Intervention de Dominique Potier

Réunion du mardi 20 mars 2018 à 17h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Potier :

Je vais emboîter le pas aux deux interlocuteurs précédents avec des arguments qui ne relèvent ni de la posture, ni des préjugés mais sont des arguments juridiques très précis. Nous avons passé des mois à travailler sur la loi « Sapin 2 » pour nous accorder sur la manière de protéger les lanceurs d'alerte. Nous avons réussi à trouver un accord pour protéger les personnes physiques qui divulguaient un très large spectre d'affaires, des affaires illégales aux affaires immorales ou relevant de l'intérêt général.

La directive que transpose cette proposition de loi couvre de façon très précise l'ensemble des parties prenantes, c'est-à-dire les personnes physiques et personnes morales, mais sur un champ de divulgation beaucoup plus restreint, celui des seules actions illégales.

Nous jugeons à ce stade la rédaction de la proposition de loi trop ambiguë pour pouvoir la voter en l'état, car nous estimons essentiel de garantir que la protection des lanceurs d'alerte se fera dans le respect de la directive européenne mais également dans celui de la loi Sapin 2, et nous défendrons des amendements en ce sens.

Le texte que nous allons voter ne doit pas être en retrait par rapport à un mouvement historique et irréversible. J'étais ce matin au collège des Bernardins où se réunissaient des scientifiques et des chercheurs, qui travaillent depuis une dizaine d'années sur l'entreprise au XXIe siècle, et dont les travaux ont en partie été repris par le rapport Senard-Notat pour recommander une modification du code civil, davantage de codétermination, de transparence fiscale ou de transparence des affaires. C'est le sens de l'histoire et les entreprises ne peuvent plus être des boîtes noires.

Au-delà du traditionnel débat sur le travail et le capital, le véritable enjeu aujourd'hui est celui de l'ouverture de l'entreprise à la démocratie et aux citoyens, notamment grâce aux différents médias que sont, à l'intérieur de l'entreprise, les syndicats et les salariés, et à l'extérieur, les journalistes, les ONG et tous ceux qui veillent au respect des droits de l'homme et de la morale publique.

Cet enjeu ne date pas d'hier. Permettez-moi de vous citer l'extrait d'un ouvrage de 1867 qui commente la fonction de commissaires aux comptes, laquelle venait d'être créée : « Cet homme, le commissaire aux comptes, cet homme que nous voulons protéger, physique ou personne morale, voit l'affaire sous un angle différent, il n'appartient à aucune coterie intérieure, il a l'habitude de voir ce qui cloche et d'approfondir rapidement les questions délicates. » Nous attendons de cette proposition de loi qu'elle permette aux lanceurs d'alerte, quels qu'ils soient, d'être ces nouveaux commissaires aux comptes.

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