M. Nicolas Dupont-Aignan appelle l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la plainte déposée par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) contre l'étude publiée par l'Institut hospitalo-universitaire (IHU) de Marseille sur 30 000 patients malades de la covid-19 ; étude condamnée et sanctions annoncées par la voix de M. le ministre devant le Sénat le 31 mai 2023, avant toute conclusion d'enquête. Rédigée par plusieurs coauteurs, dont le professeur émérite Didier Raoult, et publiée en ligne en avril 2023 dans le cadre d'un « pré-print », cette étude rétrospective synthétise plusieurs travaux faisant déjà l'objet de publications, lesquelles n'ont à ce jour jamais été contestées publiquement par le ministère. Deux premières publications datant de 2020 portaient, d'une part, sur 10 000 patients vus en hôpital de jour et, d'autre part, sur 2 000 autres hospitalisées. L'extension de l'étude controversée ne concerne que l'année 2021, bien qu'elle intègre également les patients de 2020, permettant une observation plus pertinente de deux années de lutte contre la covid-19. Ces travaux sont donc exclusivement rétrospectifs et l'enquête menée par l'ANSM, l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l'Inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGESR) de 8 inspecteurs, portant sur près de 75 000 documents fournis en toute transparence par l'IHU de Marseille, n'a pas permis de mettre en évidence une « étude prospective en cours ». Les conclusions des investigations n'ont ainsi jamais fait état d'un quelconque essai illégal qui aurait été mené par l'institut marseillais. Par ailleurs, saisi d'une plainte du conseil départemental des Bouches-du-Rhône de l'Ordre des médecins, notamment pour usage inapproprié de l'hydroxychloroquine dont le professeur Raoult n'aurait pas été en mesure de démontrer la « conformité aux données acquises de la science, ni de prouver l'obtention du consentement éclairé des patients pour lesquels [elle pouvait] entraîner des risques injustifiés », la chambre disciplinaire du conseil de première instance de Nouvelle-Aquitaine de l'Ordre des médecins a rendu des conclusions sans la moindre ambiguïté. En effet, dans sa décision du 3 décembre 2021, cette instance établit, dans ses considérants, que « les prescriptions du Pr Raoult à ses patients et celles qu'il a préconisées (...) pouvaient apparaître alors comme appropriées et équilibrées en termes d'avantages et d'inconvénients, et mesurées dans leurs conséquences. D'ailleurs, en l'état de l'instruction, aucun des nombreux patients traités par le Pr Raoult n'a porté plainte contre lui pour les soins dispensés ou même dénoncé les prescriptions effectuées ». La même décision estime en outre « qu'aucun élément produit aux dossiers ne permet d'établir que le Pr Raoult aurait participé à des recherches médicales sur les personnes en-dehors des conditions fixées par la loi ». Il ressort également de la délibération que le professeur Raoult aurait bien assuré, « durant l'année 2020, des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, à ses patients (...) que celui-ci [a] donné une information loyale, claire et appropriée au patient tant sur son état que sur les investigations et soins proposés ». Est également ajouté que « le Pr Raoult ne peut être regardé comme ayant conseillé ou prescrit à ses malades un remède ou un procédé illusoire ou insuffisamment éprouvé. » Et de conclure en affirmant que « le Pr Raoult n'a fait courir à ses patients aucun risque injustifié en prescrivant l'hydroxychloroquine aux doses habituellement préconisées pour les traitements pour lesquels elle est régulièrement utilisée depuis plusieurs années pour traiter d'autres pathologies » et qu'il a « respecté les principes de moralité et de probité exigés par les dispositions » de la loi. De nombreux pays ont utilisés et autorisé l'usage de l'hydroxychloroquine. De nombreuses études ont été publiées et sont répertoriées dans le site earlyC19.com et concluent à son intérêt. Enfin, M. le ministre, lui-même auteur d'une thèse sur la chloroquine, avait déclaré que Didier Raoult « est une référence dans ce qui a trait à l'usage de la chloroquine. Les doses qu'il prescrit sont largement en dessous des seuils de toxicité de cette molécule ». C'est pourquoi, compte tenu de ces éléments, il souhaiterait savoir ce qu'il considère comme illégal dans le travail rétrospectif rapporté par l'IHU de Marseille, sur les 30 000 patients suivis en 2020 et 2021 en hospitalisation et informés des usages thérapeutiques de cet institut.
