Intervention de Adrien Taquet

Séance en hémicycle du mercredi 7 juillet 2021 à 21h30
Protection des enfants — Après l'article 3

Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles :

Madame Panot, monsieur Ruffin, vous avez développé deux types d'arguments.

Tout d'abord, madame Panot, je prie effectivement la représentation nationale de bien vouloir m'excuser d'avoir déposé cet amendement après l'expiration du délai limite. Ce dépôt tardif ne visait pas à vous empêcher de l'étudier, bien au contraire : c'est un sujet important, et c'est précisément pour cela que nous l'avons expertisé et travaillé jusqu'au dernier moment. Nous sommes ravis et fiers d'être en mesure de vous présenter cette proposition, mais je vous présente à nouveau mes excuses pour les conditions dans lesquelles l'amendement a été déposé, et j'ai bien conscience des difficultés que cela a pu poser.

Monsieur Ruffin, nous posons ici des principes forts, qui permettent de viser un objectif : aucune sortie sèche de l'ASE, aucun enfant sans solution.

Depuis deux ans et demi, je défends l'idée que chaque enfant, chaque jeune qui sort de l'aide sociale en France doit disposer d'une solution. C'est la raison pour laquelle nous avons systématisé leur accès aux bourses, que nous les avons rendus prioritaires en matière de logement social, que nous avons systématisé l'accès à la garantie jeunes, et que nous souhaitons aujourd'hui inscrire dans la loi le fait qu'un contrat jeune majeur devra être proposé aux jeunes restant sans solution. Toutes les situations possibles des jeunes au moment de leur sortie de l'ASE seront couvertes et connues de l'ensemble des acteurs. Les responsables des missions locales, notamment, seront mobilisés pour assurer le premier entretien vers l'autonomie, proposé à 17 ans et, éventuellement, proposer la garantie jeunes si cela convient aux besoins de l'enfant. Tous les cas de figure seront couverts, afin de ne laisser aucun enfant sans solution.

Vous avez également évoqué un sujet très intéressant et directement en lien avec notre discussion : le droit à l'erreur. En effet – vous avez eu raison de le dire, car tout le monde n'en a pas conscience –, certains jeunes protégés depuis leur plus jeune âge, depuis la pouponnière, n'en peuvent plus des institutions et, à 18 ans, décident de partir : « Ciao, je ne veux plus vous voir. » C'est d'ailleurs pour cela que je veux que l'on sorte d'une approche purement institutionnelle de la protection de l'enfance dans notre pays. Mais deux, trois, six mois plus tard, ils se rendent compte que les choses sont un peu plus compliquées que ce qu'ils pensaient, ou que le lien qu'ils avaient nourri leur manque, et ils reviennent.

Deux éléments pour répondre à votre question. Tout d'abord, dans le droit commun, la garantie jeunes est ouverte jusqu'à 25 ans. La configuration que vous évoquez, celle d'un jeune de 18 ans qui commencerait par décliner l'offre de garantie jeunes et demanderait qu'on le laisse tranquille, avant de revenir demander à intégrer un parcours d'insertion professionnelle et à bénéficier du dispositif, est donc couverte. S'agissant du contrat jeune majeur, la rédaction actuelle permet également, à nos yeux, de couvrir la situation que vous évoquez jusqu'aux 21 ans de l'enfant – mais nous faisons ici face à la même difficulté que vous, madame Panot : il nous faudrait un peu plus de temps pour l'expertiser.

Vous aviez déposé des sous-amendements visant à l'inscrire dans la loi. Durant la suspension, nous avons réfléchi à une formulation permettant de figer la possibilité, pour les jeunes jusqu'à 21 ans, de revenir et de demander à avoir accès au contrat jeune majeur. Mais, pour être tout à fait honnête, au-delà du fait que le Gouvernement ne peut pas sous-amender son propre amendement et même si vous pouvez me répondre que je ne peux m'en prendre qu'à moi-même, je suis assez mal à l'aise avec l'idée d'écrire la loi sur un bout de table. Je vous confirme, monsieur Ruffin, que la rédaction actuelle couvre le cas que vous avez mentionné – ce sera inscrit au compte rendu – et je m'engage à ce que nous expertisions la proposition que vous avez formulée d'ici la discussion du texte au Sénat, car vous avez soulevé une question importante, à laquelle nous devons apporter une réponse. Nous sommes en train de vous la fournir, mais s'il est nécessaire de l'expliciter en l'inscrivant dans la loi, comme vous le souhaitez, nous le ferons, et nous le ferons bien, pour que la loi soit juridiquement bien écrite.

Enfin, madame Panot, comme vous le savez, le nombre de jeunes bénéficiant de contrats jeunes majeurs bien que n'ayant pas été confiés à l'aide sociale à l'enfance est aujourd'hui très marginal. C'est justement ce à quoi nous nous attaquons aujourd'hui, et nous pouvons être fiers du progrès que représente cet amendement : il permet enfin à tous les jeunes de sortir de l'aide sociale à l'enfance avec une solution, qu'il s'agisse de leur permettre de mener des études supérieures, de s'insérer professionnellement ou de maintenir un lien et un accompagnement socio-éducatif renforcé parce qu'il est encore trop tôt, pour eux, pour aller vers une autre solution.

J'espère que ces éléments complémentaires vous éclairent et que j'ai répondu à l'ensemble de vos questions.

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