Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi instituant un système universel de retraite et le projet de loi organique relatif au système universel de retraite

Réunion du lundi 3 février 2020 à 16h15

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION SPÉCIALE CHARGÉE D'EXAMINER LE PROJET DE LOI INSTITUANT UN SYSTÈME UNIVERSEL DE RETRAITE

Lundi 3 février 2020

La séance est ouverte à seize heures cinq.

La commission commence l'examen du projet de loi instituant un système universel de retraite (n° 2623 rectifié) (M. Guillaume Gouffier-Cha, rapporteur général, MM. Nicolas Turquois, Jacques Maire, Mmes Corinne Vignon, Carole Grandjean et M. Paul Christophe, rapporteurs).

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Mes chers collègues, nous commençons cet après-midi l'examen des articles des deux projets de loi soumis à l'examen de notre commission spéciale.

Je rappelle que nous avons procédé mardi dernier à une discussion générale avec l'audition du secrétaire d'État chargé des retraites. Mercredi, nous avons entendu les représentants des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs, puis les présidents du Conseil d'orientation des retraites (COR) et du Comité de suivi des retraites (CSR).

Les projets de loi étant inscrits à l'ordre du jour de la séance publique à compter du lundi 17 février, nous débutons donc aujourd'hui l'examen des 21 661 amendements déposés sur le projet de loi instituant un système universel.

En introduction à nos travaux, je veux rappeler que je suis attachée à conduire nos discussions dans un esprit d'ouverture et de conciliation. Nous avons tous intérêt ici à ce que nos débats soient riches, et je m'engage bien sûr à ce que tout le temps nécessaire soit pris pour ce faire. Chaque amendement pourra être défendu ; le rapporteur et, le cas échéant, le Gouvernement apporteront leurs réponses, puis, conformément à l'usage en séance publique, deux orateurs pourront s'exprimer, l'un pour l'amendement, l'autre contre.

Les échanges pourront sans doute parfois être vifs, mais je veillerai scrupuleusement à ce que chacune et chacun puisse s'exprimer dans le calme et dans l'écoute mutuelle. Nous le devons aux citoyennes et aux citoyens qui nous regardent et nous écoutent : nos débats ne seront utiles que s'ils sont de nature à les éclairer sur les enjeux qui sont au coeur de ces deux textes.

Ces enjeux sont à la fois fondamentaux, complexes et disputés. Des désaccords profonds existent, et subsisteront sans doute, mais je compte sur vous pour que la confrontation des projets, des opinions et des idées se déroule dans un esprit républicain.

Avant l'article 1er

La commission est saisie de l'amendement n° 410 de M. Patrick Hetzel.

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Les Français sont inquiets. Ils sont inquiets du niveau des pensions pour les retraités actuels, mais aussi pour les retraités de demain et d'après-demain. Cette inquiétude est légitime car, sans réforme, il y aura un déséquilibre financier. Selon les prévisions du COR, à législation inchangée, le déficit du système de retraite devrait être multiplié par quatre d'ici à 2022 pour atteindre environ 12 milliards d'euros.

Or, ces prévisions sont très largement sous-estimées : j'en veux pour preuve que les dépenses engagées cette année par l'État pour la retraite des fonctionnaires et pour abonder certains régimes spéciaux atteignent déjà 19,5 milliards d'euros pour cette année.

L'amendement n° 410 de notre collègue Patrick Hetzel vise donc à ce que le Gouvernement présente les résultats détaillés d'un audit financier indépendant portant sur les régimes de retraite, avant toute réforme du système de retraite.

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Madame la présidente, mes chers collègues, je vous salue et j'espère que le débat qui s'ouvre aujourd'hui nous permettra d'apporter tous les éclaircissements nécessaires sur ce texte.

L'amendement n° 410 remet en cause les analyses du COR, ce qui ne manque pas de me surprendre, ce conseil étant composé d'experts indépendants. Pour ma part, je considère ses prévisions comme fidèles : si les hypothèses de croissance et d'inflation sur lesquelles elles reposent sont forcément sujettes à discussion, elles constituent une bonne base de travail. À l'inverse, les interrogations que vous formulez viennent en quelque sorte apporter une justification supplémentaire à la future réforme, car c'est bien en raison des évolutions démographiques à venir que le Gouvernement a été amené à proposer cette réforme.

Je suis donc défavorable à cet amendement.

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L'amendement n° 410 vise à mettre en évidence la question de l'équilibre financier. Le problème de notre régime par répartition, qu'il convient de consolider, c'est qu'il y a de moins en moins d'actifs pour de plus en plus de retraités. Les réformes que les majorités de droite et du centre s'honorent d'avoir conduites en 1993, en 2003 et en 2010, ont toutes été motivées par des raisons financières, c'est-à-dire pour sauvegarder le niveau des retraites des Français.

Or, nous nous trouvons aujourd'hui dans une situation aussi paradoxale qu'inacceptable, où l'on engage l'examen d'un texte qui ne comporte pas les éléments financiers absolument indispensables à un texte de cette nature. Il y a de quoi être inquiet quand on sait que, depuis vingt ans, les prévisions du COR ont toujours été trop optimistes. On sait qu'à l'horizon 2025, il faudra faire face à un déficit de l'ordre de 15 milliards d'euros par an, ce qui nécessite de prendre dès maintenant la question financière à bras-le-corps : il y va de notre responsabilité.

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Je rappelle que le Conseil d'État a eu l'occasion de souligner, dans un avis cinglant, l'indigence du travail du Gouvernement et le caractère lacunaire des perspectives financières de ce projet de loi – des constats que nous faisons également, en les regrettant.

Il n'y a, par ailleurs, aucune étude d'impact sur les conséquences globales, macro-économiques et financières, de cette réforme, qui aura nécessairement des incidences sur le taux de chômage, sur la dépense publique et sur le produit intérieur brut (PIB). De ce fait, nous ne sommes pas en mesure de disposer d'une vue complète sur les conséquences potentielles de cette réforme.

Vous évoquez la nécessité de maintenir l'équilibre financier. Or, il est permis de s'interroger sur le fait que cette règle d'or est limitée au seul système de retraite : si elle portait sur l'ensemble de la sécurité sociale, cela permettrait de relativiser ce que vous présentez comme un déficit financier.

Enfin, ceux d'entre nous qui ont lu dans le détail le rapport du COR et le compte rendu de l'audition de son président y ont trouvé la confirmation du fait que le déficit constaté est essentiellement dû aux décisions du Gouvernement. Alors que, pour la première fois, nous avions l'occasion de conduire une réforme guidée par autre chose que par l'urgence financière, vous avez réussi à en faire une réforme purement paramétrique.

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À titre exceptionnel, je vais donner la parole à M. Mélenchon puis à M. Dharréville. Compte tenu du nombre d'amendements que nous devons examiner, je devrai ensuite faire une application stricte du principe selon lequel nous entendons un orateur pour et un orateur contre.

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Si on ne peut pas donner de chiffrage plus précis, c'est qu'il est difficile d'évaluer un problème qui n'existe pas... Si quelqu'un est capable de calculer avec précision ce que seront les résultats économiques du pays en 2025, je le félicite, car la plupart des responsables sont incapables de le faire pour les six mois qui viennent !

Si on regarde de plus près la répartition entre les actifs et les inactifs, on en vient très vite à la conclusion selon laquelle une modification de la répartition de la valeur ajoutée se traduirait par un bouleversement complet des résultats dont se réclame le COR. En effet, 1 % d'augmentation des salaires produit 2,5 milliards d'euros de cotisations supplémentaires à taux de cotisation constant : le problème n'existe donc pas.

Certes, le nombre d'actifs a diminué par rapport au nombre d'inactifs, mais la richesse produite a, elle, augmenté, ainsi que les bénéfices qu'il est possible d'en tirer. Par conséquent, sans rien modifier, on peut parfaitement tenir une position d'équilibre, ce qui fait s'écrouler tout le discours sur lequel repose ce projet de réforme.

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On ne sait plus à quel saint se vouer, puisque si le premier argument invoqué en faveur de cette mesure, résultant des analyses du COR, était l'absence de problème financier, on nous a ensuite affirmé exactement le contraire, à savoir que la réforme était nécessaire parce qu'il y avait un problème financier... Cela dit, quand on examine la réforme qui nous est proposée, on voit qu'il y a une volonté manifeste, non seulement de maîtriser, mais aussi de réduire la part des richesses consacrée au financement de nos retraites : cette réforme a donc bien des objectifs financiers. Nous ne savons pas exactement comment les mesures proposées vont être financées, puisque cela sera décidé dans le cadre de la conférence de financement à venir et que nous en sommes donc réduits à légiférer alors que tous les éléments ne sont pas sur la table.

Enfin, je veux dire à notre collègue Carrez que, si les réformes faites précédemment ont sans doute eu des conséquences financières, elles en ont surtout eu sur la vie de nos concitoyennes et concitoyens, en abîmant considérablement le droit à la retraite.

La commission rejette l'amendement.

Titre Ier LES PRINCIPES DU SYSTÈME UNIVERSEL DE RETRAITE

Chapitre Ier UN SYSTÈME UNIVERSEL COMMUN À TOUS LES ASSURÉS

Section 1 : Principes généraux

Avant l'article 1er

La commission examine l'amendement n° 756 de M. Damien Abad.

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L'amendement n° 756 a pour objet de présenter ce que pourrait être, pour nous, une autre réforme des retraites. D'abord, comme l'a dit Gilles Carrez, l'aspect financier n'a rien de secondaire : au contraire, c'est la clef pour qu'un système de retraite puisse être qualifié de juste. Un système non financé, c'est un système injuste pour toutes les générations qui vont se succéder.

Contrairement à ce que vous affirmez, monsieur Mélenchon, l'aspect financier doit être pris en considération quand on examine le système de retraite. Certes, il est difficile de faire une évaluation extrêmement précise de ce que seront les chiffres dans vingt ans, mais décider de se boucher les yeux et les oreilles n'est certainement pas la bonne façon de procéder.

Pour notre part, nous proposons que l'ensemble des travailleurs français soient couverts par un régime universel de base à hauteur d'un plafond de sécurité sociale, ce régime étant complété par des systèmes complémentaires qui, comme c'est le cas aujourd'hui, prennent en compte les particularités de chaque profession.

Nous voulons d'une part réduire les périodes de transition, d'autre part supprimer les régimes spéciaux – un objectif vers lequel convergeaient les réformes précédentes. Pour ce qui est de la période de transition proposée par le Gouvernement, elle paraît interminable, ce qui fait qu'elle ne veut plus rien dire et qu'elle dévitalise complètement la réforme.

Nous souhaitons également augmenter l'âge de départ à la retraite, ce qui est une mesure plus directe et plus compréhensible par tous que de celle consistant à poursuivre l'augmentation de l'âge légal de départ. La référence à l'âge pivot – une très vieille idée, déjà repoussée en 2010 – constitue une façon hypocrite de présenter les choses, car elle équivaut à une baisse des pensions, à une absence d'indication de l'âge réel de départ en retraite et, à terme, sans doute à une paupérisation des retraités.

Enfin, nous estimons que le système doit être complété par un dispositif de pénibilité différent de celui que vous envisagez car, si l'on veut un dispositif universel, c'est-à-dire qui fonctionne pour tout le monde, quel que soit le métier exercé – en dehors des métiers régaliens –, il faut passer par l'objectivation de l'incapacité à travailler, évaluée par la médecine du travail en fonction de la profession exercée. À défaut, vous créez une multitude de régimes spéciaux, donc d'injustices, à l'intérieur d'un régime universel qui n'en a que le nom.

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Votre amendement contient quelques propositions alternatives, par exemple la réduction de la couverture du système universel à un plafond annuel de la sécurité sociale (PASS) ou l'ajout de régimes complémentaires autonomes.

Il comporte également de grandes similitudes avec le projet que nous présentons – ce dont je ne peux que me réjouir –, à savoir un système universel par répartition, l'extinction des régimes spéciaux, la garantie de la pérennité financière ou la mise en place d'un système universel de pénibilité – autant d'éléments qui ne manqueront pas de susciter des débats, mais sur lesquels nous nous sommes prononcés.

Cependant, je m'étonne de constater que certains de vos amendements – en l'occurrence, les amendements n° 434 et n° 457 – visent à réintroduire les quatre critères qui ont été retirés du compte professionnel de prévention (C2P) alors que vous les considériez naguère comme inapplicables, et que vous aviez d'ailleurs salué leur suppression.

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J'ai lu attentivement votre amendement, mes chers collègues, car le diable se cache dans les détails. En l'occurrence, ce qui pose problème dans votre proposition, ce sont les mots : « de base » : alors que nous sommes favorables à un système universel par répartition, vous prônez un système universel « de base » par répartition, en allant seulement jusqu'à un PASS.

Il y a un véritable désaccord entre nous car, pour ce qui est du système prévu par le projet de loi, il allie l'accumulation de cotisations à des taux différents selon que l'on est salarié, indépendant ou libéral, et des cotisations obligatoires déplafonnées de solidarité, toutes aux taux de 2,81 %, quels que soient le niveau de revenu et le statut. Il s'agit donc d'un système de solidarité et s'inscrivant dans la pérennité, afin d'assurer le niveau de cotisation comme celui des retraites.

Au-delà de trois PASS, nous plafonnons les cotisations, tandis que la solidarité joue toujours au taux de 2,81 %.

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Vous n'avez pas compris notre proposition, monsieur Bridey. Jusqu'à un PASS, nous proposons effectivement un régime de base qui est le même pour le privé, le public et les indépendants. Au-delà, nous proposons des régimes complémentaires fonctionnant par répartition, comme c'est le cas actuellement de l'AGIRC-ARRCO.

Contrairement à vous, nous avons le courage de proposer, dans le droit fil de la réforme de 2010, une augmentation progressive – un trimestre par an – de l'âge légal de départ à la retraite, ayant vocation à aboutir à 64 ans en 2028 et à 65 ans en 2032. Un tel dispositif doit permettre, grâce aux marges de manoeuvre ainsi dégagées, de revenir à l'équilibre et de mettre en place un véritable régime de pénibilité universel : il s'appliquera à tous selon les mêmes critères, que l'on soit couvreur, conducteur de bus de la RATP ou d'une entreprise privée, ou comptable.

Nous rejoignons la proposition du Gouvernement sur la mise en place, permise par le retour à l'équilibre, d'un minimum contributif fixé d'abord à 1 000 euros, puis à 85 % du SMIC. Nous proposons de faciliter l'emploi des seniors par des mesures d'incitation, ce qui constitue un point extrêmement important, et souhaitons nous aussi une meilleure ouverture du régime de cumul emploi-retraite. Comme vous le voyez, nos propositions sont cohérentes, en ce qu'elles sont fondées sur l'équilibre financier du régime. Enfin, nous proposons d'aller plus vite que vous sur le retour au droit commun des régimes spéciaux, que nous souhaitons atteindre en quinze ans alors que vous visez plutôt une durée de vingt-cinq à trente ans.

Je viens de vous décrire notre projet en quelques mots, ce que vous êtes incapables de faire.

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Je veux répondre à notre collègue Woerth, qui a invité le président Mélenchon à envisager avec le plus grand sérieux ce que dit le COR sur le déficit potentiel prévu à l'horizon 2025. S'il ne s'agit pas de mettre de côté un déficit qui serait compris entre 8 milliards d'euros et 17 milliards d'euros, il convient de le relativiser, ne serait-ce qu'au regard de ce que représente l'ensemble du système de retraite, à savoir 330 milliards d'euros. Il ne faut pas non plus oublier d'indiquer l'origine de ce déficit qui, vous le savez comme nous, est une construction politique, puisqu'il résulte du gel du salaire des fonctionnaires, mais aussi des multiples exonérations sociales, dont l'inefficacité en matière d'emploi trouve ici sa confirmation. Les Français découvrent en effet que quand Emmanuel Macron leur annonce qu'il baisse leurs charges, il leur fait en réalité un cadeau empoisonné, puisqu'il s'agit en réalité de diminuer leurs cotisations, donc potentiellement les remboursements de l'assurance santé qu'ils pourraient percevoir ultérieurement – ou les retraites, puisque c'est ce qui nous intéresse aujourd'hui.

Puisque ce déficit est une construction politique, il ne doit pas nous inquiéter outre mesure, puisqu'il y a de l'argent qui pourrait servir à le combler. Vous n'êtes pas sans savoir que, tous régimes confondus, le montant des réserves s'élève à 127 milliards d'euros et qu'il y a 42 milliards d'euros d'encours bancaires pour un régime spécial dont on ne parle jamais, celui des retraites chapeaux. Je pourrais vous donner bien d'autres exemples : ainsi a-t-on appris récemment qu'en 2019, les actionnaires du CAC40 avaient perçu 60 milliards d'euros de dividendes.

Je constate, chers collègues du groupe Les Républicains, que vos préconisations comprennent un point d'accord central avec la majorité. Une fois retiré tout le verbiage qui peut entourer cette réforme de la retraite, il ne reste finalement qu'une mesure d'âge. Faire bosser les gens plus longtemps, voilà la grande affaire, la préoccupation essentielle de ceux qui refusent le partage des richesses, alors que ce principe nous paraît essentiel en matière de retraite.

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Il est intéressant de voir ce débat s'ouvrir par l'examen d'amendements de la droite, mais nous espérons tout de même que cela ne va pas faire de notre débat une sorte de prolongation du congrès interne à la droite sur la meilleure façon de placer le curseur pour casser notre système de retraite... En fin de compte, ce qui pourrait vous mettre d'accord, ce sont les déclarations des dirigeants du MEDEF faites la semaine dernière devant notre commission spéciale, avec un président de l'organisation patronale qui affirmait être prêt à discuter de tout, mais surtout de la manière dont on va pouvoir mettre à contribution les salariés pour financer votre mauvais projet.

En fait, ce n'est pas un débat technique que nous allons avoir dans les jours qui viennent, mais un débat portant sur le projet de société que nous voulons voir mis en oeuvre. Les amendements de la droite d'opposition comme ceux de la droite gouvernementale visent à l'instauration d'un régime qui n'est ni universel, ni juste, ni solidaire, puisque ces amendements ne prennent pas en compte les écarts importants d'espérance de vie entre les salariés en fonction de leur profession, ni ceux qu'on constate entre les cadres et les ouvriers.

Pour notre part, c'est de ça que nous allons vous parler, et pas de l'endroit où il faut placer le curseur pour flinguer plus vite le système de répartition qui fait le socle de notre protection sociale à la française. Vous pouvez compter sur nous pour opposer à votre projet libéral un autre projet de société !

Enfin, je vous dirai, aux uns et aux autres, que c'est l'austérité qui a creusé le déficit. Le COR nous dit que les politiques d'austérité, appliquées notamment aux fonctions publiques d'État, hospitalière et territoriale, expliquent en grande partie le déficit que vous invoquez pour justifier votre mauvais projet. Ces politiques d'austérité, vous les avez menées sans discontinuer depuis que vous êtes au pouvoir, et c'est ce qu'il est de notre devoir de corriger en défendant des propositions alternatives.

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Si vous vous appuyez sur une comparaison des systèmes de 2003 et de 2010 pour défendre votre amendement, monsieur Woerth, cet amendement est une proposition inédite car, pour la première fois, le malus repose sur un report de l'âge de la retraite, et non de la durée de cotisation. Dans un système basé sur la durée de cotisation, on peut estimer qu'un ouvrier ayant cotisé suffisamment longtemps va pouvoir partir en retraite. Avec votre système, une personne ayant commencé à travailler à vingt ans va devoir travailler trois ou quatre ans de plus que quelqu'un qui aurait fait des études et aurait commencé à travailler à 24 ou 25 ans, en pouvant espérer exercer un métier mieux rémunéré. Sur ce point, vous êtes en train de franchir le Rubicon, en proposant de faire reposer tout le système sur le report de l'âge réel de départ à la retraite.

Le point que vous mentionnez et qui nous pose problème, monsieur Woerth, c'est celui du fameux régime transitoire. J'aimerais que le Gouvernement et les rapporteurs puissent nous éclairer sur ce point, car nous n'avons obtenu aucune réponse au cours des auditions : pouvez-vous nous dire si tous les Français, qu'ils soient nés avant ou après 1975, vont être concernés par ce régime transitoire, et si, dès le 1er janvier 2022, ils vont voir à la fois l'assiette et le taux de leurs cotisations évoluer, alors même que vous ne leur avez pas expliqué pourquoi et comment cela se ferait ? Si vous-même et le rapporteur ne nous donnez pas de réponse précise sur ce point, monsieur le secrétaire d'État, vous conviendrez que vous vous apprêtez à entraîner la France vers une destination inconnue et extrêmement dangereuse.

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C'est une situation intéressante que celle consistant à discuter du projet de la droite avant que d'aborder celui du Gouvernement, mais pourquoi pas...

M. Woerth m'invite à faire preuve de sérieux dans l'évaluation de la situation. Je m'en étonne venant de la part d'un président de la commission des finances qui semble se satisfaire d'une évaluation de déficit comprise entre 8 milliards d'euros et 17 milliards d'euros, c'est-à-dire d'une évaluation allant du simple au double : est-ce là une attitude sérieuse ?

Au demeurant, j'ai donné la clef du problème : pour combler le déficit, il suffit de répartir différemment la plus-value – cela ne change strictement rien à la production, seul le partage diffère. Je le répète, 1 % d'augmentation de salaire représente 2,5 milliards d'euros d'augmentation des cotisations, à taux de cotisation constant. Autrement dit, pour 3,2 % d'augmentation de salaire, il n'y a plus de trou... J'estime que mon calcul est sérieux et qu'il mérite mieux qu'une remarque acerbe.

Mais ce n'est pas tout, car voici que la droite nous propose d'évaluer des critères de pénibilité universels. C'est pour le moins surprenant quand on se souvient qu'elle a voté la suppression des critères de pénibilité dans la loi que le Gouvernement a présenté en début de législature... Quant à définir des critères de pénibilité universels, l'ancien ministre de l'enseignement professionnel que je suis vous dit que vous chercherez en vain un critère de pénibilité commun à un ouvrier couvreur, qui travaille sur les toits, et un comptable.