L'article L. 1121-1 du code de la santé publique définit les recherches impliquant la personne humaine comme toute recherche organisée et pratiquée sur l'être humain afin de développer les connaissances biologiques ou médicales. Les projets de recherches portant sur le médicament (en dehors des recherches non interventionnelles) doivent être autorisés par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et recevoir l'avis favorable de la part d'un comité de protection des personnes (CPP) pour pouvoir être légalement réalisés. Ainsi, la réalisation de telles recherches ne disposant pas de l'avis favorable d'un comité et/ou de l'autorisation de l'ANSM rend passible leur promoteur de sanctions pénales et administratives. L'ANSM a saisi la Procureure de la République au sujet de l'essai de l'institut hospitalo-universitaire (IHU) de Marseille sur la chloroquine dans le cadre de la Covid 19 au titre de l'article 40 du code de procédure pénale. Une procédure contradictoire avec l'IHU et l'AP-HM a été mise en place afin d'une part de suspendre les recherches réalisées sans obtention préalable d'un avis favorable d'un comité de protection des personnes et, d'autre part, de faire la lumière sur les pratiques de l'IHU. Parallèlement, une mission d'inspection engagée par l'ANSM, l'Inspection générale des affaires sociales et l'Inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche auprès de l'IHU de Marseille fin 2021, avait notamment pour objectif la vérification du respect par l'IHU et l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille (AP-HM) des dispositions législatives et réglementaires relatives aux recherches impliquant la personne humaine. Cette vérification portait sur : - les conditions de mise en œuvre des recherches suivantes au regard de la réglementation applicable : « Recherche de tropheryma whipplei comme agent de gastro-entérite chez le jeune enfant » et « Pathologies associées au voyage et acquisition de pathogènes et de bactéries multi-résistantes chez les étudiants en médecine effectuant un stage pratique hors de France » ; - les avis du comité d'éthique interne de l'IHU sur les projets de recherches (sur la période octobre 2018 à 2021) ; - les informations transmises par l'IHU à l'ANSM en matière de promotion de recherches impliquant la personne humaine ; - les dossiers médicaux de patients traités en 2019 pour une tuberculose infectieuse par les services d'infectiologie de l'AP-HM hébergés au sein de l'IHU, en raison de la possible mise en œuvre d'une recherche interventionnelle comportant une intervention sur la personne non justifiée par sa prise en charge habituelle en l'absence d'autorisation de l'ANSM et d'avis favorable d'un Comité de protection des personnes. Cette mission conjointe a mis en évidence des infractions à la réglementation des RIPH menées au sein de l'IHU, notamment en ce qui concerne les modalités de mise en œuvre, les conditions de prélèvement et d'utilisation des échantillons des personnes incluses dans des recherches, ainsi que les modalités de recueil du consentement et d'information des participants. Les règles éthiques n'ont pas été systématiquement respectées, ne permettant pas d'assurer la protection des personnes à un niveau suffisant et tel que la réglementation le requiert. Compte tenu de la gravité des manquements constatés, l'ANSM a de nouveau saisi la procureure de la République au titre de l'article 40 du code de procédure pénale pour les faits pénalement répréhensibles suivants : - la mise en œuvre de recherches en l'absence d'avis favorable préalable d'un comité de protection des personnes au sein de l'IHU et de l'AP-HM ; - la communication à l'ANSM par l'IHU en amont de l'inspection d'un document falsifié concernant un avis du comité d'éthique interne de l'IHU.
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