Bien que les crédits des programmes 112, 147 et 162 ne soient pas élevés, leur incidence est importante sur des politiques publiques majeures, comme le Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), le plan Action cœur de ville, le programme Petites Villes de demain ou la politique de la ville.
Avec la dotation de plus de 1 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 952 millions d'euros en crédits de paiement (CP), le budget alloué à ces programmes n'est pas à la hauteur de l'ambition qui doit être la nôtre pour les territoires, d'autant que ces programmes fonctionnent et mériteraient d'être encouragés.
Dans le programme 112, la hausse des annuités des contrats de plan État-région et des contrats de plan interrégionaux État-région (CPER-CPIER) de 2021 à 2027, sanctuarisées autour de 140 millions d'euros pour le volet territorial, n'est que faciale. Elle procède d'un rapatriement des crédits du plan France relance en 2022, qui n'avaient rien à y faire puisqu'il s'agit du montant prévu chaque année au titre des engagements de l'État envers les régions jusqu'en 2027.
L'outil France Services est, d'abord, ce qui justifie la disparition des services publics. Même s'il peut fonctionner dans certains endroits, le reste à charge pour les collectivités est à la limite du supportable. De même, l'absence de revalorisation de la dotation de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) aura des conséquences immédiates : l'Agence devra appuyer sur la pédale de frein concernant les prestations sur mesure pour les collectivités, alors que ces dernières constituent une de ses raisons d'être.
S'il faut saluer l'augmentation de 30 millions d'euros du programme 147 Politique de la ville, qui permettra de pérenniser l'opération Quartiers d'été lancée en 2020, la très faible enveloppe de 15 millions d'euros allouée au NPNRU en 2023 envoie un mauvais signal. La haie à franchir sera d'autant plus haute pour l'État ces prochaines années, alors que le rythme de décaissement s'accélérera : il faudra allouer 200 à 250 millions d'euros les dernières années pour honorer le milliard qui avait été annoncé. Un soutien supplémentaire aurait permis au conseil d'administration de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) d'augmenter le taux d'avance accordé aux porteurs de projet, aujourd'hui fixé à 20 % par son règlement, donc d'accélérer les investissements.
S'agissant de l'accompagnement des territoires, qui concerne indirectement ces trois programmes, la logique du NPNRU qui insiste sur un engagement pluriannuel de l'État devrait progressivement devenir le paradigme de l'action de l'État envers les collectivités. Cet engagement n'existe pas aujourd'hui pour des programmes nationaux comme Action cœur de ville ou Petites Villes de demain. L'absence de prévisibilité est source d'incertitude pour les collectivités et une dépense d'énergie inutile. C'est aussi vrai pour le soutien aux associations des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) au titre des contrats de ville : la logique des appels à projets ou manifestations d'intérêt est à bout de souffle. Elle est source d'incertitudes et d'inégalités dans l'accès aux subventions publiques entre acteurs.
Quant au programme 162, il regroupe plusieurs interventions territoriales de l'État.
En juillet 2021, l'État a été sommé d'agir par le tribunal administratif (TA) de Renne en raison de l'insuffisance de son action contre les algues vertes en Bretagne. De nouvelles actions doivent être lancées – mesures agroenvironnementales et climatiques pour accompagner les agriculteurs dans leur changement de pratiques, achat et mise en place de matériels pour le suivi des émanations d'hydrogène, déploiement de techniques de collecte en mer –, mais de crédits frais, il n'est point question.
Concernant l'action relative au plan Chlordécone, l'État a été condamné par le tribunal administratif pour négligence fautive. Aucun nouveau crédit n'est ouvert alors que, là encore, des besoins réels existent : il faut notamment préciser la cartographie des terres polluées et créer un observatoire des pollutions. Je ne parle là que des mesures qui auraient leur place dans le programme, car la question de l'indemnisation des personnes touchées est aujourd'hui posée par le jugement du TA de Paris.
Le plan Sargasses 2 propose des mesures adéquates – développement des capteurs, achat de matériel de collecte, recensement des besoins en matière de barrages, développement du stockage, acquisition d'une flottille –, mais il faut être ambitieux : une flottille ne peut se résumer à un navire et une plateforme en mer. Les collectivités territoriales soutiennent certaines actions à hauteur de 50 % sans disposer de la santé financière suffisante. Le plan n'apporte aucune réponse à la dégradation des équipements domestiques, qui est pourtant un vrai sujet.
Enfin, le programme 162 Interventions territoriales de l'État (PITE) inclut les crédits du contrat de convergence et de transformation de la Guyane. Ils auront principalement permis d'engager la construction du plan du Larivot et la modernisation du grand port maritime, mais notre effort budgétaire doit changer de braquet. La moitié de la population de la Guyane vit sous le seuil de pauvreté – ce chiffre doit nous faire honte –, et la base de Kourou ne doit pas cacher la forêt de pauvreté.
J'ai déposé six amendements, qui, s'ils sont adoptés, pourraient motiver mon abstention.