Je suis au regret de vous dire que votre idée consistant à faire progressivement absorber les régimes spéciaux par le régime général ne vaut pas mieux que celle d'une pénibilité universelle, puisque cela revient à dire que ce qui justifie l'existence des régimes spéciaux aurait disparu. Voulez-vous nous dire que vous avez l'intention de supprimer les conditions particulières qui font qu'un égoutier meurt en moyenne dix-sept ans avant un autre ouvrier ? Si tel est le cas, c'est remarquable, mais vous devez savoir que cela va nécessiter un budget d'équipements publics qui ne correspond ni à ce que prévoyez habituellement, ni à ce que vous proposez aujourd'hui dans le cadre du budget général de l'État, monsieur le président de la commission des finances.

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Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites

Je veux d'abord dire à Mme Rabault que la conférence relative à l'équilibre et au financement de notre système de retraite disposera de plusieurs mois de travail pour trouver des solutions. Je veux également la rassurer sur le fait que, contrairement à ce qu'elle a affirmé, il n'est pas prévu de faire évoluer les cotisations en 2022. Je rappelle que le système universel de retraite s'ouvrira en 2022 aux générations à partir de 2004, sur la base du niveau actuel de cotisation.

Si le texte de loi prévoit une évolution, c'est celle de la révision du niveau de l'assiette de la cotisation sociale généralisée (CSG), qui profitera surtout aux professions libérales à partir de 2022.

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Je souhaite tout de même que le ministre précise sa réponse : le déficit constaté par le COR vaut-il bien pour toutes les générations, y compris celles d'avant 1975 ? Par ailleurs, la conférence de financement a-t-elle bien vocation à trouver les modalités de financement de ce déficit-là ?

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Notre projet est très différent de celui présenté par le Gouvernement, même s'ils se recoupent partiellement et portent un diagnostic commun sur certains points, ce dont je me félicite.

Le premier point sur lequel notre projet se distingue du vôtre, c'est qu'il est très clair, alors que le projet que vous présentez aux Français est incompréhensible. Le deuxième, c'est que notre projet est financé, alors que le texte que vous nous soumettez est incomplet : prévoyant une réforme qui va coûter très cher, il ne consiste cependant qu'en une réforme organisationnelle, sans mesures financières, ce qui ne s'était jamais vu ! La troisième différence entre nos deux projets, c'est que le nôtre est plus juste, car il laisse certaines professions s'organiser comme elles le souhaitent, à partir du moment où elles n'utilisent pas d'argent public.

Enfin, pour ce qui est de la pénibilité, il n'y a aucune contradiction dans notre proposition. Premièrement, les amendements que vous avez cités sont proposés par des députés à titre personnel et non des amendements émanant de notre groupe. Deuxièmement, je considère que ce qu'il faut viser, c'est l'incapacité : les trois critères auxquels vous faites référence ne sont pas intégrés dans le compte pénibilité, mais dans l'incapacité. Nous considérons que le compte pénibilité doit être essentiellement consacré à financer la transformation professionnelle, en d'autres termes que l'exposition à des facteurs de pénibilité doit donner lieu à un supplément de formation professionnelle par rapport aux autres travailleurs, afin d'être en mesure d'accéder à d'autres métiers, ce qui est bien plus juste.

Quant à la pénibilité statutaire, attachée à certains métiers, elle est profondément injuste, car elle n'intègre rien. Ainsi, elle ne permet pas de prendre en compte le fait qu'un salarié ait 3 heures de transport par jour pour se rendre sur son lieu de travail, alors même qu'on incite beaucoup aujourd'hui à la mobilité professionnelle, ce qui pourrait nous conduire à engager une réflexion sur l'intégration des questions de mobilité et de trajet – selon qu'on vit au Nord ou au Sud, un salarié n'est pas soumis aux mêmes conditions de vie au quotidien. À un moment donné, on finit par se heurter à une impossibilité de déterminer de façon juste ce qui est pénible et ce qui ne l'est pas. J'estime que ce qui peut répondre à cette difficulté, c'est le recours à la notion d'incapacité, c'est-à-dire le fait d'être usé physiquement par un métier et par l'exposition à certains critères.

La commission rejette l'amendement.

Elle est saisie des amendements identiques n° 22392 de Mme Clémentine Autain, n° 22395 de M. Alexis Corbière, n° 22397 de M. Bastien Lachaud, n° 22399 de M. Jean-Luc Mélenchon et n° 22403 de M. Adrien Quatennens.

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Si nous avions pu amender l'exposé des motifs de ce projet de loi, nous l'aurions fait, car il présente une dimension absolument orwellienne. Nos premiers amendements, les amendements identiques n°s 22392 et suivants, consisteront à modifier l'intitulé du titre Ier, actuellement ainsi rédigé : « Les principes du système universel de retraite ». Lesdits principes n'ayant en effet rien d'universel, nous proposons que le titre Ier soit intitulé de la manière suivante : « Les principes d'un système de retraite individualisé ».

Comme l'a très bien dit le Conseil d'État, « le projet de loi ne crée pas un "régime universel de retraite" [...] À l'intérieur de chacun de ces régimes créés ou maintenus, des règles dérogatoires à celles du système universel sont définies pour les professions concernées. En termes de gestion, sont maintenues plusieurs caisses distinctes [...] ».

Plus fondamentalement, c'est le mécanisme de solidarité qui est atteint par l'instauration d'un régime de points. En effet, le projet gouvernemental va individualiser la retraite en faisant en sorte que chacun perçoive une pension adaptée au plus juste de ce qu'il aura cotisé, ce qui est très éloigné du système imaginé par ceux qui ont créé le régime de retraite universel.

On peut se demander pourquoi il est ainsi décidé de basculer dans l'ère du « chacun pour soi ». La première raison, c'est sans doute le souhait du Gouvernement de faire de la France le bon élève de la règle d'or et de l'austérité budgétaire, ce qui se traduit par une mentalité très contrainte : on n'imagine jamais d'avancer du côté des recettes, la seule solution envisagée consistant à diminuer ce qui est partagé au sein de la société. La seconde, bien sûr, c'est la volonté d'ouvrir la voie aux fonds de pension et autres formes de retraite privée, ce qui est d'ailleurs prévu et encouragé par la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (« PACTE ») que vous avez imposée il y a quelques mois. Même les hauts cadres sont encouragés à faire sécession, puisque pour ceux percevant des revenus à partir de 10 131 euros bruts par mois, la cotisation va tomber de 28 % à 2,8 %, sans ouvrir de droits.

Puisque nous y sommes, appelons un chat un chat, et donnons à votre projet le titre qu'il mérite, celui d'un « système de retraite individualisé ».

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Clémentine Autain a exposé très clairement l'objet de cette série d'amendements identiques dont fait partie l'amendement n° 22395 que je défends. Effectivement, il y a tromperie sur la marchandise dès le titre de ce projet de loi, et nous estimons qu'il convient d'y mettre plus de sincérité en adoptant un autre intitulé, comme nous le proposons.

Ne mentons pas aux Français ! La formulation que nous proposons a le mérite de dire les choses telles qu'elles sont, afin que chacun puisse se faire une opinion.

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Pour défendre l'amendement n° 22397, je vais vous citer un autre extrait de l'avis du Conseil d'État, déjà évoqué par Mme Autain : « Toutefois, le projet de loi ne crée pas un "régime universel de retraite" [...]. Est bien créé un "système universel" par points applicable à l'ensemble des affiliés [...] mais à l'intérieur de ce "système" existent cinq "régimes" [...]. À l'intérieur de chacun de ces régimes créés ou maintenus, des règles dérogatoires à celles du système universel sont définies pour les professions concernées. En termes de gestion, sont maintenues plusieurs caisses distinctes [...]. »

Le Conseil d'État le dit clairement, le système que vous nous proposez n'est pas un système universel. Dès lors, conserver l'expression « système universel » pour désigner ce système dans l'intitulé du titre Ier est un mensonge qu'il convient de corriger.

Je sais très bien que vous vous moquez complètement de l'avis du Conseil d'État, mais celui-ci dit tout de même que l'étude d'impact de mille pages que vous avez produite est truquée, tout comme le titre Ier du projet de loi ! Il convient de corriger ces erreurs dès le début, car elles ont d'importantes conséquences. Ainsi, pour ce qui est des hauts cadres évoqués par Mme Autain, dont le taux de cotisation va passer de 28 % à 2,81 % à partir d'un revenu de 10 131 euros bruts par mois, il faut souligner que cela va nécessiter de compenser 7 milliards d'euros non cotisés. Pour cela, les hauts cadres concernés vont être invités à investir dans les fonds de pension que la loi « PACTE » a justement exonérés d'impôt à hauteur de 1,1 milliard d'euros – une somme qui va, elle, devoir être répartie sur l'ensemble des contribuables. En conclusion, ce que vous voulez faire avec ce régime qui n'a rien d'universel, c'est faire payer les plus pauvres pour les retraites des plus riches.

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Quoi que vous pensiez de nos arguments, vous devriez convenir qu'il y a un devoir de sincérité dans l'énoncé de la loi. Ne trouvez-vous pas qu'il y a quelque chose d'anormal à écrire « système universel de retraite », alors que vous savez aussi bien que nous que ce système n'est pas universel ? Comme mes collègues l'ont exposé précédemment, ce système ne s'applique pas à tout le monde puisque des régimes spéciaux et des caisses spéciales sont maintenus, puisqu'une partie de la population s'en trouve exclue – je veux parler des cadres dont les revenus sont situés au-delà de trois fois le plafond de la sécurité sociale –, ce qui nous vaut une situation assez cocasse. Le MEDEF vient en effet nous expliquer que c'est certainement l'idée la plus lamentable de ce projet, puisque les hauts cadres concernés, qui sont en compétition au niveau international, vont se tourner vers leurs employeurs pour leur demander de prendre en charge les cotisations qu'ils vont devoir verser à des fonds de pension pour essayer de maintenir le niveau de revenu qui était le leur précédemment.

Enfin, à partir du moment où, d'une part, vous prévoyez un blocage d'une fraction de la richesse de la nation produite chaque année, affectée aux retraites, et, d'autre part, vous répartissez les points entre ceux demandant la liquidation de leurs droits, vous créez un régime spécial par génération, où chacun aura intérêt à voir périr ses semblables le plus tôt possible, afin que le point vaille le plus cher possible dans la répartition.

Quoi que vous pensiez de nos arguments, je vous demande de retirer le mot « universel » de l'intitulé du titre Ier, car il n'y a pas sa place : tel est l'objet l'amendement n° 22399. Je vous rappelle qu'au départ, vous disiez tout le temps que pour un euro cotisé, il y aurait les mêmes droits : vous l'avez dit et répété sur tous les tons. Or, ce n'est pas vrai : pour un euro cotisé, quelqu'un de la génération X n'aura pas la même valeur de point que celui de la génération Y, selon que ses revenus sont situés au-delà ou en deçà de trois fois le plafond de la sécurité sociale.

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Comme chacun l'aura compris en écoutant mes collègues défendre cette série d'amendements, il s'agit pour nous de plaider pour la cohérence entre le contenu du texte et ce qu'il prétend être, en l'occurrence son titre. Nous sommes maintenant habitués, depuis deux ans et demi, à ce que la majorité ait toujours soin d'habiller ses lois les plus antisociales d'un emballage très alléchant.

Ainsi, lors de l'un des premiers débats que nous ayons eus en début de législature, le texte qui nous était soumis, portant sur le code du travail, n'était pas intitulé « Détruire le code du travail », comme il aurait logiquement dû l'être, mais « Libérer les énergies » – étrangement, le rapporteur de ce texte était Laurent Pietraszewski, aujourd'hui secrétaire d'État chargé des retraites... L'objet de ce texte était de casser une règle commune s'appliquant à tous, à savoir le code du travail, pour la remplacer par une multitude de régimes spéciaux – autant qu'il existe d'entreprises – dans le cadre d'une négociation effectuée au sein de chaque entreprise. Je considère donc que vous avez été très mal inspirés de parler de « système universel » pour désigner le système de retraite que vous voulez mettre en place, votre acte fondateur n'ayant pas permis de vérifier cette intention.

Surtout, il est désormais avéré que votre projet de loi ne prévoit rien d'universel. Le Conseil d'État parle de cinq régimes, sans compter les nombreuses dérogations, mais au-delà, votre projet va avoir pour effet d'appliquer autant de régimes différents qu'il y a de générations, ni plus ni moins.

Emmanuel Macron pourrait faire preuve de cohérence et d'honnêteté en assumant son projet, c'est-à-dire en reconnaissant qu'il ne souhaite pas qu'une part plus importante de la richesse nationale soit consacrée aux retraites, ce qui nécessite que les Français travaillent toujours plus longtemps. Ainsi, vous n'auriez plus besoin de vous cacher, de truquer les études d'impact et de tromper le Parlement pour imposer un projet ne correspondant pas à vos intentions déclarées. À moins que vous ne soyez vous aussi induits en erreur par les éléments de langage du Président de la République, l'intention de la majorité n'a jamais été d'instaurer un régime universel de retraite. Pour notre part, nous savons très bien que ce n'est qu'une histoire à dormir debout, et que votre véritable intention est de faire travailler les Français plus longtemps.

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Je vais faire une réponse de principe, au risque d'être un peu long – je serai plus concis par la suite.

S'agissant du seul titre Ier, dont j'ai l'honneur d'être le rapporteur, le groupe La France insoumise a déposé environ 4 640 amendements, ou plutôt 270 amendements différents, répétés dix-sept fois. Je ne sais pas si c'est le stigmate d'une méthode éducative qui était autrefois largement répandue et dont je doute de l'efficacité... Je précise que je ne mets pas en cause la liberté d'amender : mon intention est, au contraire, de permettre le débat.

Je ne pourrai pas donner un avis favorable, pour trois raisons.

D'abord, votre opposition de principe à tous les paramètres du futur système ne pourra conduire qu'à le vider de sa substance.

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Je n'y suis évidemment pas favorable.

Ensuite, vous ne souhaitez même pas sauver, dans ce texte, des dispositions dont le caractère favorable est unanimement reconnu. Je pense aux principes de solidarité et d'équité, que vous demandez de supprimer à l'article 1er, mais aussi à des avancées telles que la retraite minimale de 1 000 euros, pour une carrière complète, et l'attribution de points aux aidants. Êtes-vous sincèrement contre ces dispositions ?

Enfin, la vague d'amendements que vous avez déposés aura malheureusement des effets de bord : cela conduira à noyer le débat de fond que nous pourrions avoir au sein de cette commission. C'est d'autant plus regrettable que plusieurs groupes parlementaires, appartenant à l'opposition, sont à l'origine d'initiatives intéressantes. Je les salue d'autant plus volontiers que les délais étaient courts.

Je me contenterai d'indiquer, lorsque nous aborderons les amendements suivants, que mon avis est défavorable, pour les raisons que je viens d'indiquer.

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Nous avons déjà consacré 10 minutes à la question de savoir comment il fallait rédiger précisément le titre Ier – changer son intitulé aurait naturellement un impact phénoménal pour l'ensemble des Français...

Je voudrais souligner en quoi nous allons passer d'un système qui est encore assez individualisé à un système universel. J'ai aujourd'hui 39 ans : j'ai cotisé à quatre régimes de retraite distincts – j'ai été tour à tour aide-soignant dans le public et le privé, médecin hospitalier et parlementaire, et j'ai également travaillé dans une mairie et dans le secteur du commerce. J'ai de grandes difficultés à savoir précisément où j'ai cotisé et quelles sont les règles applicables. Un jeune ayant le même parcours que moi aura demain la certitude que chaque heure de travail effectuée lui rapportera des points pour sa retraite – je peux vous dire qu'un paquet de semaines pendant lesquelles j'ai travaillé ne vont compter pour rien dans mon cas – et que les règles de calcul seront les mêmes. Cela donnera droit à des points, selon un système extrêmement lisible. J'ai du mal à comprendre pourquoi vous pensez que nous allons passer d'un système universel à un système individualisé. Pour moi, c'est précisément le contraire.

Néanmoins, je vous donne raison sur un aspect : nous n'allons pas créer un régime uniforme. Au cours de mes études, j'ai été aide-soignant de nuit, pendant près de trois ans, en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes. Je m'y suis brisé les reins, comme beaucoup de mes collègues, en faisant des toilettes et en amenant des personnes aux WC. Je serais très content qu'il n'y ait pas un traitement uniforme pour ces périodes de travail, qu'elles puissent rapporter davantage en matière de retraite – et qu'elles permettent d'anticiper le départ – que le travail que j'ai pu faire en mairie – c'était passionnant et important pour la collectivité, mais moins fatigant pour le dos et pour le moral. Nous ne prônons pas un système uniforme, mais universel, au sens où les règles seront les mêmes pour tous. J'aimerais avoir 20 ans et pouvoir cotiser dans tous les jobs que j'ai eus – je pourrais partir à la retraite bien plus tôt et dans de meilleures conditions.

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Je voudrais vous soumettre un cas pratique, monsieur le secrétaire d'État. Prenons des jumeaux, dont un est né le 31 décembre 2004 et l'autre le 1er janvier 2005. Pouvez-vous nous confirmer que, même s'ils ont exercé le même emploi pendant la même durée, ils n'auront pas le même montant de retraite ? C'est une question très précise, qui rejoint ce que le président Mélenchon vient de dire : le niveau de la retraite dépendra de la génération concernée, et ce n'est donc pas un système universel.

Puisque vous avez sous-entendu, tout à l'heure, que tous les Français ne seraient pas concernés par le régime de transition, je voudrais rappeler ce qui est écrit à la page 382 de l'étude d'impact. « Les taux et assiettes de cotisations du système universel de retraite entreront en vigueur pour l'ensemble des assurés au 1er janvier 2025. Bien que les assurés nés avant le 1er janvier 1975 ne soient pas concernés par le système universel de retraite, ils seront redevables du même niveau de cotisations que les salariés qui en relèvent. En effet, afin d'éviter une distorsion du coût du travail entre générations, les cotisations doivent être fixées au même niveau pour l'ensemble des assurés. ». Cela signifie, si l'on exprime avec des phrases du type « sujet, verbe, complément » que tous les Français, même ceux nés avant 1975, seront concernés par votre réforme, par l'intermédiaire du régime transitoire, et que le taux et l'assiette de leurs cotisations seront modifiés en 2025 – je me suis trompée tout à l'heure, la date n'est pas 2022. J'aimerais que vous nous répondiez très précisément, monsieur le secrétaire d'État, afin d'éclairer les Français : même ceux qui sont nés avant 1975 seront-ils concernés par votre réforme ?

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Je voudrais répondre à l'interpellation de M. le rapporteur, qui a parlé, à propos des nombreux amendements déposés par La France insoumise, d'une opposition de principe. Supportez que notre opposition ne soit pas de principe, mais politiquement motivée.

D'abord, il ne vous a pas échappé, sauf si vous ne regardez vraiment rien de ce qui se passe à l'extérieur de notre belle institution, que le pays est en ébullition depuis près de soixante jours contre votre projet de loi, que 61 % des Français y sont opposés et que ce texte contredit les engagements du Président de la République. Dois-je rappeler ce qui était écrit clairement, noir sur blanc, dans le programme d'Emmanuel Macron ? « Nous ne toucherons pas à l'âge de départ à la retraite, ni au niveau des pensions ». Vous allez – nos débats vont le montrer – toucher à ces deux éléments : vous comptez modifier le niveau des pensions et pousser les gens à travailler effectivement plus longtemps. Ce n'est donc pas à nous qu'il faut donner des leçons de cohérence. Vous verrez que nos nombreux amendements vont nous offrir – j'en prends l'engagement devant vous – l'occasion d'avoir des débats tout à fait riches et passionnants, qui seront éclairants pour notre assemblée et pour le pays tout entier.

Vous nous dites que nous ne prenons pas en considération les quelques dispositions favorables du texte : vous admettez donc que tout le reste est potentiellement non favorable... Vous nous demandez d'accepter l'idée que l'on va doter d'une gourde les Français que vous envoyez dans le désert.

Nous disons les choses clairement, pour notre part : notre objectif est d'obtenir ce qui est demandé dans le pays, à savoir le retrait de ce texte. Notre démarche est cohérente avec la mobilisation d'une majorité de Français pour le retrait de cette réforme.

M. Véran a mis l'accent sur la lisibilité. Je comprends qu'il ait du mal – on pourrait étudier son cas particulier, pour lui rendre la vie plus facile, s'il le souhaite – mais la lisibilité va se payer très cher dans cette affaire. Les Français devront travailler toujours plus longtemps. La réalité est claire : vous allez diminuer le niveau des pensions, puisque, à un âge donné, il faudra travailler plus longtemps pour atteindre le même niveau de pension qu'auparavant. Je ne crois pas que les Français aient envie de travailler plus longtemps au nom de la lisibilité – c'est l'alibi que vous utilisez !

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Je pense qu'on pourrait veiller, lorsqu'on prend la parole, à ne pas porter un jugement. Il s'agit simplement de présenter des amendements ou de donner des réponses en ce qui les concerne.

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Il est important que l'intitulé du titre Ier reflète bien la réalité. Le Conseil d'État a été très clair : le système « universel » que vous prônez n'a rien d'universel. Il comporte cinq régimes différents et beaucoup de dérogations. On sait – car c'était l'actualité au cours de ces dernières semaines – qu'un certain nombre de catégories actives de fonctionnaires – les policiers, les sapeurs-pompiers, les gendarmes, les agents des services pénitentiaires et le personnel soignant – ainsi que d'autres catégories, notamment le personnel navigant et les routiers, vont bénéficier de dérogations à votre système universel.

