M. Aurélien Pradié alerte M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées sur l'exclusion des personnes en situation de grande pauvreté suite à un avis du Conseil économique et social qui créée un lien entre grande pauvreté et violations des droits humains, ainsi que leur caractère universel, interdépendant et indivisible. En effet, le 29 juillet 1998 a été promulguée la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, énonçant que celle-ci est un impératif national, fondée sur le respect de l'égale dignité de tous les êtres humains et une priorité de l'ensemble des politiques publiques de la nation. Cette loi, qui a permis certaines avancées telles que la couverture maladie universelle (CMU), le droit au logement opposable (DALO) et les territoires zéro chômeur de longue durée (TZCLD), avait pour ambition de lutter contre la grande pauvreté dans sa globalité, à partir de mesures structurelles durables. Aujourd'hui, 2,5 millions de personnes survivent dans l'extrême pauvreté, avec moins de 735 euros par mois et 4,15 millions de personnes vivent dans des logements insalubres ou à la rue ; la plupart n'ayant pas un emploi décent. Ainsi, il l'interroge sur les stratégies et les moyens mis en place face à l'éradication de la grande pauvreté sous toutes ses formes à l'horizon 2030 dans le cadre des objectifs de développements durable.
Le Pacte des solidarités, qui prend la suite de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, porte des mesures transversales au niveau national pour lutter contre la pauvreté, mais porte également l'ambition d'une adaptation à la diversité des territoires. Quatre orientations ont été affirmées dès le lancement de la concertation en 2022. Elles sont déclinées en 25 mesures portées au niveau national, qui s'inscrivent dans les grandes réformes du quinquennat : Axe 1 : prévenir la pauvreté et lutter contre les inégalités dès l'enfance : poursuivre et amplifier la politique de prévention de la pauvreté en s'appuyant notamment sur le service public de la petite enfance et en agissant aux âges clés pour prévenir les inégalités touchant les personnes précaires et modestes : - garantir l'accès à des temps de socialisation avant 3 ans à toutes les familles, via la poursuite du déploiement du fonds d'innovation de la petite enfance afin d'accélérer le déploiement du service public de la petite enfance et favoriser les accueils souples et en proximité des lieux de vie ; - déployer un plan d'urgence pour 80 000 enfants sans domicile avec l'objectif d'une scolarisation effective, d'un accès à l'alimentation et à la santé ; - garantir à chaque enfant l'accès à des loisirs de qualité via le programme « Ouverture ». Dès 2024, un « Pass colos » permettra à tous les enfants de partir en colonie l'année de leurs 10 ans, à l'âge charnière de l'entrée au collège avec des aides financières aux familles et des colos labellisées ; - assurer un maillage du territoire en structures de soutien à la parentalité en garantissant le maillage du territoire en une offre de service complète (1 maison des familles par département) permettant de soutenir les familles pour prévenir les ruptures et les accompagner dans leur parcours ; - lutter contre la malnutrition infantile en déployant les petits déjeuners à l'école en Outre-mer et en les renforçant dans les territoires les plus fragiles de l'hexagone, et en consolidant et étendant le programme MALIN pour accompagner les parents dans l'alimentation infantile et permettre aux enfants en situation de précarité de bénéficier de bons de réductions (petits pots et lait infantile principalement). Axe 2 : Amplifier la politique d'accès à l'emploi pour tous : garantir le dernier kilomètre de France Travail en touchant les personnes les plus éloignées de l'emploi et développer un choc d'offre pour lever les freins périphériques à l'emploi : - lever les freins à la reprise d'activité, pour assurer le dernier kilomètre de France Travail ; - créer une prime à la reprise d'activité pour lever les freins financiers d'accès à l'emploi (mobilité, habillement, restauration, modes d'accueil…) ; - développer une offre d'accompagnement simultané Emploi-Logement dans le cadre de France Travail ; - lever les freins liés à la garde d'enfant : 1 000 crèches labellisées AVIP en plus d'ici 2027 pour faciliter l'accès à un mode d'accueil du jeune enfant dans le cadre d'un projet d'insertion ; - mettre en place un accompagnement vers la santé pour 120 000 allocataires du Revenu de solidarité active (RSA) grâce aux « Missions accompagnement santé » des Caisses primaires d'assurance maladie et aux référents « santé insertion » dans les départements ; - poursuivre et approfondir le contrat d'engagement jeunes en rupture qui permet d'aller vers les « jeunes invisibles » en très grande fragilité, pour les accompagner vers l'insertion en prenant en compte l'ensemble de leurs problématiques d'hébergement, de santé, de mobilité… ; - accompagner les personnes très éloignées de l'emploi grâce à la montée en puissance des dispositifs d'insertion par l'activité économique (Sève, TAPAJ, Convergence) pour les personnes les plus éloignées de l'emploi. Axe 3 : Lutter contre la grande exclusion grâce à l'accès aux droits : compléter le chantier du logement pour prévenir les expulsions et de la solidarité à la source, en déployant massivement les démarches « d'aller vers » et les accueils sociaux pour lutter contre le non-recours : - mettre en place un plan « 100 % accès aux droits » pour garantir le dernier kilomètre de la solidarité à la source ; - développer l'accès à la domiciliation grâce au financement d'associations supplémentaires et au soutien expérimental de centre intercommunal d'action sociale / centre intercommunal d'action sociale ; - poursuivre la mise en œuvre de l'expérimentation dénommée « Territoires zéro non recours », prévue par la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite loi « 3DS ». 