M. Jorys Bovet interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les conditions mises en place pour le respect du bien-être animal durant les fêtes religieuses de l'Aïd el-Kébir qui ont lieu cette année entre le 27 juin et le 1er juillet 2023. Chaque année lors de l'Aïd el-Kébir, plus de 130 000 ovins et bovins sont sacrifiés en France. Les bêtes sont égorgées « aux principes du halal ». S'en suit une saignée qui, en 2023, apparaît aux yeux du plus grand nombre comme un acte d'une cruauté sans nom envers les animaux. En France, l'étourdissement avant l'abattage de l'animal est obligatoire pour les bovins, équidés, ovins, caprins et porcins depuis le décret du 16 avril 1964. Cette obligation s'applique depuis 1970 pour les volailles et les lapins. Le décret précité autorise des dérogations notamment dans le cas de pratiques religieuses. Il n'existe pas de dérogation à cette obligation dans des pays comme le Danemark, l'Islande ou l'Autriche. Les révélations des associations et organismes sanitaires des derniers jours ont mis en lumière des conditions de détention très sommaires au regard du bien-être animal : stockage de moutons dans des HLM, carcasses calcinées, cadavre de bête au milieu d'un troupeau de 40 têtes dans une pièce d'à peine 10 mètres carrés, etc. M. le député s'interroge sur le processus mis en place par les détenteurs de ces bêtes pour acquérir un tel troupeau. Par ailleurs, outre la vigilance citoyenne des voisins, quels moyens de surveillance et de contrôle sont mis en place pour éviter que le stockage de bêtes puisse avoir lieu dans des lieux inadéquats et que le sacrifice se fasse dans des conditions respectueuses des règles sanitaires et de la condition animale ? Enfin, il souhaiterait davantage d'informations concernant l'obtention d'autorisations d'ouvertures d'abattoirs temporaires sur la période de l'Aïd el-Kébir ainsi que les contrôles sanitaires auxquels doivent faire face ces installations temporaires.
L'abattage rituel et spécifiquement le sacrifice lié à l'aïd-el-kébir, constitue une dérogation, justifiée par le libre exercice du culte, à l'obligation d'étourdissement préalable des animaux avant leur mise à mort. La Cour européenne des droits de l'homme a ainsi considéré dans un arrêt du 27 juin 2000 (affaire Cha'are Shalom Ve Tsedek c/ France – Requête n° 27417/95) que le dispositif français permettant l'abattage rituel était un « engagement positif de l'État visant à assurer le respect effectif de la liberté d'exercice des cultes ». La mobilisation des agents des services vétérinaires à l'occasion de la célébration de la fête de l'aïd-el-kébir s'inscrit dans les missions de service public réalisées de manière permanente au sein des directions départementales en charge de la protection des populations, à savoir l'instruction des demandes d'agréments d'abattoirs ou de centres de rassemblements d'animaux de boucherie, la programmation et la réalisation de contrôles des animaux vivants, le contrôle de la protection animale au moment de la mise à mort, l'inspection des viandes dans les abattoirs, le contrôle des produits mis sur le marché et les actes qui font suite à ces contrôles (verbalisations, saisies d'animaux ou de carcasses ou de viandes…). Selon les départements et l'importance que revêt l'événement, les effectifs dédiés à ces contrôles peuvent être renforcés pendant la durée de la fête. L'abattage des animaux pendant la fête de l'aïd-el-kébir doit être réalisé dans des abattoirs agréés par l'État, dans le respect de la réglementation : l'abattage en dehors des abattoirs est interdit et constitue un délit. C'est pourquoi, outre les abattoirs existants, la politique publique menée par l'État vise à renforcer la création d'abattoirs dits « temporaires », agréés spécifiquement pour cette occasion, fonctionnant uniquement pendant la durée de cette fête. Cette démarche s'inscrit dans une dynamique d'amélioration continue qui implique chaque année l'intervention collective des différents services de l'État, des collectivités territoriales, des membres de la filière agroalimentaire ainsi que des acteurs du culte musulman. L'implication de ces derniers est essentielle pour garantir le bon déroulement de cette célébration ; en particulier, ils jouent ainsi un rôle clef dans l'estimation de la demande par rapport à l'offre existant au niveau local et la communication auprès des fidèles pour rappeler l'interdiction de l'abattage clandestin et du transport d'animaux vivants par des particuliers. Ainsi en 2023, ce sont 133 abattoirs agréés qui ont été mobilisés pour l'organisation de la fête de l'aïd-el-kébir (92 abattoirs pérennes pour 66 % du volume et 41 abattoirs temporaires pour 34 % du volume). L'agrément des abattoirs temporaires est accordé sur la base d'un dossier de demande transmis plusieurs mois avant l'évènement et instruit par les services vétérinaires pour contrôler la conformité aux exigences réglementaires. Les conditions d'octroi de la dérogation à l'obligation d'étourdissement sont également vérifiées. De nombreux abattoirs temporaires sont renouvelés d'une année sur l'autre et leur fonctionnement est donc déjà connu des services de contrôle, ce qui est facilitant pour l'instruction de leur dossier d'agrément. Dans tous les cas, un test de fonctionnement de l'abattoir est réalisé en présence des inspecteurs quelques jours avant le début de la fête de l'aïd-el-kébir, permettant de vérifier le respect des exigences sanitaires et de protection animale. Les services vétérinaires d'inspection sont présents en permanence dans tous les abattoirs d'animaux de boucherie en activité, y compris dans les abattoirs temporaires. Conformément au règlement (UE) n° 2017/625, les viandes ne sont déclarées propres à la consommation humaine et mises sur le marché que si les animaux ont fait l'objet d'une inspection ante mortem favorable et que les carcasses et les abats ont subi une inspection post mortem ne révélant aucune anomalie. Aucune denrée alimentaire préjudiciable à la santé ou impropre à la consommation humaine ne peut être mise sur le marché. Une circulaire, co-rédigée par le ministère chargé de l'agriculture et par le ministère de l'intérieur et des outre-mer, permet chaque année de rappeler aux préfets les enjeux et les modalités d'organisation de cet évènement, dans le respect des pratiques cultuelles et des exigences de la République. Cette action coordonnée des services de l'État, des collectivités territoriales, des acteurs du culte musulman et des professionnels de l'élevage et de l'abattage donne des résultats concrets, puisqu'elle a permis de réduire drastiquement les infractions constatées. Le nombre d'abattoirs clandestins s'élevait à 26 en 2023, alors qu'on en dénombrait 65 en 2006. Par ailleurs, une division nationale de lutte contre la maltraitance a été créée en 2023 au sein du ministère de l'intérieur et des outre-mer. Constituée de 15 agents spécialisés, cette division traite des affaires interdépartementales, nationales, internationales, comme les trafics d'animaux, en lien avec les services d'enquêtes du ministère chargé de l'agriculture. Elle est également étroitement associée aux procédures judiciaires qui sont engagées par les services afin de réaffirmer, sur le territoire, la volonté du Gouvernement à ne pas tolérer les détentions illégales d'animaux de rente ni leur abattage clandestin. Enfin, la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes a d'ores et déjà permis de durcir les peines encourues en cas de maltraitance animale.
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