Il est important de bien nommer les choses. Vous dites que vous allez supprimer l'ensemble des régimes spéciaux, mais c'est un mensonge. J'ai eu l'occasion d'interpeller Jean-Paul Delevoye, quand il était encore haut-commissaire aux retraites, sur la question du régime spécial des mineurs de fond, qui représente un des 9 milliards d'euros dont vous voulez la suppression. J'ai demandé à Jean-Paul Delevoye si ce régime spécial, qui a été créé en 1946 et qui relève du droit à la réparation pour les anciens mineurs et les veuves, lesquelles touchent des petites pensions de réversion et vivent dans la précarité, allait être supprimé. Il m'a évidemment répondu que non, que la solidarité nationale continuerait à jouer pour payer les pensions des anciens mineurs et des veuves, à hauteur de 1 milliard d'euros. Ce régime spécial va perdurer. L'intitulé du titre Ier ne correspond donc pas à la réalité.

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Il n'est pas question de voter en faveur de ces amendements. Ce qui est proposé n'est pas un système individualisé : il se veut universel – qu'il le soit ou non, c'est une autre question. L'individualisation serait la capitalisation – ce n'est pas le système par répartition dans lequel on se place.

L'universalité qui nous est proposée est inutilement large. Elle ne sert à rien sinon à rendre totalement illisible le système. Nous avons besoin d'un socle d'universalité et, ensuite, d'une prise en compte de la réalité des carrières. Il faut faire preuve d'un peu de bon sens : la retraite est le miroir de la carrière.

Si l'on veut éviter que ce soit totalement le cas, il faut instituer une retraite complètement sociale, une sorte de prestation sociale. Il existe déjà des mécanismes sociaux extrêmement forts dans le système actuel de retraite. Si on peut les compléter, tant mieux, mais l'universalité que vous défendez est totalement trouée – un peu de la même façon que l'impôt est troué par des niches fiscales. Ce que vous proposez n'a donc plus rien d'universel.

Vous dites que le système sera universel mais pas uniforme. Soyons honnêtes : si un Français comprend ce que cela veut dire dans son cas, il est vraiment très fort. Il y a un énorme problème de lisibilité dans cette réforme. Vous voulez embrasser à peu près tous les sujets, mais vous créez peu à peu des niches qui ressemblent, à peu de choses près, à celles qui existent aujourd'hui. Certaines personnes partiront à la retraite dans des conditions différentes : un euro cotisé ne donnera pas les mêmes droits dans tous les cas.

Pour ce qui est de M. Véran, je suis persuadé qu'il y aura vraiment très peu de différence en ce qui concerne le niveau des pensions versées lorsqu'il prendra sa retraite – dans très longtemps, et ce sera probablement à l'âge de 67, 68 ou 69 ans.

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Je voudrais prolonger ce qu'a dit Adrien Quatennens à propos de ce que vous appelez de l'obstruction. Nos amendements sont-ils techniques ? Lisez-les : ils ont un caractère politique, et ils répondent, par leur nombre, à la situation actuelle.

Il existe un décalage entre ce qui se passe dans notre société – elle est en ébullition, en colère, contre la réforme que vous voulez imposer et que le Gouvernement veut faire passer en force – et le recours à la procédure accélérée, qui consiste à s'asseoir complètement sur la contestation sociale et à mépriser le travail du Parlement. Cette procédure réduit la durée de l'examen du texte – nous ne savons même pas si nous serons capables d'aller jusqu'au bout en commission avant la date prévue pour la séance publique.

Nous avons reçu, en tout, 70 articles de loi et une étude d'impact complètement truquée et faussée. Il a fallu avaler tout cela et amender en une semaine, week-end compris. On sait, par ailleurs, que c'est un texte à trous qui prévoit 29 ordonnances, réparties entre 23 articles. Ces ordonnances concernent des piliers, des points tout à fait structurants de cette transformation de notre système de retraite, comme l'a relevé le Conseil d'État.

Nous estimons que ce n'est ni sérieux, ni légitime, ni respectueux de la colère sociale. La majorité des Français expriment, d'enquête d'opinion en enquête d'opinion, leur rejet de ce projet. C'est pourquoi nous avons recours à une méthode inédite d'interpellation. Il s'agit de faire écho à ce qui se passe dans le pays réel, au-delà de l'hémicycle et du ronron assez étrange, très déphasé, que l'on entend ici.

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J'ai bien noté votre prudence, madame la présidente, à propos des appréciations portées sur les amendements, et je l'approuve.

Ce que nous faisons n'est pas de l'obstruction. C'est une réponse à une situation que nous n'avons pas choisie. Je veux parler – mes collègues l'ont dit à plusieurs reprises – de cette étude d'impact de mille pages, de ce projet de loi à trous et de la procédure accélérée. Il faut bien que nous jouions notre rôle, qui consiste à être les tribuns du peuple. Je ne dis pas que tout le monde est d'accord avec nous – ce n'est pas la question –, mais il se trouve qu'une fraction non négligeable de notre peuple est prête à subir des souffrances considérables, qu'elle s'est imposées pendant cinquante jours de grève – des feuilles de paie de zéro euro à Noël et au mois de janvier. Quoi que vous pensiez, souvenez-vous de cette réalité et de ces souffrances. C'est cela que nous exprimons avec nos moyens, en tant que parlementaires. Le Parlement est un terrain d'insoumission comme un autre.

Le rapporteur a tort de croire que parler ne sert à rien. C'est souvent l'illusion technocratique de ceux qui pensent que la démocratie est un vain bavardage, qui prend du temps. Regardez l'évolution des points de vue qui a déjà eu lieu en à peine un quart d'heure. M. Woerth dit, comme nous, que ce régime n'est pas universel et qu'un euro cotisé ne donnera pas droit aux mêmes avantages pour tout le monde.

Reprenons-nous à notre compte l'équité ? Vous mésestimez, monsieur, un siècle et demi de querelles entre nous. Nous ne sommes pas des partisans de l'équité : nous voulons l'égalité, ce qui n'est pas du tout pareil. L'égalité signifie les mêmes droits pour ceux qui ont des besoins semblables.

En ce qui concerne la lisibilité, il n'existe aucun problème, hormis pour ceux qui considèrent les régimes spéciaux depuis la planète Mars. Il suffit de téléphoner à n'importe quel agent d'un régime de retraite, que l'on relève du secteur privé ou de l'IRCANTEC, et on vous explique en 10 minutes votre situation.

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Le débat que nous avons n'est pas purement formel, puisqu'il s'agit de déterminer l'objectif poursuivi. Il est intéressant d'essayer de se mettre d'accord sur ce que nous lisons dans le texte – il y a manifestement une divergence d'analyse.

On voit bien que l'intitulé du titre Ier est un slogan, utilisé maintes fois, dans l'hémicycle et ailleurs, pour expliquer, à lui tout seul, le sens de la réforme que vous proposez. Nous contestons que ce projet soit universel. On ne peut pas le parer de cette belle vertu. En réalité, vous cherchez à disqualifier le régime existant et toute autre proposition, qui ne serait pas universelle, par définition, puisque la vôtre l'est... C'est une stratégie de marketing que vous ne devriez pas vous permettre d'utiliser dans le contexte du discrédit, important, qui pèse sur la parole gouvernementale et, plus largement, sur certaines paroles politiques.

Nous appelons à faire preuve de sincérité. Il a été démontré que ce régime de retraite n'est pas universel – il existera une multiplicité de régimes, en réalité –, que c'est une logique d'individualisation, visant à rendre chacun comptable de son propre sort, qui prévaut et qu'il n'y aura pas, au bout du compte, de retraite garantie – le système, si on essaie de préciser l'analyse, est universellement fluctuant.

À chaque fois qu'une objection a émergé fortement dans le débat public, vous avez fini par dire que vous la prenez en compte, mais sans le faire réellement – les mobilisations, d'ailleurs, n'ont pas cessé. L'affichage que vous avez fait pose un problème de fond : il y a un décalage avec le contenu du texte. Ces amendements, en fin de compte, visent à vous éviter de faire de la publicité mensongère.

La commission rejette ces amendements.

Elle examine en discussion commune l'amendement n° 600 de M. Jean-Louis Masson ainsi que les amendements identiques n° 20542 de M. Sébastien Jumel et n° 21544 de M. Pierre Dharréville.

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S'agissant toujours de l'intitulé du titre Ier, l'amendement n° 600 tend à parler non pas d'un système « universel de retraite » mais d'un système « de retraite par répartition et par points ». Le mot « universel » semble profondément inapproprié : cela ferait croire aux Français que le système s'applique à tous les cas. Prenons garde au décalage, que l'on observe souvent en cette période jupitérienne, entre la sémantique utilisée et la réalité. Il n'y aura pas un même régime pour tous – il est faux de le dire. Au sein des cinq régimes instaurés par ce projet de loi, tout le monde ne sera pas soumis aux mêmes règles. Nous proposons de définir le système d'une manière objective, en fonction de ses caractéristiques principales, et incontestables : ce sera un système de retraite par répartition et par points.

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Quand on présente des budgets dans les collectivités, il faut veiller à ce qu'ils soient sincères, équilibrés et responsables. Votre projet n'est rien de tout cela.

Il est d'ailleurs rare, lorsque les libéraux proposent un mauvais projet, qu'ils disent aux Français qu'ils vont en prendre plein la trombine, qu'on va les enfumer et que ce sera finalement moins bien qu'avant. Il suffit de regarder les différents textes que vous avez fait adopter depuis le début de la législature pour voir à quel point vos éléments de langage ont toujours utilisé des mots volés. C'est aussi le cas avec cette réforme. Il est question de solidarité, de juste redistribution, d'équité, de simplicité, de lisibilité et d'universalité, mais ce sont des mots volés.

Nous avons déposé l'amendement n° 20542 dans une logique de cohérence et de sincérité. On connaissait déjà les « Playmobil ». On sait maintenant qu'il en existe sans coeur. (Protestations sur de nombreux bancs.)

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J'ai demandé que l'on respecte tout le monde. Commencez par le faire à notre égard. Il n'y a pas de gens sans coeur ici.

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J'ai le sentiment de respecter les familles endeuillées qui ont suivi un précédent débat. (Mêmes mouvements.)

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Lorsque nous abordons ce texte inéquitable au sujet des retraites, je pense aux doigts broyés, aux visages abîmés, aux salariés des verreries qui n'ont pas la même espérance de vie que les banquiers chez Rothschild que vous représentez.

Notre amendement a pour objet d'annoncer la couleur tout de suite, dès l'intitulé du titre Ier. Vous êtes pris en flagrant d'insincérité.

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Je voudrais qu'on ne se méprenne pas sur l'objet de l'amendement n° 21544 : nous ne souhaitons évidemment pas poursuivre l'objectif indiqué. Nous voulons vous aider à préciser la vraie nature de la réforme que vous proposez. Votre projet n'est pas un système universel, mais il a provoqué un tollé qui prend cette dimension, car il concerne tout le pays. Des gens venant de divers horizons se mobilisent parce qu'ils ne veulent pas de la proposition qui est sur la table. Vous devriez les entendre.

J'ai eu l'occasion de dire que ce n'est pas un projet universel, mais « miniversel ». Aucune des promesses que vous avez faites – créer un système plus lisible, plus juste et plus sûr – n'est tenue. Il faut être clair : adoptons un intitulé conforme aux intentions de ce projet de loi et aux résultats auxquels il conduira.

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Vous dites que ce projet n'est pas universel. Il serait même, selon M. Jumel, inéquitable. Nous n'allons pas philosopher à l'infini sur la question de l'universalité : la question est de savoir si un progrès notable va être réalisé ou non. Quand on voit qu'il y a, aujourd'hui, au moins quarante-deux façons de calculer les retraites, que des jumelles ayant accouché bénéficient d'une majoration de huit ou de deux trimestres selon qu'elles travaillent dans le privé ou dans le public, que la prise en compte du chômage n'est pas la même selon les régimes, que la pension de réversion peut être calculée de treize manières différentes ou qu'on applique au salaire moyen un taux de 50 % dans le régime général et de 75 % dans la fonction publique – et on pourrait continuer longtemps la litanie des exemples –, on comprend que ce projet fera gagner beaucoup en universalité. Celle-ci ne sera peut-être pas parfaite – nous pourrons sans doute l'améliorer durant nos débats – mais l'objectif est de réaliser un très grand pas en avant dans ce domaine.

J'émets un avis défavorable aux amendements.

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Je voudrais redire les choses simplement en ce qui concerne l'universalité. Les projets de loi que nous étudions visent bien à remplacer les quarante-deux régimes de retraite actuels par un nouveau système s'appliquant à tous dans des conditions rénovées afin de corriger les nombreuses injustices qui existent. La fin progressive des régimes spéciaux, devenus synonyme d'inégalité et d'injustice, est actée par ces deux projets de loi qui proposent une réforme systémique, ambitieuse et conforme au programme présidentiel.

La création d'un système universel de retraite dans lequel chacun bénéficiera exactement des mêmes droits contribue à construire un modèle de protection sociale ancré dans le XXIe siècle. L'universalité du nouveau système rendra notre protection sociale plus durable et plus forte car elle cessera de dépendre, comme c'est le cas aujourd'hui, de la démographie des différentes professions. Parler d'universalité n'empêche pas, évidemment, de mener des réflexions sectorielles pour prendre en compte les spécificités de chacun, grâce à des aménagements adaptés.

Il est temps de clarifier et de stabiliser les règles du jeu, une fois pour toutes, en instituant, d'une manière effective, un système universel juste, transparent et fiable.

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Il existe un principe constitutionnel très important : il faut que les citoyens puissent comprendre la loi. Celle-ci doit être rédigée d'une manière compréhensible, sans chercher à abuser des Français. C'est l'enjeu du débat sur le titre Ier – il ne s'agit donc pas d'une question secondaire.

Il paraît acquis que ce système ne sera pas universel : tout le monde ne bénéficiera pas du même régime. Pourquoi, dès lors, mentir sur le nom ? Accepter un titre erroné entacherait l'ensemble des travaux qui vont suivre. Nous avons choisi d'être très méticuleux et nous avons déposé beaucoup d'amendements car les détails comptent. Nous sommes à un moment où on ne peut pas mentir aux Français. La manière dont ce débat est ordonné est un facteur de trouble.

Je voudrais également souligner, même si Mme Rabault n'appartient pas au même groupe que moi, que sa question, assez précise, n'a eu strictement aucune réponse pour le moment. Avouez que vous ne contribuez pas à la clarté de nos échanges. Cela en dit long sur la difficulté que vous éprouvez, peut-être, à justifier un texte injustifiable.

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L'amendement n° 600 semble apporter des précisions sur la réalité du texte, mais je dois dire que je suis un peu gêné par l'idée que la retraite par répartition serait maintenue en toutes choses.

Je vais vous donner un exemple simple, qui concerne la baisse du plafond – il sera ramené de 8 à 3 PASS. Le principe de la répartition est que les actifs cotisent pour ceux qui sont inactifs. Du fait de la baisse du plafond, vous allez rendre aux futurs retraités entre 4 et 5 milliards d'euros de cotisations sociales chaque année, mais il va falloir, pendant la durée de la transition, que les actifs continuent à financer 3,7 milliards d'euros pour ceux qui ont cotisé jusqu'à 8 PASS dans l'ancien système. Il y aura donc une distorsion sur le plan de la répartition.

Le problème est qu'on ne dit pas la vérité. Beaucoup de débats sont interdits et le secrétaire d'État ne répond même pas à la question portant sur les générations antérieures à 1975. Nous devrions avoir des éléments à propos des personnes nées entre 1958 et 1975, mais rien ne figure dans l'étude d'impact. La réalité, s'agissant de la période de transition et de la résorption du déficit, est que les mesures d'ajustement vont peser prioritairement là et que cela va faire mal.

J'ai pensé au début, quand vous avez parlé d'un système plus juste, plus équitable et plus lisible, qu'il fallait faire preuve d'un peu de considération pour ce que vous proposez. La réalité objective, quand on compare ce que produira le système dans quelques années et les conditions dans lesquelles les Françaises et les Français partent aujourd'hui à la retraite, est qu'il faudra trois années de plus avant de partir à la retraite et qu'il y aura une baisse du taux de remplacement d'environ 30 %. La réalité, c'est que ce sera moins bien demain qu'aujourd'hui, mais vous ne le dites pas. C'est également vrai pour le minimum contributif : on se dit que 85 % du SMIC, finalement, ce n'est pas mal, sauf que ce sera à 64 ou à 65 ans, alors qu'aujourd'hui c'est 75 % à 62 ans. Et si on part à 62 ans, on perdra 15 % dans le système futur. Votre projet est plein de duperies.

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Oui, le système que nous voulons créer est plus solidaire, plus équitable et plus juste, du point de vue des intentions et des résultats auxquels on aboutira. Les chiffres le démontrent clairement.

Prenons le niveau moyen des pensions avant et après la réforme, pour une génération donnée : après la réforme, les 25 % de retraités ayant les pensions les plus faibles verront le niveau de celles-ci augmenter de 30 %. L'écart entre les 10 % les plus pauvres et les 10 % les plus riches passera d'un facteur de 7 à un facteur de 5. C'est donc une réforme puissamment redistributive.

Prenons aussi le cas des femmes : est-il normal que leurs pensions soient plus faibles, de 42 %, que celles des hommes ? Nous proposons une compensation à 100 % des congés maternité, une majoration des pensions pour chaque enfant, dès le premier, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, et de nouveaux droits pour les aidants, qui sont majoritairement des femmes à l'heure actuelle. Là aussi, on peut parler d'égalité et de justice. Le bilan redistributif de notre réforme est très bon.

Je voudrais également évoquer le versement d'au moins 85 % du SMIC net en cas de carrière complète : c'est un réel avantage du futur système.

Vous avez parlé de personnes partant à la retraite trois ans plus tard ; pour ma part, je voudrais revenir sur les carrières heurtées – 15 % des Français et 20 % des femmes partent aujourd'hui à 67 ans parce qu'ils n'ont pas réussi à avoir des carrières complètes. Demain, ces personnes pourront partir trois ans plus tôt.

C'est le système actuel qui est inéquitable : il fait de la redistribution à l'envers. Notre réforme a pour but de corriger cette injustice. Le futur système sera très favorable à ceux qui touchent les pensions les plus faibles, vous le savez bien.

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Mme Fabre prend pour des paroles d'évangile quelques exemples bien choisi qui figurent dans l'étude d'impact. Celle-ci comporte des éléments financiers lacunaires, comme l'a souligné le Conseil d'État.

Il ne faut pas parler, et c'est ce qui justifie l'excellent amendement de notre collègue Jean-Louis Masson, d'un régime universel de retraite mais d'un système universel de retraite. Il y aura, à l'intérieur de ce système, au moins cinq régimes différents – celui des salariés et des indépendants, celui des fonctionnaires, des magistrats et des militaires, celui du personnel navigant aérien, celui des salariés agricoles, celui des indépendants agricoles et celui des marins.

Selon l'avis du Conseil d'État, il y aura aussi tout un ensemble de dérogations au sein de ces multiples régimes. Prenons les régimes spéciaux, qui feront l'objet de mesures temporaires – mais c'est du temporaire qui va durer des décennies. Le nouveau système s'appliquera pour les agents non pas nés à partir de 1975 mais de 1980 pour l'ensemble du personnel de la RATP et de la SNCF, et à partir de 1985 pour les conducteurs : le nouveau régime ne s'appliquera qu'à 2,5 % des conducteurs de RER en poste aujourd'hui. Il y a une multitude de situations différentes : il est donc abusif de parler d'universalité.

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Je voudrais répondre au rapporteur, qui a dit qu'on n'allait pas philosopher pendant des heures. Je vous propose de regarder un cas très pratique qui montre que le système n'est pas universel et qu'il est en outre injuste ou, comme l'ont dit nos camarades communistes, inéquitable. Prenons une génération pour laquelle l'âge d'équilibre serait de 65 ans. Une ouvrière et une cadre travaillent, toutes les deux, quarante-trois ans : l'ouvrière, ou l'ouvrier, commence à travailler plus tôt, à 20 ans – c'est propre à ce type de carrière –, et part à la retraite à 63 ans ; dans le système à points, compte tenu de l'âge d'équilibre, cette personne a deux ans de décote, ce qui signifie 10 % de pension en moins ; le ou la cadre, qui travaille aussi quarante-trois ans, mais qui est plutôt entré sur le marché du travail vers 24 ans, parce qu'il ou elle a fait des études, aura donc, en partant à la retraite à 67 ans, une surcote de 10 %. Quand on regarde l'écart entre les ouvriers et les cadres en matière d'espérance de vie – il est de six ans – on voit bien l'injustice profonde du système que vous voulez créer.

Comme j'aime aussi la philosophie, permettez-moi de citer Barbara Stiegler. Elle a comparé le régime que vous proposez à un jeu vidéo : en effet, chacun devra gagner, dans les différents temps de son existence, des points de vie ou de survie et on ne pourra s'en prendre qu'à soi-même si le score est trop faible. Il y a un premier jeu, dans votre système de répartition, qui est lié à la dévaluation du point – on ne sait pas, quand on commence, quelle sera la valeur de rachat du point à la fin – mais il existe aussi une autre partie qui se joue sur le marché de la capitalisation et qui fera de tout rentier un acteur compétitif. Voilà votre système.

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Je suis déçu par la manière dont nos travaux débutent. Peut-on, monsieur le rapporteur, mesdames Fabre et Limon, sortir des éléments de langage, de la com, pour parler très sincèrement des amendements ? Je crois que nous sommes là dans ce but. J'ai défendu une rédaction à laquelle vous n'avez pas réagi. Peut-on travailler sur le fond ? Nous sommes ici, en tant que législateurs, pour choisir les bons mots. Ils doivent correspondre à ce que vous voulez faire. Puisqu'il n'y aura pas les mêmes droits pour tout le monde, le terme « universel » est inapproprié : il faut trouver autre chose. Je vous demande de réagir à la proposition que j'ai faite. Si le débat portait sur le fond des amendements et de la réforme, nous ne pourrions qu'y gagner.

