentés voteront pour le projet de loi.

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