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Xavier Batut
Question N° 44523 au Ministère de la transition écologique


Question soumise le 1er mars 2022

M. Xavier Batut alerte Mme la ministre de la transition écologique sur les conséquences de la prolifération des cormorans sur les exploitations piscicoles. L'arrêté du 26 novembre 2010 fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant les grands cormorans a pour intérêt de limiter les dommages importants aux piscicultures et étangs et de prévenir le risque présenté par la prédation du grand cormoran pour certaines espèces de poissons protégés. Néanmoins, les fédérations départementales de pêches constatent l'accroissement de la population de cette espèce au mépris de la biodiversité aquatique, tandis que les quotas fixés par arrêtés locaux se voient régulièrement annulés en justice, mettant en péril la pérennité du secteur piscicole. Il demande alors un suivi national de cette espèce par l'Office français de la biodiversité afin de considérer une éventuelle évolution du statut de cette espèce. De même, il l'interroge sur une éventuelle sécurisation juridique des arrêtés départementaux de régulation de cette espèce.

Réponse émise le 17 mai 2022

Le Grand Cormoran a un statut d'espèce protégée au niveau européen : au-delà de la protection nationale, il bénéficie du régime général de la protection de toutes les espèces d'oiseaux visées à l'article 1er de la Directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009 relative à la conservation des oiseaux sauvages. En tant qu'oiseau piscivore, sa prédation sur les espèces ichtyennes est un phénomène naturel. Toutefois, afin de contrôler l'impact du Grand Cormoran sur les espèces de poissons protégées dans les cours d'eau et plans d'eau, ainsi que sur les piscicultures en étang, un système dérogatoire à la protection stricte permet de mener des opérations de destruction si les conditions de la dérogation sont réunies. L'arrêté ministériel cadre du 26 novembre 2010 fixe ainsi les conditions et limites dans lesquelles les dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées. Il est complété par un arrêté pris tous les 3 ans, qui fixe les quotas départementaux dans les limites desquelles les dérogations peuvent être accordées. L'arrêté en vigueur pour la période 2019-2022 est celui du 27 août 2019. Il est lui-même décliné en arrêtés départementaux annuels ou triennaux qui doivent définir les personnes habilitées, les périodes et les zones de tir autorisées. Chaque année, le nombre d'oiseaux autorisé à la destruction en application de l'arrêté ministériel du 27 août 2019 est de 50 283 individus, répartis entre 29 004 oiseaux pour la protection des piscicultures et 21 279 pour la protection des espèces menacées sur les eaux libres. Au regard de la population d'oiseaux hivernants sur le territoire métropolitain, le nombre d'oiseaux pouvant être abattus représente plus de 43 % des effectifs estimés. En effet, le dernier recensement de Grands Cormorans hivernants, réalisé en janvier 2021, fait état d'un chiffre de 115 000 oiseaux présents en moyenne. Ce nombre est en hausse depuis le précédent recensement de 2018, qui avait comptabilisé en moyenne 107 000 oiseaux, et la proportion de Grands Cormorans dont le tir est autorisé reste importante. Lors des 2 dernières campagnes de destruction (2019/2020 et 2020/2021), 38 684 et 37 737 oiseaux ont respectivement été abattus, afin de protéger les piscicultures et les espèces de poissons menacées. Depuis un certain nombre d'années, les actions de destruction mises en place annuellement, combinées aux mesures alternatives, sont donc d'une ampleur conséquente afin de limiter l'impact de la prédation de l'espèce sur des espèces de poissons menacées. La question aborde le suivi national du Grand Cormoran : la politique relative à l'espèce qui est menée se fonde notamment sur les recensements nationaux triennaux des populations hivernantes et nicheuses, qui sont réalisés par un réseau de recenseurs dans l'ensemble des départements du territoire métropolitain. Ils constituent en effet l'un des éléments à partir desquels les quotas permettant de déroger aux interdictions de destruction sont définis. C'est le ministère de la transition écologique qui commande ces études coordonnées par un expert du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), afin de mesurer l'évolution des effectifs de l'espèce et d'évaluer, en fonction de l'intensité des destructions, l'impact des tirs sur les effectifs départementaux. Enfin, la question évoque l'annulation d'arrêtés préfectoraux relatifs aux autorisations accordées : il convient de préciser que ces annulations concernent uniquement les arrêtés relatifs aux cours d'eau et plans d'eau, suite à diverses requêtes déposées ces dernières années. À ce jour, 14 arrêtés ont été annulés et 6 contentieux sont en attente de jugement. C'est faute de pouvoir justifier de motivations suffisantes (présence dans les cours d'eau d'espèces de poissons menacées, impact du Grand Cormoran sur ces espèces protégées, mise en œuvre de solutions alternatives non concluantes…) que les arrêtés préfectoraux ont été annulés par les tribunaux administratifs. Dans le cadre de la définition des nouveaux quotas départementaux triennaux dans les limites desquelles les dérogations pourront être accordées pour la période 2022-2025, le groupe national Grand Cormoran, composé de l'ensemble des acteurs concernés par l'espèce et ses impacts, sera consulté prochainement. Il réfléchira notamment à la sécurisation des actes juridiques pour éviter que les futurs arrêtés préfectoraux concernant les eaux libres ne soient à nouveau annulés. L'objectif est ainsi de publier le prochain arrêté permettant de déroger aux interdictions de destruction dans le courant de l'été.

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