Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du mardi 19 janvier 2021 à 17h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

Gérald Darmanin, ministre :

Le Gouvernement a un avis défavorable sur votre amendement CS948. Pour déterminer l'existence d'un service public, il faut se fonder sur certains critères, comme on l'a vu à propos des lignes ferroviaires, et non sur le domaine d'activité.

Le service de la cantine scolaire est facultatif mais, une fois qu'il est institué, les collectivités locales n'ont pas le droit de refuser des enfants, que ce soit pour des motifs tenant à l'origine de la famille ou au comportement. Il existe peu de dispositions législatives sur les cantines. La loi du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté prévoit que les enfants scolarisés sont inscrits de droit à la cantine lorsque le service existe. L'article L. 131-13 du code de l'éducation proscrit toute discrimination selon la situation des enfants.

La plupart des cantines offrent un choix, grâce au self-service ou à plusieurs menus ; les menus alternatifs ou de substitution permettent de respecter les prescriptions religieuses. Toutefois, des collectivités refusent les dérogations au menu commun, les enfants étant libres de ne manger que ce qu'ils souhaitent. Cette solution est acceptée lorsque la collectivité démontre que, compte tenu de sa situation budgétaire ou du nombre de repas servis, elle n'a pas les moyens ou la possibilité de proposer plusieurs menus. Dans les collectivités d'une certaine taille, le juge administratif relève un détournement de pouvoir lorsque la décision est prise, de manière implicite ou explicite, pour écarter les élèves pratiquant une certaine religion – notamment l'islam – des cantines scolaires. La jurisprudence est claire : la délibération municipale de Chalon-sur-Saône, qui avait supprimé les menus de substitution, a été annulée par la cour administrative d'appel de Lyon puis par le Conseil d'État. M. Person a déposé un amendement à ce sujet.

Une autre question est de savoir si on peut proposer des repas communautaires – et non de substitution. Au vu des analyses que nous avons menées, cela n'est pas explicitement interdit aux collectivités locales. Cependant, à la suite d'un pourvoi formé par un détenu du centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier, contestant le refus de servir des repas hallal aux détenus musulmans, le Conseil d'État a estimé que « l'administration pénitentiaire n'est pas tenue de garantir aux personnes détenues, en toutes circonstances, une alimentation respectant leurs convictions religieuses ». Toutefois, a-t-il précisé, « il lui appartient de permettre, dans toute la mesure du possible […] l'observance des prescriptions alimentaires résultant des croyances et pratiques religieuses. »

Ce qui n'est pas interdit étant autorisé, on peut penser que des repas communautaires – hallal ou casher – pourraient être servis dans les cantines scolaires. Comme ce n'est pas un service public obligatoire, il est à peu près certain qu'on doit proposer des repas différenciés si les moyens budgétaires le permettent. Selon le Conseil d'État, « le gestionnaire ne peut […] modifier les modalités d'organisation et de fonctionnement [du service public de la cantine] que pour des motifs en rapport avec les nécessités strictes du service. »

Avis défavorable, puisque les cantines scolaires disposent d'une certaine liberté.

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