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M. Damien Maudet interpelle M. le garde des sceaux, ministre de la justice, au sujet du projet de loi d'orientation de la justice, prévoyant notamment, d'autoriser l'activation à distance de tout appareil connecté, téléphone, tablette, téléviseur ou assistant vocal, afin de pouvoir le géolocaliser et enclencher son micro ou sa caméra. Big brother serait-il parmi nous ? Par les mesures annoncées dans l'article 3 de ce nouveau texte de loi, la dystopie semble rattraper la réalité. Concrètement, cette loi permettra aux enquêteurs d'exploiter les failles de sécurité de ces appareils pour installer un logiciel pour en prendre le contrôle et transformer les outils numériques en mouchards. Une télévision connectée, un babyphone, un assistant vocal type Google Home ou un micro intégré à une voiture pourra être transformé en espion. Il sera possible de retransmettre des images et des vidéos à partir de la caméra d'un ordinateur, d'un smartphone. La localisation des individus pourra être récupérée grâce au GPS d'une voiture, d'une trottinette ou montre connectée. Il sera possible d'enregistrer tout ce qui se dit autour du micro d'un téléphone même sans appel en cours. « Permettre de prendre le contrôle de tous les outils numériques à des fins d'espionnage policier ouvre la voie à des risques d'abus ou d'usages massifs extrêmement graves » - l'Observatoire des libertés et du numérique. Depuis plusieurs mois déjà, les alertes contre de telles mesures se multiplient, à l'exemple de celle de l'Observatoire des libertés et du numérique, dont font partie la Ligue des droits de l'Homme, le Syndicat de la magistrature, ou encore le Syndicat des avocats de France : « Si ce texte était définitivement adopté, cela démultiplierait dangereusement les possibilités d'intrusion policière, en transformant tous nos outils informatiques en potentiels espions. Il est, à cet égard, particulièrement inquiétant de voir consacrer le droit pour l'État d'utiliser les failles de sécurité des logiciels ou matériels utilisés plutôt que de s'attacher à les protéger en informant de l'existence de ces failles pour y apporter des remèdes ». « Pour toutes ces raisons, l'article 3 de la LOPJ suscite de graves inquiétudes quant à l'atteinte aux droits et libertés fondamentales (droit à la sûreté, droit à la vie privée, au secret des correspondances, droit d'aller et venir librement) », ajoutent-ils. Pour justifier cette mesure, le ministère invoque la « crainte d'attirer l'attention des délinquants faisant l'objet d'enquête pour des faits de criminalité organisée, de révéler la stratégie établie » en installant les outils d'enquête. Il serait donc trop risqué d'installer des micros et des balises « physiques » donc autant se servir des objets connectés ? Voilà ce qu'en dit Bastien Le Querrec, juriste et membre de l'association La Quadrature du Net. « C'est une course à l'échalote inacceptable. Avec ce raisonnement, on peut justifier tout et n'importe quoi : parce que des criminels utilisent certains outils, on peut faire fi de l'État de droit et utiliser la pire des surveillances. ». Par ailleurs, les services de police et de renseignement disposent déjà d'outils intrusifs : installation de mouchards dans les domiciles ou les voitures, extraction des informations d'un ordinateur ou d'un téléphone, mise en œuvre d'enregistreurs d'écran. Des possibilités très larges, attentatoires à la vie privée, sont déjà détournées et de telles mesures prévues dans le nouveau texte de loi ne semblent donc pas nécessaires. Les libertés sont déjà sévèrement menacées. La confiance entre l'État et les citoyens est sévèrement effritée. Cette mesure doit être retiré, les libertés ne peuvent être sacrifiées ! Il souhaite connaître sa position sur le sujet.
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