À court terme, ce dispositif ne me paraît pas pertinent pour faire face à la crise que nous traversons. Le bouclier tarifaire uniforme que nous avons mis en place a plusieurs vertus : la rapidité avec laquelle nous avons pu protéger nos concitoyens, la limitation du niveau global de l'inflation, et l'acceptabilité sociale, puisque tous les Français en bénéficient.
À plus long terme, faut-il instaurer des tarifs dépendants de la consommation d'énergie ? Nous avons déjà eu cette discussion il y a une dizaine d'années, au début du mandat de François Hollande, lors de l'examen de la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l'eau et sur les éoliennes, dite « loi Brottes », votée en 2013. Une partie des dispositions relatives à la progressivité des tarifs avait d'ailleurs été censurée par le Conseil constitutionnel. Je persiste à croire qu'il y a là une idée intellectuellement séduisante, sur laquelle nous devons travailler.
Mais ce mécanisme pose un certain nombre de difficultés techniques. En premier lieu, il n'y a pas de corrélation entre le niveau de revenu et la consommation énergétique, laquelle dépend aussi de la taille du ménage et du lieu d'habitation. Un ménage très aisé peut consommer très peu d'énergie et donc, dans le cadre d'un tel dispositif, payer très peu cher, tandis qu'un ménage beaucoup plus pauvre, nombreux, vivant dans une passoire thermique et consommant beaucoup d'énergie, aurait une facture renchérie. Cela ne me paraît pas très juste. Par ailleurs, dans les logements collectifs, comment individualiser les consommations ? Ce n'est pas évident, et c'est d'ailleurs l'une des raisons qui avaient motivé la censure du Conseil constitutionnel.
Si cette piste me semble intéressante à long terme, le bouclier tarifaire a fait la preuve de son efficacité à court terme. Avis défavorable.