Intervention de Frédérique Vidal

Réunion du mardi 10 novembre 2020 à 17h15
Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation :

Les chiffres que vous avez cités montrent que la population des classes préparatoires et celle des universités sont différentes. C'est la fierté de l'Université d'accueillir tous les étudiants, mais un grand travail a été fait qui s'est concrétisé dans la loi Orientation et réussite des étudiants et l'instauration de quotas d'accueil d'étudiants boursiers dans les classes préparatoires. Nous allons poursuivre sur cette voie ; le Sénat a d'ailleurs introduit des dispositions en ce sens dans le projet de loi de programmation de la recherche.

Certains étudiants, c'est vrai, ont un accès plus compliqué que d'autres aux formations en ligne. Ce peut être par défaut d'équipement, et c'est pourquoi, pour l'ensemble des universités, 1 800 ordinateurs ont été achetés et mis à disposition des étudiants, 4 800 ont été prêtés par les établissements et plus de 5 000 cartes SIM et clefs 4G distribuées. Des étudiants qui avaient décidé de passer le premier confinement ailleurs que dans les résidences universitaires y sont restés lors du deuxième confinement ; les résidences sont connectées et nous maintenons ouvertes les salles de ressources pédagogiques et informatiques ainsi que les bibliothèques universitaires, pour certaines équipées d'ordinateurs. Les étudiants peuvent prendre rendez-vous pour venir y travailler.

Les enquêtes menées montrent que, plus que l'incapacité d'accès à un ordinateur, les difficultés principales sont l'absence d'un espace où s'isoler pour étudier et le fait que l'ordinateur étant utilisé par tous les membres de la famille, les étudiants se voient souvent affecter un créneau horaire très tardif ; cela perturbe leur sommeil et ne favorise ni les études ni l'équilibre psychologique. Nous avons donc amplifié notre effort. Nous accompagnons ceux des primo-entrants qui n'ont pas d'équipement informatique, mais il importait particulièrement de leur donner un espace de travail pour suivre les enseignements à distance. Actuellement, que ce soit pour venir aux travaux pratiques ou pour accéder à ces salles, environ 10 % des étudiants – ce ne sont pas toujours les mêmes – sont accueillis par roulement sur les campus. Cela permet aussi de maintenir un lien social, également très important. C'est pourquoi, quand nous avons préparé la rentrée avec eux, les étudiants nous ont dit tenir à ce que les enseignements aient lieu, le plus possible, dans les établissements. La rentrée est l'occasion joyeuse de retrouvailles, qui se fêtent. Des foyers infectieux se sont ainsi formés, ce qui a donné une mauvaise image de cette jeunesse. Certes, il y a eu des contaminations, mais que l'on veuille bien considérer que, selon les agences régionales de santé, on a dénombré, depuis le 14 septembre, 16 000 cas positifs dans l'ensemble de la population étudiante, ce qui n'est pas considérable. Mais quand des promotions entières sont touchées, cela se voit, et cela a été une difficulté réelle.

Les établissements nous demandent de renforcer le tutorat. Mme Elisabeth Borne et moi-même y travaillons depuis des mois. L'établissement de contrats étudiants de quelques heures hebdomadaires étant entravé par la lourdeur des règles administratives de paiement dans la fonction publique, nous envisageons, pour simplifier la procédure, d'instituer un « chèque emploi étudiant » sur le modèle du CESU et, étant donné la situation, nous cherchons, pour aller encore plus vite, à appliquer un mécanisme dérogatoire. Cela permettra d'une part de rompre la solitude des étudiants isolés et de renforcer l'accompagnement académique, d'autre part de créer dans les établissements d'enseignement, les bibliothèques universitaires et les CROUS, des emplois étudiants qui pourront être valorisés dans les cursus, remédiant ainsi aux difficultés financières des étudiants qui ont perdu leur emploi en raison de la crise. J'espère pouvoir faire des annonces très vite à ce sujet.

Parce que la souffrance psychologique des étudiants est réelle, nous travaillons avec le ministère des solidarités et de la santé à assurer un accompagnement par des psychiatres et nous mobilisons, dans les CROUS, les étudiants référents volontaires, que leur engagement altruiste aide à mieux supporter leur propre isolement. Ils prennent des nouvelles de leurs condisciples et leur proposent des animations par le biais d'internet.

Nous travaillons depuis plusieurs mois, avec les associations étudiantes, à la création d'un revenu global d'autonomie. C'est notre objectif commun mais il est de réalisation difficile car de nombreuses aides éparses existent, pour certaines nationales, pour d'autres régionales ou départementales, parfois aussi allouées par les métropoles. La première étape, en passe d'aboutir, est la création d'une plateforme unique d'accès à l'ensemble des aides possibles, car les non-recours sont nombreux. Parce qu'il est difficile de comprendre pourquoi, avec les mêmes critères, on est éligible à certaines aides mais pas à d'autres, nous nous efforçons de parvenir à une normalisation. Tout cela est très long car ce travail doit se faire au mieux avec l'État et avec les collectivités. Nous nous y employons.

Enfin, le Gouvernement tenait à soutenir l'apprentissage dans l'enseignement supérieur. Parce que les contrats d'apprentissage permettent à des jeunes gens qui autrement ne le pourraient pas de faire des études, l'État prend actuellement en charge la presque totalité du coût de ces contrats en allouant une aide exceptionnelle de 8 000 euros aux entreprises qui recrutent un alternant majeur de l'enseignement supérieur. Cette mesure a permis à de très nombreux étudiants de pouvoir poursuivre leurs études. De mémoire, le nombre de contrats d'apprentissage dans l'enseignement supérieur a été maintenu, preuve que le dispositif est suffisamment attractif pour que les entreprises jouent le jeu.

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