39 projets aux caractéristiques variées ont été sélectionnés en juillet 2023 et seront mis en œuvre en début d'année 2024, pour une durée de 3 ans ; - créer 180 nouveaux centres sociaux proches des usagers ; - prévenir les expulsions locatives pour éviter la bascule dans la grande pauvreté : création d'équipes sociojuridiques pour accompagner 30 000 ménages par an en capitalisant sur l'expérience de l'espace solidarité habitat de la fondation Abbé Pierre et renforcement des politiques départementales et de l'action des Commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) dans le cadre des pactes locaux des solidarités ; - accompagner deux fois plus de femmes en 2027 par rapport à 2022, soit 1,7 million de femmes et jeunes femmes touchées par la précarité menstruelle. Après une expérimentation nationale réussie dotée d'un million d'euros en 2020, le budget a été porté à cinq millions d'euros depuis 2021 et il sera doublé d'ici 2027 ; - soigner les personnes malades à la rue via le développement de 430 équipes mobiles et de 2 400 places « hors les murs » d'ici 2027 qui couvriront les zones blanches et les besoins des personnes (soins infirmiers et psychologiques, maladies chroniques…). Axe 4 : Construire une transition écologique solidaire : lutter contre les dépenses contraintes en matière de logement, de mobilité, d'eau et d'énergie en facilitant l'accès aux aides et permettre l'accès à une alimentation de qualité. Cet axe s'inscrit en cohérence avec la mise en place du fonds vert, le développement de MaPrimeRénov' ou encore le relèvement des obligations du certificat d'économies d'énergie précarité : - renforcer tout au long du quinquennat le programme Mieux manger pour tous pour assurer aux bénéficiaires de l'aide alimentaire l'accès à une alimentation saine et durable en améliorant la qualité écologique et nutritionnelle des aliments distribués, et poursuivre la transformation écologique de la lutte contre la précarité alimentaire en développant les projets territoriaux entre les producteurs, les associations et les collectivités ; - prolonger le dispositif « Cantine à 1€ » et renforcer le soutien aux communes pour l'amélioration de la qualité des repas, via l'accompagnement dans la durée des petites communes rurales dans la généralisation de la tarification sociale des cantines, et le renfort de 3 à 4 euros du soutien de l'Etat pour chaque repas tarifié à moins d'1 euro pour les communes qui s'engagent en faveur de la qualité des repas en accord avec la loi Egalim. Soutenir, dans le cadre des contrats avec les départements et les métropoles, la généralisation de la tarification sociale des cantines dans les collèges, en particulier pour les établissements en Réseau d'éducation prioritaire (REP) /REP+ ; - renforcer et prolonger les aides à l'achat de vélos pour les publics les plus précaires ; - soutenir financièrement et techniquement les collectivités dans la généralisation de tarifications progressives et sociales de l'eau ; - améliorer le recours au chèque énergie en ciblant les publics hors du logement ordinaire (établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, centres d'hébergement et de réinsertion sociale, gens du voyage, etc.) et permettre son usage pour payer les charges locatives de chauffage dans le parc social ; - dans le cadre de la contractualisation avec les collectivités territoriales, poursuivre la montée en charge des politiques de mobilité solidaire, en développant les plateformes de mobilité pour accompagner les publics modestes en insertion et en finançant des solutions de mobilité solidaire, en particulier dans les territoires proches d'une zone à faible émission. Le Pacte vise également à s'adapter à la diversité des territoires, dans le cadre d'un partenariat étroit entre l'Etat et les collectivités. La contractualisation avec les conseils départementaux et les métropoles est renouvelée, à travers le déploiement des pactes locaux des solidarités sur la période 2024-2027, et en lien avec la contractualisation pour l'insertion et l'emploi dans le cadre de France Travail. Cela représente un apport de 260 M€ en 2024 pour les conseils départementaux sur ces deux contractualisations, et de 12,5 M€ pour les métropoles avec une montée en charge prévue d'ici 2027. Enfin, un plan d'action spécifique en faveur de l'Outre-mer de 50 M€ par an d'ici 2027 permettra de renforcer le soutien à la parentalité, l'accès aux droits et au logement, la lutte contre l'illettrisme et le décrochage scolaire, l'accès à l'alimentation et la lutte contre les inégalités de santé. Le Pacte des solidarités incarne ainsi une approche interministérielle de la lutte contre la pauvreté en s'inscrivant sur la durée, via l'engagement pluriannuel du Gouvernement sur la période 2024-2027. Il engage une augmentation de 50 % des crédits dédiés à la lutte contre la pauvreté d'ici 2027 par rapport à la stratégie pauvreté en 2023. Il mobilise des crédits de la Sécurité sociale et des crédits de l'Etat sur plusieurs programmes budgétaires, avec une montée en charge annuelle d'ici 2027.
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