Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Réunion du lundi 3 février 2020 à 16h15
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi instituant un système universel de retraite et le projet de loi organique relatif au système universel de retraite

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Mélenchon :

Bien entendu, vous considérerez que c'est une bataille de mots ; mais quelle autre bataille peut-on mener ici ? Dans un Parlement, on parle, et dans un texte, il y a des mots. Nous demandons de la précision et de la sincérité dans les termes.

Monsieur le rapporteur, vous nous avez répondu que ce système, quoique totalement individualisé – raison pour laquelle nous proposons de changer le titre du chapitre Ier –, comporte tout de même des aspects équitables ou égalitaires, et que nous devrions en convenir. Vous évoquiez une pension de retraite minimale de 1 000 euros garantie pour ceux ayant effectué une carrière complète ; naturellement, vous n'êtes pas en état de nous expliquer ce qu'est une retraite complète dans le cadre d'un système qui fonctionne par points. Mais admettons qu'un instant, on en accepte l'idée. Si j'interpellais tout à l'heure notre présidente en tant qu'élue du Pas-de-Calais, c'est parce que je voulais aborder la question des retraites en 1910 et vous faire remarquer, monsieur le rapporteur, quel progrès immense vous nous proposez. À cette époque, l'État garantissait – comme vous-même dites que vous le faites aujourd'hui – une pension de retraite minimale de 180 francs, comparable aux 1 000 euros de votre projet. Vous nous proposez ainsi de travailler treize ans de plus qu'en 1910 pour obtenir ces 1 000 euros. Comment croire dès lors que votre système soit équitable, et universel ? Il fonctionnera à la tête du client.

Je voudrais aussi dire un mot des cadres supérieurs – peut-être cela vous semblera-t-il étonnant de ma part. Si je m'intéresse à eux, c'est que le traitement qui leur est réservé a à voir avec la compétitivité de l'économie française. Sur la partie de leur rémunération supérieure à trois fois le montant du plafond annuel de la sécurité sociale, les cadres ne cotiseront plus en effet qu'au titre de leur participation à la solidarité nationale, à hauteur de 2,81 %. Pour compléter leur retraite, il leur faudra donc s'adresser à des fonds de pension. Cela signifie que leur contribution au bien commun sera supprimée – cela représente 7 milliards d'euros ; et qu'ils vont devoir dès maintenant – et non en 2025 – cotiser à des fonds de pension, dans des proportions qui vont entraîner une diminution considérable de leur participation à l'économie nationale. Par conséquent, ce régime à la tête du client – les cadres décideront chacun, tête par tête, du niveau de leur pension de retraite – n'est pas universel, mais absolument et totalement individualisé.

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