Publié le 1er juin 2023 par : M. Houssin, M. Bentz, M. Catteau, Mme Dogor-Such, M. Frappé, Mme Lavalette, Mme Levavasseur, M. Marchio, M. Muller, M. Taché de la Pagerie, Mme Loir.
Un décret pris en Conseil d’État fixe les conditions dans lesquelles la possibilité est donnée aux plateformes de rendez-vous en ligne de conditionner toute nouvelle prise de rendez-vous d’un utilisateur n’ayant déjà, sur la même plateforme, par honorer un rendez-vous auprès d’un professionnel de santé. La plateforme pourrait, le cas échéant, exiger l’enregistrement de la carte bancaire du patient afin de pouvoir débiter ce dernier d’un montant à définir en cas de nouvelle absence, sans annulation préalable, à un rendez-vous auprès d’un professionnel de santé. Le montant forfaitaire récolté est réparti entre le médecin lésé, la caisse nationale d’assurance maladie et la plateforme.
Cet amendement souhaite proposer au Gouvernement l’exploration d’une piste de lutte contre les inégalités d’accès aux soins : celle de rendre possible une éventuelle facturation raisonnable des rendez-vous médicaux non-honorés.
Le syndicat de l’union française pour une médecine libre (UFML) a récemment alerté sur le nombre alarmant de rendez-vous médicaux non-honorés, un chiffre estimé par l’Union régionale des professionnels de santé d’Île-de-France à « deux rendez-vous non honorés en moyenne par jour et par médecin, soit plus de 28 millions de rendez-vous gâchés par an en France ».
Cet absentéisme pénalise bien évidemment les médecins eux-mêmes en premier lieu, mais également de nombreux Français qui peinent à trouver un rendez-vous. Dans un département comme celui de l’Eure par exemple, premier désert médical de France, les habitants peinent à trouver des créneaux disponibles et doivent souvent patienter longuement et effectuer un long trajet pour enfin avoir un rendez-vous.
La facilité de prise de rendez-vous, permise par certaines plateformes en ligne, a grandement démocratisé l’accès aux soins pour de nombreux Français. Toutefois, de nombreuses personnes en abusent en prenant des rendez-vous auxquels ils ne se rendent pas, souvent sans annuler au préalable.
Devant l’ampleur du phénomène – qui représenterait le temps de travail journalier de 4.000 médecins – de nombreux professionnels de santé appellent à une pénalité financière.
En l’état, l’article R. 4127‑53 du Code de la santé publique permet aux médecins de facturer uniquement les « actes réellement effectués ». L’article R. 4127‑29 quant à lui précise que « toute fraude, abus de cotation, indication inexacte des honoraires perçus et des actes effectués sont interdits ».
Ainsi, les rendez-vous non honorés représentent un préjudice réel et non indemnisé pour bon nombre de médecins. Afin de limiter ce phénomène, faciliter le travail des médecins, responsabiliser les patients et permettre la libération de nombreux créneaux de rendez-vous, il apparaît nécessaire de fixer une indemnité raisonnable pour ce genre de situation. Récupérer cet argent n’est ni le rôle du médecin, ni celui des organismes de sécurité sociale.
Le code de déontologie médicale belge (article 33) prévoit pour sa part la possibilité d’une indemnisation raisonnable des médecins en cas de préjudices de ce type : « [Le médecin] peut réclamer à son patient un dédommagement raisonnable s’il démontre qu’il a subi un dommage à cause du non-respect de ce rendez-vous. Le patient doit avoir été préalablement correctement informé des conditions d’application d’un tel dédommagement en cas d’annulation tardive ou de non-présentation à un rendez-vous. Cette indemnisation doit rester raisonnable et ne peut en aucun cas atteindre le montant des honoraires prévus pour la prestation. Enfin, si le patient a été confronté à des circonstances particulières, il y a lieu de les prendre en considération. »
Cette indemnisation, raisonnable et plafonnée, semble être le bon dispositif pour responsabiliser les patients, les inciter à ne prendre rendez-vous qu’avec mesure et à prévenir à l’avance en cas d’impossibilité.
Devrait en particulier être explorée la façon dont les plateformes de rendez-vous pourraient demander aux personnes prenant de nouveau rendez-vous par leur biais après en avoir raté un, d’effectuer un dépôt de garantie lors de la prise de rendez-vous et les modalités selon lesquelles cette somme serait partagée en cas de nouvelle absence injustifiée entre le médecin, l’Assurance maladie, et la plateforme.
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