Publié le 14 septembre 2023 par : M. Gaultier.
Rédiger ainsi cet article :
« I. – (Supprimé)
« II (nouveau). – A titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, sont autorisés les jeux proposés par l’intermédiaire d’un service de communication au public en ligne qui permettent l’obtention, reposant sur un mécanisme faisant appel au hasard, par les joueurs ayant consenti un sacrifice financier, d’objets numériques monétisables, à l’exclusion de l’obtention de tout gain monétaire, sous réserve que ces objets ne puissent pas être cédés, directement ou indirectement par l’intermédiaire de toute personne physique ou morale, à titre onéreux à toute entreprise de jeux.
« Constituent des objets numériques monétisables au sens du premier alinéa, à l’exclusion des actifs numériques relevant du 2° de l’article L. 54‑10‑1 du code monétaire et financier, les éléments de jeu qui confèrent aux seuls joueurs un ou plusieurs droits associés au jeu, et qui sont susceptibles d’être cédés, directement ou indirectement, à titre onéreux à des tiers.
« Les entreprises de jeux à objets numériques monétisables s’assurent de l’intégrité, de la fiabilité, de la transparence des opérations de jeu et de la protection des mineurs. Elles veillent à prévenir le jeu excessif ou pathologique, les activités frauduleuses ou criminelles ainsi que le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
« III (nouveau). – Les jeux autorisés à titre expérimental dans les conditions prévues au présent article, après avis de l’Autorité nationale des jeux dont les observations tiennent notamment compte des risques de développement d’offres illégales de jeux en ligne, sont les jeux de fantaisie sportive et hippique qui proposent à leurs utilisateurs des interactions ayant pour support des compétitions, manifestations sportives ou épreuves hippiques réelles.
« IV. – Afin de prévenir les risques d’atteinte à l’ordre public susceptibles de résulter du développement d’offres illégales de jeux de casinos en ligne, à titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, est autorisée l’exploitation par les casinos régis par l’article L. 321‑1 du code de la sécurité intérieure d’une offre digitale de jeux de casinos à distance.
« Cette expérimentation est soumise aux dispositions du présent IV.
« A. Par dérogation aux articles L. 321‑5‑1, L. 324‑1 et L. 324‑2 du code de la sécurité intérieure, une autorisation temporaire d’exploiter une offre digitale de machines à sous et de jeux de contrepartie à distance peut être accordée aux casinos autorisés à l’article L. 321‑1 du même code.
« L’autorisation temporaire d’exploiter une offre digitale de machines à sous et de jeux de contrepartie est accordée au casino concerné par le ministre de l’Intérieur après avis de l’Autorité Nationale des Jeux. L’arrêté détermine un nombre de positions de jeu à distance équivalent au nombre de tables de jeux de contrepartie et d’appareils de jeux mentionnés à l’article L. 321‑5 du code de la sécurité intérieure exploités par le casino considéré, prévoit les modalités d’accès à l’offre digitale, les mesures de surveillance et de contrôle des opérations de jeu à distance, le taux et le mode de perception des prélèvements applicables à l’offre digitale du casino concerné.
« L’autorisation temporaire peut être révoquée par le ministre de l’Intérieur avant la fin de l’expérimentation en cas d’inobservation du cahier des charges ou des clauses de l’arrêté du ministre de l’Intérieur dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 321‑2 du code de la sécurité intérieure. En aucun cas, notamment en cas d’abrogation ou de modification des dispositions applicables à la présente expérimentation, le retrait de cette autorisation temporaire ne peut donner lieu à une indemnité quelconque. Les autorisations temporaires accordées dans ce cadre sont caduques à l’issue de l’expérimentation.
« B. La liste des jeux de contrepartie pouvant être autorisés à distance est fixée par décret.
« C. Sont applicables aux casinos exploitant une offre digitale de machines à sous et de jeux de contrepartie à distance les articles L. 321‑4, L. 321‑4‑1, L. 323‑1 à L. 323‑3 et le titre V du livre II du code de la sécurité intérieure ainsi que les dispositions du chapitre Ier du titre VI du livre V du code monétaire et financier applicables aux casinos.
« D. Les prélèvements opérés par l’État, les communes, les établissements publics de coopération intercommunale, la métropole de Lyon et les organismes sociaux sur l’offre digitale exploitée par les casinos autorisés en application de l’article L. 321‑1 du Code de la sécurité intérieure sont effectués sur le produit brut des jeux offerts à distance.
« Le produit brut des jeux de contrepartie offerts à distance est constitué par le produit d’un coefficient de 93,5 % appliqué au montant des mises engagées par les joueurs diminué au montant des gains qui leur sont reversés.
