Vous proposez d'insérer dans le code pénal un article 315-1 disposant que « l'occupation sans droit ni titre, de mauvaise foi, d'un immeuble appartenant à un tiers s'apparente à un vol. » Sur le principe, je suis d'accord : du point de vue idéologique ou philosophique, il me paraît tout à fait justifié et même important d'acter ce principe dans la loi.
Dans l'esprit de tout un chacun, un immeuble est une propriété construite, mais ce n'est pas forcément le cas du point de vue juridique. Or, un promeneur adepte de camping sauvage qui planterait sa tente sur un terrain qui n'est pas le sien ne commet pas de vol. Aussi mon sous-amendement CE72 vise-t-il à clarifier les choses en précisant que seuls les immeubles bâtis à usage d'habitation sont concernés par cette définition ; en en excluant les terrains vagues, les terrains agricoles et tous les terrains non bâtis, nous éviterons des situations ubuesques.
Vous souhaitez également introduire un article 315-2 imposant au tiers occupant de prouver sa bonne foi « par la présentation d'un titre de propriété, d'un contrat de bail en cours de validité le liant au propriétaire de l'immeuble occupé ou bien d'une convention d'occupation à titre gratuit signée par le propriétaire du bien ». La preuve de la bonne foi par la présentation de l'une de ces trois pièces est exclusive : en leur absence, le juge ne peut considérer que le tiers occupant est de bonne foi. Ce renversement de la charge de la preuve, qui ne permet pas au juge de qualifier la bonne foi, pose un problème de constitutionnalité. Par ailleurs, dans la pratique, il est des situations où l'occupant se trouve dans l'impossibilité de présenter l'une de ces trois pièces, par exemple s'il vit en concubinage, ou s'il a été autorisé à dormir chez un ami sans que ce dernier lui ait signé de bail ou de convention d'occupation des lieux. Nous devons accorder au juge une marge d'interprétation. Pour ce faire et afin de rendre votre amendement constitutionnel, mon sous-amendement CE73 vise à prévoir la seule présentation d'un titre, sans qu'il s'agisse de prouver sa bonne foi.
Je donne donc à votre amendement un avis favorable, sous réserve de l'adoption de mes deux sous-amendements de clarification.