Publié le 27 octobre 2022 par : M. Vicot, Mme Pic, M. Saulignac, Mme Thomin, Mme Untermaier, Mme Karamanli, M. Delaporte, les membres du groupe Socialistes et apparentés.
I. – Après l’article L. 411‑1 du code de la sécurité intérieure, il est inséré un article L. 411‑1‑1 ainsi rédigé :
« Art. L. 411‑1‑1 – L’organisation administrative et territoriale des services de la police judiciaire permet à l’autorité judiciaire de diriger et de contrôler la police judiciaire. Elle garantit également la spécificité de services de la police nationale et de la gendarmerie dédiés à des missions de police judiciaire, tant à l’échelon national que territorial.
« Cette organisation est fixée par décret en Conseil d’État. »
II. – Après le mot : « République », la fin de l’article 12‑1 du code de procédure pénale est ainsi rédigée : « , le juge d’instruction ou les autorités judiciaires compétentes ont le libre choix des officiers de police judiciaire territorialement compétents ou des services ou des formations auxquelles appartiennent les officiers de police judiciaire territorialement compétents et qui seront chargés de 1’exécution de leurs réquisitions ou commissions rogatoires. »
Cet amendement du groupe socialistes et apparentés s'inspire d'un amendement déposé par les sénateurs socialistes.
Dans une décision récente, le Conseil constitutionnel a rappelé qu’il résulte de l’article 66 de la Constitution que la police judiciaire doit être placée sous la direction et le contrôle de l’autorité judiciaire (cf. Décision ri° 2021-817 DC du 20 mai 2021).
Le rapport final du comité des États généraux de la justice souligne son attachement à ce que la police judiciaire continue d’exercer directement ses activités sous la direction des magistrats du parquet ou, le cas échéant, des juges d’instruction (cf. Rapport du comité des États généraux de la justice - point n° 3.4, page 194 dans l’édition du site vie-publique. fr).
Dans son avis du 10 mars 2022 (au paragraphe n° 34) portant sur la première version du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, le Conseil d’État observe 1’existence d’une « évolution qui, de proche en proche, traduit une certaine érosion des pouvoirs de direction et de contrôle des enquêtes par le parquet » et donc par l’autorité judiciaire.
Cette tendance, observée par le Conseil d’État, justifie l’insertion dans la loi de correctifs de nature à rétablir l’équilibre qui doit exister entre la direction et le contrôle de la police judiciaire par 1’autorité judiciaire, d’une part, et la direction des personnels de la police nationale et de la gendarmerie nationale par leurs autorités de tutelle, d’autre part.
Le présent amendement vise tout d’abord à inscrire plus clairement l’exigence constitutionnelle, rappelée par le Conseil constitutionnel le 20 mai 2021, dans la partie législative du code de la sécurité intérieure et à lui donner un sens plus concret en fixant des principes fondamentaux pour l’organisation administrative et territoriale des services en charge de missions de police judiciaire au sein de la police nationale ou de la gendarmerie nationale, et en permettant de prendre en compte l’avis de l’autorité judiciaire sur cette organisation.
L’amendement harmonise les règles applicables pour la police nationale et la gendarmerie nationale.
Il pose le principe selon lequel doit demeurer assurée la spécificité des services de police nationale et de la gendarmerie nationale dédiés à des missions de police judiciaire, tant à l’échelon national que territorial.
Cet amendement vise aussi à garantir le libre choix des officiers de police judiciaire ou des services auxquels ils appartiennent, par l’autorité judiciaire compétente. En effet, cette liberté de choix est indispensable pour que l’autorité judiciaire compétente puisse décider, selon le contexte, quels seront les destinataires les plus pertinents de ses instructions ou réquisitions. L’indépendance des enquêtes judiciaires dépend de ce principe de libre choix des enquêteurs.
Cet amendement converge nettement avec les termes du très récent communiqué de presse du Conseil supérieur de la magistrature : "Le Conseil supérieur de la magistrature fait part de sa profonde préoccupation face au projet de réforme tendant à placer la police judiciaire sous l'autorité du directeur départemental de la police nationale, lui-même dépendant du préfet.Le Conseil tient à rappeler que toute réforme touchant à la police judiciaire dans un État de droit doit respecter un ensemble de garanties, corollaires indispensables du principe d’indépendance de l’autorité judiciaire :
- la direction et le contrôle de la police judiciaire par les magistrats, directeurs
d’enquête constitutionnellement garants des libertés ;
- le libre choix du service d’enquête par les magistrats du parquet et les juges
d’instruction ;
- la définition et la mise en œuvre des politiques pénales sur les territoires par les
procureurs généraux et les procureurs de la République ;
- le respect du secret de l’enquête et de l’instruction"
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