Publié le 30 septembre 2022 par : Mme Givernet, M. Metzdorf, M. Roseren, Mme Delpech, M. Valletoux, M. Adam, M. Ott.
Après le premier alinéa de l'article 18, ajouter :
Le VI de l’article 53 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 est ainsi réécrit :
« Sous réserve des contraintes liées au décalage horaire de leur reprise en outre-mer, les programmes diffusés entre vingt heures et six heures des services nationaux de télévision mentionnés au I de l'article 44, comportent des messages publicitaires pour des biens ou services présentés sous leur appellation générique, des annonces publicitaires de contributeurs publics ou privés. A l'exception de leurs programmes régionaux et locaux, le temps maximal consacré à la diffusion de messages publicitaires s'apprécie par l’opportunité d'ouvrir une à trois sessions publicitaires par programme d’une durée maximale cumulée de 300 secondes à heure d'horloge donnée. »
« Au plus tard le 1er mai 2024, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport évaluant, après consultation des organismes professionnels représentatifs du secteur de la publicité, l'incidence de la mise en œuvre du premier alinéa du présent VI sur l'évolution du marché publicitaire et la situation de l'ensemble des éditeurs de services de télévision et de services de médias audiovisuels. »
« La mise en œuvre du premier alinéa du présent VI donne lieu à une compensation financière de l'Etat dans des conditions définies par la loi de finances. Le montant de cette compensation est affecté à la société mentionnée au I de l'article 44. Le cas échéant, le montant de cette compensation est réduit à due concurrence du montant des recettes propres excédant le produit attendu de ces mêmes recettes tel que déterminé par le contrat d'objectifs et de moyens ou ses éventuels avenants conclus entre l'Etat et la société mentionnée au même I.»
Le présent amendement vise à rétablir le droit de diffuser des messages publicitaires sur la
télévision publique entre vingt heures et six heures du matin afin de réduire le montant de la
compensation financière versée annuellement par l’Etat. Sur ce créneau horaire journalier, il prévoit
un temps de diffusion de messages publicitaires limité à cinq minutes réparties en une à trois
sessions à heure d'horloge donnée.
Cette réforme du financement de l’audiovisuel public complète et renforce la suppression de la
redevance par la loi de finances rectificative pour 2022 du 16 août 2022. Elle renforce
l'indépendance de l'audiovisuel public tout en dégageant des marges de manœuvre budgétaires.
Cet amendement s’appuie sur un double constat :
- La réforme portée par la loi n°2009-258 du 5 mars 2009 n’a pas atteint ses objectifs ;
- L’incidence sur le marché publicitaire des nouvelles formes de consommation audiovisuelle en
ligne a modifié en profondeur le marché de la publicité audiovisuelle.
La réforme portée par la loi n°2009-258 du 5 mars 2009 n’a pas atteint ses objectifs. De fait, dès
2013, le rapport du député Marcel Rogemont relatif à l’indépendance de l’audiovisuel public du 17
juillet 2013 révèle que la suppression de la publicité après 20 heures sur France Télévisions a coûté
près de 746 M€ entre 2009 et 2013 au budget de l'État. Depuis, la situation ne s’est pas améliorée,
au contraire. En 2012, les recettes publicitaires générées par le rétablissement de la publicité après
20 heures sur France TV étaient estimées à 200 M€.
Force est de reconnaître que la suppression de la publicité après 20 heures sur France Télévisions
n’a pas permis de « faire démarrer les soirées plus tôt », bien au contraire. Sur le plan financier, les
outils de compensation basés sur des taxes spécifiques ont vite montré leurs limites, rendant
nécessaire une refonte totale du modèle économique de l’audiovisuel public. A cela, on peut ajouter
à l’approche de la Coupe du Monde de Rugby 2023 et des Jeux olympiques de Paris en 2024,
l’intérêt de valoriser la diffusion de ces événements sportifs d’envergure mondiale.
Il s'agit aussi de réorienter la publicité vers des canaux audiovisuels officiels. En effet, face à la
diminution des espaces publicitaires à la télévision, les annonceurs ont accru leur présence en ligne
et à côté de la publicité classique se développe la publicité programmatique. Les annonceurs
peuvent ainsi acheter de l’espace publicitaire de façon automatisée en ciblant les utilisateurs grâce à
des algorithmes. Comme le souligne dans son chapitre 3 le rapport "Les Lumières à l’ère
numérique" remis en janvier 2022 au Président de la République, il est apparu que ces annonces
programmatiques se retrouvent fréquemment sur des sites propageant des contenus haineux,
conspirationnistes, attentatoires à la dignité humaine et à l’égalité femmes-hommes, ou
encourageant des dérives sectaires, relevant de la désinformation caractérisée ou susceptibles de
troubler la tranquillité publique. Pour reprendre les termes du rapport : "les revenus publicitaires
que ces sites en tirent constituent une manne financière considérable qui entretient la pollution
informationnelle". On peut espérer que le rétablissement de la publicité le soir sur France TV
permettra de réduire, même de manière modérée, le recours à ces supports nocifs.
Enfin, la multiplication des supports de diffusion liée notamment au développement des services de
vidéo à la demande a bouleversé le modèle économique des opérateurs de télévision classiques.
Aussi, afin d'ajuster la compensation financière de l'Etat, il conviendra d’évaluer de manière précise
l’impact de ce rétablissement encadré de la publicité sur les chaînes de France TV tant sur les
finances du groupe audiovisuel public que sur les opérateurs privés de télévision et de services de
médias audiovisuels tels que les plateformes de vidéo à la demande. C’est pourquoi le présent
amendement prévoit un premier rapport d’évaluation dès mai 2024.
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