Intervention de Patrice Pétriarte

Réunion du mercredi 13 février 2019 à 13h30
Groupe de travail sur les conditions de travail à l'assemblée nationale et le statut des collaborateurs parlementaires

Patrice Pétriarte, Solidaires Assemblée nationale :

Le syndicat Solidaires -Assemblée nationale déplore qu'il ait été décidé de mettre mis fin aux travaux du groupe de travail sur les conditions de travail à l'Assemblée nationale et le statut des collaborateurs parlementaires au mois de juin dernierl'été prochain, alors que nous considérions sa constitution comme un progrès.

Nous syndiquons tous les personnels travaillant à l'Assemblée nationale, que leurqu'ils aient le statut soit de collaborateurs parlementaires, de fonctionnaires, de contractuels de droit public ou de droit privé. Nous sommes parfois saisis de cas de RPS ou de harcèlement, dont je vais traiter puisque tel est l'objet de cette réunion.

C'est à juste titre qu'est posée la question des conséquences de la situation de sous-effectifs sur les risques psychosociaux, car la situation est trop violente, ; d'autant plus que la baisse des effectifs s'est accompagnée d'une augmentation du volume des missions à remplir.

Pour avoir travaillé à la division des scrutins du service de la séance, je peux témoigner que six fonctionnaires y étaient employés il y a quatre ans, et qu'au cours de la XIVe législature, 1 380 scrutins ont été enregistrés ; pour la législature en cours, ce chiffre est de 1 600 environ, soit 400 % d'augmentation alors que l'effectif a chuté de 50 %.

Les RPS existent, j'ai tiré la sonnette d'alarme pour mon propre cas, il ne s'est rien passé ; l'administration s'est bornée à promettre un renfort au mois de juillet, mesure qui a sans cesse été repoussée, jusqu'à ce que la machine se casse.

Ainsi aujourd'hui, lorsqu'un collègue est malade, il n'est pas possible de le remplacer, sinon le service est désorganisé, et l'on demande encore plus à ceux qui sont présents. Par ailleurs, les recrutements de contractuels de droit public ne comblent pas la baisse des effectifs. Le statut de ces personnels, déterminé par leur contrat, les conduit à effectuer un nombre déterminé d'heures de travail, ce qui, le cas échéant, amène les fonctionnaires travaillant à leurs côtés à accomplir plus fréquemment qu'ils ne le devraient des travaux nocturnes.

La baisse des effectifs a donc des conséquences importantes sur les manifestations de risques psychosociaux.

Il existe à l'Assemblée un comité d'hygiène et de sécurité (CHS) : nous avons obtenu une évolution de la réglementation car, à l'Assemblée nationale, on ne discutait pas des conditions de travail. Comment n'y aurait-il pas une augmentation des RPS, alors qu'il n'existe aucune instance pour évoquer les conditions de travail ? Une amélioration est à l'œuvreIl va être transformé en CHSCT, mais comme toujours les choses vont beaucoup trop lentement. Le médecin de prévention, que nous rencontrons fréquemment et qui est sollicité au sujet des RPS, dresse un état des lieux.

Le taux d'absentéisme, de l'ordre de 6 %, est habituellement très faible à l'Assemblée nationale, mais chaque année, il augmente il a atteint des pics de 10 % à 15 % ; l'effectif est donc moindre alors que le nombre d'arrêts de maladie augmente. Sur un effectif constant, le nombre d'arrêts maladie à l'Assemblée nationale représente 9 800 jours, ce qui signifie que, tous les jours, 25 fonctionnaires sur 1 021 sont malades. Il y a donc une corrélation entre la baisse des effectifs et la hausse du nombre des arrêts de maladie.

Autre facteur de risques psychosociaux : la pyramide des âges des fonctionnaires, dont 50 % ont plus de 55 5250 ans. Il me semble que plus on est âgé, plus on a du mal à faire face à une modification de situation professionnelle et à une augmentation du volume de travail. On a beau vouloir, parfois le corps ne répond pas.

Par ailleurs, le comportement parfois autoritaire de l'organisation managériale « braque » les personnes. À titre d'exemple, je peux faire état d'une phrase lue dans la notation d'un fonctionnaire dans laquelle son supérieur considérait que la perturbation de la vie familiale était inhérente au travail à l'Assemblée nationale. Nous ne pouvons pas l'accepter : l'organisation du travail à l'Assemblée ne doit pas perturber la vie familiale !

C'est une vision faussée de la réalité : , nous sommes bien sûr au service de l'institution, mais, comme le souligne le médecin de prévention, mieux vaut arrêter quelqu'un pendant un mois parce qu'il est à platépuisé que de le voir faire un burn-out. Ce médecin est indépendant dans sa mission, et porte cette appréciation. Les managers ne voient que le résultat et considèrent que la perturbation de la vie familiale est la condition sine qua non du travail à l'Assemblée nationale ; nous ne partageons pas ce point de vue et nous le dénonçons. Nous mettons à profit cette tribune pour le dire.

En réponse à la troisième question posée, qui porte sur les conditions de travail, je dirais que, pour les services législatifs, la production a augmenté, que les effectifs ont diminué, et que nous atteignons le point de rupture. Une note interne au service de la séance, indique que les administrateurs qui y travaillent doivent effectuer 2 400 heures par an Comment avoir une vie familiale équilibrée avec un tel quota d'heures ?

J'entends bien qu'il y a des contraintes, mais je ne suis pas certain qu'un mauvais équilibre familial soit la meilleure solution pour travailler dans de bonnes conditions à l'Assemblée nationale.

Je partage enfin le constat de mes collègues sur l'empilement des statuts, qui emporte des droits différents pour l'occupation des mêmes postes, avec des congés différents. Il faut savoir que, de par leurs obligations, les personnels de l'Assemblée nationale ont droit à un certain nombre de jours de congé, alors que leurs collègues contractuels connaissent un autre régime. Il semblerait que l'administration souhaite y mettre un peu d'ordre, ce qui serait préférable, car ces situations sont propices à l'apparition de risques psychosociaux.

Car les risques psychosociaux susceptibles de toucher les contractuels de droit public nous sont inconnus puisque ces personnels ne siègent pas au CHS et n'ont pas d'élections professionnelles. Nous n'avons connaissance que des cas extrêmes. D; dans ces conditions, il nous est difficile d'établir un état des lieux de ces situations.

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