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Je crois, s'agissant de la qualité des débats, qu'il faut bien se comprendre. J'ai vu tout à l'heure que vous réagissiez vivement aux propos de notre collègue Sébastien Jumel au sujet d'un vote assez désastreux qui concernait le deuil des enfants. Je vous comprends : personne n'a envie de se faire accuser d'inhumanité. Vous ne le souhaitez pas plus que d'autres. Vous devez entendre, néanmoins, que nous nous inscrivons dans une longue tradition lorsque nous nous exprimons. Nous nous identifions non à ceux qui vont le mieux mais à ceux qui vont le moins bien et à ceux qui sont les moins défendus. Nous parlons – c'est notre rapport avec le passé et le futur – en pensant aux 565 personnes qui meurent au travail tous les ans et aux professions dangereuses. La lutte de notre camp politique s'identifie à la volonté de faire diminuer le temps de travail dans la journée, la semaine, le mois, l'année et la vie.

Vous êtes une élue du Pas-de-Calais, madame la présidente. C'est dans ce département que la catastrophe de Courrières a eu lieu en 1906. Vous la connaissez, comme nous tous ici. Ceux qui avaient à gérer cette catastrophe furent soupçonnés d'avoir abandonné les travailleurs à leur triste sort et de ne pas avoir conduit les recherches assez longtemps. Ils n'étaient pas contents, eux non plus, qu'on les soupçonne. C'est de la colère et de la révolte nées à ce moment-là – il y a eu une série de grèves pendant les années 1906 et 1907 – que sont issus le ministère du travail et, en 1910, une loi sur les retraites, qui prétendait également être universelle. Elle a instauré un régime par capitalisation et tolérait l'existence de régimes particuliers. Le grand Jaurès et ses amis n'en voulurent qu'à condition que l'on étende bientôt les bénéfices du système, mais tout le monde était d'accord pour dire que cela ne valait rien. On a dû attendre la Libération pour qu'enfin, grâce aux ouvriers communistes et à la CGT, on puisse installer un régime par répartition,..

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..qui a d'abord été géré par les seuls ouvriers. Ne l'oubliez pas.

Je voudrais enfin souligner que le rapporteur ne tient aucun compte de nos propos. Nous disons qu'il n'y a pas quarante-deux régimes spéciaux : il en existe vingt-trois selon le COR et dix-huit selon le ministère du travail. Pourquoi répéter les mêmes éléments de langage, alors que vous savez qu'ils sont faux ?

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Je vois bien le piège du débat dans lequel nous nous engageons. On voudrait laisser penser qu'il y aurait, d'un côté, les défenseurs du statu quo et, de l'autre, les partisans d'un nouveau système mirifique, mirobolant ou miraculeux, qui réglerait tous les problèmes. Je crois que c'est un plus compliqué, et il faut que le débat ait lieu.

Vous accusez de tous les maux le système actuel. Je pense qu'il a permis des progrès sociaux immenses – il y a eu une déflagration sociale quand il a été mis en place : il a ouvert des horizons inattendus et même impensés. J'appelle à faire preuve d'un peu de mesure dans la manière dont on envisage les choses.

Le système actuel n'a pas été appliqué comme on l'avait souhaité, puis il a été largement affaibli par les réformes qui se sont succédé. Une partie de ce que vous dénoncez résulte de ces réformes, qui ont abîmé le droit à la retraite dans notre pays. Il existe bien d'autres façons d'y remédier : nous savons qu'il existe certaines insuffisances et nous défendons des propositions pour garantir de meilleurs droits en matière de retraite.

Les propositions que vous avez mises sur la table, de votre côté, ne correspondent pas à cette logique : contrairement à ce que j'ai entendu dire, il n'y a pas de progrès au rendez-vous. En ce qui concerne la pénibilité, vous jouez au bonneteau – c'est votre habitude – ou plutôt vous donnez d'une main et vous reprenez de l'autre. Il en est de même pour les chômeurs : où est l'amélioration à leur égard dans ce que vous proposez ? Il n'y en a pas. En ce qui concerne l'affaire des 67 ans, il suffit de supprimer la décote. Pourquoi ne le faites-vous pas ? Vous dites que vous allez diminuer l'écart entre les pensions les plus basses et les plus hautes, mais c'est faux. Il n'y aura plus de prise en compte entre 3 et 8 PASS. Je vous mets en garde : le taux de remplacement est un élément central, mais il n'en est pas question dans votre projet. Vous fixez un objectif très ambitieux lorsque vous parlez d'universalité mais vous ne vous en donnez pas les moyens.

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Je voudrais revenir sur un point précis évoqué par notre collègue Catherine Fabre, concernant les droits familiaux. Elle a dit, comme le répètent les ministres, que le nouveau système serait plus avantageux pour les familles. Or je suis persuadée que cette information est erronée. Le système actuel reconnaît en effet deux dispositifs : à la fois une majoration de trimestres accordée dès le premier enfant – avec une durée différente que l'on travaille dans le privé ou dans le public, puisque la majoration est de huit trimestres par enfant dans le privé, contre quatre trimestres dans le public –, et une majoration de la pension de retraite à partir du troisième enfant. Vous proposez une majoration de la pension de retraite de 5 % par enfant, dès le premier enfant. Mais je ne suis pas du tout certaine que cette proposition soit favorable aux familles comptant trois enfants et plus ; cette question mérite d'être approfondie.

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Monsieur le secrétaire d'État, je souhaiterais que vous répondiez à la question très importante posée par Clémentine Autain, à partir de l'exemple d'un ouvrier et d'un cadre. L'ouvrier commence à travailler à 20 ans, cotise quarante-trois ans, et pourrait donc prendre sa retraite à 63 ans mais l'âge d'équilibre étant fixé à 65 ans, il va subir une baisse de pension de 10 % du fait de la décote que vous avez instaurée sur l'âge réel de départ à la retraite. Le cadre, quant à lui, commence à travailler à 24 ans parce qu'il ou elle a fait des études ; au bout de quarante-trois ans de cotisation, il arrive à 67 ans, c'est-à-dire deux ans après l'âge d'équilibre, et va donc bénéficier d'une surcote de 10 % sur sa pension de retraite. Est-ce bien cela ? Vous pouvez répondre par oui ou par non. Mais si tel est bien le cas, comment pouvez-vous appeler cela une mesure de justice ?

La commission rejette successivement les amendements.

La commission examine les amendements identiques n° 22321 de Mme Clémentine Autain, n° 22326 de M. Bastien Lachaud, n° 22328 de M. Jean-Luc Mélenchon et n° 22332 de M. Adrien Quatennens.

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Il s'agit de rédiger ainsi l'intitulé du chapitre Ier du titre Ier du projet de loi : « un système créant un régime de retraite par assuré, système souffrant lui-même de nombreuses exceptions ». L'amendement n° 22321 vise à la clarté et à l'intelligibilité de la loi. Nous estimons en effet que les intitulés choisis ne correspondent pas au contenu du projet de loi. Je sais bien qu'en Macronie, « la guerre, c'est la paix », mais il nous paraît juste de remettre à l'endroit ce que vous mettez systématiquement à l'envers.

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L'amendement n° 22326 vise à réécrire l'intitulé du chapitre Ier. Nous substituons aux mots « un système universel commun à tous les assurés », les mots « un système créant un régime de retraite par assuré, système souffrant lui-même de nombreuses exceptions ». Je me réfère à l'avis du Conseil d'État – page 16, paragraphe 28 – qui « relève enfin que l'objectif selon lequel ‘‘chaque euro cotisé ouvre les mêmes droits pour tous'' reflète imparfaitement la complexité et la diversité des règles de cotisation ou d'ouverture de droits définies par le projet de loi ». Il explique bien que ce système n'est pas commun à tous les assurés, puisque les droits ouverts ne seront pas les mêmes pour tous. En modifiant l'intitulé du chapitre, il s'agit donc de le clarifier et de le rendre plus compréhensible. Il faut rappeler ce que signifie la notion d'universalité : elle renvoie à ce qui est valable pour tout cas, sans aucune exception. Or force est de constater qu'à partir du moment où vous acceptez des exceptions – et vous le faites, que ce soit pour les pompiers, les gendarmes, les policiers ou les personnels navigants aériens –, vous avouez vous-mêmes que votre système n'est pas universel. Il faut donc que vous le transcriviez dans le texte.

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Bien entendu, vous considérerez que c'est une bataille de mots ; mais quelle autre bataille peut-on mener ici ? Dans un Parlement, on parle, et dans un texte, il y a des mots. Nous demandons de la précision et de la sincérité dans les termes.

Monsieur le rapporteur, vous nous avez répondu que ce système, quoique totalement individualisé – raison pour laquelle nous proposons de changer le titre du chapitre Ier –, comporte tout de même des aspects équitables ou égalitaires, et que nous devrions en convenir. Vous évoquiez une pension de retraite minimale de 1 000 euros garantie pour ceux ayant effectué une carrière complète ; naturellement, vous n'êtes pas en état de nous expliquer ce qu'est une retraite complète dans le cadre d'un système qui fonctionne par points. Mais admettons qu'un instant, on en accepte l'idée. Si j'interpellais tout à l'heure notre présidente en tant qu'élue du Pas-de-Calais, c'est parce que je voulais aborder la question des retraites en 1910 et vous faire remarquer, monsieur le rapporteur, quel progrès immense vous nous proposez. À cette époque, l'État garantissait – comme vous-même dites que vous le faites aujourd'hui – une pension de retraite minimale de 180 francs, comparable aux 1 000 euros de votre projet. Vous nous proposez ainsi de travailler treize ans de plus qu'en 1910 pour obtenir ces 1 000 euros. Comment croire dès lors que votre système soit équitable, et universel ? Il fonctionnera à la tête du client.

Je voudrais aussi dire un mot des cadres supérieurs – peut-être cela vous semblera-t-il étonnant de ma part. Si je m'intéresse à eux, c'est que le traitement qui leur est réservé a à voir avec la compétitivité de l'économie française. Sur la partie de leur rémunération supérieure à trois fois le montant du plafond annuel de la sécurité sociale, les cadres ne cotiseront plus en effet qu'au titre de leur participation à la solidarité nationale, à hauteur de 2,81 %. Pour compléter leur retraite, il leur faudra donc s'adresser à des fonds de pension. Cela signifie que leur contribution au bien commun sera supprimée – cela représente 7 milliards d'euros ; et qu'ils vont devoir dès maintenant – et non en 2025 – cotiser à des fonds de pension, dans des proportions qui vont entraîner une diminution considérable de leur participation à l'économie nationale. Par conséquent, ce régime à la tête du client – les cadres décideront chacun, tête par tête, du niveau de leur pension de retraite – n'est pas universel, mais absolument et totalement individualisé.

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Chers collègues de la majorité, vous devriez éviter de systématiquement comparer le système actuel avec le système que vous voulez mettre en place. En procédant ainsi, vous espérez certainement nous convaincre ; mais nous ne sommes pas des partisans du système actuel, et nous considérons que compte tenu des trente années de réformes libérales qu'il a subies, il est déjà trop plein de trous et de coups de canif. De notre point de vue, les gens partent déjà trop tard et trop pauvres. Faisons donc l'économie de cette comparaison qui ne sert pas nos débats.

Surtout, l'amendement n° 22332 veut indiquer que si le projet de loi est adopté, il y aura au moins autant de régimes de retraite différents que de générations. Vous avez voulu faire peur aux Français en évoquant les quarante-deux régimes de retraite distincts que comporterait le système actuel, chiffre censé leur donner de l'urticaire. Mais je ne comprends toujours pas d'où vient ce chiffre – et M. le secrétaire d'État ne nous a fourni aucune réponse à ce sujet. Comme vous, je prends au sérieux les travaux du COR, qui n'en trouve que vingt-trois ; quant au ministère des solidarités et de la santé, qui produit aussi des statistiques en la matière, il n'en dénombre que dix-huit. Sauf à considérer que M. Delevoye a ajouté autant de régimes qu'il a oublié de lignes dans sa déclaration à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, je ne vois toujours pas d'où viennent ces quarante-deux régimes. J'ai observé la manipulation effectuée concernant le régime de retraite complémentaire des salariés AGIRC-ARRCO. C'est un régime résultant de la fusion entre deux régimes préexistants, AGIRC et ARRCO ; or pour atteindre ce chiffre prétendument insupportable de quarante-deux, on l'a décloisonné et comptabilisé les deux – AGIRC et ARCO – séparément. Ces quarante-deux régimes viennent donc de nulle part, sinon des bouches d'Emmanuel Macron et d'Édouard Philippe.

Vous n'avez toujours pas répondu à la question de nos collègues socialistes, s'agissant des Français nés avant 1975. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous confirmer que l'objet de la conférence de financement du système de retraite, qui se tient actuellement, est strictement décorrélé de nos discussions sur le projet de loi ? Cette conférence n'a pour objet que de trouver les 12 milliards d'euros jugés nécessaires pour combler le déficit projeté par le COR d'ici à 2027, et permettant de financer les retraites de la génération née avant 1975, à qui ne s'appliquera pas le système de retraite par points. Pouvez-vous le confirmer ?

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S'agissant des quarante-deux régimes de retraite du système actuel, je vous invite à consulter le document établi sous la responsabilité du secrétariat de notre commission spéciale, qui vous a été transmis et qui expose à partir de la page 12 les quarante-deux combinaisons possibles d'affiliation en matière de retraite, en tenant compte du régime de base et du régime complémentaire – il ne sépare pas AGIRC et ARRCO.

Ensuite, M. Quatennens, vous nous reprochez de faire une comparaison entre notre projet et le système actuellement en place ; c'est pourtant le principe même de l'action politique que d'établir un constat sur une situation donnée – ce que le Gouvernement et le haut-commissaire aux retraites ont fait, en analysant les défauts et les manquements du système actuel et en essayant d'apporter une réponse qui vienne corriger ces défauts.

Nous posons les fondations d'un système universel commun à tous les assurés ; nous ne modifierons donc pas le titre du chapitre Ier, et notre avis sur les amendements est défavorable.

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Monsieur le secrétaire d'État, je veux profiter de votre présence et vous aider à sortir de votre embarras. Vous avez du mal à répondre à la question posée portant sur l'exemple de jumeaux ; je vous propose d'y répondre en prenant l'exemple de jumelles – même si, qu'il s'agisse de garçons ou de filles, le raisonnement est le même. Ces deux jumelles ont été séparées de leurs parents à la naissance. L'une d'entre elles vit dans le luxe, le calme et la volupté, ses parents d'adoption ont les moyens de l'élever et de la nourrir, et de financer ses études ; elle accomplit pendant quarante-trois ans une carrière de cadre supérieur chez Rothschild. L'autre jumelle a moins de chance : elle vit au fin fond de la vallée de la Bresle, et les revenus de ses parents ne lui permettent pas d'être logée convenablement – je le précise car l'espérance de vie en bonne santé n'est pas seulement liée au métier exercé, mais aussi aux conditions de vie endurées dès la naissance ; elle effectuera une carrière hachée, faite de petits boulots précaires mais, parce qu'elle est courageuse, elle aura elle aussi, malgré tout, travaillé quarante-trois ans. Est-ce qu'avec le mauvais projet que vous proposez, ces deux jumelles, qui auront été traitées de manière universelle, bénéficieront équitablement des mêmes droits à la retraite, sans décote et sans surcote ? La question est simple, monsieur le secrétaire d'État, et il vaut mieux y répondre maintenant plutôt qu'attendre la fin de nos débats.

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Nous nous opposerons à ces amendements, mais ils posent des questions qui méritent de l'être. Parler de quarante-deux régimes, c'est une pure entreprise de communication, qui n'a rien à voir avec la réalité des choses. On met ensemble d'énormes cageots de poires et des toutes petites fraises. La vérité, c'est que 90 à 95 % des affiliés passent par huit régimes pendant leur vie – et c'est déjà beaucoup. Si l'on prend la caisse des salariés du privé, celle des fonctionnaires, le régime des indépendants et celui des agriculteurs, la grande majorité des Français sont couverts. Voir la réforme des retraites au travers de toute une série de régimes qui n'ont rien de « systémique », pour reprendre votre expression, ne me paraît pas pertinent. Le régime de retraite des personnels de l'Opéra national de Paris n'est pas systémique. Il peut interroger, notamment ceux qui n'en relèvent pas et qui exercent pourtant le métier de danseur, ou plus généralement celui de sportif. La véritable question qui se pose dans leur cas, ce n'est pas celle de l'injustice de la retraite : c'est celle de la reconversion professionnelle. Il faut préparer chaque individu à évoluer au cours de sa carrière. Il est évident qu'un danseur ou un sportif ne pourra pas continuer sa carrière au-delà d'un certain âge. Or vous ne traitez ce problème nulle part dans votre projet de loi. Votre insistance sur les quarante-deux régimes n'est qu'une manière d'embrouiller les choses. D'ailleurs, comme le dit le Conseil d'État – et c'est la réalité –, vous recréez finalement au moins autant de régimes que ceux existant pour 95 % des Français.

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Au cours de ce débat, un certain nombre de questions très précises vont être posées, soulevant des différences entre certains cas et certaines situations. Le Conseil constitutionnel sera très attentif à ce que des réponses claires soient apportées, pour que le Parlement puisse voter de manière éclairée. Notre discussion devrait avoir cette utilité.

S'agissant de la philosophie du système de retraite, je crois que votre projet de loi cherche à imposer une rupture de sens et de droit. Ce que vous nous proposez me fait penser aux publicités pour le nouvel Omo : comme elle, votre projet est paré de toutes les vertus. Bornons-nous à comparer deux formules : « chaque euro cotisé doit donner les mêmes droits » ; et « à chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ». Il y a là deux philosophies différentes. Cette rupture fondamentale mérite un débat de fond.

La question du taux de remplacement n'est pas neutre. Vous ne l'abordez pas, et elle ne fait pas partie des objectifs de votre projet de loi. Si nous en parlons, c'est que, comme le dit l'économiste Bernard Friot, la retraite représente en réalité un « salaire continué ». En la rapprochant de l'idée d'un minima social, vous en modifiez la conception établie ; c'est une rupture de sens considérable.

Enfin, vous parlez de progrès. Où est le progrès quand il est inscrit dans le texte que l'âge légal du départ à la retraite va reculer un peu plus à chaque génération ? Tout cela mérite un débat approfondi.

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En effet, il faut impérativement revenir sur l'idée selon laquelle le système que vous proposez permettrait la mise en place d'un régime unique et universel. Il y aura bien autant de régimes différents que de générations, et c'est pourquoi le Conseil d'État, en évoquant cinq régimes auxquels s'ajoutent les régimes dérogatoires, sous-évalue la situation que vous allez créer. Votre texte dit explicitement que l'âge d'équilibre est voué à se décaler au fil des générations. Tout le monde a compris pourquoi : votre objectif est de contracter la part des richesses produites consacrée aux retraites, et le niveau des pensions sera votre variable d'ajustement. Pour ne pas dire aux gens qu'ils gagneront moins en partant au même âge, vous leur dites que leur pension sera la même s'ils travaillent plus longtemps. En réalité, c'est la même chose. Ces amendements visent donc la cohérence : vous avez le droit de penser qu'il est inéluctable de travailler plus longtemps ; la droite le dit et l'assume, elle pense qu'il faut prendre une mesure d'âge. Votre projet de loi n'est en fait rien d'autre qu'une vaste mesure d'âge. Une fois retiré tout ce verbiage inutile sur l'universalité, dont on vérifie d'ailleurs grâce au Conseil d'État qu'elle n'existe pas, et qu'un euro cotisé n'ouvre pas les mêmes droits pour tous, on se rend compte que l'arbre cache la seule forêt que vous maintenez, et qui se résume à l'idée qu'il va falloir travailler inéluctablement plus longtemps, sans tenir compte du fait que la productivité a augmenté.

Quand vous évoquez l'évolution du ratio entre actifs et retraités, vous oubliez de dire qu'un actif produit aujourd'hui de manière incommensurablement plus importante que par exemple dans les années 1970 – jusqu'à trois fois plus, c'est énorme. Où va cette part de la richesse produite par le travail humain ? Le système par points est le meilleur outil au service d'un objectif précis, celui qui vise à contracter la dépense liée aux retraites dans l'espoir que les gens se détournent du système par répartition. Incontestablement, le système que vous proposez est une étape intermédiaire vers un régime par capitalisation. Certes, le système par points reste par répartition, mais c'est l'étape nécessaire pour passer à la capitalisation que vous encouragez comme jamais.

La commission rejette ces amendements.

Elle examine ensuite l'amendement n° 759 de M. Patrick Hetzel.

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La définition de l'universalité bat de l'aile depuis un certain temps. Chaque jour, on observe en la matière de nouvelles entorses par rapport au projet initial, qui se voulait universel mais finit par multiplier les exceptions, en particulier sur l'âge de départ, en fonction des professions.

Pour nous, l'essentiel est d'harmoniser les modes de calcul entre le secteur privé et le secteur public. C'est le sens de l'amendement n° 759.

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L'harmonisation des modes de calcul entre les différents régimes, et notamment entre le privé et le public, se trouve au coeur de ce projet de loi. Elle est abordée au chapitre II, au moment où est définie l'unité de mesure du point, qui donnera lieu à un système équitable, lisible et garantissant un certain niveau de vie à ses bénéficiaires par son indexation dynamique.

Je vous propose de retirer votre amendement, qui ne vise pas le bon chapitre et conduirait à alourdir la rédaction de celui-ci.

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Je m'associe aux propos de M. le rapporteur qui suggère à notre collègue de retirer son amendement, non parce qu'il ne se trouve pas à la bonne place, mais parce que la différence de mode de calcul entre le privé et le public se justifie par le fait que les carrières n'y sont pas les mêmes : dans le privé, la carrière n'est pas linéaire, elle peut être interrompue et hachée, alors que dans le public, le système d'avancement d'échelon fait que les six derniers mois sont normalement les plus favorables.

Vous n'êtes pas non plus sans savoir qu'auparavant, dans le privé, la pension de retraite était calculée à partir des dix meilleures années ; depuis la réforme des retraites de 1993, elle l'est sur la base des vingt-cinq meilleures années.

Le changement de mode de calcul précise l'intention du Gouvernement, et valide l'idée selon laquelle il y aura une écrasante majorité de perdants. Tout le monde peut comprendre que si l'on calcule la pension de retraite non plus sur la base des six derniers mois – dans le public – ou des vingt-cinq meilleures années – dans le privé –, mais sur l'ensemble de la carrière, la plupart des gens y perdront. Un élève de primaire saura tout de suite qu'il est plus favorable pour lui qu'on calcule sa moyenne à partir de son dernier bulletin qui a été particulièrement bon plutôt que sur l'ensemble de sa scolarité.

