Intervention de Philippe Gosselin

Réunion du mercredi 19 janvier 2022 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Gosselin :

Cette proposition de loi va au-delà d'une simplification des procédures et soulève un certain nombre de questions. Contrairement aux apparences, le sujet traité n'est pas anodin : je regrette donc que nous ne disposions ni de l'étude d'impact ni de l'avis du Conseil d'État qui accompagnent les projets de loi.

Le nom de famille ne relève pas uniquement de la sphère privée. Il compte énormément dans la sphère publique, et ce n'est pas un hasard si François Ier a, dans l'ordonnance de Villers-Cotterêts, fondé l'état civil sur le principe de l'immutabilité du nom. Certes, le droit actuel admet le changement de ce dernier dans certaines circonstances particulières – notamment s'il est perçu comme ridicule ou lourd à porter en raison de l'histoire ou de faits personnels –, et nous convenons tous qu'il existe d'autres situations récemment mises en avant, déjà évoquées ce matin, qui justifient un changement de nom permettant d'échapper au poids d'une histoire familiale qui peut être terrible. Cependant, le nom n'est pas un élément accessoire de l'identité : il inscrit l'individu dans une lignée, dans une famille, dans une fratrie.

L'article 1er n'appelle pas de remarque particulière et ne pose aucune difficulté : la loi prévoit déjà la possibilité de porter un nom d'usage, et il me paraît opportun d'inscrire ce dernier à l'état civil. En revanche, le nom dépasse l'identité individuelle dans la mesure où il renvoie aussi à une identité familiale. Aussi le droit individuel d'en changer prévu à l'article 2 aura-t-il pour effet de déstructurer des fratries. Pour des raisons diverses n'ayant rien à voir avec l'objectif recherché par la présente proposition de loi – protéger des personnes ayant vécu des situations familiales très particulières, notamment de violences –, les membres d'une même fratrie pourront porter des noms tout à fait différents, ce qui posera de véritables difficultés. Voir son frère ou sa sœur changer de nom peut être vécu comme un drame et troubler la relation affective avec les parents.

L'état civil à la carte que vous voulez instituer n'apporte pas toutes les réponses souhaitées et suscite de véritables interrogations. Ce droit généralisé de changer de nom me paraît aller trop loin : il affecte l'ensemble de la société et peut-être même l'ordre public. Pour ma part, j'attends que l'on apporte un certain nombre de réponses à nos questions et que l'on propose une limitation de ce nouveau droit.

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