Intervention de Peimane Ghaleh-Marzban

Réunion du jeudi 25 juin 2020 à 9h05
Commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

Peimane Ghaleh-Marzban, directeur des services judiciaires :

Je ne crois pas qu'aujourd'hui une cour, une juridiction ou un magistrat ait été entravé dans une enquête parce que nous aurions excipé d'une difficulté en matière de frais de justice. À tous ceux qui m'ont entendu, j'ai toujours expliqué que la maîtrise des frais de justice ne saurait revenir en aucun cas sur l'indépendance juridictionnelle. Nous l'avons toujours dit et je ne pourrais pas, en tant que magistrat, dire autre chose. D'où l'intérêt d'ailleurs d'avoir des magistrats à l'administration centrale, parce qu'ils apportent leurs regards et leurs convictions. Mais qu'en revanche, on puisse avoir une vision rationalisée des frais de justice, cela peut avoir une incidence. Selon que vous recourriez, par exemple, pour des expertises génétiques, à tel expert ou à tel autre, cela peut avoir des conséquences budgétaires. Vous voyez bien qu'il est intéressant de rechercher le meilleur prix en passant par les laboratoires de police scientifique, par la gendarmerie nationale, plutôt que par un laboratoire privé.

Autre exemple : lorsque vous placez sous scellés un véhicule et que pendant dix ans, tous les mois, vous payez un garage car la procédure dure, ne peut-on pas essayer de rationnaliser ? De même quand vous placez tous ces véhicules dans 40, 50, 60 garages dans tout le département – au point que vous ne savez même pas où ils sont – ne peut-on pas exercer un suivi ? Les chefs de cours en sont convaincus. Concrètement, c'est de cela qu'on parle.

En ce qui concerne l'intéressement, l'idée est de dire aux chefs de cours de mettre en place une rationalisation – c'est-à-dire leur demander ce qu'ils ont fait sur le plan des véhicules, sur le recours à telle ou telle solution – et, s'ils ont pris certaines mesures, nous leur donnons effectivement des crédits complémentaires : c'est aussi cela, le dialogue de performance. Quand dans certaines juridictions, on recourt massivement aux interprètes-traducteurs, on peut en recruter. Voilà les solutions dont on parle.

Jamais nous n'avons limité les frais de justice. Je tiens à dire devant les caméras, puisque nous sommes filmés, que si demain il y a une affaire de viol dans un village et que le juge d'instruction souhaite faire des examens sur toute une partie de la population, il peut et il pourra toujours le faire. Jamais on ne lui dira « ça coûte un peu cher, n'y allez pas ». Je n'ai pas un exemple de magistrat à qui l'on aurait dit qu'il ne pouvait pas avoir telle ou telle chose parce qu'il y aurait une entrave budgétaire. Notre rôle justement est de faire respecter cette indépendance juridictionnelle tout en trouvant des moyens d'efficience budgétaire. L'action que nous devons mener, c'est une action métier. De la même manière que, dans un débat judiciaire, vous vous posez les questions « l'infraction est-elle constituée ? » et « quelle sanction faut-il prononcer ? », il faut se poser la question du sort des biens. Confiscation ou non ? Et se poser cette question, tout au long de la procédure. Faut-il attendre le jugement pour restituer un véhicule ? Ne faudrait-il pas le restituer en cours d'information judiciaire ? C'est de cela dont nous parlons, dans les préconisations que nous faisons à l'endroit des chefs de cours. On peut parler d'optimisation et d'efficience des frais de justice, tout en garantissant l'indépendance.

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