Mme Delphine Lingemann appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les moyens à mettre en œuvre pour limiter les coulées de boue sur les espaces publics et privés : routes, bâtiments publics ou privés. Les changements climatiques que l'on connaît se traduisent notamment par des phénomènes violents. On observe des orages de plus en plus intenses, surtout en mai et en fin d'été. Cette année, dans le Puy-de-Dôme, de violents orages ont éclaté et ont entraîné des coulées de boue, notamment sur les routes. À titre d'exemple, le 28 mai 2023, un violent orage a provoqué d'énormes dégâts sur les communes de Champeix, Plauzat et Neschers. Ces boues proviennent essentiellement des terrains agricoles situés en amont des routes. La raison principale est le choix d'une culture sarclée (maïs et tournesol) sur ces bassins versants. Le choix de la culture est donc un des éléments majeurs susceptibles d'éviter les coulées de boue. Une parcelle en pente collecte l'eau, mais également de la terre sur des surfaces importantes. Les coulées de boues ont de lourdes conséquences telles que l'érosion des terres entraînant un appauvrissement des sols. L'eau s'échappant et ruisselant dans les parcelles gaspille une ressource terriblement utile lorsque l'on connaît les besoins en eau en été. En fonction de la gestion du sol, le différentiel d'infiltration peut se chiffrer en dizaines de mm/heure. Un millimètre de pluie qui ne s'infiltre pas et donc ruisselle représente 10 m3 d'eau, ce qui laisse imaginer que quelques dizaines de millimètres non infiltrés lors de violents orages vont représenter des milliards de m3 au sein d'un petit bassin versant. Des solutions existent. Il serait possible de réglementer un périmètre, en bord de route avec l'obligation d'intercepter les coulées de boues par des dispositifs d'hydraulique douce comprenant des bandes enherbées, des haies, des fascines vivantes ou mortes ou des bandes de cultures d'hiver. L'autre solution envisageable serait l'installation de bassins de rétention. Ces bassins permettraient de stocker provisoirement l'eau de pluie sur les terrains en amont et éviteraient les inondations et les coulées de boue. Toutes ces solutions ne peuvent être portées seulement par les agriculteurs et notamment l'installation des bassins de rétention. Elles doivent être accompagnées par des mesures incitatives car sans mesures de soutien, tant à long terme qu'à court terme, les agriculteurs ne seront pas en capacité d'investir le temps et l'argent nécessaires pour changer de mode de culture, mettre en place des haies ou des bandes enherbées ainsi qu'installer des bassins de rétention même s'ils ont totalement conscience que leur adaptation aux changements climatiques est une nécessité. Ainsi, Mme la députée demande ce que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour assurer la gestion des eaux pluie lors des épisodes d'orage et quel soutien il compte apporter aux agriculteurs dans la mise en place des moyens de rétention des eaux de pluie.
Le ruissellement est un phénomène complexe, aux manifestations et conséquences variées. Sa gestion est à la croisée de politiques publiques complémentaires : aménagement et artificialisation des sols, assainissement et gestion des eaux pluviales (ruissellements relativement fréquents ne menaçant pas les vies humaines), prévention des risques (évènements plus rares pouvant menacer des vies humaines ou des biens). La réduction du ruissellement agricole peut être obtenue par différentes actions articulant aménagements d'hydraulique douce (haies, noues, etc.) et ouvrages hydrauliques structurants (bassins de rétention par exemple). Ces deux leviers d'action sont reconnus et encouragés dans le cadre des plans de gestion des risques d'inondation (PGRI) portés par l'État pour chaque bassin hydrographique. Ainsi, certains PGRI reconnaissent l'impact des pratiques agricoles sur les inondations ; d'autres identifient la nécessité de privilégier des pratiques agricoles réduisant l'érosion et favorisant l'infiltration de l'eau dans le sol. Les collectivités territoriales sont un acteur essentiel de la stratégie de prévention des inondations par ruissellement à l'échelle d'un bassin versant. Certaines, notamment plusieurs communes subissant des ruissellements urbains, ont ainsi déjà réalisé des zonages règlementaires pluviaux et intégré le risque de ruissellement dans leurs documents d'urbanisme. Ces approches visent à gérer de manières spécifiques les secteurs de production des ruissellements, les axes d'écoulement et les secteurs d'accumulation. Les collectivités peuvent aussi engager des programmes d'actions de prévention des inondations (PAPI). Cet outil partenarial entre l'État et les collectivités incite à apporter des réponses concrètes (aménagements hydrauliques doux ou ouvrages conçus pour ralentir ou stocker provisoirement les ruissellements en amont, etc.) qui peuvent bénéficier de subventions de l'État via le fonds de prévention des risques naturels majeurs (dit « fonds Barnier »). Dans le cadre de l'exercice de la compétence de « gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations » (GEMAPI), les autorités compétentes peuvent engager toute démarche qu'elles jugent nécessaire afin de prévenir des inondations par ruissellement susceptibles, entre autres, d'emporter sur leur passage des sédiments fins. Bien que la compétence GEMAPI n'inclue pas la mission « maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement ou la lutte contre l'érosion des sols » visée à l'article L. 211-7 du code de l'environnement, les autorités compétentes pour la GEMAPI peuvent s'en saisir et porter aussi, à leur échelle d'intervention, des actions prévenant l'érosion des sols. D'autres dispositifs de financement sont également mobilisables, comme les fonds nationaux et européens dans le cadre de la politique agricole commune via les mesures agri-environnementales et climatiques, ou des dispositifs spécifiques des Agences de l'eau. Afin de mieux connaître le risque de ruissellement, le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires a confié au Cerema l'analyse de la faisabilité d'une cartographie nationale des zones exposées.
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