Mme Martine Etienne alerte M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur le drame ayant touché le jeune Aimène Bahouh. Le vendredi 30 juin 2023, il rentre dans la nuit de son travail et décide de repartir de chez son voisin pour aller se ravitailler à la boutique d'une pompe à essence de Rodange, au Luxembourg. Lors de ce déplacement au volant de sa voiture et avec deux amis à ses côtés, un membre des forces du RAID lui tire dessus, sans raison apparente. Ses amis racontent : « Juste avant de passer sur la chicane et un ralentisseur de la rue de Verdun, Aimène, vitre baissée, rétrograde en seconde. Je tourne la tête à gauche, j'aperçois des policiers dans le noir, je vois une lampe torche qui nous éclaire et j'entends "poc" ». Un membre des forces du RAID a tiré sur Aimène, sans sommation et sans qu'il ne représente de danger apparent. Ce jeune est aujourd'hui dans le coma entre la vie et la mort après avoir reçu le projectile au niveau de la tête. Les médecins sont dans l'incapacité de se prononcer sur l'évolution de son état de santé. Les révoltes de ces derniers jours témoignent des violences policières subies par les jeunes racisés et les jeunes des quartiers populaires. L'État doit apporter une réponse politique et non plus seulement répressive comme le Gouvernement est en train de le faire. Il est ainsi indispensable de refonder le fonctionnement de la police et de la gendarmerie pour revenir à une logique de gardiens de la paix. Il faut une doctrine d'emploi de la force raisonnée, raisonnable, proportionnée. Il ne faut plus attendre pour lutter contre la multiplication des actes racistes au sein de la police. Les formations doivent être entièrement repensées, la formation des policiers doit être allongée à 2 ans et une réforme de la déontologie policière doit être engagée. L'inspection générale de la police nationale (IGPN) et l'inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) doivent être supprimées : leurs missions doivent être confiées à une instance indépendante. Cela fait bien longtemps que les habitants des quartiers populaires subissent une relégation urbaine, économique, sociale et bien sûr politique. Celle-ci n'a fait que s'aggraver avec la période sécuritaire qu'a engendrée la lutte contre le terrorisme. Il existe aujourd'hui une rupture de l'unité républicaine. La lutte contre les discriminations urbaines ethniques, sociales et économiques vécues quotidiennement passe par le rétablissement d'une totale égalité de traitement entre les citoyens. Ainsi, Mme la députée interpelle le M. le ministre : combien faudra-t-il encore de violences policières pour que le Gouvernement agisse et décide de refonder la police afin que cet usage arbitraire de la force armée, par un fonctionnaire dépositaire de la force publique ne se reproduise plus ? Quand le Gouvernement prendra-t-il ses responsabilités et agira, comme lui recommande l'ONU, contre les violences racistes au sein de la police ? Que faisait le RAID dans cette commune et pourquoi cet agent a été habilité à tirer ? Enfin, elle lui demande quelles sanctions vont être prises à l'encontre de ce fonctionnaire.
Face aux violences urbaines survenues du 27 juin au 7 juillet 2023, le Gouvernement a décidé d'un engagement massif des forces de sécurité : jusqu'à 45 000 policiers et gendarmes ont été mobilisés chaque soir, avec, dans de nombreuses villes, le soutien précieux des agents des polices municipales. La gravité de la situation, notamment les dommages causés envers des bâtiments publics et des commerces et les violences contre des élus, a conduit le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer à mobiliser également les services de renseignement du ministère, des moyens spécialisés (hélicoptères de la gendarmerie, drones, etc.) et des unités d'intervention. Des agents du RAID, des brigades de recherche et d'intervention de la police nationale, du groupe d'intervention de la gendarmerie nationale et des pelotons de la garde républicaine et de la gendarmerie nationale ont ainsi été déployés. Ces services spécialisés n'ont pas seulement témoigné de la fermeté de la réponse de l'État et de sa détermination à déployer sur le terrain, en dissuasion comme en judiciaire, toute la force nécessaire, mais ont également procédé à de très nombreuses interpellations. S'agissant du drame survenu à Mont-Saint-Martin (Meurthe-et-Moselle), les faits font l'objet d'une enquête confiée par l'autorité judiciaire – qui décide souverainement du service d'enquête – à l'inspection générale de la police nationale (IGPN) et il n'appartient pas au ministère de l'Intérieur et des Outre-mer d'en rendre compte. Il peut toutefois être précisé que l'intervention du RAID dans cette ville répondait à un contexte très tendu avec de nombreux actes de dégradations de biens publics et privés. Face à cette situation, les élus locaux avaient sollicité des renforts de police. Cette demande a été entendue. S'agissant de la remise en cause – ancienne – de l'inspection générale de la police nationale, elle revient à jeter l'opprobre sur une institution, la police nationale, qui est non seulement l'administration certainement la plus contrôlée qui soit, notamment par l'autorité judiciaire, mais également une institution appréciée et soutenue par une large majorité des Français. La police nationale est également une des institutions les plus représentatives de la diversité de la société. Les mises en cause de l'IGPN induisent une critique de fonctionnaires, les policiers, qui témoignent au quotidien, dans leur immense majorité, de leur sens de l'État, de leur professionnalisme et de leur engagement. Ces attaques contre l'IGPN sont également une mise en cause de la légitimité de l'État, notamment de son pouvoir de contrainte. L'IGPN est une institution qui a largement évolué, notamment depuis 2013, et qui est ouverte sur le reste de l'administration et sur la société, tant dans ses modalités de saisine que dans sa politique de transparence, sa composition et sa participation à diverses instances dédiées à la déontologie. Le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer a, par exemple, décidé fin 2020 la création d'un comité d'évaluation de la déontologie de la police nationale, composé notamment de représentants d'autres administrations (Défenseur des droits, magistrats) et de la société civile (professeurs d'université, avocats, journalistes, etc.). La décision du ministre de nommer à sa tête une magistrate de l'ordre judiciaire constitue une nouvelle évolution, de même que les avancées actées par la loi du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur, qui fixe de nouvelles ambitions en matière de transparence et d'exemplarité de l'action des forces de l'ordre. Il n'existe aucune impunité dans la police nationale. Lorsque des manquements déontologiques et professionnels ou des fautes sont suspectés, les faits font l'objet d'enquêtes administratives et d'enquêtes judiciaires, s'ils sont constitutifs d'infractions pénales. Les policiers et les gendarmes, qui représentent moins de 4,5 % des effectifs de la fonction publique, concentrent 55 % des sanctions disciplinaires. Aucune tolérance n'est de mise lorsque des manquements sont démontrés.
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