Vouloir à tout prix cette harmonisation est donc une très mauvaise idée : la différence entre les modes de calcul se justifie.

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À mon sens, le débat s'engage assez mal. Il est très ennuyeux que M. le secrétaire d'État reste mutique pendant l'examen des amendements alors que des questions précises lui sont posées. La représentation nationale a besoin d'être éclairée. Mardi dernier, déjà, nous lui avons posé beaucoup de questions et nous avons obtenu très peu de réponses, à une heure bien tardive. De nombreuses questions fondamentales sont esquivées. Le taux de remplacement des retraites va chuter de façon drastique, et l'écart entre le niveau de vie des retraités et celui des actifs va retrouver son niveau des années 1980 ; nous allons donc gommer quarante ans de progrès. Et 30 % des pensionnés – 40 % des femmes – le seront au minimum contributif. Est-ce un progrès ? N'esquivons pas ce débat ! Vous évoquez de prétendus progrès. Mais vous durcissez la situation de ceux qui ont vécu des périodes de chômage, de même que l'accès au dispositif pour carrière longue, et ce que vous proposez à propos de la pénibilité est indigent. Il y a treize ans de différence d'espérance de vie entre les 5 % de Français les plus riches et les 5 % les plus pauvres. On a le sentiment que vous vivez dans un monde imaginaire. La réalité, c'est que vous avez regardé ce projet comme une boule à neige ; vous l'avez agité, et vous ne savez pas où la neige retombe. Vous êtes incapables de nous dire où il mène. Quand nous parlons d'universalité, ce n'est pas pour nous amuser. Le Conseil d'État vous a dit que vous ne pouviez pas revendiquer la notion de « système universel commun ». Ces mots sont vidés de leur sens. Pendant des décennies, les nouveaux régimes que vous créez coexisteront avec les anciens ; il y aura donc beaucoup plus de régimes qu'il n'y en a aujourd'hui. Vous avez promis plus de simplicité et de lisibilité, mais personne n'est capable aujourd'hui de dire quel sera le montant de sa pension de retraite. Vous n'avez pas répondu aux cas d'espèce ni non plus à la question de savoir pourquoi vous aviez tout calculé à partir de la génération née en 1975, sur un âge d'équilibre fixé à 65 ans, alors que la loi dit l'inverse. Nous avons besoin de ces réponses.

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Le fait que M. le secrétaire d'État ne réponde pas me convient. Les commissions existent aussi pour que nous puissions débattre entre parlementaires. La présence des ministres en commission n'est d'ailleurs pas obligatoire, même si elle peut être parfois utile.

L'Assemblée nationale a déjà voté, il y a quelques années, un article – l'article 16 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites – prévoyant que la France allait étudier « les conditions de mise en place d'un régime universel par points ». Cet objectif est inscrit dans la loi. Or force est de constater qu'en 2013, le débat n'a pas été lancé comme il devait l'être. Il se trouve aujourd'hui à nouveau posé. Que voulait-on dire à l'époque en évoquant un régime « universel » ? Il ne s'agissait pas d'unifier l'ensemble des catégories de personnes, sans exception, mais bien d'un universalisme englobant les salariés du privé et la fonction publique, soit les deux régimes les plus importants. En effet, selon nous, un informaticien, qu'il travaille dans une entreprise ou dans un ministère – le ministère de l'intérieur ou celui des affaires sociales, par exemple –, doit être traité de la même manière en matière de retraite. L'erreur du Gouvernement est d'avoir maladroitement et inutilement étendu cet objectif à l'infini, à tous les Français – même ceux qui ne demandaient rien à personne, et ils sont très nombreux –, le rendant illisible. Mais la mise en oeuvre d'un universalisme entre la fonction publique et les salariés relevant du régime général de la caisse nationale d'assurance vieillesse me semble être indispensable. Cette mesure a un coût très élevé, mais elle me paraît parfaitement juste, car l'existence d'une différence de régime entre salariés de la fonction publique et salariés du privé relève de l'injustice. Seule la pénibilité – une pénibilité objective – peut justifier le fait de rompre avec cet objectif.

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Une large partie de l'opinion publique est en effet favorable à un rapprochement entre le public et le privé en matière de régime de retraite. Mais cela fait des années que l'on recule sur ce sujet. Monsieur le secrétaire d'État, vous entendez aussi cette volonté généralisée de rapprocher le secteur privé du secteur public. Peut-être cet objectif est-il inscrit plus loin dans le projet de loi, mais il nous semblait nécessaire de préciser dès le début du texte cette exigence d'harmonisation. Je maintiens l'amendement qui a été déposé par mon collègue Patrick Hetzel.

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Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites

Je suis défavorable à l'amendement n° 759, mais j'entends bien l'aspiration de Jean-Pierre Door en la matière. Il a lu le projet de loi avec attention, et il sait qu'on y retrouve ce qu'il souhaite : nous y avons clairement exposé le fait que l'ensemble des assurés, qu'ils travaillent dans le secteur public ou dans le secteur privé, seront concernés par ce système universel.

J'ai pris quelques instants pour relire la page de garde du projet de loi qui vous est soumis : elle évoque bien un « projet de loi instituant un système universel de retraite », ce qui répond à une partie des questions posées depuis que la commission a commencé à se réunir.

En tant que jeune ancien député, je partage l'avis de M. Woerth sur le fait que les commissions sont aussi le lieu de l'expression de la représentation nationale, et que le rôle du Gouvernement est certes de l'éclairer, mais aussi d'écouter ce qui s'y dit ; c'est l'état d'esprit qui m'anime.

Cela dit, quelques éléments méritent que je réagisse. Pour reprendre l'exemple des jumeaux, ou des jumelles – j'ai bien compris qu'il y avait en ce moment un intérêt particulier pour les grossesses gémellaires –, la construction d'un système universel de retraite amènera l'un – ou l'une – et l'autre, lorsqu'ils auront le même niveau de cotisation, la même carrière et un âge identique, à obtenir un même niveau de pension. C'est bien parce que ce n'est pas le cas aujourd'hui que nous vous proposons cette grande transformation du système de retraite. En effet, jusqu'à présent, si l'une et l'autre avaient mené des carrières relativement similaires, mais dans des organismes soumis à des régimes différents – que ce soit dans une entreprise dotée d'un régime spécial, dans le privé ou dans la fonction publique –, elles auraient certainement eu des niveaux de cotisation différents et, assurément, des niveaux de pension différents.

C'est bien ce que nous voulons éviter dans le cadre de ce projet universel. N'ayons pas peur d'utiliser ce mot. Il a un fondement, qui est de rassembler l'ensemble de nos concitoyens autour d'un projet important dans le cadre de notre capacité à vivre ensemble, à faire République ensemble : celui qui consiste à créer une égalité de tous devant la retraite. J'entends certes les critiques et les inquiétudes exprimées, au fond desquelles je perçois une volonté collective de réussir ensemble cette transformation et d'éviter que des situations particulières ne soient pas prises en compte – même si la loi doit traiter de l'intérêt général et s'il nous faut être vigilants à propos de ces situations particulières. Mais c'est une belle ambition que nous devons tous porter.

La commission rejette l'amendement.

La commission examine les amendements identiques n° 1118 de Mme Clémentine Autain, n° 1123 de M. Bastien Lachaud, n° 1125 de M. Jean-Luc Mélenchon et n° 1129 de M. Adrien Quatennens.

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Nous continuons à corriger la manière dont vos titres sont rédigés. En l'occurrence, il s'agit de la section 1 du chapitre Ier du titre Ier, pour le moment intitulée : « Principes généraux », ce qui est extrêmement flou. Nous proposons le titre suivant : « Incantations générales de façon à donner une apparence d'humanisme à une réforme délétère ». Sans vouloir raviver la polémique lancée tout à l'heure par mon camarade Sébastien Jumel sur la question de l'humanité, nous sommes au coeur du sujet. S'agit-il d'une réforme, au sens où elle constituerait un progrès, ou d'une contre-réforme menant à une régression ?

Dans ce paragraphe, les mots utilisés ne correspondent pas à la réalité du projet. Vous reprenez le terme d'équité, que vous préférez à celui d'égalité. Que chacune et chacun réfléchisse à la différence entre ces deux termes. L'égalité était le terme choisi en 1789 dans la Déclaration – universelle, c'est le cas de le dire – des Droits de l'Homme et du Citoyen. Ce n'est pas un hasard si on a progressivement décidé de lui substituer celui d'équité. C'est une forme de renoncement, car l'équité est un sous-produit de l'égalité : elle part du principe qu'il est impossible de ne pas avoir d'inégalités, et qu'il faut donc se contenter d'en compenser les injustices, tout en suivant une logique méritocratique, mettant en avant les mérites de certains. Cela n'a rien à voir avec l'égalité réelle. Cette logique ne prend pas en compte la réalité des inégalités sociales. C'est de ce principe que vous partez, et c'est pourquoi vous vous trompez.

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Ces principes généraux camouflent bien un projet délétère. Il suffit de regarder le nombre et la répartition de certains mots utilisés dans ce projet. Monsieur le secrétaire d'État, vous nous dites que ce régime est universel parce que c'est écrit. Le mot universel apparaît en effet 346 fois ; celui d'égalité, seulement sept fois. On trouve 109 fois le mot ordonnance, quatre fois le mot débat ; 156 fois le mot activité, aucune fois le mot repos ; 133 fois le mot travail ou travailleur, mais seulement deux fois le mot précarité, et une fois le mot pauvreté. Ce décompte montre bien quelles sont les priorités du Gouvernement. Le mot femme apparaît seulement treize fois ; pourtant, c'est un projet délétère pour les droits des femmes. Celles-ci vont être les principales victimes de cette réforme, d'abord par la suppression des méthodes de calcul qui permettaient un lissage des carrières heurtées – avec le passage d'un calcul de la pension de retraite fondé sur les vingt-cinq meilleures années, ou six derniers mois dans le public, à un calcul fondé sur la carrière complète. Les femmes sont majoritaires parmi les fonctionnaires, et ce sont elles qui vont subir le plus les mesures de convergence que le Gouvernement prépare. Je pourrais également évoquer les pensions de réversion, qui ne seront plus versées aux femmes divorcées. Selon une version provisoire de l'étude d'impact, les femmes aux salaires bas avec deux ou trois enfants seraient les plus défavorisées par le projet de loi, avec des baisses de pension allant de 50 à 300 euros par mois. Voilà un projet délétère, et voilà le sens de mon amendement n° 1123.

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Vous avez compris qu'à ce moment de nos interventions, nous avons décidé de convoquer l'humour. J'ai lu les principes généraux – ils feront tout à l'heure l'objet d'amendements – et je ne les trouve pas si généraux. Ils ont même l'air assez étroitement ciblés, et n'y apparaît pas ce qui me semble être un principe général dans l'organisation du travail – je parle ici sous le contrôle de connaisseurs. Nous nous identifions depuis un peu plus d'un siècle à la diminution du temps de travail et, comme j'ai eu l'honneur de participer aux débats sur les 35 heures, je ne peux pas ne pas y penser à ce moment. Certes, il y a toujours eu une majorité conservatrice pour considérer que le temps de travail n'était jamais assez long – à l'évidence, cela a quelque chose à voir avec la volonté d'accumulation. Mais le premier des principes généraux que l'on devrait poser est le suivant : puisque la machine et l'intelligence sont disponibles, elles doivent remplacer la peine de l'être humain au travail. Ce n'est pas évoqué une seule fois dans vos principes généraux ; par conséquent, ils n'en sont pas.

Le moment est venu de rappeler qui a introduit de véritables principes généraux de réduction du temps de travail. La question de la retraite est pour nous associée à celle de la réduction du temps de travail, et c'est parce que nous avons réduit le temps de travail dans la journée, dans la semaine, dans l'année et dans la vie que nous avons vécu plus longtemps – au cours du dernier siècle, nous avons gagné trente ans d'espérance de vie, et ce progrès s'est accompli à mesure que le temps de travail diminuait. Dans la semaine, c'est nous – la semaine de 40 heures en 1936, puis celle de 39 heures en 1981, et celle de 35 heures sous le gouvernement de Lionel Jospin ; dans l'année, c'est nous – les congés payés introduits par le Front populaire en 1936, puis à la Libération, et rallongés en 1981 ; dans la vie, c'est encore nous – sans nous, ni la loi sur les retraites ouvrières et paysannes de 1910, ni celle sur l'assurance vieillesse de 1946, ni celle sur la retraite à 60 ans de 1981, n'auraient été votées. Le pays a-t-il été ruiné à l'une de ces occasions ? Non, et la population en a bénéficié.

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Cette série d'amendements cherche à mettre en cohérence le contenu du projet et ses intitulés. En réalité, depuis que nos débats ont démarré, nous avançons très rapidement : il est désormais établi qu'il n'y a pas d'universalité. Le Conseil d'État nous l'avait déjà dit, et M. le Président Macron lui-même avait récemment déclaré qu'« universel ne veut pas dire que c'est le même pour tout le monde » – nous avions alors compris de quoi il retournait. Je suggère donc, puisque nous pouvons tomber d'accord sur le fait qu'il n'y a pas d'universalité, de retirer ce terme non seulement du texte, mais de nos prises de parole.

Cessez de croire, monsieur le secrétaire d'État, qu'à force de les répéter, les éléments de langage finissent par s'imprimer dans les esprits. Cela fait des mois que votre gouvernement rabâche que la réforme est « plus juste, plus simple, pour tous », et c'est tout l'inverse que les Français comprennent.

Vous avez vous-même renoncé à l'universalité à mesure que la mobilisation grandissait. Dès qu'une profession menaçait de basculer dans la grève, vous vous êtes empressés de la rassurer en affirmant que la réforme ne la concernait pas. Nous n'avons d'ailleurs toujours pas compris votre logique : en quoi une profession devrait être rassurée de ne pas se voir appliquer une réforme que vous estimez si formidable ? Cela nous éclaire sur vos intentions : vous ne comptez nullement mettre en oeuvre un système « plus juste, plus simple, pour tous », cette formule n'est qu'un simple habillage.

Après deux heures de débat, peut-être est-il temps de s'accorder sur le fait que votre projet de loi ne vise aucunement l'universalité, pas plus que la casse du code du travail n'a permis de « libérer les énergies ».

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Nous avons un rapport différent au travail. Il peut certes être source de pénibilité – des progrès restent à faire – mais il est aussi facteur d'épanouissement et d'intégration sociale. De nombreux cas de personnes vivant mal une fin de carrière brutale me viennent à l'esprit. À cet égard, réfléchir à un départ progressif peut avoir du sens.

Par ailleurs, je précise qu'un article du code de la sécurité sociale, dans la rédaction issue de la « loi Touraine » du 20 janvier 2014, fixe déjà l'équité comme objectif du système de retraite.

Cette série d'amendements identiques propose de remplacer les mots « Principes généraux » par « Incantations générales de façon à donner une apparence d'humanisme à une réforme délétère ». Je ne me reconnais dans aucun des termes de cette proposition : mon avis est défavorable.

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Monsieur le secrétaire d'État, je vous ai posé une question précise et simple tout à l'heure et j'aurais espéré une réponse. Prenons le cas de deux jumelles, l'une née le 31 décembre 2004, l'autre le 1er janvier 2005. Nous confirmez-vous qu'elles n'auront pas la même pension de retraite alors qu'elles auront exercé la même activité professionnelle, pour un même salaire et pour une même durée de travail ?

La commission rejette ces amendements.

Article 1er : Création d'un système universel de retraite par répartition

La commission est saisie des amendements de suppression n° 1 de M. Stéphane Viry, n° 542 de M. Pierre Dharréville, n° 796 de Mme Clémentine Autain, n° 801 de M. Bastien Lachaud, n° 803 de M. Jean-Luc Mélenchon, n° 807 de M. Adrien Quatennens, n° 20966 de Mme Valérie Rabault et n° 21084 de M. Boris Vallaud.

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Notre amendement n° 1 propose de supprimer l'article 1er car il nous apparaît nécessaire de simplifier la réforme des retraites et de la rendre plus efficace sur le plan à la fois social et financier car ces deux dimensions sont à nos yeux indissociables.

L'énorme défaut de votre projet de loi, certains diraient même le scandale de votre projet de loi, c'est qu'il ne propose aucune mesure de financement. La représentation nationale devrait pouvoir examiner un texte complet. Comment aboutir à l'équilibre en 2027, comme vous le souhaitez ? Mystère. Comment le système s'équilibrera ensuite ? Double mystère.

L'étude d'impact nous aide peut-être à comprendre votre démarche. Elle prend pour hypothèse un âge d'équilibre fixé à soixante-cinq ans alors que le Gouvernement parle d'un âge d'équilibre à soixante-quatre ans. Pourquoi une telle augmentation ? Nous vous demandons depuis deux mois quel chemin vous comptez suivre mais vous ne nous l'indiquez pas.

Je note enfin que c'est la première des réformes de retraite à ne pas opérer de recul de l'âge légal. C'est peut-être facile à expliquer mais c'est financièrement impossible à réaliser puisque vous abaissez dans le même temps la deuxième borne d'âge, celle du taux plein, aujourd'hui fixée à 67 ans, pour la faire coïncider avec l'âge d'équilibre, de 65 ans. Or l'âge d'équilibre se situera à 67 ans à un moment donné, notamment lorsque beaucoup de femmes prendront leur retraite.

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La mise en place d'un système universel de retraite par points constitue un bouleversement majeur de notre système de retraite hérité du Conseil national de la Résistance. Cette réforme « systémique » est avant tout une réforme paramétrique permanente qui conduira à affaiblir le droit à la retraite de nos concitoyens par l'allongement de la durée de vie au travail et la baisse programmée des pensions. Les dispositifs de solidarité qui fondent notre contrat social – droit familiaux, réversion, prise en compte du chômage – sont, en outre, rabotés au nom d'un seul objectif : la réduction de la dépense publique. Enfin, cette réforme est nocive car elle ouvre des espaces à la capitalisation. C'est donc le pilier de notre pacte social qui est gravement remis en cause.

Nous tenons une preuve supplémentaire de son caractère régressif dans cet article 1er qui prévoit un engagement du Gouvernement à revaloriser les rémunérations des enseignants pour compenser la baisse anticipée de leurs pensions dans le système à points. Rappelons que cette disposition a été jugée inconstitutionnelle par le Conseil d'État puisqu'elle n'a aucune valeur contraignante : elle n'assure en rien que les enseignants seront revalorisés dans les prochaines années. La meilleure manière de garantir le niveau des pensions des enseignants est d'augmenter le point d'indice des fonctionnaires, ce que le gouvernement actuel s'est refusé à faire. Mieux payer les personnels de l'éducation nationale et plus largement les agents publics doit constituer un objectif à part entière et non une contrepartie. En liant augmentation des rémunérations et réforme des retraites, vous n'avez fait que réveiller des aspirations chez les uns et chez les autres.

Finalement, vous allez transformer l'âge légal en âge de départ à la retraite anticipée avec une décote.

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Nous constatons l'écart entre ce que vous rabâchez et la réalité concrète de votre projet de loi et nous contestons l'affirmation selon laquelle la réforme renforce la solidarité entre les assurés. C'est tout l'inverse qui se produira puisqu'une entreprise de régression sans pareille est à l'oeuvre. Si votre système est si bon, on se demande d'ailleurs bien pourquoi vous voulez épargner les policiers ou les militaires, monsieur le secrétaire d'État.

Nous attendons toujours votre réponse au sujet de la comparaison entre un ouvrier et un cadre ayant tous les deux travaillé quarante-trois ans. Citons un autre exemple de l'injustice née de l'application des recettes néo-libérales à notre régime de retraite. Dans le système actuel, la retraite correspondant à la période de chômage est calculée sur la base du salaire antérieur ; dans votre nouveau système, la valeur du point sera fondée sur les indemnités de chômage. Pas besoin d'avoir fait HEC ou Sciences Po pour comprendre que la pension sera diminuée puisque les indemnités de chômage sont inférieures au salaire perçu antérieurement.

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Avec cet article 1er, nous sommes en plein coeur de la rhétorique macronique du « en même temps ». Reprenons ses termes.

Le système universel de retraite doit répondre à l'objectif d'équité, mais en même temps les pensions élevées des fonctionnaires qui correspondaient à des salaires différés ne seront pas maintenues.

Ce projet renforce la solidarité entre assurés, mais en même temps incite à la capitalisation des plus riches, dont une partie des cotisations échappera au régime général.

Le système doit permettre de garantir un niveau de vie satisfaisant, mais en même temps organise une baisse des revenus durant la vie active puisque les personnes au-dessus de 50 ans ont beaucoup plus de difficultés à retrouver un emploi. Leurs pensions, avec le système par points, seront donc durablement affectées.

Ce projet doit renforcer la liberté dans le choix de départ en retraite des assurés, mais en même temps va inciter les personnes à travailler plus longtemps, en reculant l'âge auquel elles pourront partir avec une retraite sans décote. Drôle de vision de la liberté !

Le projet doit répondre à un objectif de soutenabilité économique et d'équilibre financier, mais en même temps ne fait plus rentrer certaines cotisations dans le système général, celles correspondant à des revenus de plus de 10 000 euros par mois.

Enfin, ce système doit être lisible et permettre aux assurés d'anticiper l'impact d'un changement professionnel sur le montant de leurs droits, mais en même temps la valeur du point ne pourra pas être connue à l'avance puisqu'elle sera fixée par le conseil d'administration de la Caisse nationale de retraite universelle.

Bref, en même temps, chaque personne aura un régime différencié en fonction de son parcours.

