Intervention de Gérard Leseul

Séance en hémicycle du jeudi 17 juin 2021 à 15h00
Prévention des risques technologiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Leseul :

Je remercie une nouvelle fois le rapporteur Jean-Paul Lecoq pour cette proposition de loi sur la gestion des risques industriels. Tous les deux élus de Seine-Maritime – tous trois, avec notre collègue Hubert Wulfranc –, nous venons d'un département marqué par l'empreinte industrielle et nous partageons la même volonté d'assurer une sécurité de chaque instant aux habitants vivant à proximité des sites industriels. L'accident de Lubrizol nous a rappelé à quel point une catastrophe est vite arrivée, avec son lot de conséquences potentiellement désastreuses et parfois irrémédiablement dramatiques.

Les PPRT font partie des outils qui permettent de réduire le risque à sa source, et c'est une bonne chose. Ils ont été créés en 2003 par la loi Bachelot pour ajouter un volet de maîtrise d'urbanisme au dispositif national de prévention des risques industriels, ce dont nous nous félicitons ; malheureusement, ils ne concernent que les sites classés Seveso à haut risque. Lors de l'élaboration de la loi, les PPRT visaient soixante-dix établissements industriels établis dans 900 communes. Leur adoption a été longue : en 2010, 273 PPRT avaient été lancés et 28 approuvés ; en 2020, 285 PPRT ont été approuvés dans plus de 800 communes. En Seine-Maritime, il y a bien sûr Le Havre et Rouen, mais aussi Rives-en-Seine, Caudebec, Lillebonne, Port-Jérôme-sur-Seine – des communes que je connais bien car elles sont dans ma circonscription. Les PPRT permettent de trouver un équilibre entre les exigences de développement économique et la protection de la population aux alentours. Ils délimitent autour des installations à haut risque des zones à l'intérieur desquelles des prescriptions peuvent être imposées aux constructions existantes et futures et d'autres à l'intérieur desquelles les constructions futures peuvent être interdites ; ils définissent également les périmètres à l'intérieur desquelles l'expropriation est possible pour cause de danger très grave menaçant la vie humaine et ceux dans lesquels les communes peuvent donner aux propriétaires un droit de délaissement et préempter les biens à l'occasion de transferts de propriété.

La proposition de loi a le mérite d'élargir l'objet des PPRT. Elle ne rate pas du tout sa cible ; au contraire, elle vise les installations abritant en permanence des stocks mobiles de matières dangereuses au même titre que les installations classées dans le cadre des PPRT. Il s'agit d'étendre très nettement le champ d'application des PPRT prévu par la loi Bachelot, lequel est limité aux installations Seveso seuil haut, pour inclure toutes les installations qui abritent des stocks mobiles dangereux. Sur le plan juridique, cela assurerait la protection effective des travailleurs, des populations et des biens économiques et personnels ainsi que le financement des PPRT par les pollueurs. Serait concerné le stockage dans les gares de triage, les parkings, les barges fluviales sur les rivières, les quais maritimes, les plateformes aéroportuaires… Bref, tous les espaces de stockage susceptibles de devenir des zones contaminées. Nous voterons clairement en faveur de cette avancée.

Mais, avec cette proposition de loi, nous avons l'occasion de renforcer la transparence et la sécurité des habitants qui résident à proximité des sites industriels les plus dangereux. Ainsi, nous suggérons de repenser l'élaboration des PPRT à l'échelle de plateformes industrielles. En effet, la notion de plateforme est particulièrement bien adaptée aux activités industrielles reposant sur des procédés complexes et imbriqués, particulièrement en milieu urbanisé – les liens qui ont été rappelés entre Lubrizol et l'entreposeur Normandie Logistique illustrent bien cette combinaison qu'il nous faut mieux maîtriser. Cela justifie la reconnaissance de la notion de plateforme industrielle.

Nous proposons aussi d'élargir l'objet des études de danger à l'impact du changement climatique et d'instaurer une formation obligatoire des salariés sous-traitants sur la sécurité et les réflexes à adopter en cas de survenance d'un risque dans l'enceinte de l'entreprise. Enfin, nous souhaitons rendre obligatoire la tenue par l'exploitant d'une liste exhaustive des produits entreposés sur un site industriel. Notre groupe a mené un important travail sur le sujet après l'accident Lubrizol. Il en est ressorti que par manque de moyens et d'indépendance, les contrôles étaient défaillants.

Récemment, une nouvelle pollution aux néonicotinoïdes dans la Seine est venue rappeler que des produits particulièrement dangereux sont entreposés dans des bâtiments qui ne sont pas classés Seveso. L'élargissement du champ des PPRT serait donc une très bonne chose. Profitons de ce texte présenté par notre collègue pour réconcilier l'activité industrielle et l'activité humaine dans nos territoires.

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