M. Rodrigo Arenas alerte M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la mise en place d'un terminal méthanier flottant au Havre, pourtant dangereux et inutile. Dans une enquête commune, Disclose et Greenpeace révèlent d'une part que la construction de ce terminal a reposé sur l'agitation par le Gouvernement d'une menace fictive de rupture d'approvisionnement en gaz. Et d'autre part, les très sérieux risques qu'il représente pour les Havrais et l'environnement. Sous couvert de la guerre en Ukraine, Total Énergies a réalisé un lobbying efficace auprès du Gouvernement dans le but de poursuivre le développement de ses activités climaticides à rebours de l'histoire. Les analyses montrent qu'il n'était pas nécessaire de construire de nouvelles infrastructures pour répondre à la demande française en gaz, malgré les potentielles coupures annoncées. Pour preuve, il n'y a eu aucune alerte majeure sur notre sécurité énergétique en 2022 et concernant 2023, les terminaux gaziers existants sont encore loin de leur capacité maximale de fonctionnement. Face à ces constats, l'État et Total apportent désormais de nouvelles justifications, peu crédibles. Il existerait selon eux entre autres un risque de défaillance ou de sabotage sur nos gazoducs, ce qui n'est absolument pas démontré à ce jour. Cependant, au-delà de l'inutilité du projet, ce sont également les conditions de sa mise en œuvre qui interpellent. Prétextant l'urgence d'installer ce terminal méthanier, le Gouvernement s'est servi de la loi « pouvoir d'achat » pour s'épargner des contraintes réglementaires et la consultation des citoyens. Concrètement, les élus locaux n'ont pas eu leur mot à dire et les normes environnementales ont été contournées. Par exemple, alors que le terminal aurait dû remplir le régime ICPE, indispensable à la simple construction d'un pressing, une manœuvre juridique l'en a épargné. La dangerosité de ce type d'infrastructure est réelle. Un terminal méthanier accueille du GNL, principalement issu de gaz de schiste, dont les fuites sont fréquentes et très nocives. Total Énergies le reconnaît d'ailleurs dans une de ses notes, « 151 phénomènes dangereux » pourraient survenir du fait de fuites. Contre toute logique, l'entreprise doit notamment rendre une étude d'impact six mois après la mise en service du terminal. Enfin, le simple choix de sa localisation dans le port du Havre confirme l'absurdité du projet. Il est prévu que le terminal flottant soit installé en fond de port. Autrement dit, en cas d'incident grave, il faudrait qu'il parcoure 8 km pour rejoindre la mer libre, en passant au niveau de sites Seveso seuil haut et à proximité immédiate du centre-ville. Il n'existe aucune configuration comparable dans le monde. Ainsi, le projet de terminal méthanier n'étant pas indispensable pour la sécurité énergétique du pays et face aux trop nombreux risques qu'il représente, il est d'intérêt public de revenir sur sa réalisation. Il peut être judicieux de reconnaître qu'un projet n'est pas nécessaire, d'autant plus lorsqu'il écarte l'ensemble des acteurs, s'affranchit d'une étude d'impact environnemental et qu'il retire des moyens à la transition énergétique. En raison de l'ensemble des éléments précités, le Gouvernement s'engage-t-il à revenir sur l'installation du terminal méthanier du Havre ?
La France s'est donné comme objectif d'atteindre la neutralité carbone en 2050. Durant la phase de transition énergétique, il est nécessaire d'assurer la sécurité d'approvisionnement des consommateurs qui continuent à utiliser des énergies fossiles, notamment du gaz naturel. Depuis 2021, la limitation des exportations de gaz naturel décidée unilatéralement par le gouvernement russe a eu des conséquences majeures sur le fonctionnement du système gazier européen. L'approvisionnement en gaz naturel de l'Allemagne et de la Belgique a été fortement impacté et les possibilités d'importation de gaz naturel depuis ces deux pays vers la France ont disparu. L'installation d'un terminal méthanier flottant dans le port du Havre est une solution temporaire et réversible pour répondre rapidement à ces bouleversements du système gazier. Cette installation a été règlementairement encadrée sans recours aux dérogations possibles instaurées par la loi relative aux mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat (MUPPA) et dans le respect des dispositions règlementaires applicables mentionnées dans l'avis du Conseil d'État du 4 juillet 2022 qui confirmait, à cet égard, que l'encadrement réglementaire précité « paraît au Conseil d'Etat de nature à garantir un degré d'exigence suffisant en matière de protection de la santé, de la sécurité et de la salubrité publiques ainsi qu'en matière de protection de l'environnement ». La loi MUPPA a par ailleurs prévu une étude complémentaire, qui s'ajoute à ce cadre réglementaire déjà bien établi. La capacité additionnelle d'importation de gaz naturel liquéfié associée au terminal méthanier flottant du Havre est en effet nécessaire au plus vite pour apporter une réponse à la menace grave qui pèse actuellement sur la sécurité d'approvisionnement en gaz naturel, à savoir l'impossibilité d'assurer l'approvisionnement en gaz naturel et la préservation des capacités de transit en cas d'indisponibilité d'une infrastructure gazière majeure, notamment du gazoduc sous-marin Franpipe utilisé pour transporter jusqu'en France du gaz norvégien. L'arrêté du 13 mars 2023 fixant les objectifs de mise en service, de maintien en exploitation et de capacités de traitement de gaz naturel liquéfié pour le projet d'installation d'un terminal méthanier flottant dans le port du Havre porté par TotalEnergies LNG Services France définit un objectif de mise en service avant le 15 septembre 2023, en amont de l'hiver 2023-2024, et un maintien en exploitation pendant une durée de 5 ans. La poursuite de la transition énergétique permettra une réduction progressive des importations de gaz naturel d'origine fossile, grâce à la réduction de la consommation de gaz méthane et le remplacement du gaz naturel d'origine fossile par des gaz renouvelables et bas-carbone. Cette baisse des importations de gaz naturel conduira à retrouver d'ici 2028 des marges de flexibilité, permettant de préserver l'approvisionnement en gaz naturel et les capacités de transit en cas d'indisponibilité d'une infrastructure gazière majeure, sans avoir recours à la capacité additionnelle du terminal méthanier flottant. Grâce à sa réversibilité, le projet d'installation d'un terminal méthanier flottant dans le port du Havre est compatible avec ces perspectives.
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