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Madame la présidente, vous ne serez pas étonnée de m'entendre reprendre l'argument à mes yeux central de la diminution du temps de travail. Mais avant de le développer, je voudrais dire un mot à notre rapporteur. Il affirme que nous n'avons pas la même conception du travail, mettant en avant le fait que le travail peut être facteur d'accomplissement. Certes mais là n'est pas notre principale divergence. Nous considérons que seul le travail crée de la richesse. C'est la raison pour laquelle il doit être protégé, bien rémunéré et la richesse qu'il produit correctement partagée. La plupart des gens aiment leur travail mais ils trouvent toujours moyen d'introduire un espace de liberté pour le tailler à leur mesure. Le travail, qu'il plaise ou non à celui qui l'exerce, suppose temps contraint et lien de subordination, essence du contrat de travail. Ceux qui militent pour la réduction du temps de travail militent en réalité pour l'augmentation du temps choisi. Les gens, quand ils partent à la retraite, ne restent pas couchés en attendant la mort ; ils multiplient les occupations, qui les accaparent souvent plus que leur activité professionnelle antérieure, tout simplement parce qu'elles constituent du temps choisi.

N'allez pas croire que ce que je suis en train de vous dire soit pure rhétorique. La réduction du temps de travail est le seul moyen dont nous disposons pour améliorer les conditions de vie de nos compatriotes. Il arrive un moment où le travailleur est gagné par l'usure physique et psychologique et c'est à notre société, en édictant des règles dans le code du travail ou le code de la santé, de fixer une limite à l'astreinte au travail. C'est ainsi qu'au cours du siècle passé, les Français ont gagné trente ans d'espérance de vie. Avez-vous réalisé, chers collègues, que, pour la première fois depuis au moins un siècle, l'espérance de vie stagnait ? Dans certains grands pays que nous citons en modèle comme les États-Unis d'Amérique, elle recule même, tout comme l'espérance de vie en bonne santé.

En allongeant le temps de travail de nos compatriotes, nous ne ferons que déporter vers les caisses de chômage la prise en charge de leur existence matérielle parce qu'ils ne trouvent pas de travail et déplacer vers l'assurance maladie des charges qui auraient pu lui être évitées si les conditions d'une vie meilleure avaient été réunies.

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Cet article 1er est un écran de fumée qu'il importe de dissiper par souci de sincérité. Parmi les principes généraux qu'il énumère, il réaffirme le financement par répartition mais passe sous silence le fait que vous encouragez la capitalisation. Les Français ont bien compris qu'ils auraient toujours le droit de partir à l'âge légal de 62 ans mais qu'il n'est pas dans leur intérêt de le faire, à moins d'avoir souscrit à des dispositifs de capitalisation pour éviter la décote que vous voulez leur infliger. En outre, la diminution du plafond pour les hauts revenus va constituer une incitation supplémentaire à la capitalisation.

L'article 1er indique que « le système universel de retraite doit permettre de garantir un niveau de vie satisfaisant aux retraités » mais vous ne précisez jamais ce que vous entendez par là. Selon nous, il doit s'établir pour une carrière complète au moins au niveau du SMIC car en dessous du seuil de pauvreté, on survit plus qu'on ne vit.

À l'autre question fondamentale que se posent les Français – « à quel âge me sera garanti ce niveau de vie satisfaisant » –, vous répondez a minima 64 ans, soit au-delà de l'espérance de vie en bonne santé, et votre projet de loi nous montre que cette limite peut être toujours repoussée. Compte tenu des hausses de productivité et de l'espérance de vie en bonne santé, nous considérons que c'est à 60 ans qu'un assuré devrait partir à taux plein.

L'article 1er évoque à nouveau le caractère universel du système de retraite qui, nous l'avons montré, est un leurre. Il dit encore que le projet de loi a pour but de renforcer la liberté dans le choix de départ en retraite. Mais peut-on parler de liberté face à la menace de la décote ?

Monsieur le rapporteur, si vous trouvez le temps long, je vous soumettrai un document qui montre que, pour financer le retour à l'équilibre, il existe bien d'autres possibilités que de faire travailler les gens toujours plus longtemps.

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L'article 1er organise l'augmentation de trois ans de l'âge réel du départ en retraite mais aussi la baisse programmée du taux de remplacement de 30 %, autrement dit une réduction du niveau de vie des futurs retraités. Il met en place un système injuste de malus extrêmement dissuasif et porte l'âge d'équilibre à 65 ans, âge appelé à être reculé en fonction notamment de l'évolution de l'espérance de vie.

Il ne prend pas en compte l'espérance de vie en bonne santé qui est aujourd'hui de 63 ans et cinq mois. Le patron du MEDEF nous a indiqué la semaine dernière que l'âge moyen de liquidation dans le secteur privé était de 63 ans et sept mois mais dans le secteur public, il est inférieur, ce qui place l'âge moyen de départ en retraite autour de 62 ans.

L'article reprend l'engagement du Gouvernement de revaloriser la rémunération des enseignants et des chercheurs pour compenser la baisse anticipée de leurs pensions. Autrement dit, vous reconnaissez que ces fonctionnaires sont les grands perdants de cette réforme des retraites. Le Conseil d'État ayant qualifié cette disposition d'inconstitutionnelle, qu'allez-vous faire ?

Je terminerai en appelant votre attention sur un cas exposé à la page 108 du rapport de la commission. Un agent public né en 1974 qui partirait à la retraite à 65 ans, soit en 2039, aura vu ses cotisations de retraite augmenter de 8 euros par mois pendant quatorze ans, sans aucun droit nouveau ou majoration de sa pension. Qu'en pensez-vous ?

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Première question : quelle est la portée normative de ces principes généraux ? Il est à craindre qu'ils n'en aient aucune et que dès lors, cet article 1er soit frappé d'inconstitutionnalité.

Ces principes sont-ils fondés ?

Le premier est l'équité. Vous affirmez qu'un euro cotisé ouvrira les mêmes droits à chacun. Toutefois, vous ne précisez pas ce que vous entendez par « mêmes droits ». Cela a-t-il une portée normative ? En outre, vous ne prenez pas en compte les différences d'espérance de vie selon les carrières. Enfin, pour les revenus situés entre une fois et trois fois le PASS, les droits à la retraite diffèrent selon que l'assuré est un travailleur indépendant ou un salarié.

Le deuxième principe est la solidarité entre les assurés. Aucune garantie n'est pourtant donnée pour assurer aux retraités un niveau de vie satisfaisant. La seule règle d'or que vous posez est financière. Vous ne dites rien de l'évolution du niveau de vie des retraités par rapport aux actifs dans la durée. Rien non plus de l'évolution du taux de remplacement, qui va chuter.

Le troisième est la liberté. Mais peut-on parler de liberté quand une personne, y compris quand elle relève du minimum contributif, est obligée soit de travailler plus longtemps, soit de renoncer à une part significative de sa pension ?

Quatrième principe : la lisibilité. Elle est contestée par le Conseil d'État qui estime que le nouveau système « retire aux assurés une forme de visibilité sur le taux de remplacement prévisible qui leur sera appliqué, dans la mesure où la pension n'est plus exprimée à raison d'un taux rapporté à un revenu de référence mais à une valeur de service du point définie de manière à garantir l'équilibre financier global du système ».

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Ces amendements de suppression me permettent de remettre en perspective plusieurs enjeux trop souvent déformés.

D'abord, les principes et les objectifs que contient l'article 1er ne sont pas dépourvus de portée normative : ils orienteront au quotidien le pilotage du système universel.

Ensuite, je me demande comment il est possible de se satisfaire du système actuel, qui est très complexe pour la grande majorité de nos concitoyens. Il les oblige à faire des choix qui ne sont pas optimaux en matière d'orientation et de cessation de carrière. Proposer des règles plus simples, plus lisibles et plus communes – si vous préférez ce terme à « universelles » – constitue à cet égard une grande avancée.

Rappelons qu'aujourd'hui, les femmes touchent en moyenne 40 % de retraite de moins que les hommes. Bon nombre de nos concitoyens perçoivent des pensions de l'ordre de 700 à 800 euros – et là, c'est l'agriculteur qui vous parle. Essayer de leur apporter une réponse est un objectif qui est, je crois, tout à notre honneur.

Avis défavorable à ces amendements de suppression.

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La situation des agriculteurs est en effet préoccupante, monsieur le rapporteur. Dois-je rappeler que le Gouvernement s'est opposé au Sénat à une proposition de loi d'André Chassaigne adoptée à l'unanimité sous la précédente législature dans notre assemblée ? Elle répondait pourtant à une partie du problème. Dois-je souligner que le projet de loi ne comporte aucune solution pour les retraités actuels du monde agricole ?

Selon vous, le nouveau système apporterait une lisibilité extraordinaire. Cela reste à démontrer. Je dirai même que la lisibilité est moindre, compte tenu de la complexité des différents systèmes qui s'enchevêtrent.

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Je poursuivrai mon propos en évoquant les enseignants. Quel crédit apporter à l'engagement que vous prenez d'augmenter leurs rémunérations ? Vous comptez le remplir grâce à une loi de programmation. Or le Conseil d'État souligne que l'injonction à légiférer est inconstitutionnelle. Et dans l'étude d'impact, vous avez le culot d'avancer que l'augmentation de pouvoir d'achat des retraités passera par une augmentation de 0,3 point par an de la part de la prime pour les enseignants pendant cinquante ans.

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Les ficelles que vous utilisez sont un peu grosses.

L'instauration d'un minimum retraite aux alentours de 85 % du SMIC est subordonnée à plusieurs conditions : avoir 64 ans, contre 62 ans aujourd'hui ; avoir effectué une carrière complète, ce qui exclut 40 % des femmes ; avoir cotisé au moins 600 heures chaque année, ce qui exclut les temps partiels.

Quant aux agriculteurs, vous vous êtes servis d'eux comme d'un leurre pour mieux nous faire avaler la couleuvre. Vous leur proposez d'accéder à l'allocation de solidarité aux personnes âgées, mais en posant des conditions de ressources et en prévoyant des remboursements au moment de la succession. De plus, cette mesure ne concernera pas les trois millions d'agriculteurs ayant déjà liquidé leurs retraites, condamnés à vivre en dessous du seuil de pauvreté.

Tout est leurre dans cet article 1er, qui mérite d'être réécrit.

La commission rejette ces amendements.

Elle en vient aux amendements identiques n° 1135 de Mme Clémentine Autain, n° 1142 de M. Jean-Luc Mélenchon et n° 1146 de M. Adrien Quatennens.

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Nous avons décidé de déposer des amendements de suppression de chaque alinéa de l'article 1er pour réaffirmer notre opposition à la philosophie du projet de loi et à la duplicité du fameux « en même temps » qui l'imprègne tout entier.

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Cet article 1er est censé décliner « les grands principes qui fondent le système universel de retraite, ainsi que les objectifs sociaux et économiques qui lui sont assignés ». En fait de grands principes, il s'agit plutôt de modes d'organisation. Quant à l'universalité du système, nous avons vu qu'elle n'existait pas. « Objectifs sociaux et économiques » : la formulation me paraît incomplète, compte tenu de votre réaction aux propos de mon collègue Sébastien Jumel sur l'inhumanité de votre comportement politique. Je suis persuadé que vous voudriez ajouter « humains ». Je ne plaisante pas, le Programme des Nations unies pour le développement a mis au point en 1992 un indice de développement humain, dont l'une des composantes principales est l'espérance de vie. Plus elle est longue, plus elle permet de formuler des projets, de les voir aboutir, et donc de concourir au bien commun. En réalité, vous n'envisagez aucun objectif de progrès ou de développement humain dans votre réforme qui passe à côté de l'essentiel de ce qu'on attend d'un régime de retraite : qu'il dise simplement que la vie peut être belle en dehors du travail.

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Nos amendements visent à supprimer le premier alinéa.

D'abord, parce qu'il fait de nouveau référence à l'universalité du nouveau système, alors que nous avons montré qu'elle était absente de la réforme. Ensuite parce qu'il oublie de dire que le projet de loi est un texte à trous qui renvoie à des ordonnances dans des proportions rarement atteintes – vingt-neuf au total ! Ce sont autant d'enjeux qui ne pourront pas être débattus au sein de notre assemblée. Enfin, vous évoquez les « objectifs sociaux et économiques » alors que le seul objectif que vous poursuivez est de faire travailler les Français toujours plus longtemps, au-delà de l'espérance de vie en bonne santé.

Faire travailler les Français plus longtemps ne va pas dans le sens de l'histoire, compte tenu des hausses de productivité – Jean-Luc Mélenchon a bien montré comment les avancées sociales avaient permis de les libérer du travail. En outre, cela ne fera qu'aggraver le chômage des séniors alors qu'aujourd'hui, à l'âge de la retraite, ils ne sont déjà qu'un sur deux à occuper un emploi. Notre pays compte 300 000 chômeurs de plus de 60 ans. Autrement dit, vous ne ferez que transférer le déficit potentiel des caisses de retraite vers l'assurance chômage.

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Rappelons les termes de l'alinéa 1 : « I – Le livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié ». Je dois dire que j'ai du mal à percevoir la portée politique de vos amendements de suppression. Avis défavorable.

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J'avoue que j'avais du mal à comprendre le sens de ces amendements. Vous avez parfaitement le droit de relancer la discussion générale mais, sans parler d'obstruction parlementaire, je dirai qu'on perçoit le ridicule de certaines de vos propositions.

Je tiens à faire entendre d'autres voix dans ce débat : certains estiment ici que l'article 1er est bien écrit et qu'il pose de bons principes.

La commission rejette ces amendements.

Elle est saisie des amendements identiques n° 1345 de Mme Clémentine Autain, n° 1352 de M. Jean-Luc Mélenchon et n° 1356 de M. Adrien Quatennens.

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Parlons de ridicule : les mille pages de l'étude d'impact fournissent des études de cas erronées, susceptibles de fausser le jugement des parlementaires, mais aussi cocasses – pensons à ces aides-soignantes au salaire mirobolant qu'évoquait ma collègue Caroline Fiat.

Vous réaffirmez le principe de la retraite par répartition et de la solidarité entre les générations. L'un des nombreux problèmes que votre nouveau système pose, c'est qu'il passe d'un système à prestations définies, où l'assuré connaît le taux de remplacement, à un système de cotisations définies. Chaque personne qui cotise connaît la valeur du point au moment de son acquisition mais ignore sa valeur de service, ce qui l'empêche de faire des anticipations.

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J'admets parfaitement, monsieur Mattei, que vous puissiez trouver cet article 1er bien écrit même si nous aurions aimé que vous nous expliquiez pourquoi.

Je vais vous dire amicalement pourquoi nous avons choisi de déposer de tels amendements. Nous avons entendu toutes les rumeurs – y aura-t-il un 49-3 ? cette commission va-t-elle interrompre l'examen du texte ? – et nous nous sentons en insécurité dans ce débat. Je m'exprime en tant que président d'un groupe d'opposition qui veut s'identifier à une lutte dure. Vous le savez aussi bien que moi, ces soixante jours de grève sont un moment spécial dans l'histoire du pays et nous voulons tenir dignement notre rôle en reprenant à chaque article la totalité de notre argumentaire. Attendez-vous donc à des répétitions.

Je me saisis de toutes les occasions de supprimer ce que qui me paraît présenter un risque. S'agissant de système de retraite, la Commission européenne est sur notre dos depuis au moins dix ans. Elle est arrivée à ses fins dans pratiquement tous les pays ; il n'y a plus que ce maudit village gaulois qui résiste, ce qui pousse certains à dire que notre pays est irréformable – comme s'il y avait une obligation à réformer. Nous craignons que la retraite par capitalisation ne se profile à l'horizon. Affirmer que « les actifs d'aujourd'hui financent par leurs cotisations les retraites d'aujourd'hui » et que ce principe est « intangible » ne suffit pas à bloquer ce processus. À n'importe quel moment, les points peuvent être mis en réserve.

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Si nous avons déposé des amendements pour supprimer alinéa par alinéa les articles de ce projet de loi, c'est par cohérence avec l'opposition qu'exprime une majorité de Français. L'argument selon lequel ce projet de loi respecte l'engagement du programme présidentiel de ne pas modifier l'âge de la retraite est tombé. Certes, vous ne touchez pas à l'âge légal, mais vous augmentez l'âge effectif en diminuant le montant des pensions.

M. le secrétaire d'État ne nous a toujours pas répondu au sujet de la conférence de financement. Elle ne porte pas sur le nouveau système mais sur les générations nées avant 1975. Vous demandez aux partenaires sociaux de dégager 12 milliards d'euros d'économies avant même l'entrée en vigueur du système par points. Le débat sur l'âge pivot qui a lieu ces dernières semaines ne concerne pas ce projet de loi. Tout le monde a compris que l'âge d'équilibre demeurait.

Ce que vous présentez aux parlementaires et aux Français est insincère.

Je reviendrai sur le fait que l'étude d'impact est faussée comme l'ensemble des cas types présentés aux Français pour expliquer la réforme.

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Vos amendements visent à supprimer l'alinéa suivant : « 1° Après l'article L. 111-2-1, il est inséré un article L. 111-2-1-1 ainsi rédigé ». Mme Autain y a vu une allusion à la valeur du point, M. Mélenchon à la capitalisation et M. Quatennens à l'âge de départ. Nous ne devons pas avoir le même texte sous les yeux.

Avis défavorable.

La commission rejette ces amendements.

La commission examine les amendements identiques n° 1362 de Mme Clémentine Autain, n° 1369 de M. Jean-Luc Mélenchon et n° 1373 de M. Adrien Quatennens.

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L'amendement n° 1362 a pour objet de supprimer l'alinéa 3. Celui-ci vise à insérer, dans le code de la sécurité sociale, un article L. 111-2-1-1 ainsi rédigé : « La Nation affirme solennellement son attachement à un système universel de retraite qui, par son caractère obligatoire et le choix d'un financement par répartition exprime la solidarité entre les générations, unies dans un pacte social. » Nous ne sommes évidemment pas d'accord puisque nous ne cessons de contester son « universalité », comme l'ont fait le Conseil d'État et de très nombreuses personnes, majoritaires dans notre pays. Deuxième mensonge éhonté, vous touchez au système par répartition. Avec la loi « PACTE », vous avez préparé en outre le terrain au régime par capitalisation et à la privatisation du financement des retraites. Nous estimons enfin que votre système aggravera au contraire la situation actuelle et que le pacte social est totalement laminé par votre projet de loi.

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Je vous donne acte, monsieur le rapporteur, que je m'étais trompé d'alinéa. Vous me dites que j'ai lu « capitalisation » alors qu'il n'en est pas question dans le texte. Comme j'ai tenté de vous l'expliquer précédemment, le fait de parler de répartition n'empêche pas la capitalisation. Vous serez d'accord avec moi pour dire que même un système de capitalisation est un système qui répartit, parce qu'aucun système ne peut échapper à la démographie ! Quand la génération X prendra sa retraite, elle se partagera ce qu'il y a : le système de retraite est donc sensible à la démographie. Voilà pourquoi je dis qu'il ne suffit pas d'affirmer l'attachement à un système de répartition. Je prends le pari – j'espère ne pas être là pour voir ça ! – que l'étape suivante de la Commission et des autres organes européens consistera à dire aux Français : « Maintenant que vous avez instauré le système par points, il va falloir stocker les points pendant un moment pour en faire de la capitalisation, de manière à injecter de l'argent dans l'économie. » C'est exactement ce qu'a dit M. Le Maire lorsqu'il a défendu l'idée qu'il fallait développer la capitalisation au service de l'industrie du pays. Et ne nous dites pas qu'elle n'est pas prévue dans ce texte puisque vous poussez précisément les cadres supérieurs à aller vers la capitalisation ! Nous verrons, à l'article 64, comment vous comptez en régaler le pays.

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L'alinéa 3 contient au moins deux informations mensongères. La première, c'est l'instauration de ce fameux système universel : il n'en est rien ! Le Conseil d'État l'a souligné et nous vous avons démontré que vous allez créer autant de régimes différents que de générations. Mais surtout, l'universalité, c'est le pari de la jalousie entre les Français. L'intention réelle d'Emmanuel Macron est de limiter la part des richesses consacrée aux retraites, mais comme ce n'est pas acceptable pour le grand public, il dit : « Jalousez-vous les uns les autres », espérant que la jalousie des Français entre eux sera supérieure à l'aspiration générale à un bon niveau de retraite pour tous. Je rappelle au passage que les régimes spéciaux ne concernent que 3 % de la population active de notre pays ; or nous en avons beaucoup parlé dans le débat qui nous occupe.

La deuxième information mensongère concerne la répartition. Chacun a compris que votre système par points obligera toujours les actifs d'aujourd'hui à payer pour les retraités d'aujourd'hui. Je l'ai déjà expliqué, c'est l'étape intermédiaire nécessaire pour passer demain à un système par capitalisation. De plus, vous n'attendez pas de passer à un système de retraite par capitalisation pour encourager les Français à y recourir : s'ils veulent partir dès l'âge légal de départ sans avoir à subir la décote, ils ont plutôt intérêt à faire appel à leur banquier ou à leur assureur pour compléter leurs revenus !

Pire encore, vous adressez un message clair aux hauts revenus : en baissant le plafond à partir duquel ils ne font plus acquisition de droits nouveaux à la retraite, vous les incitez à se tourner vers un système par capitalisation. Ce faisant, et c'est absolument incroyable, le fait d'abaisser ce plafond pour les hauts revenus creusera un trou de 3,5 milliards par an dans les caisses de retraite. Oui, c'est effectivement un message clair que vous leur adressez : « Vous qui avez du fric, vous qui avez du pognon, arrêtez de le laisser dormir dans ce système rétrograde qu'est la sécurité sociale, et allez voir nos amis de BlackRock, qui se tiennent prêts à vous accueillir ! »

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Vos amendements visent à supprimer l'alinéa 3. Je ne vous conteste pas le droit de rejeter les outils que nous vous proposons d'adopter pour atteindre les objectifs. Toutefois, dès le début du texte, vous proposez de supprimer un objectif que nous pourrions partager avec vous, partis de gauche. « La Nation affirme solennellement son attachement à un système universel de retraite qui, par son caractère obligatoire et le choix d'un financement par répartition, exprime la solidarité entre les générations, unies dans un pacte social. » À défaut d'être d'accord sur les moyens, nous aurions pu nous retrouver sur cet objectif. Je suis donc défavorable à ces amendements.

