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Intervention de Martine Etienne

Réunion du mercredi 16 novembre 2022 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Etienne :

C'est de la liberté des femmes à disposer de leur corps, objet de nos combats depuis tant d'années, qu'il est question. Je pense à l'accès à la contraception, à l'autonomie, au divorce et à l'IVG ou à la reconnaissance du viol : les femmes ont dû batailler pendant des siècles pour avoir le droit de disposer de leur corps, ou plutôt pour ne pas en être privées. Le corps de la femme, depuis les prémices de la littérature et dans les idéologies les plus conservatrices, n'a souvent été perçu et défini que comme un objet du désir masculin ou comme un objet reproductif servant à perpétuer une lignée ou à engendrer de la force de travail.

Dans le monde patriarcal, la femme est un objet et l'homme est le sujet. Ce n'est pas notre projet. Malgré des années de bataille sociale et les victoires arrachées par celles qui ont eu le courage de lutter pour ce qui est juste, le droit à l'IVG est remis en question dans plusieurs pays. Le patriarcat reprend de plus en plus de terrain sur les libertés des femmes et sur les conquêtes sociales. Nous ne pouvons y rester insensibles. Depuis plusieurs années, nous martelons ainsi la nécessité de constitutionnaliser l'avortement, non pas pour la forme ni par ambition politique, mais pour le protéger durablement.

Le film récemment consacré à Simone Veil retrace le combat que cette femme a dû mener, notamment dans l'institution au sein de laquelle nous nous trouvons, pour permettre aux femmes enceintes de pouvoir avorter et pour élargir leur droit à disposer de leur corps. Alors que la critique et les médias saluent unanimement ce film, le droit à l'IVG est lentement mais largement remis en cause. Des propos absurdes et venus d'un autre temps empoisonnent le débat public, même dans notre pays.

Chers collègues, vous ne pouvez promettre que le droit à l'avortement ne sera jamais aboli. Personne ne le peut. Nous avons cependant la chance de pouvoir agir en gravant ce droit dans le marbre. Nous pouvons le faire perdurer et dire à celles et ceux qui ont œuvré pour le faire adopter que leur travail n'a pas été vain. Nous souhaitons donner aux femmes le droit à la liberté, le droit de choisir la procréation ou la non-procréation. Nous voulons leur laisser le choix. C'est pour cette raison que la question du droit à la contraception est intimement liée à celle du droit à l'avortement.

La garantie de ces droits est essentielle pour quiconque souhaite préserver le droit à disposer de son corps. Or ce droit est remis en cause : en dix ans, 130 centres pratiquant l'IVG ont fermé. Certaines femmes ne peuvent ainsi avorter dans les délais impartis, en raison de la surfréquentation des centres restants et de leur manque cruel de moyens matériels et humains. Par ailleurs, les offensives réactionnaires se multiplient. De plus en plus de courants et de personnes, au sein même de l'Assemblée nationale, n'hésiteraient pas une seule seconde à remettre en cause le droit à l'IVG s'ils accédaient à la présidence de la République. Chaque jour, ils attaquent les femmes, les associations, le Planning familial et son action.

Dans ce contexte, le texte commun que nous défendons vise à protéger et à garantir le droit fondamental à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception. La protection de ces droits fondamentaux se résume en deux phrases à inscrire dans la Constitution pour garantir la liberté de procréer : « Nul ne peut porter atteinte au droit à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception. La loi garantit à toute personne qui en fait la demande l'accès libre et effectif à ces droits. »

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