Publié le 30 novembre 2023 par : Mme Ferrari.
Supprimer les alinéas 2 et 3.
Cet amendement a pour objectif de revenir sur une mesure malencontreuse adoptée lors de l'examen en commission de ce texte, qui autorise les communes à réduire de 120 à 90 le nombre maximal de nuitées autorisées pour la location d'une résidence principale. Cette mesure repose sur une hypothèse radicalement fausse, à savoir un lien présumé entre la pénurie de logements et la pratique de location temporaire par des propriétaires occupants.
Il est illusoire de croire qu’abaisser ce plafond applicable aux seules résidences principales libérerait du logement de long terme. Les résidences principales ne pouvant, par définition, être mises sur le marché de la location de longue durée puisque leurs occupants y ont élu domicile et y habitent !
Attaquer la légitimité d’un propriétaire à louer temporairement sa résidence principale lorsqu’il ne l’occupe pas pour dégager un complément de revenus constitue donc, selon nous, une mesure populiste et inutile. Ce point a notamment été acté dans la feuille de route Etat - collectivités territoriales sur les meublés de tourisme, signée par sept associations d’élus locaux et trente villes en 2021, qui a “écarté une modification de ce seuil” car cela “n’aurait pas d’incidence directe sur l’offre de logements mis à la location de manière pérenne”.
Par ailleurs, cela affecterait brutalement le pouvoir d’achat des ménages recourant à la location de courte durée, soit plusieurs centaines de milliers de foyers chaque année, ainsi que le pouvoir d’achat des millions de voyageurs français qui partent en vacances ou en weekend à moindre coût grâce à la location meublée touristique (familles, jeunes, étudiants). En abaissant l’offre de locations meublées touristiques disponible, cette mesure contribuera à une hausse des prix malvenue dans le contexte inflationniste actuel et contradictoire avec les objectifs de faire de France la plus grande destination touristique. Cette proposition crée une véritable injustice sociale, en décalage complet avec la situation économique actuelle (crise énergétique, hausses des charges dans les copropriétés, augmentation de la taxe foncière dans de très nombreuses villes) qui incite de plus en plus de Français, pour y faire face, à recourir à la location occasionnelle de leur hébergement quelques jours ou semaines par an. Qui au pays de BlaBlaCar soutiendrait sérieusement une loi pour limiter à 3 personnes l'occupation d’une voiture 5 places?
Il a été évoqué lors des débats en commission que certains propriétaires déclareraient abusivement leur hébergement comme résidence principale pour contourner la réglementation. Cependant, les procédures de changement d’usage et le numéro d’enregistrement en vigueur depuis la loi ELAN, ainsi que l’accès aux données communiquées par les plateformes, offrent déjà aux collectivités les outils nécessaires pour contrôler les hébergements et sanctionner les éventuels - et rares - abus. Ainsi les tribunaux examinent-ils chaque semaine la situation d’hébergeurs ayant été assignés par leur Mairie, étant rappelé que les fraudeurs encourent des sanctions pécuniaires importantes (jusqu’à 50.000 euros) - les contrôles ont donc bien lieu et les sanctions tombent.
Réduire le nombre de nuitées pour tous les propriétaires occupants apparaît donc comme une sanction collective et injuste, affectant de nombreux propriétaires respectueux des règles qui comptent sur ce complément de revenus.
De plus, l'argument selon lequel un propriétaire occupant ne devrait pas être en mesure de louer son logement 120 jours par an repose sur une logique erronée. Sans même rappeler que les week-ends et les congés payés réglementaires représentent 129 jours), on ignore des situations légitimes loin d’être isolées. De nombreuses personnes, pour des raisons professionnelles, partagent leur temps entre plusieurs villes - comme les commerciaux, le personnel saisonnier, les soignants intervenant dans plusieurs hôpitaux, ou encore les militaires. Leur résidence principale est nécessairement et régulièrement inoccupée. Il en va de même pour de nombreux retraités qui, bien que propriétaires, se déplacent fréquemment pour être présents aux côtés de leur famille, voyager, ou encore profiter de leur résidence de campagne.
De surcroît, une mesure conduisant à un abaissement du plafond dans certaines villes serait vraisemblablement anticonstitutionnelle en ce qu’elle porterait une atteinte injustifiée au droit de propriété, tout en heurtant l’objectif à valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi et, au-delà, de la réglementation en général - il serait bien difficile pour les hébergeurs de comprendre quel plafond s’applique dans tel ou telle ville.
Par conséquent, cet amendement propose de supprimer la disposition introduite en commission, en cohérence avec l’esprit de la proposition de loi.
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