Le sujet qui nous occupe est structurel et je regrette que nous l'abordions sous le seul angle budgétaire. Inséré dans le projet de loi de finances rectificative, il est présenté comme une mesure de pouvoir d'achat. Or sa suppression est loin d'être anodine et ne peut se résumer à faire gagner 88 ou 138 euros par an aux ménages concernés.
La suppression de la CAP est une réforme d'ampleur, qui nécessite un débat approfondi sur l'avenir de l'audiovisuel public dans tous ses aspects. Une telle réforme mérite un autre véhicule législatif qu'une loi de finances rectificative. Notre groupe a donc déposé un amendement de suppression de l'article 1er, car nous estimons que les conditions ne sont pas réunies pour supprimer purement et simplement la redevance.
Pour financer l'audiovisuel public, le Gouvernement propose de recourir au budget général de l'État, ce qui peut légitimement faire craindre pour la pérennité des ressources affectées à l'audiovisuel. La suppression de la CAP conduira en effet à une perte de recettes de plus de 9 milliards d'euros. Si les 3 milliards affectés à l'audiovisuel public sont pris sur le budget d'État, cela réduira d'autant les crédits accordés à d'autres dépenses, au détriment des citoyens. Ils risquent également de diminuer, avec un impact direct sur les ressources futures de l'audiovisuel public. Le Gouvernement s'est montré favorable à une garantie pluriannuelle, pour donner plus de visibilité, mais comment compte-t-il réellement l'assurer dès lors que la règle demeure celle de l'annualité budgétaire ?
Pour les mêmes raisons, nous devons entendre les craintes concernant la transparence et l'indépendance de l'audiovisuel public. Nous ne pouvons pas rendre son financement dépendant du bon vouloir de l'exécutif ou encore des cycles des majorités politiques. Maintenir une ressource affectée, c'est assurer un financement stable, pérenne, public, indispensable pour soutenir le cinéma, la fiction, le documentaire, la création, mais aussi et surtout un service public de l'information de qualité et indépendant.
Il faut toutefois reconnaître que la redevance audiovisuelle est un impôt régressif, injuste car uniforme, justifiant de ce fait une réforme. Celle-ci doit permettre de garantir tout à la fois l'équité de la justice fiscale, la pérennité des ressources ainsi que l'indépendance de l'audiovisuel public. La suppression de la CAP seule ne sera pas suffisante. Il faut donc réfléchir à d'autres formes de financement et se donner le temps de les appliquer dans le cadre d'une réforme d'ampleur, avec une vraie vision stratégique. Ce sujet, abandonné lors de la précédente législature, ne peut être traité en enjambant le débat citoyen et parlementaire.