Mme Violette Spillebout attire l'attention de Mme la ministre de la culture sur la question du partage de la valeur dans le domaine de l'édition, plus particulièrement entre les auteurs et les éditeurs, ainsi qu'à propos de la rémunération des auteurs. Les droits d'auteurs constituent la principale rémunération des auteurs et sont régis par les contrats d'édition ou des contrats avec des organismes de gestions collectives. Mme la députée a échangé avec des auteurs faisant partie du Conseil permanent des écrivains : 43 % des auteurs ont constaté une diminution, au cours des cinq dernières années, du montant des droits d'auteur versés par leurs éditeurs ou des organismes de gestion collective, selon l'Observatoire des rémunérations (SGDL et DAGP). Toujours selon cette étude, dans 84 % des cas, le montant de l'à-valoir des auteurs est inférieur à 5 000 euros. Seuls 16 % des auteurs ont perçu un à-valoir supérieur à 5 000 euros. 70 % des auteurs interrogés constatent que leurs à-valoir sont insuffisants pour leur permettre de se consacrer sereinement à l'écriture de leur prochain livre, alors que le secteur du livre reste la première industrie culturelle en France et qu'il participe activement au rayonnement culturel du pays. La question du partage de la valeur est aussi centrale pour les auteurs. Des discussions sous l'égide du ministère de la culture ont lieu entre les auteurs et les éditeurs, mais les échanges n'ont pas encore abouti à un consensus sur cette question cruciale. Une directive européenne a été promulguée en 2019, ordonnant une « rémunération appropriée » pour les auteurs. Le rééquilibrage ou l'ajustement, par la législation notamment, de leurs contrats est souhaité par beaucoup d'artistes. Aussi, elle souhaiterait savoir quelles sont les solutions possibles afin d'établir un meilleur partage de la valeur entre auteurs et éditeurs et proposer une meilleure rémunération pour les auteurs.
La rémunération des auteurs de livres est un sujet important pour la culture et le ministère y attache une attention particulière. Contrairement au droit commun des contrats et au principe de liberté contractuelle qui prévaut en droit français, le législateur a voulu en 1957 faire respecter un certain équilibre entre les auteurs et leurs éditeurs, en prévoyant qu'un certain nombre de dispositions relatives aux droits et aux obligations des parties doivent figurer dans le contrat d'édition. Ce cadre légal, particulièrement protecteur des auteurs, pose les principes généraux qui guident les relations contractuelles entre auteurs et éditeurs. Ainsi, afin de préserver les intérêts patrimoniaux de l'auteur, l'exigence d'une rémunération de l'auteur qui soit proportionnelle au produit de l'exploitation de son œuvre a un caractère impératif, le recours au forfait étant prévu de manière limitative. La volonté des parties prévaut cependant lorsqu'il s'agit de fixer le taux de cette rémunération proportionnelle qui est négocié de gré à gré entre l'auteur et l'éditeur, la diversité des situations rendant difficile toute mesure autoritaire. La nullité d'une stipulation fixant un taux dérisoire est toutefois susceptible d'être prononcée par le juge. Le code de la propriété intellectuelle sera par ailleurs complété afin de parfaire la transposition de la directive 2019/790 du 17 avril 2019 en prévoyant que la rémunération des auteurs cédant leurs droits pour l'exploitation de leurs œuvres doit être « appropriée ». Si la loi n'a pas vocation à se préoccuper du taux de la rémunération versée à l'auteur, la réforme fondamentale du contrat d'édition intervenue en 2014 permet désormais des relations contractuelles plus équilibrées entre auteurs et éditeurs. Le ministère de la culture continue à accompagner les discussions interprofessionnelles qui se poursuivent autour de l'accord du 1er décembre 2014 entre le conseil permanent des écrivains et le syndicat national de l'édition. Une mission de médiation confiée au Professeur Pierre Sirinelli et à Sarah Dormont en mai 2021 a ainsi permis d'aboutir à la signature d'un nouvel accord entre le conseil permanent des écrivains, la ligue des auteurs professionnels et le syndicat national de l'édition le 20 décembre 2022. Cet accord va permettre des avancées significatives en matière de transparence et d'équilibre contractuel. Afin de progresser encore dans la définition de meilleures règles du contrat d'édition, les services du ministère de la culture pilotent un nouveau cycle de discussions interprofessionnelles qui vont se poursuivre jusqu'en décembre prochain. L'ensemble des points qui sont inscrits à l'agenda de ces discussions sont porteurs de perspectives d'amélioration des modalités de rémunération des auteurs. Il en va ainsi de la systématisation de la progressivité des taux de rémunération, de l'encadrement des modalités de rémunération en cas de liquidation par l'éditeur des exemplaires en stock, de la définition de l'assiette de rémunération de l'auteur en cas de cession de droits par l'éditeur à un tiers, ou encore de la sécurisation et de l'encadrement des pratiques d'à-valoir. Parallèlement à ces chantiers de discussion, il convient d'encourager chaque fois que possible les bonnes pratiques en matière de rémunération. À cet égard, le ministère de la culture a confié au centre national du livre le soin de travailler, sur le fondement d'une concertation, au conditionnement des aides qu'il octroie au respect de bonnes pratiques de rémunération des auteurs. Enfin, le ministère de la culture encourage les organisations d'auteurs et d'éditeurs à travailler à la mise en œuvre d'une commission de conciliation, dont la gouvernance serait paritaire et qui pourrait être amenée à jouer un rôle important afin de traiter des conflits individuels entre auteurs et éditeurs liés au contrat d'édition, y compris sur la question de la rémunération.
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