_« Le produit brut des jeux de machines à sous à distance est constitué par le produit d’un coefficient de 85 % appliqué au montant des mises engagées par les joueurs diminué du montant des gains qui leur sont reversés.
« Le taux des prélèvements opérés par les communes sur le produit brut des jeux offerts à distance par les casinos autorisés ne peut excéder celui des prélèvements opérés par lesdites communes sur le produit brut des jeux issu de l’activité terrestre desdits casinos en vertu des clauses des cahiers des charges de ces établissements et ne doit, en aucun cas, dépasser 15 %. Ces prélèvements s’appliquent à la somme totale des éléments constitutifs du produit brut des jeux offerts à distance diminuée de 25 % et, le cas échéant, de l’abattement supplémentaire mentionné au I de l’article 34 de la loi de finances rectificative pour 1995 (n° 95‑1347 du 30 décembre 1995).
« Il est institué un prélèvement progressif opéré par l’État assis sur le produit brut des jeux offerts à distance par les casinos autorisés. L’assiette de ce prélèvement est constituée du produit brut des jeux offerts à distance diminué d’un abattement de 25 % et, le cas échéant, de l’abattement supplémentaire mentionné au I de l’article 34 de la loi de finances rectificative pour 1995 (n° 95‑1347 du 30 décembre 1995). Le taux du prélèvement progressif est fixé par décret, dans les limites minimale et maximale de 6 % et de 83,5 %.
« Le montant de l’abattement sur le produit brut des jeux dont peuvent bénéficier les casinos au titre des manifestations artistiques de qualité en vertu de l’article L. 2333‑55‑3 du code général des collectivités territoriales peut, pour les casinos autorisés à proposer une offre de jeux à distance, également être imputé sur les prélèvements prévus aux alinéas 4 et 5 du présent D) dus au titre de la saison des jeux échue au cours de laquelle se sont déroulées lesdites manifestations artistiques de qualité, dans les conditions prescrites à l’article L. 2333‑55‑3 susvisé.
« Lorsque le taux du prélèvement communal ajouté au taux du prélèvement de l’État sur la somme des éléments constitutifs du produit brut des jeux offerts à distance par les casinos autorisés dépasse 83,5 %, le taux du prélèvement de l’État est réduit de telle façon que le total des deux prélèvements soit de 83,5 %.
« Il est institué une contribution sur le produit brut des jeux offerts à distance par les casinos autorisés. Le taux de cette contribution est fixé à 3 %. Il est institué une contribution complémentaire de 11,2 % sur une fraction égale à 68 % du produit brut des jeux de machines à sous offerts à distance. Il est institué une contribution de 13,7 % prélevée sur tous les gains d’un montant supérieur ou égal à 1 500 euros, réglés aux joueurs de jeux de machines à sous offerts à distance. Ces contributions sont recouvrées et contrôlées selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que le prélèvement prévu à l’article 50 de la loi de finances pour 1991 (n° 90‑1168 du 29 décembre 1990).
« E. Les communes peuvent, par convention, reverser tout ou partie du prélèvement au groupement de communes, à une métropole, à la métropole de Lyon ou au syndicat mixte dont elles sont membres lorsqu’il réalise des actions de promotion en faveur du tourisme.Il est reversé à chaque commune, siège d’un casino autorisé en application de l’article L. 321‑1 du Code de la sécurité intérieure, ou à chaque établissement public lorsqu’il est délégant de la délégation de service public du casino, 10 % du prélèvement opéré par l’État sur le produit brut des jeux offerts à distance réalisé par l’établissement.
« Le montant de ce versement ne peut toutefois avoir pour effet d’accroître de plus de 5 % le montant des recettes réelles de fonctionnement de la commune ou de l’établissement public délégant de la délégation de service public du casino, ce plafond étant porté à 10 % pour les communes mentionnées au V de l’article L. 5210‑1‑1 du code des collectivités territoriales ou pour les communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale faisant application des dispositions de l’article 1609 nonies C du code général des impôts et dont le potentiel financier par habitant est inférieur au potentiel financier moyen par habitant de l’ensemble des communes appartenant au même groupe démographique.
« F. Les prélèvements concernant l’offre à distance des casinos autorisés qui sont opérés au profit de l’État, des communes, des établissements publics de coopération intercommunale, de la métropole de Lyon et des organismes sociaux sont liquidés et payés mensuellement auprès d’un comptable public. Les prélèvements sont soldés par saison des jeux qui court du 1er novembre au 31 octobre de l’année suivante. Aucune compensation n’est admise entre le montant des prélèvements dû au titre d’une saison des jeux en cours et celui dont le casino est redevable pour une saison des jeux antérieure.
