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Intervention de Pieyre-Alexandre Anglade

Réunion du mercredi 23 novembre 2022 à 13h40
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPieyre-Alexandre Anglade, président :

La COSAC a été largement dominée par l'actualité en Ukraine, avec notamment la présence de Mme Ivanna Klympush-Tsintsadze, Présidente de la Commission sur l'intégration de l'Ukraine à l'Union de la Rada d'Ukraine, qui a rappelé le contexte dans lequel se trouve aujourd'hui l'Ukraine. Elle a souligné que l'objectif de la Russie était de mettre à bas l'économie ukrainienne et de provoquer ainsi une crise humanitaire majeure entraînant des vagues de réfugiés et de personnes déplacées à l'intérieur du pays. 40 % des infrastructures énergétiques civiles ukrainiennes ont été détruites. Au moment où nous parlons, il y aurait de nouvelles frappes sur Kiev, visant là aussi les infrastructures civiles. Le maire de la ville de Kiev, M. Vitali Klitschko, vient d'en faire état, entraînant de graves conséquences pour l'alimentation énergétique de la population ukrainienne, notamment de graves pannes d'électricité.

Ces dernières ont évidemment des conséquences répétées pour les Ukrainiennes et les Ukrainiens, notamment sur la manière dont ils vont passer l'hiver. J'ai tenu à rappeler que la France se tenait évidemment au côté des Ukrainiennes et des Ukrainiens pour face à ce qu'on peut qualifier de stratégie de terreur menée par la Fédération de Russie. Le 13 décembre se tiendra à Paris une conférence internationale pour la résilience de l'Ukraine, avec pour objectif clair la fourniture de matériel dont l'Ukraine aura besoin pour passer l'hiver. Cette conférence aura également pour volonté de reconstruire les infrastructures énergétiques essentielles et de tout faire pour que le peuple ukrainien ne passe pas l'hiver dans le froid et le noir.

Ces questions ont été au cœur des débats de la COSAC, car la Russie devra évidemment payer pour les destructions humaines et matérielles, c'est ce qu'a dit un vote clair de l'Assemblée générale des Nations Unies la semaine passée et la Présidente de la Commission sur l'intégration de l'Ukraine à l'Union européenne. Elle a indiqué, de même que le gouvernement ukrainien, que l'Union avait créé un fond de redressement rapide qui pourrait notamment être financé par les avoirs russes gelés. Ce point a été repris dans la contribution adoptée par la COSAC qui demande la mise en place d'un mécanisme conforme au droit international pour saisir les actifs gelés à la suite des sanctions et les utiliser pour compenser les dommages causés à l'Ukraine par l'agression russe. Elle a enfin appelé à la création d'un tribunal pénal international spécial pour juger les auteurs de crimes de guerre en Ukraine. Ce point a également été repris dans la contribution adoptée par la COSAC.

Au-delà du débat ukrainien, cette réunion de la COSAC a été rythmée par des débats sur l'avenir de l'Union. Sur ce thème de l'avenir de l'Union, le vice-président du Parlement européen, Othmar Karas (Autriche, PPE), a fait part de sa déception devant le peu de travail accompli pour mettre en œuvre les conclusions de la Conférence sur l'avenir de l'Europe et notamment devant le refus du Conseil de convoquer une conférence de révision des traités comme le Parlement européen l'y avait engagé. Il a, sur ce point, trouvé un soutien assez large. En ce qui me concerne, je crois qu'il a soulevé un point essentiel, il est évident que le Conseil doit se saisir le plus rapidement possible de ces conclusions et que les options sur la table doivent être étudiées rapidement de sorte à pouvoir avancer. Il y aura le 2 décembre prochain à Bruxelles une réunion sur les suites de cette conférence, cela sera abordé. Mme Věra Jourová, vice – Présidente de la Commission européenne, a lancé un appel trouvant un large écho au sein de la COSAC, quant à une implication des parlements nationaux pour l'organisation de débats en leur sein dans le suivi des résultats de la conférence. Marietta Karamanli et Charles Sitzenstuhl, qui sont intervenus dans ce débat, nous diront ce qu'ils ont pensé des échanges.

Sur le thème de l'autonomie stratégique européenne, Maroš Šefčovič, Vice-président de la Commission européenne, a rappelé que l'Union avait réussi à réduire de 15 % sa consommation de gaz et de faire passer les importations de gaz russe de 40 % à 7,5 %, grâce au doublement des livraisons de gaz naturel liquéfié (GNL) américain et norvégien. Un des enjeux de l'autonomie stratégique européenne est désormais le risque de pénuries de puces électroniques : il a annoncé que la Commission présentera une proposition de législation sur le sujet en février 2023. Václav Bartuška, ambassadeur sur la sécurité énergétique pour la République tchèque, a de son côté rappelé qu'avant le début de la guerre, il y avait 40 % d'importations de matériaux énergétiques d'origine russe et que ces importations sont désormais presque à zéro.

Le dernier thème était celui de l'intégration européenne des pays des Balkans. Mirek Topolánek, ancien Premier ministre tchèque, a regretté que les anciens États membres donnent la priorité à de nouveaux modes de coopération plutôt qu'à l'adhésion et appelé à un changement de paradigme : l'Union doit élargir son espace de liberté, de prospérité et de paix plutôt que de rechercher son approfondissement. Différentes mesures ont été évoquées par les différents intervenants : ouverture rapide des négociations d'adhésion avec l'Albanie et la Macédoine du Nord ; accélération de celles ouvertes avec la Serbie et le Monténégro ; soutien à la Bosnie-Herzégovine afin qu'elle puisse accéder au statut de pays candidat ; mesures de libéralisation des visas avec le Kosovo.

Le dernier point que je voudrais évoquer est celui des suites des groupes de travail institués au sein de la COSAC sous présidence française sur le rôle des parlements nationaux et l'État de droit dans l'Union. Mon homologue du Sénat Jean-François Rapin et moi-même nous sommes battus pour que le paragraphe 20 de la contribution soit plus ambitieux. Nous avons déposé un amendement afin que :

- la COSAC salue non pas la création des groupes de travail mais leurs conclusions – parmi lesquelles figurent des préconisations intéressantes comme l'octroi aux parlements nationaux d'un droit d'initiative législative indirect (« carton vert »)

- la Commission, le Conseil et le Parlement européen soient officiellement saisis des propositions des groupes de travail et y répondent – et pas seulement prennent note des travaux et y réfléchissent

Cet amendement a été mis aux voix. Il a obtenu le soutien de 22 assemblées et l'opposition de 22 autres. Comme le règlement de la COSAC exige un vote favorable des trois quarts des suffrages exprimés, il n'a pas été adopté. Nos positions se sont heurtées à la vive opposition du Parlement européen qui s'est démultiplié pour s'opposer à toute disposition revenant à augmenter le rôle de la COSAC. Sa position a trouvé un écho assez large auprès de parlements de pays scandinaves et d'Europe centrale et orientale qui ne souhaitent pas développer le rôle collectif des parlements nationaux soit parce qu'ils sont par principe réticents à l'égard de tout approfondissement de la coopération politique européenne, soit parce qu'ils craignent que la COSAC puisse prendre des positions qui engagent leur parlement.

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