Monsieur Bataillon, vous avez proposé de recourir à un fléchage d'une partie des prélèvements obligatoires. Or, à partir de 2025, toute affectation de taxe devra avoir un lien direct avec la mission de service public concernée.
Par ailleurs, la relation entre les Français et l'audiovisuel public n'est pas parfaite : tous ceux qui écoutent l'audiovisuel public n'y contribuent pas forcément, tandis que ceux qui y contribuent ne l'écoutent pas forcément. Créer un lien, cela peut passer par l'impôt, de la même façon que ceux qui payent l'impôt financent le service public de l'éducation, qu'ils aient ou non des enfants.
Monsieur Chudeau, vous voulez supprimer l'audiovisuel public parce que vous considérez qu'il n'a pas de valeur ajoutée : je le conteste. Un média soumis à la pression des annonceurs n'agit pas dans l'intérêt de tous les Français, mais seulement dans celui de ses annonceurs ou du public que ceux-ci veulent toucher. Ainsi, l'information sur France 2 est totalement différente de celle diffusée sur CNews. Seul le service public peut, à une heure de grande écoute, diffuser un téléfilm sur le viol suivi d'un débat raisonné sur la prévention des violences faites aux femmes. Du reste, la suppression de la contribution à l'audiovisuel public n'entraînera ni la suppression ni même la réduction de l'audiovisuel public. C'est seulement une question d'organisation.
Madame Legrain, la suppression de la contribution à l'audiovisuel public ne cache rien. Je regrette, moi aussi, que le rapport des inspections n'ait pas été porté à notre connaissance. J'appuie donc votre demande pour qu'il soit mis à la disposition des parlementaires.
Nous avons toutefois auditionné les quatre inspecteurs généraux, qui ont évoqué les différentes possibilités sur lesquelles ils avaient commencé à travailler, en particulier la possibilité de budgétiser. Ils veulent l'assortir d'une commission indépendante, dont ils ont une vision assez différente de celle proposée par le Sénat. Le rôle d'une telle commission devrait être discuté, en particulier au regard de celui de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), qui a déjà pour mission de garantir l'indépendance de l'audiovisuel public et préside à la sélection des dirigeants de celui-ci.
Si la compensation devra se faire à hauteur de 3 milliards, celle-ci ne se fera pas en prélevant ce montant depuis une autre mission budgétaire ; le travail sera mené avec beaucoup de précision. Les 29 millions d'euros et les 2 000 emplois à temps plein économisés sur la collecte de la redevance seront redéployés et renforceront ainsi d'autres services publics.
Nous reviendrons, lors de l'examen des amendements, sur la taxation des GAFAM et sur tous les efforts qui ont été accomplis pour y parvenir, particulièrement au niveau européen.
Madame Meunier, quand le Président de la République a évoqué la suppression de la contribution à l'audiovisuel public, il l'envisageait initialement pour 2023. Puis, compte tenu de l'urgence de la protection du pouvoir d'achat, il a proposé de le faire dès 2022, raison pour laquelle cette mesure se retrouve dans le présent texte.
Le lien entre les Français et la contribution à l'audiovisuel public est parfois mal compris. Certaines personnes qui écoutent la radio publique sont fières de vous dire qu'elles ne payent pas la CAP parce qu'elles ne possèdent pas de télévision, oubliant que cette contribution sert aussi à financer la radio. De plus, on observe un décrochage chez les jeunes de 16 à 24 ans, auxquels il va falloir expliquer qu'il s'agit d'un bien commun et que chacun doit y contribuer selon ses moyens.
La proposition sénatoriale de créer France Médias Régions doit être sérieusement étudiée car elle permettrait, outre de véritables gains de synergie, de parler de l'actualité de la ruralité.
Madame Bannier, je vous remercie d'avoir justement rappelé que le versement des crédits en début d'année est une garantie qu'il faut pérenniser – à cet égard, l'article 1er constitue une bonne surprise.
