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Sébastien Chenu
Question N° 9484 au Ministère auprès du ministre de la transition écologique


Question soumise le 27 juin 2023

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M. Sébastien Chenu interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, sur la suppression des facilités de circulation des agents de la SNCF. Soulevé par plusieurs agents de la SNCF, il s'agit d'une transformation qui indigne et qui révèle fortement ce que réserve l'avenir pour les employés des grandes entreprises nationales et d'autant plus pour les salariés de la Société de chemin de fer français. L'annonce date du 15 juin 2023 : « à compter du 1er janvier 2024, les facilités de circulation de loisir de l'ensemble des salariés de la SNCF seront traitées en tant qu'avantages en nature et seront donc soumises à cotisations salariales, patronales et à fiscalisation ». Désormais, les billets dits gratuits seront signifiés sur les fiches de paie. Il s'agira donc d'individualiser sur les fiches de paye les « billets gratuits » ou quasi gratuits, attribués depuis toujours aux agents et leurs ayants droit. Un sujet très sensible dans l'entreprise publique et qui dépasse très largement le cercle des cheminots, statutaires ou contractuels. En l'occurrence, 328 000 agents actifs et retraités et plus de 787 000 ayants droit, à savoir les enfants, les conjoints, les concubins et les parents, bénéficient de ces billets. Certes, un rapport gouvernemental de 2021 révélait que cela représentait 105 millions d'euros de perte de chiffre d'affaires pour la SNCF. Concrètement, chaque salarié de la SNCF peut jouir d'un Pass qui lui donne droit à des voyages sur l'ensemble du réseau national ferré. Seul le coût de la réservation des billets, qui varie de 1,70 à 15 euros, selon les billets concernés, reste à la charge de l'employé. Il est vrai aussi que les conjoints et les enfants peuvent également bénéficier de 16 billets gratuits chaque année, mais pas seulement, et que cette facilité, au-delà de ce quota, permet aux membres de la famille proche de jouir d'une réduction de 90 % sur les billets suivants. Cependant, que révèle cette décision d'imposabilité ? Premièrement, elle manifeste une certaine radicalité ; ni solutions intermédiaires ni options de transition ne sont proposées. Le Gouvernement s'est empressé de taxer chaque billet obtenu via la facilité plutôt que de revoir les modalités des quotas ou la réduction des cercles de bénéficiaires, qui pourraient être trop généreux. Deuxièmement, le motif budgétaire, qui serait d'alléger la SNCF de ces 105 millions d'euros par l'imposition, est largement discutable. On ne sait pas exactement de combien d'euros cette nouvelle recette fiscale ferait économiser, ni comment cette imposition serait appliquée avec équité (de manière dégradée en fonction du bénéficiaire et du lien de proximité avec le premier bénéficiaire - agent de la SNCF ?) et surtout : est-on certain au moins que cette imposition nouvelle sera reventilée pour compenser la perte évoquée dans le rapport gouvernemental ? Troisièmement, cette mesure ne se résume peut-être qu'à un triste symbole et un certain mépris de l'histoire nationale. Après avoir accéléré coûte que coûte toutes les procédures possibles visant à supprimer les régimes sociaux dont celui des cheminots, le Gouvernement impose encore une fois un diktat afin de mettre un terme à la reconnaissance étatiques envers les groupes qui ont fourni à la France sa Résistance et donc le retour de son État véritable, via des mesures sociales. Enfin, il semble ironique que le régime de la « start-up nation » semble vouloir priver les agents de la SNCF des services de leur propre société. Pourtant, les entreprises privées ont traditionnellement coutume de faire profiter leurs services à leurs salariés à travers des remises en tout genre. Jamais on ne penserait à taxer les remises en pourcentage des salariés de LVMH sur les produits LVMH. L'ironie : la « start-up nation » serait la seule entreprise de France à ne pas vouloir faire bénéficier ses propres services à ses propres salariés. Pour revenir à des arguments moins politiques, la facilité de circulation des agents SNCF est avant tout un moyen d'assurer la pérennité de la société des chemins de fer français, quand la montée à la concurrence risque d'exercer des pressions sur les prix à la baisse alors que les bénéfices sont moindres. En quoi la compensation proposée par la SNCF est-elle aussi juste ? Une perte du pouvoir d'achat en raison d'une taxe ne se corrige pas vraiment en pratique avec « une augmentation du traitement pour les statutaires ou du salaire de base pour les contractuels », si les salaires en question ne sont pas très élevés en l'état. Pour Les Échos, reste en outre le débat sur le maintien de ces avantages pour les cheminots SNCF qui seraient transférés vers des entreprises tierces, dans le cadre de l'ouverture à la concurrence du rail ou du changement de périmètre annoncé de Fret SNCF. Aussi, il s'agit donc de protéger cette industrie du transport propre au développement économique français par la sauvegarde de l'attractivité des postes. Il faut également rappeler que les facilités de circulation forment aussi une certaine compensation pour les conditions de travail qui se dégradent. Il faut dire que les incivilités ou agressions contre ses agents sont en hausse en 2022. La SNCF devait même lancer une campagne de sensibilisation « pour appeler au respect dans les trains » : en 2021, par exemple, « 5 330 actes de violence verbale ou physique, soit 14 actes par jour » ont été commis contre un agent de la SNCF. « Parmi tous ces incidents, 900 ont donné lieu à une déclaration d'accident de travail », a recensé la compagnie de trains. Et les choses ne se sont pas améliorées cette année puisque sur les six premiers mois de 2022, le phénomène est en hausse de 9 % par rapport à 2021, détaille ce vendredi 16 juin 2023 SNCF Voyageurs. Enfin, cette mesure ne traitera pas du problème de fond de la SNCF, qui est celui de la rentabilité. Que prévoit M. le ministre outre cette mesure de fiscalité pour rehausser les profits de la SNCF, sans augmenter les prix à outrance - déjà inaccessibles pour la plupart des Français ? Finalement, on devrait conclure que cette annonce prend lieu dans un contexte qui ne semble pas la rendre nécessaire, la SNCF s'attendant à « un nouvel été record » et que l'on finira 2023 avec le constat d'aucun nouveau coup de pouce salarial. Alors que près de 450 000 billets supplémentaires ont été en effet mis en vente par rapport à l'été 2022, a annoncé le mardi 20 juin 2023, Alain Krakovich, en charge des TGV et des Intercités, à la SNCF, l'entreprise n'aura pas touché aux augmentations salariales des cheminots prévues pour cette année. Il lui demande donc pourquoi avoir faire ce choix de la radicalité ; à combien s'estiment les économies dégagées, quelle équité d'application de l'impôt, comment elles seraient ventilées ; comment conserver ou renforcer l'attractivité des postes d'agents de la SNCF alors que la compensation proposée par l'entreprise demeure discutable ; quel impact pour les agents redirigés vers des entreprises tierces ; en complément de cette mesure et en revenant sur la question de la rentabilité, quelles initiatives sont à prendre outre celles touchant à des modifications des contrats des salariés.

Réponse

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