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Intervention de Benjamin Haddad

Réunion du mercredi 16 novembre 2022 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBenjamin Haddad :

Dès le titre de la proposition de résolution, vous attaquez personnellement le Président de la République et vous mettez en cause sa responsabilité, sans préciser que vous vous référez à la période 2014-2016, durant laquelle Emmanuel Macron était ministre de l'économie. Vous entretenez la confusion en évoquant dans l'exposé des motifs des liens supposés avec Uber dans le cadre de la récente PFUE et en mentionnant dans le dispositif la campagne présidentielle.

La responsabilité du chef de l'État n'est susceptible d'être mise en cause par le Parlement que selon la procédure prévue par l'article 68 de la Constitution, et non par une commission d'enquête. Pour contourner le risque certain d'inconstitutionnalité, vous avez déposé tardivement deux amendements visant à supprimer la référence à la présidence de la République dans le titre et le dispositif de la proposition de résolution. Les motivations du texte, votre démarche générale et cet aveu tardif entretiennent une confusion préjudiciable au respect et à l'équilibre de nos institutions, ainsi qu'une impression d'improvisation du travail.

Sur le fond, vous mettez en cause la responsabilité d'un ministre de l'économie qui agissait conformément à son rôle en échangeant avec des entreprises qui souhaitaient s'implanter en France et avec l'ensemble des acteurs d'un secteur en mutation profonde. J'ai eu l'occasion d'assister à l'audition d'un journaliste du Monde, membre du consortium qui a publié les Uber Files. Il vous a lui-même indiqué n'avoir rien constaté d'illégal ni d'irrégulier dans ces dossiers concernant le rôle que vous prêtez à Emmanuel Macron, ce qui souligne en creux l'absence de véritable objet de votre proposition de création d'une commission d'enquête.

Nous faisions face à l'époque à une pénurie de taxis par rapport à nos voisins européens. Objet de débats publics antérieurs à la création d'entreprises comme Uber, le secteur du VTC répondait à une demande des consommateurs et s'installait dans un vide juridique auquel il fallait répondre. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, a échangé avec les acteurs du monde des taxis, les syndicats, Uber mais aussi d'autres entreprises de VTC afin de parvenir à l'équilibre nécessaire dans un secteur qui était en mutation en France et partout dans le monde. Ces échanges étaient inhérents au rôle du ministre de l'économie et ne semblent pas justifier la création d'une commission d'enquête. Concernant la protection présumée de la société Uber vis-à-vis de contrôles de l'administration, l'article du Monde précise que la demande d'intervention auprès du ministre de l'économie était restée sans réponse.

Il n'y a eu pas eu d'irrégularités ni d'opacité. Notre vision de la société diffère de la vôtre, mais pouvez-vous reprocher à Emmanuel Macron d'avoir masqué sa conception de ce secteur ? Au contraire, il en avait fait un argument de campagne. Il indiquait ainsi à Mediapart : « Nous voulons lutter contre l'assignation à résidence et accompagner les acteurs qui peuvent permettre à de nouveaux emplois d'émerger ». C'est ce que nous nous appliquons à faire depuis plus de cinq ans, et je rappelle que le chômage est au plus bas depuis quinze ans – nous sommes fiers de notre action. Le Président de la République a toujours été transparent quant à ses intentions et s'est constamment prononcé en faveur de l'installation de ces acteurs. Les gouvernements successifs depuis 2017 se sont attachés, sous son impulsion, à mieux réguler les relations entre taxis et VTC, notamment grâce à la loi d'orientation des mobilités (Lom) de 2019, qui a comblé un vide juridique. Nous avons également défendu la régulation des plateformes au niveau européen et international, en œuvrant pour une fiscalité minimale et la protection des données privées.

Vous pouvez être en désaccord avec ces orientations, mais nous ne pensons pas que ces différences politiques de fond légitiment la création d'une commission d'enquête. Au contraire, cette dernière alimenterait un sentiment complotiste sur le rôle qu'aurait joué, à l'époque, le ministre de l'économie.

S'agissant, enfin, de la représentation d'intérêts, votre demande nous semble satisfaite par l'évolution de la législation entre 2014 et 2017. En effet, l'application de la loi Sapin 2 a rendu obligatoires l'inscription des représentants d'intérêts sur un répertoire numérique et une déclaration annuelle auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), afin de permettre leur identification.

Pour toutes ces raisons, notre groupe réfute la recevabilité et l'opportunité de votre démarche.

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