M. François Ruffin alerte M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger sur l'accord UE-Mercosur : le Président et le Gouvernement vont-ils, à nouveau, contourner l'Assemblée ? Ou les députés pourront-ils voter et, s'ils le décident, bloquer l'accord ? « Il n'y a aucune ambiguïté, il n'y a aucun double discours ». Mardi 13 juin 2023, alors que l'Assemblée nationale adoptait une résolution contre le projet d'accord de libre-échange UE-Mercosur, M. le ministre venait marteler ces mots à la tribune. Mais son intervention était, au contraire, un comble d'ambiguïté. Près de quinze minutes de discours sans jamais répondre à la question principale : le Gouvernement s'engage-t-il à consulter le Parlement avant toute adoption d'un accord commercial UE-Mercosur ? M. le ministre a fait la sourde oreille. Dans la proposition de résolution adoptée, les députés réclament noir sur blanc : « que l'accord conclu dans son intégralité devra donc être soumis à la procédure de ratification prévue pour les accords mixtes, c'est-à-dire soumis à un vote à l'unanimité des États membres, puis un vote au Parlement européen et à une ratification par l'ensemble des États membres selon la procédure prévue au niveau national, par l'Assemblée nationale et le Sénat dans le cas français ». Ainsi, les députés ont demandé un refus explicite du splitting, du « découpage » de l'accord ou de toute autre manœuvre juridique visant à museler les parlements nationaux qui s'y apparente. Mais M. le ministre n'en a pas dit un mot. La députée Marie Pochon l'a pourtant interrogé très clairement : « pouvez-vous nous confirmer, M. le ministre, que la représentation nationale pourra débattre et voter tout nouvel accord de commerce négocié à l'échelle européenne ? Vous engagez-vous contre le splitting du texte voulu par la Commission européenne ? » Là encore, M. Olivier Becht a préféré le silence. Lors des explications de vote, de nombreux députés l'ont relancé. À nouveau, sur ce point, M. le député s'est tu, a évité le sujet. Or que se passe-t-il en coulisse à Bruxelles ? La Commission européenne envisage désormais, bel et bien, de sortir le volet commercial du reste de l'accord UE-Mercosur. Avec quelles conséquences ? Ne pas soumettre le volet « libre-échange » au processus classique de ratification : priver les États de leur droit de veto, tout en ôtant toute capacité de blocage aux Parlements nationaux, notamment le vote par les parlementaires. En décembre 2022, déjà, la Commission européenne a ainsi choisi de faciliter la ratification d'un accord de libre-échange avec le Chili, dans le dos des parlements nationaux. Comment ? Par le recours à un accord commercial « intérimaire ». Un accord qui n'a d'intérimaire que le nom : une fois appliqué - sans l'accord des parlements nationaux -, cet accord ne pourrait, ensuite, plus être remis en cause. Une nouvelle manœuvre anti-démocratique, contre les peuples, que le Gouvernement n'a, à aucune occasion, dénoncée. Le Gouvernement clame qu'il sera vigilant sur l'adoption de ce nouvel accord UE-Mercosur. Mais, en ce cas, il faut qu'il s'engage avec netteté contre ce découpage, ce splitting, cet accord « intérimaire » : quels que soient les termes utilisés ou l'habillage utilisés, le Gouvernement doit garantir très clairement aux parlementaires français qu'ils auront la possibilité de décider, si cet accord avec le Mercosur doit être, ou non, ratifié. Ainsi, avec les députés Marie Pochon, Sébastien Jumel, Dominique Potier, il lui repose la question très clairement, sans ambiguïté, et attend donc en retour une réponse très claire, sans ambiguïté : à savoir, s'il s'engage à ce qu'un vote, avec capacité de blocage, sur la totalité de l'accord UE-Mercosur, soit organisé au Parlement français.
Comme pour tout accord international négocié par l'Union européenne (UE), il revient au négociateur, en l'occurrence ici la Commission européenne, de présenter formellement la proposition d'accord au Conseil de l'UE. Elle seule en a l'initiative, qu'il s'agisse de son contenu mais également de sa forme juridique. La France défend le respect de la répartition des compétences entre l'UE et les Etats membres, ainsi que le respect des attributions de chaque institution européenne. Tel que négocié, il apparaît que cet accord contient à la fois des stipulations relevant de la compétence exclusive de l'UE - en particulier le volet commercial - et des stipulations relevant de compétences que l'Union partage avec les États membres. La France estime donc qu'il s'agit d'un accord mixte, qui devra être à la fois conclu par l'Union et ratifié par chacun des États membres, selon ses procédures constitutionnelles. Comme pour tout accord commercial de l'UE, l'accord sera par ailleurs soumis à l'approbation du Parlement européen. Au regard de la dimension de cet accord et de la résolution adoptée par l'Assemblée nationale le 13 juin 2023, le Gouvernement a indiqué à plusieurs reprises à la Commission européenne sa volonté de maintenir un accord mixte, sous la forme d'un accord d'association, conformément au mandat confié par le Conseil de l'UE à la Commission. Il a donc exprimé son opposition à une scission, pour permettre aux Parlements nationaux de participer pleinement à son processus de ratification.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.