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Quand on lit la suite du texte, on se rend bien compte qu'il y a un hiatus : c'est la raison principale de la critique faite à cet alinéa. Affirmer des principes généraux est une bonne chose mais quand on analyse les actes accomplis par le Gouvernement depuis 2017, on se rend compte qu'ils ne correspondent pas tout à fait à ces principes.

La réforme que vous nous proposez est une fusée à trois étages. Premier étage : l'augmentation de la CSG pour les retraités, qui revenait à baisser leurs pensions – on se souvient de votre entêtement à cet égard. Deuxième étage : la loi « PACTE », avec la création de nouveaux produits d'épargne retraite et la volonté de les développer. Troisième étage : l'affaiblissement de notre système solidaire et d'un droit garanti à la retraite. Et je crains un quatrième étage car je ne suis pas sûr que vous souhaitiez vous en arrêter là...

Dernière remarque : tout cela s'inscrit dans une cohérence politique incontestable. Vous avez commencé par vous attaquer au droit du travail, au droit à la formation, à l'assurance maladie et à l'assurance chômage : vous vous attaquez désormais à la retraite.

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Monsieur le rapporteur, si nous souhaitons la suppression de cet alinéa, c'est justement par souci de cohérence avec le reste de votre texte, que nous avons bien lu. Vos intentions sont toujours louables : libérer les énergies, très franchement, cela m'enthousiasme ! Je trouvais cela très intéressant. Le problème, c'est que quand on vérifie vos actes, on en est très loin ! De même que vous avez voulu détruire le code du travail pour en faire un par entreprise, vous prétendez désormais mettre en place un système universel et maintenir le système par répartition. En réalité, cet alinéa n'est justifié que parce qu'il serait difficile à Emmanuel Macron de dévoiler ses véritables intentions aux Français.

Si vous ne voulez pas supprimer cet alinéa, nous pouvons le rédiger autrement : « La Nation française désormais ne consacrera pas plus de 14 % de sa richesse nationale aux retraites. Pour atteindre cet objectif, bien que la productivité ait augmenté et que la richesse produite n'ait jamais été aussi mal répartie, les Français devront travailler toujours plus longtemps et au-delà de l'espérance de vie en bonne santé. » Vous avez le droit de penser que c'est ce qu'il faut faire pour notre pays, vous avez le droit de penser que c'est la bonne solution, mais ne le cachez pas ! Ne maquillez pas cela en parlant d'un système universel ou d'un encouragement à la répartition !

Les assureurs et les banques ne vous rendent d'ailleurs pas service. Ils n'arrêtent pas en effet de déclarer leur flamme à votre projet de loi dans toute la presse économique, éclairant ainsi vos intentions : oui, le système de M. Macron est une aubaine pour les retraites par capitalisation ! Il n'y a pas un matin sans que l'on entende, à la radio ou à la télévision, de la publicité pour une banque ou un assureur qui propose de compléter votre retraite à points. Ce que vous faites est clair, alors assumez-le, tout simplement !

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Ces amendements visent à supprimer la réaffirmation solennelle de l'attachement de la nation au principe de répartition. Le groupe majoritaire ne votera évidemment pas ces amendements car le principe de répartition est la base de la solidarité entre les générations et la condition nécessaire pour éviter le recours à la capitalisation, comme cela existe dans d'autres pays.

Le fait que ce système sera obligatoire pour 100 % des Français et qu'il touchera les revenus de 99 % d'entre eux, avec une cotisation de solidarité pour le pourcentage restant, signifie que nous sommes en train de créer un immense système public qui permettra d'assurer à la fois le niveau de vie et la solidarité à l'égard des accidents de vie : nous créons ainsi un nouveau système plus solidaire. Je réaffirme donc que le système par répartition obligatoire pour tous est une excellente solution ; les Français le savent, ils y sont attachés et, comme ils nous écoutent, je tiens à le rappeler au nom de tous.

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Il importe de sécuriser le texte. Vous ne pouvez pas affirmer votre attachement aux principes d'universalité et de répartition alors qu'ils sont battus en brèche par l'observation méticuleuse du reste des articles et de ce que vous avez accompli depuis deux ans et demi.

Vous avez commencé par faire en sorte qu'un euro cotisé ne produise pas les mêmes droits, en indexant de façon différente les retraités au-dessus et en dessous de 2 000 euros de pension. Vous fixez un principe et, dès que vous en avez l'occasion, vous y dérogez ! Vous prétendez avoir supprimé quarante-deux régimes spéciaux alors que vous en avez créé des dizaines ! On passera des régimes spéciaux à des régimes spécieux, car ceux que vous prétendez être les gagnants de la réforme ne le seront pas ! Il faut donc contester votre formulation : si un certain nombre de différences de traitement étaient admises historiquement dans les anciens régimes, le Conseil d'État, dans son avis, souligne que le principe d'égalité n'est pas assuré dans les différences que vous avez consacrées. Comment peut-on par exemple comprendre que les aiguilleurs du ciel puissent partir à la retraite avant les infirmières et les aides-soignantes ? Du point de vue de la pénibilité de ces métiers, l'un vaut au moins l'autre ! On en arrive à des situations aberrantes et absolument injustifiées.

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Quand le Premier ministre a entamé son grand oral sur les retraites, je me suis dit : « Qu'est-ce qu'il est brillant ! » Il parlait au coeur des Français en leur rappelant leur attachement à la répartition, aux solidarités entre les générations ; il a même fait appel au sang et aux larmes du Conseil national de la Résistance, alors que l'un de ses objectifs est de flinguer le statut que Marcel Paul a mis en place pour les électriciens gaziers, et que l'autre est de dénaturer le projet solidaire d'Ambroise Croizat.

Nous voulons faire tomber les masques et vous confronter à vos propres turpitudes. Je prendrai un exemple : vous réaffirmez votre attachement à la solidarité entre les générations. Lorsque vous exonérez les cadres à partir d'un certain niveau de revenus, vous privez les retraités de leurs contributions, enfonçant ainsi un coin dans la solidarité entre les générations. Vous réaffirmez solennellement l'attachement à un système universel alors que vous ne cessez de repousser les dates de fusion de tous les organismes de retraite. L'universalité n'est donc pas au rendez-vous.

En amendant ce titre Ier, nous vous mettons face à vos contre-vérités, vos mots volés, alors que votre projet vise instaurer progressivement un système de retraite par capitalisation. La secrétaire d'État Agnès Pannier-Runacher a parlé de Smarties : mais c'est le début de la fin, les Smarties, en matière de retraite par répartition, parce que c'est le début de la capitalisation !

La commission rejette ces amendements.

Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques n° 5060 de Mme Clémentine Autain, n° 5067 de M. Jean-Luc Mélenchon et n° 5071 de M. Adrien Quatennens ainsi que les amendements n° 2 de M. Stéphane Viry et n° 22588 de M. Sébastien Jumel.

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Si nous avons déposé de nombreux amendements de suppression d'alinéas, nous défendons également des amendements permettant de valoriser notre contre-projet. En l'occurrence, l'amendement n° 5060 a pour objet de substituer aux alinéas 3 à 15 les alinéas suivants :

« Art. L. 111-2-1-1. – La Nation affirme solennellement son attachement au caractère solidaire et obligatoire du système de retraites, ainsi qu'à la préservation du droit de partir à l'âge de 60 ans, garantissant ainsi une retraite agréable et un temps libre profitable. » Je rappelle que l'espérance de vie en bonne santé est de 63 ans : c'est dire l'intérêt du projet de société que nous soutenons.

« Elle garantit à toutes et tous la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, parce qu'il a atteint l'âge décent de 60 ans, ou avant ce terme, en raison de la pénibilité subie lors de l'activité professionnelle, en raison de son état physique ou mental, ou d'une carrière commencée précocement, a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence. » C'est une façon d'exprimer très clairement l'objectif que nous recherchons.

« Les différents paramètres à disposition des organisations de salarié et des organisations patronales afin d'assurer l'application de ces principes ne peuvent revenir sur ces limites d'âge de départ volontaire. » Cette disposition nous permet de sortir de votre cadre budgétaire contraint. On voit bien qu'avec vous, les partenaires sociaux, qui sont garants de l'équilibre, sans aucune logique de recettes, pourraient remettre en cause les bornes d'âge que nous souhaiterions fixer. Le présent amendement vise donc à les graver dans le marbre.

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La nouvelle rédaction proposée par l'amendement n° 5067 vise à ramener la retraite à 60 ans au coeur de la discussion. Ne tournons pas autour du pot : c'est cela que nous voulons faire ! Nous voulons entendre pourquoi la retraite à 60 ans était possible en 1981 avec trente-sept annuités et demie, et pourquoi elle n'est plus possible aujourd'hui. Y a-t-il eu une catastrophe ? Le pays est-il plus pauvre ? Non ! Selon vous, c'est parce que les gens vivent plus longtemps, mais vous vous trompez ! Les gens vivent plus longtemps parce qu'ils se sont précisément arrêtés de travailler à 60 ans avec trente-sept annuités et demie ! Nous avons pris à l'époque une mesure de santé publique en prenant une mesure sociale de retraite. Dans notre esprit, le progrès social est un aliment du progrès économique : nous ne nous retrouverons pas sur ce point parce que vous pensez que c'est seulement s'il y a du progrès économique qu'il peut y avoir du progrès social. Nous voulons donc relancer le sujet de la retraite à 60 ans : c'est l'oeuvre historique de notre famille politique au sens large, qui a été réalisée en 1981 – sauf erreur, madame la présidente, vous étiez à l'époque d'accord avec cette idée ! Nous en sommes tous au même point : nous pensons que 60 ans est un bon âge pour partir à la retraite parce que les gens ne sont pas épuisés.

Je vous ai rappelé un peu plus tôt l'histoire de 1910 : figurez-vous qu'une bonne partie des salariés ne voulaient pas alors entendre parler de cette cotisation obligatoire qu'on leur infligeait pour partir à la retraite. Ils refusaient en effet de payer la retraite pour les morts, parce qu'eux-mêmes seraient morts quand ils auraient le droit de partir à la retraite à 65 ans. Or nous sommes progressivement en train de rétablir la retraite pour les morts : les gens partiront à la retraite au-delà de l'âge moyen d'espérance de vie en bonne santé, qui est de 63 ans. Ce n'est pas admissible, après que le pays a fait tant de progrès et accumulé autant de richesses ! La retraite, c'est 60 ans et pas un an de plus !

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Il s'agit pour nous de répondre à la commande passée par le Premier ministre, qui s'est dit prêt à entendre toutes les propositions pour assurer l'équilibre financier du système. Pour cela, il existe d'autres modalités que le fait de décaler, génération après génération, l'âge de départ à la retraite. Vous poursuivez un objectif arbitraire, comptable, budgétaire avec ces 14 % du PIB consacrés au financement des retraites, lesquels en outre diminueront, selon le Conseil d'État. Or votre variable d'ajustement, c'est la vie des gens et l'âge auquel ils pourront partir à la retraite. Nous vous appelons donc à faire exactement le contraire. Quelle idée se fait un grand pays comme la France de ce troisième âge de la vie qu'est la retraite ? Pour nous, compte tenu de ce qu'est l'espérance de vie en bonne santé, les gens doivent pouvoir partir à 60 ans, avec aucune pension sous le SMIC pour une carrière complète et personne sous le seuil de pauvreté.

Comment allons-nous financer, nous demanderez-vous ? Il faut au préalable se demander s'il est souhaitable de partir à la retraite à un âge décent avec un bon niveau de pension. Ensuite, la politique dicte sa loi et nous mettons la comptabilité au service de notre objectif politique. Financer la retraite à 60 ans ne nécessite que deux points de PIB en plus d'ici à 2040 : très franchement, cela n'a rien d'impossible, surtout quand on sait ce qu'est la répartition de la richesse produite dans notre pays ! Au moment même où nous débattons des retraites, nous apprenons dans un rapport d'Oxfam qu'en France, sept milliardaires possèdent autant que 30 % de la population : oui, nous avons un problème de répartition des richesses. Il est possible de financer la retraite à un âge décent avec un bon niveau de pension.

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Par l'amendement n° 2, le groupe Les Républicains souhaite modifier substantiellement la rédaction de l'article 1er. Nous avions, mais en vain, souhaité modifier les principes généraux de cette réforme des retraites. Nous réitérons donc notre proposition de projet de réforme des retraites alternatif en nous appuyant sur les textes existants, de façon à aboutir à une rédaction plus lisible et améliorée.

Les grands axes de ce projet alternatif seraient les suivants : tout d'abord, la mise en place d'un régime universel de base, jusqu'à un PASS. Nous souhaitons en effet maintenir les régimes complémentaires, qui ne coûtent pas d'argent au contribuable français et qui, à travers les caisses autonomes, permettent à certaines professions de faire face à la nécessité d'assurer un régime de retraite décent à celles et ceux qui leur sont affiliés.

Nous souhaitons également écrire à nouveau noir sur blanc ce qui constitue la condition essentielle de la sécurité du futur régime de retraites : sa pérennité financière. Je réitère notre forte opposition à ce que l'Assemblée nationale soit saisie d'un texte qui ne garantisse pas le financement du système des retraites : cela nous semble non seulement indigne de la représentation nationale mais surtout de nature à renforcer l'angoisse de nos compatriotes. La pérennité financière doit donc être inscrite dans le texte de loi avec des mécanismes précis de financement.

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Vous avez compris qu'il s'agit pour nous de réécrire l'article 1er. François Morel a dit dans sa chronique sur France Inter : « Tâchons, dans la mesure du possible et afin d'assainir les caisses de l'État, de mourir tôt ! Travaillons toute la vie, puis mourrons avant d'envisager ces années superflues ! [...] » Si je l'avais entendue avant de rédiger l'amendement, je l'aurais reprise à mon compte car c'est une belle traduction de l'article 1er.

Nous proposons donc, avec l'amendement 22588, une rédaction par l'absurde : la Nation assume pleinement son attachement à un système inéquitable de retraite ; elle encourage ceux qui peuvent y échapper à recourir à la retraite par capitalisation ; elle grave dans le marbre l'inégalité entre les sexes et entre les générations ; elle se fixe comme objectif de résorber les dernières traces du programme du Conseil national de la Résistance ; elle se fixe l'objectif clair de dégradation du niveau de vie des retraités et de versement d'une retraite bien inférieure aux revenus perçus pendant la vie active.

Google propose à ceux qui ne parlent pas bien une langue étrangère le service Google Traduction : je lui ai donc soumis votre projet rédigé dans la langue des Marcheurs, et voilà le résultat ! Je le trouve assez fidèle à ce que nous avons compris de votre projet.

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Concernant les amendements de La France insoumise, M. Mélenchon se demande ce qui a changé depuis 1981 : l'augmentation de l'espérance de vie est manifeste, tout comme l'entrée tardive sur le marché du travail. Les Français ont conscience que l'on ne peut pas réduire la durée du travail à chaque bout : il faut en tenir compte, tout comme il est nécessaire de tenir compte de la qualité de vie et de la répartition entre le temps de travail et le temps de loisir. Avis défavorable.

Concernant l'amendement n° 2 du groupe Les Républicains, il correspond exactement à l'amendement que vous aviez déposé avant l'article 1er, à l'exception de l'enjeu de la pénibilité. Je ne reviendrai pas sur le fond ; avis défavorable.

Quant à M. Jumel, je lui conseille de vérifier la version de Google Traduction car ce n'est pas l'objectif de notre projet. Nous constatons l'insuffisance du système actuel ; les outils peuvent peut-être être améliorés mais le cadre général apporte une bonne réponse aux difficultés que le système actuel rencontre. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

La commission se saisit de l'amendement n° 22057 de M. Sébastien Jumel.

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Le présent amendement a été pour partie défendu à l'instant par Sébastien Jumel. Il a pour objet de vous aider à mieux formuler vos intentions car « Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement ». Nous avons en effet constaté que les outils que vous avez mis à disposition ne correspondent pas du tout à vos intentions, ou alors il faudra nous démontrer en quoi le système que vous mettez en place répond aux enjeux. Pour l'instant, il n'en est rien.

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Je m'inscris en faux contre votre lecture de la réforme. Vous parlez d'iniquité : nous préférons l'application d'un corpus universel, ou le plus homogène possible si le mot « universel » vous gêne, de règles et la prise en compte de situations spécifiques. Vous évoquez l'injustice : nous préférons l'extension du compte professionnel de prévention de la « loi Touraine » à la fonction publique, l'attribution de droits aux aidants ou la retraite minimale à 1 000 euros. Vous évoquez le financement individuel : nous préférons la mutualisation de l'ensemble des ressources face au défi démographique. Vous évoquez la capitalisation : nous préférons l'affirmation solennelle de l'attachement de la nation à la répartition. Je vous rappelle que le seuil des 3 PASS couvre 99 % de nos concitoyens. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement n° 21525 de M. Pierre Dharréville.

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Le présent amendement a pour objet de remplacer le mot « universel » par le mot « inéquitable », qui me semble plus approprié pour décrire vos intentions.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques nos 14652 de M. Pierre Dharréville et 14653 de M. Sébastien Jumel.

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L'amendement n° 14652 vise à apporter une précision sur la nature du système de retraite, qui doit être à prestations définies. Or votre projet de loi prévoit un système à cotisations définies, c'est-à-dire que vous définissez au départ la masse globale des richesses produites consacrée aux retraites – une masse décroissante – et que vous honorez ensuite ce que vous pouvez, sans garantie d'un véritable taux de remplacement. Nous préférons donc le système inverse, à prestations définies, qui se fixe un objectif en la matière : nous proposons de l'inscrire dans la loi.

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Les règles garantissant le taux de remplacement ne sont pas gravées dans le marbre de la loi. Le niveau des prestations n'est pas non plus garanti dans le projet que vous présentez. Nous avons la certitude que, in fine, cette réforme dégradera le niveau des pensions et l'accès aux prestations telles qu'elles sont aujourd'hui définies. Tel est le sens de l'amendement n° 14653.

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Je vous remercie pour ces amendements, qui me permettent de mettre un terme à un faux débat entre régime à cotisations définies et régime à prestations définies. Le système actuel, marqué par de nombreuses réformes, n'est pas entièrement un régime à prestations définies : depuis 1987, les réformes des différents gouvernements ont conduit à modifier l'indexation des droits, l'indexation des pensions liquidées, l'âge d'ouverture des droits, l'âge du taux plein, la durée d'assurance. Il n'y a donc pas de prestations définies dans notre régime par annuité.

À l'inverse, le meilleur moyen de garantir de bonnes pensions est d'assurer un équilibre financier durable et un pilotage fin, avec de bonnes capacités de projection, un volant important de cotisations – 82 % – renforcé par des ressources fiscales stables – CSG, taxe sur les salaires. Le système proposé ne sera pas un régime à cotisations définies mais un système qui anticipe mieux et s'appuie sur des cotisations équitablement réparties. Avis défavorable.

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Pour appuyer la démonstration de nos collègues communistes, l'objectif a été de plafonner la part des richesses consacrée aux retraites ; Jean-Paul Delevoye avait même évoqué un plafond de 14 %. Depuis, nous avons appris par le Conseil d'État que ce projet de loi aurait pour effet de faire diminuer cette part des richesses consacrée aux retraites. Les cotisations et l'âge de départ seront donc bien la variable d'ajustement. Votre objectif n'est pas de dire aux gens : « Vous partirez à tel âge, avec tel niveau de pension », puisqu'il s'agit précisément de votre variable d'ajustement. C'est toute la différence entre un système à prestations définies, dont l'objectif est bien de soulager la vie des gens et d'y adapter la comptabilité, et un système à cotisations définies, qui se débrouille avec le niveau de cotisations défini – et tant pis si ce n'est pas suffisant !

J'entends parfois l'argument qui nous est opposé : 14 % du PIB suffiraient à amortir les départs en retraite des prochaines décennies. Mais la part de PIB est ainsi plafonnée alors que la part des seniors dans la population de ce pays continue à augmenter. Chacun comprend donc que votre annonce programme la baisse des pensions. Certes, vous dites que les pensions ne baisseront pas, mais tout le monde comprend que s'il faut travailler plus longtemps pour atteindre le même niveau de pension, c'est bien que le niveau de pension a baissé. Vous parlez du temps de travail plutôt que du niveau des pensions, mais cela revient exactement au même. Ces amendements sont donc tout à fait justifiés.

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Monsieur le rapporteur, je crains que votre réponse n'éteigne pas le débat. Je n'ai jamais défendu la modification des indexations, les baisses de pensions au gré des réformes, etc. – bien au contraire ! La dégradation qu'a connue notre système de retraite depuis quelques décennies est d'ailleurs une partie du problème.

Je vous retourne donc la question : à quel endroit dans le texte fixez-vous les garanties sur le taux de remplacement et sur un véritable droit à la retraite ? Cela ne figure nulle part. Nous sommes dans une réforme paramétrique permanente, où la variable d'ajustement est l'âge de départ et, de ce fait, le niveau des pensions. L'objectif fixé dans l'étude d'impact, c'est qu'au moins 50 % des gens travaillent jusqu'à l'âge d'équilibre : les 50 % restants partiront donc avec une décote et leurs pensions baisseront. Vous avez joué sur ces paramètres mais vous ne fixez aucun objectif réel de droit à la retraite : c'est bien le problème.

Par ailleurs, concernant la prévisibilité, divers outils ont permis d'obtenir des éléments extrêmement précis sur la stabilité financière et sur l'avenir financier du système. Le dernier rapport du COR en est un exemple.

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Ces amendements ont le mérite de poser assez nettement les termes du débat. Les 14 % constituent un plafond : or l'étude d'impact évalue ce taux à 12,9 %, alors même que le nombre de retraités va augmenter de façon considérable. Pour faire simple, vous réduisez la part du gâteau et le nombre de ceux qui demanderont une part va croître : pas besoin d'être un grand mathématicien pour comprendre que la part sera plus petite ! Mais c'est un sujet que vous esquivez : votre seule règle d'or, qui figure dans la loi organique et non dans la loi ordinaire, c'est l'équilibre financier du système. Cela signifie que, par exemple, si nous devions connaître une crise avec un choc asymétrique, comme en 2008, la seule variable d'ajustement serait le niveau des pensions ou l'âge de départ à la retraite. Vous ne dites pas en revanche comment évolueront le taux de remplacement et le niveau relatif des retraités par rapport aux actifs. La réalité, c'est que tous ceux qui partiront à la retraite verront ce taux de remplacement baisser substantiellement et que, en outre, ils devront partir plus tard. La réforme ne peut pas être juste dans ces conditions.

