Publié le 7 mai 2024 par : Mme Louwagie, Mme Dalloz, M. Bazin, M. Bony, M. Forissier, Mme Bonnivard, M. Bourgeaux, M. Hetzel, Mme Bazin-Malgras, M. Seitlinger, Mme Tabarot, M. Cordier, M. Brigand, M. Viry, M. Ray, Mme Corneloup.
I. – L’arrachage des haies et l’abatage des arbres non mentionnés aux articles L. 412‑21 à L. 412‑26 du code de l’environnement est interdit durant la période de nidification, sauf en cas d’impératif sanitaire ou de sécurité, et après réalisation d’un diagnostic permettant d’évaluer l’enjeu phytosanitaire et écologique.
II. – La taille d’une haie non mentionnée aux articles L. 412‑21 à L. 412‑26 du code de l’environnement, dans le cadre de son entretien usuel, est interdite durant la période de nidification, sauf dans les cas suivants :
1° Taille des jeunes pousses âgées de moins de deux ans ;
2° Travaux nécessaires pour des raisons de sécurité, notamment autour des voies de circulation et des infrastructures de transports, ou pour assurer le bon fonctionnement des réseaux d’énergie et de télécommunication ;
3° Taille indispensable pour des raisons sanitaires, pour permettre à la haie de fournir ses services écologiques, ou pour l’adapter aux contraintes extérieures.
III. – La taille des arbres non mentionnés aux articles L. 412‑21 à L. 412‑26 du code de l’environnement, dans le cadre de leur entretien usuel, durant la période de nidification, est conditionnée à la réalisation d’un diagnostic permettant d’évaluer l’enjeu phytosanitaire et écologique.
IV. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. Il précise notamment :
1° Les modalités de fixation de la période de nidification, qui peut être différente selon les régions, durant laquelle les travaux mentionnés dans le présent article sont interdits ou conditionnés à un diagnostic permettant d’évaluer l’enjeu phytosanitaire et écologique ;
2° Les modalités du diagnostic permettant d’évaluer l’enjeu phytosanitaire et écologique, notamment les dispositions minimales à définir dans le cadre du diagnostic pour éviter de nuire à la biodiversité et pour respecter les interdictions mentionnées à l’article L. 411‑1 du code de l’environnement ;
3° Les conditions dans lesquelles les travaux mentionnés au I du présent article sont autorisés pour des raisons sanitaires ou de sécurité, ainsi que les dispositions minimales à respecter durant les travaux pour préserver la biodiversité et pour respecter les interdictions mentionnées à l’article L. 411‑1 du code de l’environnement ;
4° Les conditions dans lesquelles les travaux mentionnés aux 1° , 2° et 3° du II du présent article sont autorisés, ainsi que les dispositions minimales à respecter durant les travaux pour préserver la biodiversité et pour respecter les interdictions mentionnées à l’article L. 411‑1 du code de l’environnement ;
5° Les dispositions minimales à mettre en œuvre dans le cadre des travaux mentionnés au III du présent article pour préserver la biodiversité et pour respecter les interdictions mentionnées à l’article L. 411‑1 du code de l’environnement ;
6° Les sanctions administratives ou pénales en cas de non-respect du présent article.
Les règles autour de la taille des haies et des arbres font l’objet de nombreuses incompréhensions et surinterprétations, notamment pendant la période de nidification des oiseaux. En effet, de nombreux acteurs communiquent sur une interdiction de taille et d’élagage des végétaux entre le 16 mars et le 15 août. Or, cette interdiction n’existe que pour les haies agricoles, et ne s’applique pas aux haies et aux arbres présents chez les particuliers, dans les espaces verts ou dans les milieux naturels.
Cette confusion crée des difficultés importantes:
- Pour les particuliers, qui ne savent pas s’ils ont le droit d’entretenir leurs végétaux entre le 16 mars et le 15 août
- Pour les donneurs d’ordre (gestionnaires d’espaces verts publics et privés, gestionnaires de réseaux…), qui doivent adapter leur agenda et reporter des interventions parfois indispensables
- Pour les entreprises du paysage, en particulier celles qui sont spécialisées dans l’élagage, qui font face à des réactions hostiles des riverains ou d’associations pour des interventions qui sont pourtant autorisées.
Cette situation risque de se traduire, à terme, par un arrêt pur et simple de la taille, de l’élagage et de l’entretien des végétaux durant cette période, qui serait contre-productif à plusieurs égards :
- Les professionnels du paysage savent mettre en place les bonnes pratiques pour intervenir en évitant les destructions de nids d’oiseaux. Il leur est notamment recommandé d’effectuer un diagnostic avant chaque intervention pour vérifier si des espèces protégées sont présentes dans la végétation.
