Publié le 13 septembre 2023 par : Mme Garin, M. Peytavie, Mme Rousseau, Mme Taillé-Polian.
Compléter l’alinéa 1er par les phrases suivantes :
« Les ordonnances prévues à cet alinéa font l’objet d’une négociation avec les conseils départementaux des collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution et les conseils territoriaux de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon. Elles ne peuvent inclure les sanctions envers les bénéficiaires du revenu de solidarité active établies à l’article 1 à 3 du présent projet de loi. »
Le présent article 11 octroie au Gouvernement la capacité d’appliquer la présente loi aux outre-mer par ordonnance. Ce faisant, il ne donne pas d’indication concernant les mesures d’adaptations qu’il envisage pour appliquer un projet de loi dont les dispositions sont largement inappropriées aux contextes des territoires d’outre-mer.
C’est ainsi que le Conseil Départemental de la Réunion signait à l’unanimité une motion en mai dernier déclarant que le projet de loi France Travail ne prenait pas en compte les spécificités réunionnaises et que le régime des sanctions prévues dans le projet de loi était « inadapté à la situation réunionnaise ».
De fait, on peut largement s’interroger sur les effets de France Travail dans ces territoires particulièrement défavorisés, alors même que des études ont établi que les sanctions provoquaient du non-recours au RSA et qu’il n’est absolument pas garantie que France Travail fasse mieux que Pôle Emploi en termes d’accompagnement à l’emploi.
En tout état de cause, le Conseil Départementale de la Réunion le souligne : c’est d’un accompagnement social renforcé dont ont besoin les 96 000 allocataires de l’île.
La Cour des Comptes le soulignait également en indiquant qu’à La Réunion « trop de bénéficiaires, les deux tiers, sont directement orientés par le département vers un parcours professionnel géré par Pôle Emploi. Or en raison de leurs freins sociaux, ils relèvent d’abord de l’accompagnement social et socio-professionnelle départemental. ». Ainsi, la Cour admet elle-même qu’un renvoi vers un dispositif d’accompagnement professionnel est inadapté dans la majorité des cas, interrogeant fortement la pertinence de France Travail dans un tel contexte.
La mise en œuvre d’un projet de loi majoritairement orienté vers les sanctions dans des territoires où le taux de pauvreté atteint 60 % en Guadeloupe et en Guyane et 40 % en Martinique et à La Réunion, où le taux de chômage est très élevé (24 % à la Réunion, 38 % à Mayotte), n’a pas grand sens.
La levée des freins à l’emploi dépend d’un accompagnement social bienveillant et non d’un renforcement des sanctions qui n’entrainera que du non-recours. L’accompagnement à l’emploi pour les personnes disponibles à un retour vers l’emploi dépend de la création d’emplois durables dans ces territoires et non de la transformation du SPE, en entrainant par ailleurs un alourdissement de la charge de ce dernier via l’inscription des allocataires du RSA.
Enfin, légiférer par Ordonnance porte atteinte à la démocratie parlementaire et constitue un affront pour l’ensemble des élus issus des territoires d’outre-mer qui n’ont ainsi aucun moyen de représenter les millions d’électeurs qui leur font confiance. Elle constitue une forme de mépris envers une population à qui l’on n’offre pas même le luxe d’être traité comme les métropolitains et d’avoir ainsi droit à un projet de loi en bonne et due forme qui puisse être discuté par la représentation nationale et en particulier les élus des territoires d’outre-mer.
Pour toutes raisons, cet amendement se propose de soumettre la rédaction des ordonnances à une négociation avec les conseils départementaux et territoriaux des territoires d’outre-mer afin de garantir une voix à la représentation de ces populations avant l’application de la loi, tout en ne permettant pas à ces ordonnances de reprendre les dispositions de sanctions envers les allocataires du RSA prévues au sein du présent projet de loi.
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