La proposition de loi que nous avons à étudier est aussi inique que dangereuse, et je serais très surpris qu'Olivier Klein, ministre chargé du logement et maire d'une ville qui a souffert plus que toute autre des marchands de sommeil et des propriétaires délinquants, puisse y souscrire. Ce n'est pas ces propriétaires délinquants que cette loi veut punir. Ceux-là pourront continuer d'exploiter tranquillement les souffrances des plus précaires, en empochant les loyers de logements insalubres, parfois prêts à s'effondrer.
Avec l'article 3, c'est bien aux locataires en difficulté que vous vouliez vous en prendre, en les envoyant devant un juge plutôt qu'auprès d'un organisme susceptible de les reloger. Vous souhaitez soudainement le supprimer et ne voulez donc plus incarcérer ceux qui, pris à la gorge, sont contraints de choisir le frigo plutôt que la quittance. Bravo ! Vous avez fait preuve de raison. Heureusement, car vous alliez réinventer la prison pour dettes, qui a été abolie en France en 1867. Malgré votre revirement, je tiens à rappeler quelques données que vous avez manifestement occultées au moment de rédiger votre texte.
Le 115 refuse chaque soir un hébergement à plus de 6 000 personnes, dont 1 700 enfants, des chiffres sous-évalués puisque nombre de personnes, découragées, n'essaient même plus d'appeler ce numéro. Le rapport de la Fondation Abbé Pierre de 2022 révèle que plus de 4 millions de Français sont non ou mal logés. Quant aux expulsions locatives, qui ont concerné 8 156 ménages en 2021, elles devraient repartir à la hausse après avoir baissé grâce à la prolongation de deux mois de la trêve hivernale, en raison du contexte sanitaire. Surtout, la rue a tué 623 personnes l'année passée.
Votre proposition de loi ne fait que cacher sous le tapis les vrais enjeux du logement. Vous prétendez sécuriser les rapports entre propriétaires bailleurs et locataires, mais vous ne vous attaquez jamais aux problèmes à la racine. Pour nous, Écologistes, il est urgent d'instaurer la garantie universelle des loyers, afin de rassurer les propriétaires et permettre à tous d'être logés sans crainte. C'est une question de droit et de dignité. Il est impératif d'encadrer les loyers partout – ils seront ainsi moins difficiles à payer – et d'en finir avec les rentes et la spéculation immobilière, qu'Emmanuel Macron lui-même avait en son temps dénoncées.
Nous ne pouvons pas continuer à faire reposer le risque pour le propriétaire sur un dispositif de garant aléatoire, injuste et inefficace, qui prive de logement tant de nos concitoyens les moins bien nés. C'est en sécurisant le locataire, en amont de la location, et en rassurant le propriétaire que nous pourrons remettre sur le marché les plus de 3 millions de logements vacants. Et permettre ainsi au plus grand nombre de se trouver un toit.
Toujours à court d'idées pour éradiquer la pauvreté, vous en débordez, en revanche, pour la criminaliser. C'est pourquoi les Écologistes s'opposeront à ce texte.