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Arnaud Le Gall
Question N° 8953 au Ministère de l’europe


Question soumise le 13 juin 2023

M. Arnaud Le Gall alerte Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les évènements récents au Sénégal et sur les élections présidentielles à venir dans le pays. M. le député souhaite savoir comment la diplomatie française entend aider, sans ingérence, mais sans indifférence, à ce que la situation s'apaise au Sénégal, dans la préservation du cadre démocratique. La grande majorité des observateurs et acteurs de l'espace politique sénégalais s'accordent sur le constat que la condamnation, le 8 juin 2023, à deux ans de prison d'Ousmane Sonko, principal opposant au Président en exercice, Macky Sall, est d'ordre politique. Multiplication opportune des chefs d'accusation, condamnation à deux ans de prison ferme pour l'étrange délit de « corruption de la jeunesse » - après une mise en cause initiale pour « viol » -, répression extrajudiciaire de nombreux soutiens d'Ousmane Sonko, mais aussi de journalistes, empêchement du Parlement : tout indique que les institutions judiciaire et policière sénégalaises agissent en fonction d'un agenda politique fixé par la présidence. La situation s'est encore aggravée depuis la condamnation d'Ousmane Sonko. La répression des manifestations ayant suivies cette condamnation a été d'une grande violence. Un cran a été franchi dans l'usage de la violence d'État. Depuis 2021, la répression avait fait vingt morts et des dizaines d'opposants avaient été emprisonnés. Depuis le 8 juin 2023, elle aurait déjà fait près de trente morts. Ces agissements ne sont pas cautionnables. Ils n'ont pourtant pas suscité de déclaration officielle de la France, hormis une timide expression semblant renvoyer dos-à-dos les acteurs de cette crise. Cette réaction n'apparaît pas à la hauteur de la gravité de la situation. La tenue de l'élection présidentielle sénégalaise de 2024, dans des conditions pacifiques et équitables, est d'ores et déjà compromise par les agissements du pouvoir. Il n'est de secret pour personne que le Président entend, à ce stade, aller au bout de sa volonté d'exercer un troisième mandat, en dépit de l'interdiction qui lui en est faite par la Constitution. Pour ce faire il s'assure de ne pas avoir face à lui d'opposant ou d'opposante susceptible de le battre. Or cette dérive autoritaire d'un président abîmant un pays qui fut la démocratie la plus stable de la région ne concerne pas que le Sénégal. Elle serait un signal grave pour toute une région déjà en crise. La position du pays reste observée dans cette région du monde. Tout signal laissant penser que la France cautionnerait les agissements du pouvoir nuira gravement à l'amitié entre le peuple français et le peuple sénégalais. En janvier 2023, un message malheureux a déjà été envoyé, avec l'adoption d'une convention d'extradition « modernisée » entre la France et le Sénégal. Présentée comme exclusivement technique et sans portée politique, cette convention, qui ne présentait aucun caractère d'urgence puisqu'il existe déjà une convention entre les deux pays, ne pouvait au contraire être vue autrement que comme un brevet en État de droit décerné à un Président enfermé dans une dérive inquiétante. Il lui demande si, par conséquent, il n'y a pas urgence à envoyer des signaux plus conformes à la nécessité de préserver l'avenir des relations avec le Sénégal, pays ami.

Réponse émise le 25 juillet 2023

En tant que partenaire et amie du Sénégal, la France a suivi avec attention l'évolution de la situation dans le pays. En Afrique comme ailleurs, la France soutient la démocratie, les droits de l'Homme et la liberté d'expression. Le Président de la République l'a rappelé lors de son discours sur le partenariat avec l'Afrique, le 27 février dernier. S'agissant de la situation intérieure sénégalaise, nous saluons la décision du Président Macky Sall de ne pas se porter candidat à la prochaine élection présidentielle. Le Sénégal démontre ainsi à nouveau la solidité de sa longue tradition démocratique. Nous avons confiance dans la capacité des acteurs politiques à poursuivre un dialogue inclusif et pacifique, afin que les élections de 2024 puissent se dérouler dans le respect des règles de la démocratie et de l'Etat de droit. Concernant les violences qui ont eu lieu au Sénégal ces derniers mois, la France s'est exprimée dès le début des événements. De trop nombreuses personnes, souvent très jeunes, ont perdu la vie. Nous avons appelé l'ensemble des acteurs politiques à faire preuve de retenue et à s'abstenir de toute violence. Nous avons passé ce message sans relâche, aux autorités sénégalaises comme à l'opposition.

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