Publié le 26 janvier 2023 par : M. Di Filippo.
I. – Le troisième alinéa de l’article L. 112‑3 du code de l’action sociale et des familles est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Les modalités de mise en œuvre de ces décisions doivent être adaptées à chaque situation et objectivées par :
« 1° Un examen médical systématique de l’enfant qui fait l’objet d’une information préoccupante ou d’un signalement, réalisé dans les plus brefs délais par le médecin, la personne agissant comme référent protection de l’enfance du département ou par un médecin désigné par ce dernier ;
« 2° Une enquête de voisinage ;
« 3° Des visites impératives au sein des lieux de vie de l’enfant. Lorsque ces visites sont annoncées, la présence de l’enfant doit être systématique, de même que lors des entretiens qui peuvent être fixés par les services sociaux. À chaque visite, l’enfant doit être entendu seul, dès lors qu’il est en mesure de s’exprimer, ainsi que les membres de sa fratrie, sans qu’il y ait besoin de l’accord des titulaires de l’autorité parentale. Des visites sont également réalisées de façon inopinée.
« Les décisions qui sont prises s’appuient sur les ressources de la famille et l’environnement de l’enfant. Elles impliquent la prise en compte des difficultés auxquelles les parents peuvent être confrontés dans l’exercice de leurs responsabilités éducatives et la mise en œuvre d’actions de soutien adaptées en assurant, le cas échéant, une prise en charge partielle ou totale de l’enfant. Dans tous les cas, l’enfant est associé aux décisions qui le concernent selon son degré de maturité. »
II. – La charge résultant pour l’État du I est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
III. – La charge résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La protection de l’enfance représente un enjeu social majeur. Selon le rapport 2019 de l’Observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE) paru en mai 2020, le nombre de mineurs bénéficiant au 31 décembre 2018 d’au moins une prestation ou mesure relevant de la protection de l’enfance est estimé à 306 800 sur la France entière, ce qui représente un taux de 21 ‰ des mineurs.
En France, en 2018, plus de 52 000 enfants ont subi des violences, des mauvais traitements ou un abandon. La même année, 122 mineurs ont été victimes d’infanticide, dont 80 dans le cadre intrafamilial. Plus de 23 500 plaintes ont été déposées pour violences sexuelles sur mineur, dont 7 260 dans le cercle familial. Un enfant meurt tué par sa propre famille tous les cinq jours en moyenne, et un enfant est violé par heure. Le Conseil de l’Europe estime qu’un enfant ou adolescent sur cinq est victime de violences sexuelles.
La maltraitance de l’enfant est malheureusement un phénomène très répandu. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) la définit comme « toutes les formes de mauvais traitements physiques et/ou affectifs, de sévices sexuels, de négligence ou de traitement négligent, ou d’exploitation commerciale ou autre, entraînant un préjudice réel ou potentiel pour la santé de l’enfant, sa survie, son développement ou sa dignité dans le contexte d’une relation de responsabilité, de confiance ou de pouvoir. »
En 2017, 22 % des Français déclarent avoir été victimes de maltraitances au cours de leur enfance et 47 % des Français suspectent au moins un cas de maltraitance dans leur environnement immédiat (familles, voisins, collègues, amis proches…)
Dans son rapport sur la protection de l’enfance publié en novembre 2020 et intitulé « La protection de l’enfance - Une politique inadaptée au temps de l’enfant », la Cour des comptes insiste sur le fait que « la réactivité des institutions et leur investissement doivent être à la mesure du temps de l’enfant qui passe bien plus vite que celui des pouvoirs publics. »
Au lieu de cela, la décision en matière de protection de l’enfance se caractérise par un empilement de délais qui retarde le moment de la prise en charge : délai de traitement des informations préoccupantes (le délai de trois mois imposé pour le traitement des informations préoccupantes n’est pas respecté dans de nombreux départements), délais internes aux juridictions, délais d’exécution des décisions de justice, délai pour trouver une orientation durable suite à un accueil d’urgence, etc. qui peuvent nuire gravement à l’enfant.
Tous ces délais se cumulent, retardant d’autant le moment de la prise en charge effective du mineur, avec des conséquences potentiellement graves.
Pour protéger au mieux et au plus vite les enfants en danger, cet amendement exige la réalisation dans les plus brefs délais d’un examen médical de l’enfant qui fait l’objet d’une information préoccupante ou d’un signalement par un professionnel, examen qui sera réalisé par le médecin référent « protection de l’enfance » du département de l’enfant, ou par un médecin désigné par celui‑ci (médecin de ville, hospitalier ou de santé scolaire), et qui devra s’accompagner d’un entretien personnalisé avec l’enfant si celui‑ci est en âge et en capacité de s’exprimer.
Il impose la présence de l’enfant lors de chaque rendez‑vous organisé par les services sociaux et lors de chaque visite au domicile, ainsi qu’un entretien personnalisé avec l’enfant et avec ses frères et sœurs lorsque dès lors que ceux‑ci sont en âge de s’exprimer. Il prévoit que l’enfant puisse être entendu seul, ainsi que les membres de sa fratrie, sans qu’il y ait pour cela besoin de l’accord des titulaires de l’autorité parentale. En effet, l’article D. 226‑2‑6 du code de l’action sociale et des familles prévoit que lors d’une évaluation menée suite à la transmission d’une information préoccupante, une rencontre ne peut être organisée avec le mineur sans les titulaires de l’autorité parentale qu’avec l’accord de ces derniers. Il est essentiel de lever la condition de cet accord. Des parents ou proches de l’enfant qui ne souhaitent pas que l’enfant puisse faire part des maltraitances qu’il subit refuseront bien évidemment qu’il soit entendu sans eux et qu’il ait ainsi la possibilité de libérer sa parole. Leur présence leur permet de garder une emprise sur l’enfant.
Enfin, cet amendement ouvre la possibilité d’effectuer des visites inopinées dans les familles, et exige qu’une enquête de voisinage soit systématiquement réalisée lors de l’évaluation de la situation d’un enfant faisant l’objet d’une information préoccupante ou d’un signalement.
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