Intervention de Aurélie Trouvé

Réunion du mardi 15 novembre 2022 à 17h15
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélie Trouvé, rapporteure :

Les 12 milliards d'euros que nous avions votés dans le projet de loi de finances auraient financé en grande partie les mesures que nous proposons. Si le coût de notre proposition de loi s'élève à 17 milliards d'euros, elle assurerait aussi plusieurs milliards d'euros de rentrées fiscales par an, du fait de la hausse de la production et des emplois, ainsi qu'une baisse des allocations-chômage représentant également plusieurs milliards d'euros, une diminution des dépenses de sécurité sociale que le collectif « Rénovons ! » estime à 700 millions d'euros, une économie de 2 à 6 milliards d'euros due aux importations de gaz évitées, à quoi s'ajoute tout ce qui n'est pas estimable financièrement, à savoir la santé des êtres humains.

La Capeb et la Fédération française du bâtiment (FFB) affirment qu'elles seront capables de suivre le rythme de 700 000 rénovations globales par an, à condition de disposer d'une visibilité sur plusieurs années, ce qui suppose une planification en matière énergétique et en ce qui concerne les dispositifs d'aide. Le premier problème auquel font face les entreprises est celui du carnet de commandes à moyen terme. Elles ont été capables de créer 100 000 emplois en très peu de temps et pourront faire plus.

La Convention citoyenne sur le climat a préconisé d'interdire la location des passoires thermiques, et vous avez légiféré en ce sens. Toutefois, la loi prévoit qu'un locataire occupant un logement indécent saisisse lui-même la commission départementale de conciliation, puis éventuellement la justice. Or le locataire est souvent économiquement fragile et fait face à un propriétaire qui loue parfois plusieurs appartements dans les mêmes conditions. Il s'ensuit que de nombreux locataires n'accomplissent pas de démarches, comme nous l'ont confié beaucoup d'acteurs de la solidarité.

Il y a certes des risques de tension, mais ils existent déjà. On observe, actuellement, que des propriétaires qui n'ont pas effectué la rénovation de leurs logements se hâtent de les vendre, à des prix minorés, à des ménages modestes. L'article 1er permettrait précisément à ceux-ci d'entreprendre la rénovation thermique. Par ailleurs, nous vous soumettrons un amendement qui vise à conditionner l'aide publique à la non-augmentation du loyer.

S'agissant des classes moyennes, nous avions déposé un amendement qui concernait les déciles 5 et 6 de revenus, mais qui a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution. C'est un aspect de la question qu'il faudra continuer à étudier.

Il est indispensable d'augmenter les moyens de l'Agence nationale de l'habitat pour accompagner les ménages et assurer l'information de tous, à commencer par les plus modestes – à cet égard, je suis évidemment favorable à un guichet unique. Cela étant, la différenciation territoriale est essentielle. Comme nous le disaient les représentants de l'Ordre national des architectes, la politique énergétique du quartier ou de la commune doit s'articuler avec la rénovation thermique des logements.

J'en viens à la question de la maîtrise d'œuvre, même si elle dépasse le cadre de la proposition de loi. La rénovation globale des logements nécessite une maîtrise d'œuvre relativement lourde, qui peut être assurée par un architecte ou un bureau d'études agréé pour bien articuler les différentes interventions – celle du chauffagiste et celle du plaquiste, par exemple –, pour respecter les règles de l'art, pour éviter des abus de la part de certaines entreprises, mais aussi pour s'adapter aux ressources disponibles localement, notamment en ce qui concerne les matériaux biosourcés : on n'utilise pas partout les mêmes. Il faut développer davantage la maîtrise d'œuvre, qui n'est absolument pas pris en charge, à l'heure actuelle, dans le cadre des dispositifs d'aide. Si la maîtrise d'œuvre est réfléchie, pensée à l'avance, une rénovation globale peut se faire sur plusieurs mois ou même des années. Une planification est nécessaire à l'échelle des logements mais aussi sur le plan national, pour notre politique d'aide. Les entreprises ont besoin de savoir quelle demande elles auront à long terme, afin de pouvoir se projeter en matière de formation et de création d'emplois, et quels seront les dispositifs d'aide. Cette proposition de loi vise à les rendre plus ambitieux.

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