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Intervention de Sabrina Sebaihi

Séance en hémicycle du lundi 28 novembre 2022 à 16h00
Soutien au mouvement pour la liberté du peuple iranien — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSabrina Sebaihi :

Plus de deux mois après la mort de Mahsa Amini, les manifestations contre la dictature perdurent partout en Iran, et ce malgré la répression sanglante dont le bilan s'alourdit de jour en jour : 16 000 prisonniers, 400 morts, des sévices infligés aux manifestants et des tirs à balles réelles dans les foules, comme c'est le cas au Baloutchistan.

Ce mouvement n'est pas inédit. Il s'inscrit dans un cycle de manifestations et de répressions sanglantes qui marquent le pays de plus en plus fréquemment et de plus en plus durement. À chaque fois, le catalyseur est différent, à chaque fois le résultat est le même : l'aspiration à la liberté et la critique des élites responsables de la déroute du pays.

En 1999, les étudiants iraniens manifestent contre la fermeture du journal persan Salam : dix-sept personnes meurent. En 2009, le mouvement vert dénonce la fraude électorale lors de la dernière élection présidentielle : 2 millions d'Iraniens y participent et des centaines de personnes meurent. Fin 2019, les Iraniens défilent dans les rues contre l'augmentation des prix des carburants : 1 500 morts résultent cette fois des manifestations.

L'ampleur du mouvement actuel montre que c'est le pays tout entier qui s'embrase. La tentative de placer au pouvoir des personnalités réputées moins conservatrices, telles que l'ancien président Hassan Rohani, a échoué. Et c'est maintenant l'ensemble du régime théocratique, jusqu'au guide suprême, qui est remis en question.

Mais le pouvoir est sourd aux aspirations du peuple. Il s'entête à assimiler les manifestants à des porteurs de chaos, reprenant ainsi une vieille rengaine chère aux dictatures : en l'occurrence celle qu'un certain allié de l'Iran, Bachar al-Assad, utilisait déjà en 2011 en Syrie.

Or le chaos, c'est bien le régime actuel qui en est responsable.

Chaos d'abord sur la scène intérieure iranienne, les élites corrompues ayant bâti un système fondé sur l'entre-soi et la rente pétrolière, alors que 80 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. La jeunesse est particulièrement touchée : un jeune sur quatre – un sur deux dans certaines régions – est sans emploi. Les associations sont muselées, les partis et les syndicats interdits. Il n'y a rien qui puisse offrir un avenir à la jeunesse iranienne, laquelle, quand elle ne s'est pas expatriée en quête d'une vie meilleure, est particulièrement présente dans la lutte de ces derniers mois.

Chaos ensuite au plan international, avec l'instrumentalisation du JCPOA – Joint Comprehensive Plan of Action : plan d'action global commun (PAGC) –, dont les chances de restauration apparaissent par conséquent très fortement réduites. Alors que le régime possède désormais un uranium enrichi à plus de 60 %, la menace qu'il se dote de l'arme nucléaire se fait de plus en plus prégnante.

Le régime fait également pression sur l'Occident, afin d'éviter tout soutien aux manifestants. À cet égard, je tiens à rappeler que sept de nos compatriotes sont toujours détenus arbitrairement à la suite d'accusations fallacieuses d'espionnage. Nous demandons bien sûr leur libération immédiate, sachant que plusieurs employés locaux de l'ambassade de France à Téhéran ont aussi été arrêtés.

Pourtant, malgré le chaos et la cristallisation du régime année après année, la fronde perdure.

Pour Hegel, si l'histoire nous enseigne quelque chose, c'est que nous n'en apprenons rien. Mes chers collègues, allons-nous reproduire les mêmes erreurs que celles que nous avons commises sur la Syrie, où la révolution matée dans le sang s'est achevée par le maintien au pouvoir du dictateur al-Assad ? La voix de la France doit porter haut et fort en soutien à la révolution iranienne.

Pour l'heure, cette proposition de résolution, qui serait la moindre des contributions en vue de la libération des Iraniens, tend à reconnaître le soutien de la représentation nationale au mouvement actuel. Pour que notre devise « liberté, égalité, fraternité » résonne aux côtés du slogan « femme, vie, liberté », le groupe Écologiste – NUPES votera ce texte.

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