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M. Rodrigo Arenas alerte M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur l'accaparement de l'eau dans la Vienne. La science n'intéresserait-elle le Gouvernement que lorsqu'elle sert ses intérêts ? En témoigne la manière dont le préfet de la Vienne a rapidement fait invalider une étude scientifique commandée il y a quatre ans par l'établissement public territorial de bassin. Confié à une filiale de Suez, ce rapport de 600 pages, intitulé « Hydrologie, milieux, usages et climat (HMUC) », devait pourtant déterminer la pertinence de construire 30 bassines visant à stocker 8,8 millions de mètres cubes d'eau. L'étude est formelle : toutes les bassines ne pourront pas être remplies. Alors que les pressions exercées sur les ressources hydriques du bassin de la rivière Clain sont déjà trop importantes depuis plusieurs décennies, les dérèglements climatiques ont accru la fréquence et l'intensité des sécheresses hivernales. Dès lors, penser que l'on pourra faire face au manque d'eau l'été par le stockage de l'eau pompée dans les nappes phréatiques en hiver est illusoire. Inutile de rappeler que pour faire valider la construction des bassines, le Gouvernement s'est appuyé sur un ancien rapport du BRGM dont les données s'étendent de 2000 à 2011. Autrement dit, une période où la question de l'eau n'était pas aussi centrale et où les sécheresses n'étaient pas aussi massives. L'étude HMUC pose uniquement des constats sur la situation hydrique de la région et les possibilités d'un juste partage de l'eau. Pour autant, elle remet en question le maintien d'un modèle agricole prédateur des ressources, des personnes et de la biodiversité. Alors, par l'intermédiaire de son préfet et sous pression de la FNSEA, l'État s'entête à défendre l'intérêt particulier, quitte à sacrifier l'avenir agricole de la Vienne. Les bassines ne bénéficieront qu'à une infime minorité d'exploitations. Celles-ci sont majoritairement tournées vers des cultures intensives, gourmandes en eau et en pesticides à destination de l'élevage industriel. Déjà sous perfusion grâce aux aides de la PAC, l'agro-industrie pourrait également bénéficier d'argent public, à hauteur de 70 %, pour financer ses bassines. Il est temps de réintroduire un juste partage des ressources permettant d'assurer la viabilité des sols et le retour à une agriculture locale et saine. À ce titre, le comportement du préfet n'est pas à la hauteur des enjeux. Sous couvert de défendre les intérêts économiques de la région, son passage en force va à l'encontre des réalités climatiques et de l'indispensable transition que doit engager l'agriculture française. Ce déni de réalité est incompréhensible pour l'immense majorité des agriculteurs, irrigants ou non, qui seront privés d'eau par la construction des mégabassines. En prétextant l'absence d'étude sur les impacts socio-économiques et bien que le cahier des charges ne le demandât pas, le préfet est parvenu par tous les moyens à faire invalider l'étude. Sur place, cet acharnement est vécu comme une trahison et un déni de réalité probant, cela dans le seul but de porter un projet allant à l'encontre de l'intérêt général. Cette absence constante de remise en question laisse perplexe. Les études s'accumulent, la contestation se généralise et pourtant le Gouvernement décide de faire la sourde oreille. On est en 2023, les nappes phréatiques et les cours d'eau de la Vienne sont historiquement bas, alors que l'été vient seulement de débuter. Cette situation alarmante démontre à quel point le solutionnisme technologique que le Gouvernement propose n'est pas à la hauteur. Il lui demande quand le Gouvernement décidera d'un moratoire sur la construction des mégabassines qui privent d'eau une majorité d'agriculteurs au profit d'une minorité s'acharnant dans un modèle dépassé.
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