Plusieurs questions se posent au sujet du champ de compétence et des objectifs de la commission indépendante. Aura-t-elle seulement pour tâche d'apprécier l'adéquation entre les ressources et les missions ? Quelles personnes seront le plus à même d'en juger ? Nous accomplissons déjà ce travail, à travers l'examen des COM. Nous sommes également appelés à connaître de cette question aux côtés de l'ARCOM. La question, dès lors, est de déterminer la valeur ajoutée qu'apportera la commission. Sera-t-elle constituée d'auditeurs issus du public comme du privé ? Comprendra-t-elle des personnalités qualifiées en matière de ressources humaines ? Jusqu'où pourra-t-elle aller dans l'examen du budget et de la gestion des fonds de chaque entreprise – domaine qui relève de la compétence du conseil d'administration, comme l'a rappelé Delphine Ernotte ? Pourra-t-elle examiner les budgets ligne par ligne ? Ces questions ne sont pas encore tranchées.
Monsieur Echaniz, vous conviendrez avec moi que, même si on ne partage pas les idées de son voisin, on n'a aucune raison de s'interdire de goûter le même plat que lui. Nous pensons que la suppression de la CAP renforcera le pouvoir d'achat et, loin de défaire l'audiovisuel public, lui donnera une nouvelle impulsion, en renforçant le lien qui l'unit aux Français. Chacun y contribuera à la mesure de ses moyens.
Monsieur Patrier-Leitus, les effets fiscaux sont compensés mais, vous avez raison, on pourrait aller un peu plus loin dans leur prise en compte. Les répercussions budgétaires des mesures de compensation peuvent atteindre plusieurs millions. À titre d'exemple, les sociétés de l'audiovisuel public bénéficient de droits à déduction de la TVA sur leurs achats, parce que la CAP était soumise à une part de TVA. Ces sociétés accomplissent en effet de nombreux achats, dont le coût est accru par l'inflation. La direction du budget et les sociétés concernées examinent de près ces effets fiscaux. Nous pourrions envisager de préciser un peu plus dans le texte l'obligation de compensation, même si l'administration considère que cela tombe sous le sens.
Madame Taillé-Polian, des foyers sont aujourd'hui exonérés de la CAP, tandis que d'autres l'acquittent bien qu'ils ne soient pas soumis à l'impôt sur le revenu : c'est le cas de 5 millions de foyers, qui bénéficieront d'un gain de pouvoir d'achat net de 138 euros.
On aimerait toujours commencer par une loi de programmation mais, en l'occurrence, on a l'occasion de l'exiger. Il y a deux types de lois de programmation. La loi de programmation des finances publiques, qui sera discutée à l'automne, définira un premier cadre et déterminera la trajectoire de la mission budgétaire. Parallèlement, je nous engage vraiment à élaborer une loi d'orientation et de programmation sectorielle, qui nous permettrait d'aller beaucoup plus loin, en identifiant les points de synergie et les priorités, et en prévoyant la création de programmes qui s'ajouteraient aux six prévus.
La concentration des médias privés est en effet un véritable défi. Les règles sont parfois trop cloisonnées, qu'elles se focalisent sur la concentration verticale ou sur la concentration horizontale. C'est un chantier qu'il va falloir engager. La ministre Roselyne Bachelot avait demandé un rapport pour améliorer l'audit de la contribution à l'audiovisuel public, lequel, à ma connaissance, n'a pas encore été remis publiquement. Nous pourrions en faire la demande. Nous avons également suivi d'autres travaux – vous avez fait référence à ceux de Julia Cagé. Le financement de l'audiovisuel public nous permettra de contrebalancer la concentration des grands groupes, mais ce n'est pas l'objet de la discussion du jour.
Monsieur Peu, apprendre à changer de méthode, c'est peut-être s'engager à ce qu'on bâtisse cette loi de programmation et d'orientation. C'est au Parlement que cela peut se faire. Les parlementaires pourront plus facilement proposer ce texte s'ils sont unis sur l'ensemble des bancs ; tout ne sera pas alors à la main du Gouvernement.
Par ailleurs, comme je l'ai dit, la budgétisation existe déjà : ne la nions pas.
Monsieur Lenormand, il est beaucoup plus aisé d'assurer l'équité en recourant à l'impôt sur le revenu.
Madame Anthoine, les trois quarts des Français sont en effet attachés au service public audiovisuel, mais la même proportion d'entre eux sera satisfaite de bénéficier d'un gain de pouvoir d'achat. Ce n'est pas contradictoire.