Intervention de Cécile Untermaier

Réunion du jeudi 25 juin 2020 à 9h05
Commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCécile Untermaier :

Pour les frais de justice, je pense qu'effectivement de gros progrès ont été faits, vous avez su combler l'arriéré. Mais ces frais ne peuvent pas être un puit sans fond où l'on puiserait de manière irresponsable. Même si je pense qu'il y a là une question de liberté et d'indépendance, je pense aussi qu'il y a une responsabilité. Je viens d'une juridiction administrative où le recours à l'expertise ne relevait pas simplement d'un juge d'instruction se précipitant sur une expertise pour asseoir son statut et, quelquefois, acheter en quelque sorte son indépendance. Je pourrais citer des mesures d'instruction qui n'avaient aucun sens. Elles sont prises par un juge d'instruction qui exprime ainsi son indépendance, en utilisant les moyens et les possibilités dont il dispose. Il me semble que d'une manière responsable, tous ensemble, nous devons réfléchir à cette question et voir si ce n'est pas par le recours à la collégialité, à la discussion entre magistrats, que, dans des dossiers très sensibles, la mesure d'expertise doit quelquefois être prise. Je tenais à le dire en contrepoint de cette idée que le recours à l'expertise est nécessairement la garantie de l'indépendance : il faut également y adosser la pertinence, la responsabilité.

Ma deuxième question concerne les choix que vous avez évoqués en termes budgétaires. Vous n'ignorez pas les gros projets de construction de prisons et de centres éducatifs fermés. Or il n'y a aucune transparence quant à leurs lieux d'implantation. Il me semble que la transparence serait de mise, de sorte que l'on ne puisse pas imaginer que ces constructions répondent à des sollicitations politiques. Dans mon département, nous avons enregistré la suppression d'un centre éducatif fermé (CEF) et l'annulation d'un autre projet de CEF, à un moment où la justice des mineurs va – à juste titre – se redéployer. Les magistrats se trouvent en difficulté. Dans le même temps, on apprend qu'alors que nous en avons déjà un à Chalon-sur-Saône, un autre tribunal va être construit ou réhabilité. J'ai besoin de voir clair dans les choix politiques. Je ne discute par la pertinence des choix, mais j'aimerais en comprendre la logique. J'espère qu'une véritable transparence lèvera mes craintes et qu'un autre choix sera fait, mais j'avoue redouter ce dont la presse s'est fait écho : des suppressions de postes liées à la couleur politique de la collectivité. Je ne voudrais pas que la justice s'abîme dans ce genre de choses. La transparence dans les choix de construction d'établissements pénitentiaires comme de CEF s'impose.

Ma troisième question concerne les nominations. Beaucoup de progrès ont été faits, et je pense effectivement qu'aller devant le CSM est une excellente chose. Mais reparlons transparence. Lors de son audition devant notre commission, madame Houlette a fait valoir qu'étant proche de la retraite, et donc n'attendant rien, elle n'avait pas de pression. Mais a contrario, une personne jeune ne se sentira-t-elle pas sous pression ? Dans le dispositif de transparence que vous évoquez, comment prévenir les craintes que pourraient avoir des magistrats certes consciencieux mais soucieux aussi de ménager leur avancement ?

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