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Sébastien Chenu
Question N° 9359 au Ministère de l’éducation nationale


Question soumise le 27 juin 2023

M. Sébastien Chenu appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur les effets néfastes de la dernière réforme des filières « pros ». Le 30 mai 2023, des professeurs de l'établissement professionnel Jurénil de Denain se sont rassemblés pour protester contre la réforme du lycée professionnel. Loin de faire l'unanimité, cette réforme soulève inquiétude et colère chez les enseignants concernés. Beaucoup ont fait part de leurs craintes d'une diminution de l'offre de filières professionnelles. En effet, la réforme prévoit de fermer les filières professionnelles dont les taux d'accès à l'enseignement supérieur et à l'emploi ne satisfont pas les exigences d'insertion. Certaines filières seront supprimées dès la rentrée 2023. Or ces brusques fermetures laissent peu de temps aux enseignantsainsi qu'aux élèves pour se réorienter. Il est très probable que des lycéens professionnels se retrouvent sans filière dans leur aire géographique, les contraignant soit à partir soit à se réorienter. Une atteinte grave au principe d'égalité du service public serait donc à déplorer. Les lycéens réorientés dans d'autres filières risquent de surcharger les effectifs déjà importants des classes. Le risque de décrochage est aussi considérable. Avec 30 % des élèves décrochant de leur scolarité professionnelle, les chiffres risquent d'augmenter si certains lycéens sont contraints de changer de secteur géographique. Cette réforme ne doit pas accélérer les cas d'échec scolaire chez les jeunes. Les enseignants protestent également contre la priorité accordée aux stages et insertions professionnelles aux dépens de l'apprentissage des matières théoriques comme le français ou les mathématiques. Une base fondamentale d'enseignements théoriques demeure indispensable. De trop nombreux lycéens arrivent avec des difficultés scolaires et ces enseignements généraux visent justement à combler les lacunes. Enfin, les enseignants demandent une revalorisation du point d'indice de la fonction publique afin de suivre les effets de l'inflation. La revalorisation annoncée récemment est bienvenue pour le corps professoral mais elle reste insuffisante pour maintenir des conditions de vie décentes. La rémunération reste un facteur clé de l'attractivité de la profession. Le décrochage des professeurs pourrait suivre le décrochage des élèves si aucune mesure n'est prise. Il lui demande comment il compte minimiser les conséquences des fermetures de classes sur les lycéens professionnels et quelles sont les mesures d'attractivité à mettre en place pour les enseignants professionnels.

Réponse émise le 14 novembre 2023

La réforme des lycées professionnels vise à offrir aux jeunes les meilleures chances de démarrer leur vie d'adulte, en facilitant leur accès à l'emploi. La transformation de la carte des formations professionnelles scolaires en est un levier majeur mis en valeur par le Président de la République dès septembre 2022 et rappelé en mai 2023. À l'échelle de chaque région académique, la transformation attendue prendra en compte : les formations aux nouveaux métiers, aux compétences d'avenir et aux métiers en tension, en particulier dans les secteurs de l'industrie, de l'énergie, du numérique, de la logistique et des transports, des métiers de l'aide à la personne ; les logiques de parcours de formation du bac -3 au bac +2/+ 3, intégrant une approche par filière d'activité ; la fermeture des formations qui combinent une insertion insuffisante et une poursuite d'études trop peu fréquente, ce qui dégagera la capacité à ouvrir des formations plus performantes ; la mixité des parcours entre statut scolaire et apprentissage ; l'offre de formation courte à l'issue d'un premier niveau de qualification professionnelle, de type mention complémentaire désormais appelée certificat de spécialisation, une formation secondaire après un premier diplôme améliorant de façon importante des taux d'accès à l'emploi ; la coloration des diplômes professionnels à un secteur professionnel. Le travail d'élaboration d'une stratégie pluriannuelle est mené de façon concertée entre l'administration centrale, les préfectures, les régions académiques et les académies, les conseils régionaux et les établissements. Il s'appuie à la fois sur une entrée territoriale, conduite à l'échelle des établissements et des bassins d'emploi, et sur une entrée de filière d'activité, menée à l'échelle d'un périmètre plus large. Les premières mesures du changement de l'offre des formations des lycées sont visibles à la rentrée 2023 avec 2 600 places fermées et 3 000 places ouvertes. En complément, 1 050 places ont été ouvertes sur la base des besoins exprimés par des entreprises partenaires des lycées professionnels dans le cadre de France 2030. Il n'y a eu aucune réduction de capacité d'accueil dans la voie professionnelle au niveau national à la rentrée 2023. Plusieurs leviers et outils sont mis à disposition des acteurs en territoires pour faciliter le déploiement de nouvelles cartes des formations pour faire du lycée professionnel, dans chaque territoire, un choix d'avenir pour les élèves et les entreprises. Dans le prolongement de la carte interactive des formations professionnelles déjà disponible, une console de pilotage de la carte des formations professionnelles initiales à destination des acteurs académiques et établissements, intitulée Orion, est en cours de développement pour travailler avec une base de données croisées allant jusqu'à la maille « établissement » (effectifs, taux de pression, taux de remplissage, taux de réussite, poursuite d'études, insertion, besoins en emplois des territoires). De plus, un volet spécifique de l'appel à manifestation d'intérêt « Compétences et métiers d'avenir » France 2030 apporte des moyens supplémentaires financés par l'État pour accompagner la transformation de la carte des formations professionnelles scolaires et financer la formation des professeurs. Par ailleurs, la place des enseignements généraux dans la réforme des lycées professionnels n'est aucunement remise en question. Elle se trouve même renforcée par la possibilité de mettre en place des petits groupes d'élèves en français et mathématiques dès l'entrée en voie professionnelle, pour répondre aux besoins de consolidation et de remédiation pour ces enseignements qui irriguent l'ensemble du parcours de l'élève en voie professionnelle. Cette mesure rentre dans le cadre de la lutte contre le décrochage scolaire qui concerne à ce jour 25 % des élèves de cette voie. Le Pacte enseignant s'ajoute à l'ambition de revalorisation inconditionnelle de tous les enseignants. Il instaure la création de parts fonctionnelles de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves. Les professeurs de lycées professionnels volontaires peuvent bénéficier de six de ces parts. Ces dispositions s'appliquent en plus de la revalorisation du point d'indice décidée à l'échelle de la fonction publique d'État. Chaque professeur en lycée professionnel peut s'engager dans les Pacte LP au travers de l'accompagnement de mesures de la réforme, et obtenir une rémunération supplémentaire annuelle pouvant aller jusqu'à 6 786 euros nets. Pour cette réforme des lycées professionnels, l'Etat déploie des moyens sans précédent, à hauteur d'1 Md € supplémentaires annuels à terme. Contribuant à l'attractivité du métier des enseignants, la réforme de la voie professionnelle comporte un profond renouvellement de la formation continue des enseignants avec pour objectif de permettre aux professeurs de se former dans leur domaine professionnel a minima tous les trois ans en entreprise ou dans un Campus des métiers et des qualifications.

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