- Certaines interventions sont nécessaires pour des raisons de sécurité (visibilité sur les routes, arbres menaçant de tomber, protection des réseaux d’électricité et de télécommunication…), pour maintenir la bonne santé des végétaux (en cas de maladie par exemple) ou pour respecter l’obligation légale de débroussaillement.
- Les jardins et espaces verts représentent une surface supérieure aux espaces naturels, ils jouent un rôle majeur dans la préservation des services écosystémiques, qui ne se limitent pas aux oiseaux. Or, certaines interventions sont nécessaires pour préserver d’autres composantes de la biodiversité. Par exemple, les arbustes à floraison printanière, qui représentent la majorité des végétaux des jardins et des espaces verts, doivent être taillés au printemps ou l’été pour qu’ils puissent fleurir à nouveau l’année suivante et donc bénéficier aux polinisateurs. Une interdiction totale d’entretenir les haies des jardins et espaces verts durant la période de nidification pourrait donc nuire à d’autres composantes de la biodiversité.
- Si l’entretien des haies et des arbres devient trop contraignant ou que ces derniers posent des difficultés pratiques (par exemple, dans le cas d’une haie qui obstruerait le passage si elle n’est pas taillée régulièrement), il y a un risque que les propriétaires de jardin et les gestionnaires d’espaces verts fassent le choix de les arracher, ce qui serait contre-productif pour la biodiversité.
- Cela menacerait fortement l’activité des entreprises du paysage, qui sont en constante évolution pour mieux intégrer les enjeux liés à la biodiversité et à l’adaptation au réchauffement climatique. Cela transformerait notamment l’activité d’élagueur en activité saisonnière. Or il s’agit d’un métier particulièrement technique, dangereux et physique, qui peut difficilement devenir saisonnier. Il y a également un risque, si les donneurs d’ordre, en particulier les gestionnaires d’infrastructures linéaires, concentrent l’activité sur une courte période, que les entreprises françaises ne soient pas en mesure d’assurer la totalité des travaux. Cela les conduirait à faire appel à des entreprises d’élagage étrangères qui n’appliquent pas toujours les bonnes pratiques en faveur de la biodiversité.
L’article 14 du projet de loi d’orientation agricole, dans sa rédaction actuelle, clarifie la réglementation concernant les haies agricoles et rurales mais il ne précise rien concernant les haies et les arbres présents dans les jardins des particuliers ou dans les espaces verts.
Cet amendement vise donc à établir un cadre législatif clair concernant l’entretien des végétaux durant la période de nidification concernant pour les haies qui ne sont pas visées par l’article 14 du présent projet de loi et par la réglementation encadrant la PAC.
Il prévoit une interdiction de l’arrachage des haies et de l’abatage des arbres sauf impératif de sécurité (visibilité sur les routes, risque de chute), ou sanitaires (végétaux touchés par une maladie pouvant contaminer les autres végétaux par exemple) durant la période de nidification.
Il interdit également la taille des haies durant cette période sauf cas particuliers :
- Jeunes pousses de moins de 2 ans (pour lesquelles le risque de détruire un nid est très significativement réduit)
- Travaux nécessaires pour des raisons de sécurité ou pour assurer le bon fonctionnement des réseaux
- Travaux nécessaires pour des raisons sanitaires et pour permettre à la haie de rendre ses services écologiques (par exemple en taillant les arbustes à floraison printanière au printemps pour leurs permettre de refleurir l’année suivante)
Il conditionne également les travaux à la réalisation d’un diagnostic permettant d’évaluer l’enjeu phytosanitaire et écologique. Ce diagnostic permettrait ainsi d’évaluer les risques de destructions de nid au regard de l’intérêt des travaux et de prévoir les précautions nécessaires pour éviter de nuire à la biodiversité ou de détruire des espèces protégées.
Ce dispositif aurait le mérite de définir clairement les opérations qui sont autorisées et celles qui sont interdites pendant la période de nidification, pour éviter le flou et les conflits auxquels sont confrontés les gestionnaires d’espaces verts et les particuliers, qui risquent à terme de les inciter à réduire le nombre de végétaux. Il permettrait également de mieux protéger la biodiversité que le cadre réglementaire actuel, qui ne prévoit aucune disposition claire et générale concernant l’abatage et l’entretien des végétaux pendant la période de nidification, tout en permettant le maintien de l’activité des entreprises du paysage pendant cette période.
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