Vous pouvez esquiver le débat mais les termes de « justice » et de « progrès » sont vains : derrière ces paroles, il n'y a rien. Avec le minimum contributif, vous entrez à 85 % du SMIC mais vingt ans plus tard, compte tenu de la règle de l'indexation, vous serez à 70 % du SMIC, parce qu'il y aura eu un décrochage entre les pensions et le SMIC, comme il y aura eu un décrochage entre le niveau de vie des retraités et celui des actifs. Voilà la réalité objective. Ce que vous semblez donner d'une main, vous le reprenez de l'autre.

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Nous avons démontré que votre réforme anticipe et accentue la baisse du taux de remplacement prévue par le rapport du COR. Nous avons également montré, à l'aide d'arguments qui ne souffrent aucune objection, que le système à points que vous préconisez n'offre aucune garantie aux salariés sur le niveau de leur retraite, puisque vous ne fixez aucune cible, aucun objectif, ni aucune garantie pour le taux de remplacement. Enfin, et vous le reconnaissez vous-mêmes dans le rapport qui a inspiré ce texte, « le rendement définitif ne pourra être acté qu'en 2024, en fonction des hypothèses économiques qui prévaudront alors ». Autrement dit, vos promesses sur le rendement garanti sont des promesses de Gascons.

La commission rejette ces amendements

Elle examine ensuite l'amendement n° 20533 de M. Matthieu Orphelin.

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Le système universel de retraite incarne une ambition forte de solidarité, où la société tout entière participe au financement de la branche vieillesse de l'assurance maladie, et donc à la retraite de ses aînés. S'il va de soi que notre responsabilité est de garantir l'équilibre et la pérennité de notre système de retraite pour les jeunes générations, nous consacrons aussi, dans ce texte, la solidarité au sein de chaque génération.

Indépendamment des statuts, des branches, des métiers, le système universel marque le rassemblement de la société tout entière derrière le principe d'une solidarité au sein de chaque génération. Chacun participe à la solidarité nationale pour tous. Cet amendement vise à rappeler ce qui fait la force de ce projet de loi, à savoir la solidarité entre les générations, mais aussi au sein même de chaque génération.

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Je vous remercie pour cet amendement et je vous rejoins totalement : la solidarité s'exprime à la fois entre les générations et au sein des générations. Mais ces deux formes de solidarité figurent déjà à l'article 1er, puisqu'il est fait mention de la « solidarité entre les générations » à l'alinéa 3 et d'un « objectif de solidarité au sein de chaque génération » à l'alinéa 6. Je vous invite à retirer votre amendement, car il est satisfait par la rédaction actuelle de l'article.

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Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites

Dans le prolongement des propos du rapporteur, je veux rassurer les auteurs de cet amendement et leur dire que la volonté du Gouvernement est bien de garantir la solidarité intergénérationnelle. C'est d'ailleurs l'un des fondements du système que nous nous proposons de reconstruire. De plus en plus de jeunes disent ne plus croire dans le système par répartition. Or nous, nous voulons le voir perdurer, parce qu'il fait l'honneur de notre société et de notre République. J'espère que mes mots vous auront rassurés ; sachez en tout cas que tout cela figure dans le texte et que je fais la même lecture que le rapporteur de l'alinéa 6.

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Cette solidarité au sein d'une même génération existe déjà dans le régime actuel de retraite, par exemple au sein de l'AGIRC-ARRCO, où la somme reversée ne correspond pas toujours exactement à la cotisation. Ce système, qui fonctionne, risque pourtant de disparaître, puisque votre texte prévoit la fusion l'AGIRC-ARRCO au sein du régime universel. C'est tout un système social qui risque de disparaître.

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Monsieur le secrétaire d'État, vous n'avez pas le droit d'invoquer les inquiétudes de la jeunesse quant à la pérennité de notre système de retraite par répartition pour justifier sa remise en cause. C'est insupportable ! C'est comme si vous disiez à une personne qui a peur en permanence : « Rassure-toi, on va supprimer tous les policiers ! » C'est complètement surréaliste et c'est insupportable ! Vous avez évoqué les agriculteurs pour flinguer les régimes spéciaux. Et maintenant, vous invoquez les inquiétudes de la jeunesse pour remettre en cause le régime par répartition ! Les inquiétudes des jeunes sont réelles et légitimes : mes enfants s'inquiètent pour l'avenir, surtout quand ils vous écoutent. Mais n'utilisez pas ces inquiétudes légitimes pour justifier cette mauvaise réforme !

La commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement n° 760 de M. Patrick Hetzel.

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Depuis deux ans, nos retraités ont subi de plein fouet l'augmentation de la CSG puis la désindexation de leurs pensions de retraite, ce qui a réduit leur pouvoir d'achat. Et chat échaudé craint l'eau froide.

Avec cet amendement, nous proposons donc que le montant des pensions de retraite ne puisse pas diminuer du fait de décisions gouvernementales, de mesures économiques ou de changements de politique fiscale.

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Les éléments concernant l'évolution des retraites et des pensions sont évoqués plus loin, aux articles 9, 11 et 55. Ce dernier définit les marges de manoeuvre de la future Caisse nationale de retraite universelle. Avis défavorable.

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J'aimerais faire quelques remarques sur l'article 1er et sur le projet de loi dans son ensemble.

Premièrement, je rappelle que les pensions augmentent en fonction de l'inflation. Deuxièmement, il est prévu que la valeur du point évolue en fonction de l'augmentation des salaires qui, généralement, est supérieure à celle de l'inflation.

Ce texte confie par ailleurs la gouvernance du système aux partenaires sociaux, qui auront pour mission d'assurer son équilibre sur des périodes de cinq ans. Le régime AGIRC-ARRCO, qui est lui-même géré par les partenaires sociaux, a fait ses preuves : au cours de la dernière décennie, la valeur du point n'a pas baissé.

Enfin, nous réaffirmons le principe du système par répartition, comme cela a été dit à maintes reprises.

L'article 1er est donc beaucoup plus protecteur que le droit actuel. Il me semble important de faire confiance à la gouvernance et aux partenaires sociaux qui auront à gérer ce système.

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L'indexation des retraites est une question très importante, mais le discours de la majorité est souvent ambigu à ce sujet. Ce projet de loi prévoit bien, à terme, une indexation du point sur l'évolution des salaires, mais pas une indexation des pensions. Ce n'est pas la même chose, mais vous entretenez cette confusion dans le débat public. Je me permets donc de souligner que vous n'avez pas prévu, pour l'instant, d'indexer les pensions sur les salaires.

Monsieur le secrétaire d'État, vous avez évoqué l'inquiétude de la jeunesse et je voudrais prolonger les propos de mon collègue Sébastien Jumel. Vous reprenez à votre compte l'idée selon laquelle le système actuel serait en péril, alors même que le COR nous a dit que ce n'était pas le cas. Le fait que vous vous fondiez sur des fake news pour défendre votre projet de loi est tout de même problématique ! Je vous invite par ailleurs à mesurer la portée de votre argument : si le fait que le système actuel suscite des inquiétudes suffit à l'invalider, alors vous devriez immédiatement abandonner le vôtre !

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Je veux souligner l'intérêt de l'amendement qu'a défendu notre collègue Jean-Pierre Door. Au cours des dernières années, nos retraités ont vécu la sous-indexation des pensions comme une profonde injustice, dans la mesure où ils n'avaient plus aucun moyen d'agir sur leur pouvoir d'achat.

Monsieur le rapporteur, vous avez répondu sur la forme, mais pas sur le fond. Vous avez renvoyé aux articles 9, 11 et 55 du projet de loi, mais si nous ne posons pas quelques grands principes dès l'article 1er, nous resterons dans le flou. Et chacun sait que quand c'est flou, il y a un loup.

Votre manière ambiguë de formuler les choses nous fait passer à côté d'un débat de fond. Votre démonstration repose sur la valeur d'acquisition du point, mais ce qui compte, c'est sa valeur de service, au moment de la liquidation de la retraite. Qu'en sera-t-il ? Il faut que vous nous rassuriez à ce sujet.

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L'indexation des pensions et celle du point sont des questions très importantes.

L'indexation des pensions sur l'inflation était déjà inscrite dans le code de la sécurité sociale et cela n'a pas empêché le Gouvernement d'y déroger pour prendre dans la poche des grands-mères de quoi payer les augmentations de pouvoir d'achat que les employeurs refusaient à leurs salariés.

Quant à la prétendue indexation du point sur les salaires, elle est toute relative... Jusqu'en 2045, le taux d'augmentation de la valeur du point sera compris entre celui de l'inflation et celui des salaires. Après 2045, ce principe sera tout sauf une règle d'or, puisqu'on pourra y déroger pour garantir la vraie « règle d'or », celle de l'équilibre économique du système. Vous avez la règle d'or à géométrie variable : vous ne l'inscrivez dans le marbre que lorsqu'elle permet de faire des économies.

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J'aimerais vous soumettre cette analyse des Économistes atterrés, qui ont décortiqué votre texte : « La plupart des salariés ont, dans l'ensemble de leur carrière, des hausses de salaire plus fortes que celle du salaire moyen qui est pris en compte pour valoriser le point de retraite, de sorte que leur salaire de fin de carrière est supérieur au salaire moyen de leur carrière revalorisé avec le salaire moyen de l'ensemble des salariés. Avec une hausse moyenne de salaire de 0,5 % par an de plus que le salaire moyen, le salaire de fin de carrière est supérieur de 11 % au salaire moyen revalorisé. » Je vois que certains sont perdus, mais les Français le sont aussi !

Qui sait ce qui peut arriver d'ici à 2045 ? Les Présidents de la République qui se seront succédé auront peut-être remis en cause, les uns après les autres, les promesses non réalisables que vous faites aujourd'hui. Les Économistes atterrés, en tout cas, font la démonstration qu'avec ce référentiel, vous dévalorisez le niveau des pensions.

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Le niveau des pensions va baisser : c'est un fait. S'il faut travailler plus longtemps pour obtenir le même niveau de pension, c'est bien qu'à âge égal, le niveau des pensions va baisser.

J'en viens à la question de la valeur du point. On entend souvent que votre projet de loi sacralise la valeur du point et que celle-ci ne baissera pas : ce principe serait gravé dans le marbre de la loi. Mais j'insiste sur le fait que la valeur du point n'offre absolument aucune garantie sur le niveau des pensions, parce qu'il faut effectivement distinguer entre la valeur d'acquisition et la valeur de service du point. Entre les deux, il y a un coefficient de conversion. Or vous pourrez ajuster les différents paramètres, notamment en fonction de l'espérance de vie.

Un de nos collègues a dit qu'adopter le système par points, c'était faire un pari morbide, et je crois qu'il a eu une bonne intuition. Au sein d'une même génération, il vaut mieux que les autres meurent tôt, pour que la part du gâteau qui vous revient soit plus grande. La valeur d'acquisition et la valeur de service sont différentes et le coefficient de conversion peut varier. Vous pouvez donc modifier tous les paramètres. Mais ce sur quoi vous ne pouvez pas vous engager, c'est sur le montant des pensions : vous ne pouvez pas vous engager sur des taux de remplacement, précisément parce que c'est la variable d'ajustement qui vous permettra de respecter votre règle d'or budgétaire, celle des 14 % de PIB.

La valeur du point n'offre aucune garantie. La valeur d'acquisition du point ne baissera pas, mais les pensions, elles, pourront très bien chuter. C'est d'ailleurs ce qui va se produire.

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J'ai eu beaucoup de plaisir à entendre un député de la majorité nous dire que le régime AGIRC-ARRCO était bien géré et à l'équilibre depuis dix ans. Mais cela m'amène à poser deux questions. Pourquoi, tout d'abord, fondre le régime AGIRC-ARRCO dans le régime universel, puisque cela va le faire disparaître ? Deuxièmement, pourquoi abandonner la gouvernance paritaire qui est actuellement celle de l'AGIRC-ARRCO ?

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J'aimerais enfoncer le clou. Le régime par répartition que vous voulez instaurer, c'est plus ou moins celui de l'AGIRC-ARRCO. Alors, pourquoi ne pas réfléchir à partir de ce régime, que nous connaissons et sur lequel nous avons du recul ? Pourquoi ne pas avoir un vrai débat à ce sujet ? Le secrétaire d'État n'a répondu à aucune des questions que nous avons soulevées, alors qu'elles mériteraient qu'on en débatte.

Les arguments que nous exposons depuis tout à l'heure, ce sont ceux que nous entendons au sein de la société et dans les mobilisations sociales. Les différentes réformes qui ont eu lieu depuis 1993 ont entraîné une libéralisation de notre économie et une dégradation du système des retraites. Quand on a fait le choix d'indexer les pensions, non plus sur les salaires, mais sur l'inflation, on a fait baisser les pensions. Nous avons du recul sur AGIRC-ARRCO et nous savons que le montant des pensions a fini par baisser au sein de ce régime.

Vous êtes en train d'amplifier des mesures sur lesquelles nous avons déjà du recul et une vraie visibilité. Ne faisons pas comme si nous partions de zéro et comme si nous ne savions pas que lorsqu'on favorise le régime économique libéral, on réduit les pensions.

La commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques n° 1424 de Mme Clémentine Autain, n° 1431 de M. Jean-Luc Mélenchon et n° 1435 de M. Adrien Quatennens.

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L'amendement n° 1424 vise à supprimer l'alinéa 4, qui introduit les objectifs que « la Nation assigne au système de retraite ». Les six objectifs que vous fixez – l'équité, la solidarité, la garantie d'un niveau de vie satisfaisant, la liberté de choix du moment du départ, l'objectif de soutenabilité économique et l'objectif de lisibilité – sont insincères. En effet, le système que vous proposez est inéquitable et sexiste et ne promeut pas la solidarité, ni entre les générations, ni entre les retraités eux-mêmes. Il forcera les personnes à se maintenir en activité le plus longtemps possible et organisera une individualisation qui rendra, de fait, le système illisible.

Vous devriez exposer clairement vos objectifs, et d'abord celui de faire faire des économies à l'État, car c'est bien la règle d'or qui dicte le calendrier et le contenu de cette réforme. Si vous sacralisez la part du PIB consacrée aux retraites, c'est dans le but de faire des économies. Par ailleurs, vous ouvrez la voie au système par capitalisation : chacun sait que la baisse des pensions et le manque de lisibilité du système vont amplifier la privatisation de l'assurance retraite. Tels sont vos vrais objectifs !

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L'amendement n° 1431 vise également à supprimer l'alinéa 4, car je ne crois pas que vous proposiez, avec ce texte, un système universel de retraite.

J'aimerais que nous sortions enfin du non-dit qui entoure la question de la capitalisation. Je veux bien croire que nombre d'entre vous y sont hostiles et que ce n'est pas ce que prévoit ce texte, mais l'intelligence commande de voir ce qui, dans un moment politique, en prépare un autre. Si la retraite par capitalisation était une incongruité totale, vous pourriez m'accuser d'être incongru, mais nous sommes en plein dedans ! Nous sommes dans une période où, partout, sur tous les terrains, un système cherche à marchandiser ce qui autrefois n'était pas dans la sphère marchande. Il y a encore vingt ou trente ans, personne n'imaginait que la santé ferait un jour partie de la sphère marchande !

Les retraites représentent 312 milliards d'euros. On peut donc comprendre que ceux qui pensent que la meilleure place, pour l'argent, c'est dans la sphère marchande, s'y intéressent de près. En décidant de sortir du système les 350 000 personnes dont les revenus dépassent trois fois le plafond de sécurité sociale, vous retirez 7 milliards de financement au régime général, tout en obligeant ces personnes à cotiser à des régimes par capitalisation. C'est inévitable : elles vont forcément chercher à protéger leurs revenus de remplacement. Non seulement le système économique français va y perdre, mais vous favorisez la logique de la capitalisation.

Le ministre Bruno Le Maire n'a pas eu vos pudeurs : il a dit qu'il était favorable au système des assurances et qu'il souhaitait leur développement. Ce ne sont pas des lubies, c'est écrit dans votre texte et c'est en marche dans tout l'Europe.

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Avec l'alinéa 4, vous prétendez une nouvelle fois que le système que vous nous proposez est universel. Or nous avons montré, au cours de nos quelque 4 heures de débat, qu'il y aura autant de régimes spéciaux que de générations. Le Conseil d'État a lui-même indiqué qu'il y aurait au moins cinq régimes différents, sans compter les dérogations. Cet alinéa, qui fait référence à un système « universel », mérite donc d'être supprimé.

Vous faites ensuite la liste des objectifs visés par ce projet de loi, mais aucun d'eux ne correspond réellement à ce que vous êtes en train de faire. Il faudrait plutôt écrire que votre objectif est de faire travailler les Français plus longtemps, pour ne pas avoir à organiser le partage de la richesse produite, que vous favorisez la capitalisation par l'abaissement du plafond pour les hauts revenus et que vous voulez limiter la part des richesses consacrées aux retraites. Tels sont vos vrais objectifs : c'est pourquoi j'appelle à supprimer l'alinéa 4.

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Je vais me contenter de rappeler les objectifs énoncés à l'article 1er : équité, solidarité, garantie d'un niveau de vie satisfaisant, liberté de choix pour les assurés, soutenabilité économique et lisibilité des droits. Je pense que nous pouvons nous mettre d'accord sur ces objectifs. Nous pourrons ensuite, au fil de nos débats et de l'examen des articles, débattre de la meilleure manière de les atteindre. Avis défavorable sur ces trois amendements.

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Chers collègues, votre argument me paraît totalement inapproprié. Vous qui appelez constamment au plafonnement des revenus et des salaires, vous vous opposez aujourd'hui au plafonnement des pensions de retraite pour les plus hauts revenus. Il y a là une incohérence que je dénonce et que je ne comprends pas. Les plus hauts revenus verseront une cotisation de solidarité, dont on pourra discuter le montant et qui n'ouvrira pas de droits : c'est une bonne mesure, qui a une vraie dimension redistributive. Vous avez beaucoup cité l'étude d'impact, mais vous avez omis de dire qu'elle juge ce projet de loi puissamment redistributif.

La commission rejette ces amendements.

Puis elle examine l'amendement n° 21527 de M. Sébastien Jumel.

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Vous répétez le mot « universel » dans tout votre texte, comme un slogan. Et nous vous invitons, à chaque fois qu'il apparaît, à préciser votre pensée.

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Je note la cohérence du groupe de la Gauche démocrate et républicaine sur cette question. Je reste moi aussi cohérent et j'émettrai donc un avis défavorable sur cet amendement.

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J'aimerais dire un mot de la redistributivité et de la réduction des inégalités. Dès lors que vous faites sortir du système de retraite les 1 % de Français les plus riches, vous améliorez mécaniquement la redistributivité en réduisant les écarts de pensions. C'est mécanique, mais cela ne change rien. Est-ce un progrès d'avoir 60 % des pensionnés dans un filet de sécurité et 40 % des femmes ? C'est un nivellement par le bas. Je ne crois pas que cette réforme apporte des progrès de ce point de vue.

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Il me semble que l'argument de l'universalité n'a pas résisté à ces quatre heures de débat et, de ce point de vue, j'estime que nous avançons bien. Je regrette toutefois que nos collègues de la majorité interviennent aussi peu dans nos débats. J'espère que, dans la soirée et dans les prochains jours, nous aurons des échanges plus nourris. Nous avons le désagréable sentiment que vous attendez que ça se passe.

Si j'étais à votre place, convaincu que ce nouveau système va être formidable, je mettrais un peu plus de coeur et d'enthousiasme à le défendre. Qu'attendez-vous pour monter au créneau et pour défendre votre système, qui est si juste et si simple que la France en a tellement envie ? Nous avons l'habitude des meetings et nous pouvons parler longtemps, mais nous aimerions qu'une vraie confrontation ait lieu : ce serait plus intéressant.

La commission rejette l'amendement.

La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.

Membres présents ou excusés

Réunion du lundi 3 février 2020 à 16 heures 15

Présents. – Mme Clémentine Autain, M. Thibault Bazin, Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, Mme Aude Bono-Vandorme, Mme Brigitte Bourguignon, Mme Marine Brenier, M. Jean-Jacques Bridey, M. Fabrice Brun, Mme Céline Calvez, M. Gilles Carrez, M. Lionel Causse, M. Gérard Cherpion, Mme Christine Cloarec-Le Nabour, M. Olivier Damaisin, M. Yves Daniel, M. Dominique Da Silva, M. Pierre Dharréville, M. Jean-Pierre Door, Mme Jeanine Dubié, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Nathalie Elimas, Mme Catherine Fabre, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Albane Gaillot, M. Éric Girardin, M. Guillaume Gouffier-Cha, M. Fabien Gouttefarde, Mme Carole Grandjean, M. Brahim Hammouche, Mme Danièle Hérin, M. Sacha Houlié, M. Régis Juanico, M. Sébastien Jumel, Mme Fadila Khattabi, Mme Célia de Lavergne, Mme Marie Lebec, M. Didier Le Gac, Mme Constance Le Grip, Mme Monique Limon, M. Jacques Maire, M. Jacques Marilossian, M. Jean-Paul Mattei, M. Jean François Mbaye, M. Thierry Michels, M. Patrick Mignola, Mme Cendra Motin, Mme Sophie Panonacle, M. Adrien Quatennens, Mme Valérie Rabault, M. Vincent Thiébaut, M. Nicolas Turquois, M. Boris Vallaud, M. Olivier Véran, Mme Corinne Vignon, M. Éric Woerth

Assistaient également à la réunion. – M. Jean-René Cazeneuve, M. Alexis Corbière, M. Bastien Lachaud, M. Jean-Luc Mélenchon, Mme Stéphanie Rist