« Les prélèvements sont recouvrés et contrôlés selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que les taxes sur le chiffre d’affaires. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ces mêmes taxes.
« Un décret fixe les conditions d’application du présent F.
« V. – Au plus tard six mois avant la fin des expérimentations, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation sur les effets de ces expérimentations, proposant les suites à leur donner. »
La définition des JONUM adoptée par le Sénat regroupe toujours les quatre conditions qui qualifient l’activité de jeux d’argent : une offre au public, un mécanisme faisant appel au hasard, un sacrifice financier et l’espérance d’un gain (les objets numériques sont monétisables).
Les opérateurs illégaux de casinos en ligne pourraient donc intégrer la catégorie des JONUM et se trouver de fait légalisés. Il leur suffirait pour cela de transformer les gains qu’ils offrent aux joueurs en objets numériques.
Malgré la lutte mené par les autorités, l’offre illégale de casinos en ligne a proliféré en France ces dernières années. L’Autorité Nationale des Jeux (ANJ) estime que le nombre de joueurs français sur les sites de casinos en ligne serait compris entre 1,4 et 2,2 millions, contre 500 000 joueurs en 2016[estimation de l’ANJ sur la base de l’étude Harris interactive 2020 sur l’évaluation de l’offre illégale de jeux]. Selon les dernières estimations disponibles – baromètre de l’Association française des jeux en ligne de juin 2023 – plus de 3 millions de Français envisageraient d’y jouer en 2023. Dans son rapport d’activité 2022, le service d’aide SOS Joueurs met également en avant le fait que les jeux du marché non régulé représentent une part croissante du total des appels reçus, atteignant 25,6 % contre 22,9 % en 2021. L’ANJ mène actuellement une étude (à paraître) sur la taille du marché illégal de casinos en ligne en France.
Afin de répondre de manière équilibrée et réaliste aux enjeux d’ordre public et de santé publique liés à cette évolution (protection des mineurs et des publics vulnérables ; prévention du jeu excessif et pathologique), il est proposé d’accompagner ces nouveaux comportements de jeux en menant une seconde expérimentation législative en parallèle de l’expérimentation sur les JONUM.
L’objectif de cette seconde expérimentation législative serait d’autoriser les casinos terrestres à exploiter à distance une offre digitale afin de permettre la canalisation des joueurs français qui fréquentent l’offre illégale vers une offre sécurisée, contrôlée et fiscalisée.
Cette offre digitale correspondrait à des jeux – jeux de contrepartie et machines à sous - dont l’exploitation est réservée aux casinos par la loi et serait liée à l’offre physique des casinos terrestres afin de préserver notamment le retour vers les territoires et de maintenir les emplois de la filière.
En 2022, les casinos ont généré un Produit Brut des Jeux (le PBJ est défini comme comme la différence entre le montant des mises initiales - incluant les sommes engagées par les joueurs et éventuellement les avances initiales pour les casinos et les bonus - et le montant des gains reversés aux joueursJ de 2,488 milliards d’euros. En rapportant le dernier niveau connu de la dépense moyenne annuelle par joueur en ligne[3] au PBJ généré par les machines à sous et les jeux traditionnels dans les casinos en 2022, qui s’établit à 2,242 milliards d’euros, on calcule que l’expérimentation proposée pourrait répondre à la demande de plus de 4,9 millions de joueurs français, soit suffisamment pour permettre la canalisation des joueurs français même selon les estimations les plus hautes de l’offre illégale.
En 2022, les activités terrestres des casinos ont généré 1,390 milliard d’euros de prélèvements fiscaux. Le cadre fiscal proposé pour cette expérimentation reprend celui applicable aux activités terrestres des casinos qui casinos versent chaque année près de 55 % de leurs recettes brutes en prélèvements fiscaux.
Les casinos terrestres exercent leurs activités dans le cadre de délégations de service publics et sont des interlocuteurs naturels des pouvoirs publics notamment en matière de prévention du jeu excessif et pathologique et de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
[1] Estimations de l’ANJ sur la base de l’étude Harris Interactive (2020) sur l’évaluation de l’offre illégale de jeux.
[2] [2] Le Produit Brut des Jeux (PBJ) est défini comme la différence entre le montant des mises initiales (incluant les sommes engagées par les joueurs et éventuellement les avances initiales pour les casinos et les bonus) et le montant des gains reversés aux joueurs.
[3] Rapport annuel 2018/2019 de l’Autorité de Régulation des Jeux en Ligne (ARJEL), p. 13 : « En prenant pour référence la dépense moyenne annuelle par joueur – 450 € – sur le marché agréé, […] ».
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