Publié le 7 mai 2024 par : Mme Louwagie, Mme Dalloz, M. Bazin, M. Bony, M. Forissier, Mme Bonnivard, M. Bourgeaux, M. Hetzel, Mme Bazin-Malgras, M. Seitlinger, Mme Tabarot, M. Cordier, M. Brigand, M. Viry, M. Ray, Mme Corneloup.
Afin d’éviter la destruction des habitats et des nids d’oiseaux durant la période de nidification, un décret en Conseil d’État fixe :
1° La période de nidification, qui peut varier selon les régions, durant laquelle la taille ou l’arrachage des arbres et des haies est interdit sauf en cas d’impératif sanitaire ou de sécurité, ou conditionné à un diagnostic permettant d’évaluer les enjeux phytosanitaires et écologiques ;
2° Les travaux qui, en fonction du type de végétaux et des enjeux sanitaires ou de sécurité, font l’objet d’une interdiction, d’une obligation de diagnostic permettant d’évaluer les enjeux phytosanitaires et écologiques, ou pour lesquelles des dispositions permettant d’éviter les nuisances à la biodiversité et de respecter les interdictions prévues par l’article L. 411‑1 du code de l’environnement doivent être mises en œuvre ;
3° Les modalités de réalisation du diagnostic permettant d’évaluer les enjeux phytosanitaires et écologiques, ainsi que les dispositions minimales à mettre en œuvre dans les cadre des travaux de taille et d’abatage des végétaux durant la période de nidification, afin d’éviter les nuisances à la biodiversité er pour respecter les interdictions prévues à l’article L. 411‑1 du code de l’environnement.
4° Les sanctions administratives ou pénales en cas de non-respect des interdictions.
Les règles autour de la taille des haies et des arbres font l’objet de nombreuses incompréhensions et surinterprétations, notamment pendant la période de nidification des oiseaux. En effet, de nombreux acteurs communiquent sur une interdiction de taille et d’élagage des végétaux entre le 16 mars et le 15 août. Or, cette interdiction n’existe que pour les haies agricoles, et ne s’applique pas aux haies et aux arbres présents chez les particuliers, dans les espaces verts ou dans les milieux naturels.
Cette confusion crée des difficultés importantes:
- Pour les particuliers, qui ne savent pas s’ils ont le droit d’entretenir leurs végétaux entre le 15 mars et le 15 août
- Pour les donneurs d’ordre (gestionnaires d’espaces verts publics et privés, gestionnaires de réseaux…), qui doivent adapter leur agenda et reporter des interventions parfois indispensables
- Pour les entreprises du paysage, en particulier celles qui sont spécialisées dans l’élagage, qui font face à des réactions hostiles des riverains ou d’associations pour des interventions qui sont pourtant autorisées.
Cette situation risque de se traduire, à terme, par un arrêt pur et simple de la taille, de l’élagage et de l’entretien des végétaux durant cette période, qui serait contre-productif à plusieurs égards :
- Les professionnels du paysage savent mettre en place les bonnes pratiques pour intervenir en évitant les destructions de nids d’oiseaux. Il leur est notamment recommandé d’effectuer un diagnostic avant chaque intervention pour vérifier si des espèces protégées sont présentes dans la végétation.
- Certaines interventions sont nécessaires pour des raisons de sécurité (visibilité sur les routes, arbres menaçant de tomber, protection des réseaux d’électricité et de télécommunication…), pour maintenir la bonne santé des végétaux (en cas de maladie par exemple) ou pour respecter l’obligation légale de débroussaillement.
- Les jardins et espaces verts représentent une surface supérieure aux espaces naturels, ils jouent un rôle majeur dans la préservation des services écosystémiques, qui ne se limitent pas aux oiseaux. Or, certaines interventions sont nécessaires pour préserver d’autres composantes de la biodiversité. Par exemple, les arbustes à floraison printanière, qui représentent la majorité des végétaux des jardins et des espaces verts, doivent être taillés au printemps ou l’été pour qu’ils puissent fleurir à nouveau l’année suivante et donc bénéficier aux polinisateurs. Une interdiction totale d’entretenir les haies des jardins et espaces verts durant la période de nidification pourrait donc nuire à d’autres composantes de la biodiversité.
- Si l’entretien des haies et des arbres devient trop contraignant ou que ces derniers posent des difficultés pratiques (par exemple, dans le cas d’une haie qui obstruerait le passage si elle n’est pas taillée régulièrement), il y a un risque que les propriétaires de jardin et les gestionnaires d’espaces verts fassent le choix de les arracher, ce qui serait contre-productif pour la biodiversité.
- Cela menacerait fortement l’activité des entreprises du paysage, qui sont en constante évolution pour mieux intégrer les enjeux liés à la biodiversité et à l’adaptation au réchauffement climatique. Cela transformerait notamment l’activité d’élagueur en activité saisonnière. Or il s’agit d’un métier particulièrement technique, dangereux et physique, qui peut difficilement devenir saisonnier. Il y a également un risque, si les donneurs d’ordre, en particulier les gestionnaires d’infrastructures linéaires, concentrent l’activité sur une courte période, que les entreprises françaises ne soient pas en mesure d’assurer la totalité des travaux. Cela les conduirait à faire appel à des entreprises d’élagage étrangères qui n’appliquent pas toujours les bonnes pratiques en faveur de la biodiversité.
Cet amendement vise donc à établir un cadre réglementaire clair concernant l’entretien des végétaux durant la période de nidification, qui s’ajouterait aux dispositions déjà prévues par l’article 14 du présent projet de loi, ainsi qu’aux règles encadrant l’accès aux aides de la PAC, qui prévoit l’interdiction de la taille des haies du 16 mars au 15 août uniquement sur les exploitations agricoles bénéficiant de la PAC.
Ce cadre réglementaire définirait de façon précise les travaux qui sont autorisés et ceux qui sont interdits, en fonction du type de végétaux et des enjeux sanitaires ou de sécurité, durant la période de nidification. Il prévoirait également, pour les travaux qui sont autorisés, la mise en œuvre d’un diagnostic phytosanitaire et environnemental en amont des travaux, ainsi que de mesures visant à éviter les destructions de nids.
Ce dispositif aurait le mérite de créer des règles claires concernant l’entretien des végétaux durant la période de nidification, pour éviter le flou et les conflits auxquels sont confrontés les gestionnaires d’espaces verts et les particuliers, qui risquent à terme de les inciter à réduire le nombre de végétaux. Il permettrait également de mieux protéger la biodiversité que le cadre réglementaire actuel, qui ne prévoit aucune disposition claire et générale concernant l’abattage et l’entretien des végétaux pendant la période de nidification, tout en permettant le maintien de l’activité des entreprises du paysage pendant cette période.
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